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quelquefois un fçeau entier, & la jettant d'une telle force qu'un homme a souvent de la peine à le fouffrir, fans en être renverfé. On vend cet Animal felon fa taille. Le plus grand a neuf coudées, depuis la pointe du pied jusqu'à l'épaule, & chaque coudée eft évaluée mille Pardaons. Les Mores ou Mahométans qui en achettent, donneront autant pour un Eléphant de Ceylan, que pour quatre d'un autre Pays, qui femblent reconnoître cette fupériorité, & la témoignent par quelque figne extérieur.

Les Singes de l'Ifle différent de ceux des autres Pays en plufieurs autres choses. Ribeyro dit qu'il y en a de cinq espèces. Les forêts, & furtout celles du Royaume de Jafanapatan, en font très-peuplées. Il s'en trouve d'auffi grands que nos Epagneuls, ayant le poil gris, le vifage noir, & de longues barbes blanches d'une oreille à l'autre, ce qui fait qu'on les prendroit pour des vieillards. Ceux qu'on appelle Wauderous, font différenciés par la couleur; car avec la barbe, ils ont le corps & le vifage blanc : les feuilles d'arbre font leur nourriture. Les Rillours ne vont que par troupes, ravageant le grain qui croît dans les bois, & quelquefois les jardins; ils ont la face blanche fans barbe, mais

avec de longs cheveux fur la tête, qui tombent comme ceux d'un homme.

Les Infectes font à peu près les mêmes qu'aux Indes. Les Fourmis font prefque toutes fort groffes. Il y en a de plufieurs fortes, dont quelques-unes méritent d'être remarquées. Les Coumbias & TaleCoumbias font celles qui reffemblent le plus aux nôtres par la figure; elles habitent les troncs d'arbres, & fentent fort mauvais. Il y en a d'autres nommées Dimbios, dont les nids font de feuilles fur les arbres les plus élevés. Les Coura-atch se pratiquent des fentiers foûterrains. Les Coddia font d'un beau noir, & leur piqueure eft douloureuse; mais l'efpéce de Vacos eft plus nombreufe qu'aucune autre. La terre en eft couverte : elles ont le corps blanc, & la tête rouge; elles dévorent tout, montent le long des murailles, & fe font avec de la terre, une maniére de voûte qu'elles continuent en arcade, tout da long de leur chemin, à quelque hauteur qu'elles aillent. Dans les endroits inhabités, elles élevent de petites montagnes de quatre, cinq, ou fix pieds ; la terre en eft fi fine, que le Peuple en fabrique fes Dieux, & fi bien liée, qu'on auroit de la peine à abattre ces demeures, que les

rieur eft percé de routes que les Vacos habitent, & où elles engendrent; leurs nids font remplis d'oeufs & de jeunes Fourmis. Comme elles multiplient extrêmement, auffi meurent-elles par pelotons ; il leur vient des aîles, & pour lors elles s'élévent dans l'air vers l'Occident en fi grand nombre, qu'on a de la peine à voir le Ciel; on les perd bientôt de vûe, ne ceffant point de voler, qu'elles ne foient épuifées, & qu'elles ne tombent mor

tes.

Il y a des Abeilles de plufieurs fortes. Celles qui répondent aux nôtres, s'appellent Méemaffes : les Connameya ou Abeilles aveugles, font petites, & les gens du Pays n'en font aucun cas. Celles qu'ils nomment Bamburos, font plus grandes & d'une couleur plus vive que nos mouches; leur miel eft clair comme de l'eau, & elles le font fur les plus hautes branches des arbres; en certain temps de l'année, des Villes entiéres vont dans les bois chercher ce miel dont elles reviennent chargées.

Si Ceylan a reçu du Ciel de grands avantages, il femble que l'Auteur de la Nature les ait voulu compenfer par bien des maux. Elle eft fort incommodée des Serpents : ils font de figure diverse, &ré

pandent différemment un venin qui n'opére pas de la même maniére.

Les moins dangereux font, le Gerende, qui eft le plus nombreux, & qui n'en veut qu'aux petits Oifeaux & aux Lapins; le Carow la, que les Chats mangent; le Lézard Kiekanella; le Kobbera-Guyon, de cinq ou fix pieds de longueur, à qui la langue eft bleue & fourchue, femblable à un éguillon ; mais qu'il ne tire que pour fiffler, & non pour mordre. Le Tolla-Guzon, qui n'eft pas fi grand, eft le meilleur manger des Chingulais. L'Araignée, qu'ils appellent Democulo, eft longue, velue, noire, tachetée, & luifante: fon corps eft de la groffeur du poing, & les autres membres y font proportionnés ; fa bleffure n'eft pas mortelle, mais elle rend quelquefois les gens infenfés.

Ceux qui font les plus venimeux font auffi les plus rares. Un de ces Serpents n'a que deux palmes de longueur; il est de couleur brune, & particuliérement fous le ventre; dès qu'on en eft atteint, l'on tombe dans un fommeil profond, & l'on meurt en peu de temps, fi l'on n'eft promptement fecouru. La morfure d'un autre excite un tranfport de fureur, que la mort fait au bout de vingt-quatre heures. Le

venin eft fi prompt & fi violent, que dès qu'un homme en eft piqué, le fang lui fort par touts les pores, fans qu'il y ait de reméde. Il y en a un qui eft verd, & qui n'eft pas plus gros qu'une corde de violon, de la longueur de trois palmes, & qui attire, à ce qu'on prétend, les yeux de ceux qu'il attaque. Ce que je vais dire d'un autre de la même étendue, paroîtra peutêtre fabuleux & incroyable: Il fe perche fur un Arbre, & s'élance fur quelque Animal qu'il voye paffer; en quelque endroit qu'il s'attache, la chair tombe par morceaux de fa groffeur, & l'Animal bleffé demeure immobile, le venin agiffant toujours intérieurement, fans qu'il en paroiffe prefque rien au dehors. Quelques Curieux ayant ouvert des Animaux que ce Serpent avoit tués, on leur a trouvé toute la chair hachée & pourie, quoique la peau fut entiére.

Celui que les Chingulais appellent Pimberah, & les Portugais Cobra-da-Serra,

a le corps auffi gros que celui d'un homme, & il eft long à proportion. Cette étendue l'empêche d'aller vîte; pour y remédier, il fe cache dans les fentiers, & il arrête les Daims & les Géniffes avec une efpéce de cheville, qu'il porte à l'extrêmité de fa queuë: mais telle eft la capa

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