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& de ces belles Etoffes des Indes. Ces richeffes y aménent du monde de toutes les parties de la Terre, & ce concours ne contribue pas peu à l'état floriffant du commerce de Ceylan.

Voilà ce que j'ai appris des fingularités de ce Pays. Le portrait de fes Peuples fournira l'autre moitié de ma carrière. Heureux, Monfieur, fi j'ai dit ce que j'ai prétendu dire; puifque je n'ai eu d'autre envie, que de remplir quelques-unes de vos idées! Plus heureux encore, fi quelques veilles vous paroiffent un témoignage irréprochable de cette affection refpectueufe avec laquelle je fuis &c !

LES

ETRENNES

DE LA SAINT MARTIN,

ou LA GUERRE

DE SCEAUX,

POEME FOU

J

CHANT PREMIER.

E chante des exploits échappés à l'Histoire,

Ou plutôt réservés aux Filles de Mémoire, Et qu'un trop grand éclat, fans leur autorité, Auroit rendus fufpects à la Pofterité.

Le Soc avoit bruni la face des campagnes, Et déja le Vin doux ruiffeloit des montagnes ; Lorfqu'avec LATERREUR, l'ardeur de fourager Arma GREGORIO,LA RISSOLLE & ROGER: MARCHE-A-MOI, BRASDEFER, non moin

Demeurés dans Paris, y gardoient le bagage.

Ce n'étoit point Tunis, ce n'étoit point Alger, Que ces nouveaux Croisés prétendoient ravager:

C'étoit aux Cervelas, au Jambon, au Fromage, Au Bourgogne, au Champagne, au bon Pain de ménage,

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Que devoient se porter de fi terribles coups;
Et Sceaux, de leur fureur, étoit le rendez-vous.

Dans ces lieux où déja la brigade arrivée, 'A l'affaut réfolu marche tête levée,

Eft un Fort fans foffés, fans Tours, fans Bastions,
Mais fort par fon affiette & fes provisions:
Il est entre deux cours, dont l'une eft gazonnée;
Aux Dindons aux Pigeons l'autre est aban-

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ROGER n'hésite point entre ces deux chemins:
Camarades, dit-il, enfonçons cette porte,
Et gardez que, furtout, la Volaille ne forte!
Joignons l'économie à l'ardeur de gagner,
Et confervons bien tout pour ne rien épargner!
Mais entrons;la nuit vient, & la faim m'assassine;
Je vous dirai le refte, amis, dans la Cuifine.
Il dit; & dans l'inftant le Fort fut emporté.
Dans la Cave déja LA TERREUR s'eft jetté;"

Tandis

Tandis
que s'arrêtant fur un refte d'éclanche,
L'ardent GREGORIO le ronge jufqu'au manche.
Mais, du fond de l'Office, on entendit foudain,
D'un ton embarraffé, crier : du Vin ! du Vin !
La TERREUR rapportoit une bouteille pleine;
Il court reconnoiffant la voix du Capitaine.
ROGER, c'étoit lui-même, acharné fur un pain,
Ayant aigri fa foif en appaisant sa faim,
Réduit à l'épargner, l'embrassoit d'un air tendre,
Et ne pouvoit, hélas ! l'achever ni le rendre.

Autour de la bouteille, étendart bien fuivi,
L'alteré Bataillon fe raffemble à l'envi:
Soldat & Caporal, Lieutenant, Capitaine,
Chacun également s'en détache avec peine ;
Ils fe préviennent même, & c'eft de main en

main

A qui pourra plutôt foulager fon voifin.
Tant que dura le vin l'union fut pareille :
Mais la Difcorde fort du fond de la bouteille,
Et montant en vapeur dans ces fougueux ef-

prits,

Fait annoncer d'abord fon régne par des cris.

GREGORIO joignant l'effet à la menace, Deja de LA RISSOLLE a fait rougir la face; Lorfqu'un coup plus tardif, mais non pas plus léger,

Etendit LA TERREUR fous le bras de ROGER.

1

Le brave Caporal que ce coup de tonnerre, Sans pouvoir l'étourdir, a renversé par terre, Sur fes genoux pliés raffermiffant fon corps, Saifit fon ennemi qui fe courboit encor;

Et l'ayant ébranlé par un effort extrême, Retombant fur le dos, l'entraîne fur lui-même. GREGORIO tenoit LA RISSOLLE aux che

veux;

Celui-ci voit leur chûte, & le pouffant fur eux,.
Il paffe tout-à-coup sa jambe fous la fienne,
Et de fon Lieutenant couvre fon Capitaine ;
Mais le bras qui le tient redoublant sa fureur,
Il acheve, en tombant,d'écrafer LA TERREUR.
Sous ce choc général la troupe fe délie ;
Et fe relevant touts avec plus de furie,
D'inftruments meurtriers chacun s'arme auffi-
tôt ;

L'un fouleve un chenet, l'autre prend le réchaut ;

Celui-ci fur la pelle à la hâte se jette,

Cet autre, dans fa main, fait branler la pin

cette :

Tout préfage le fang, tout n'annonce qu'hor

reur;

Les portes & les murs fe couvrent de fueur; On voit du poulailler s'échapper la volaille; Les Dindons réveillés, fauter fur la muraille; La Vache épouvantée a rompu fon cordon,

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