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les plus rudes persécutions, et qu'elle eût souffert les douleurs aigües d'une longue maladie, elle fut étonnée au lit de la mort d'entendre parler de sa patience; elle dit que depuis qu'elle s'était donnée à Dieu, elle n'avait jamais eu rien à souffrir, et qu'elle n'avait point été dans le cas d'exercer la patience. Cette disposition était l'effet de son ardente charité. On ne doit pas embrasser son institut, à moins que l'on ne se sente assez de ferveur pour en accomplir fidèlement toutes les observances, et que l'on ne soit fortement résolu de faire chaque jour de nouveaux progrès dans l'esprit d'humilité, d'obéissance, de pauvreté, de recueillement, de prière et de charité; c'est par là que les Clarisses se sanctifieront, et qu'elles assureront leur bonheur pour cette vie-ci et pour

l'autre.

S. EUPLIUS, MARTYR EN SICILE.

LE 12 d'août 304, sous le neuvième consulat de Dioclétien et le huitième de Maximien, Euplius, diacre de Catane, en Sicile, fut conduit à la salle d'audience du gouverneur. Etant près du rideau qui fermait le lieu où était le juge, il s'écria qu'il était Chrétien et qu'il désirait mourir pour le nom de Jésus-Christ. Calvisien (c'était le nom du gouverneur) l'entendit et ordonna qu'il comparût devant lui. Euplius entra, tenant à sa main le livre des Evangiles. Un des amis du gouverneur, nommé Maxime, lui fit des reproches sur ce qu'il osait paraître avec un livre qui contenait une doctrine proscrite par les édits de l'empereur. « Où avez-vous pris ces » écrits ? lui dit Calvisien. Les apportez-vous de votre maison?» Je n'ai point de maison, répondit Euplius; mais j'avais ce livre » avec moi lorsque j'ai été arrêté. » Le juge lui ayant dit d'en lire quelque chose, il l'ouvrit et lut les passages suivans: Bienheureux sont ceux qui souffrent persécution pour la justice; car le royaume du ciel est à eux1. Celui qui veut venir après moi doit porter sa croix et me suivre2. Calvisien lui demanda ce que cela voulait dire. EUPLIUS. C'est la loi de mon Dieu qui m'a été donnée. >> -CALVINIEN. Par qui? -EUPLIUS. Par Jésus-Christ, fils du Dieu vivant. Le juge ayant été aux opinions, dit : « La confession d'Euplius prouvant évidemment qu'il est Chrétien, qu'on le livre » aux bourreaux et qu'on l'étende sur le chevalet; exécuté sur-le-champ.

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1 Matth. V, 10.

2 Matth. XVI, 24.

» ce qui fut

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Au second interrogatoire qu'il subit sur le chevalet le même jour, Calvisien lui demanda s'il persistait toujours dans ses premiers sentimens. Formant alors le signe de la croix sur son front, avec une de ses mains qui était libre, il répondit : « Je vous ai déjà » déclaré et je vous déclare de nouveau que je suis Chrétien et » que je lis les saintes Ecritures. » Il ajouta qu'il offenserait Dieu en livrant ces écrits sacrés, qu'il aimait mieux mourir que de commettre un tel crime, et que sa mort serait suivie d'une vie éternellement heureuse. Calvisien ayant fait redoubler ses tourmens, il fit cette prière : « Je vous rends grâces, Seigneur Jésus, de ce » que je souffre pour l'amour de vous: sauvez-moi, je vous en » conjure. CALVISIEN. Quittez cette folie; adorez nos dieux, et je vous ferai mettre en liberté.—EUPLIUS. J'adore Jésus-Christ; je déteste les démons. Faites ce qu'il vous plaira; condamnez» moi si vous le voulez à de nouveaux tourmens, car je suis Chré» tien. Il y a long-temps que je désire être dans l'état où je me » trouve. » Le juge, las de le voir tourmenter, ordonna aux bourreaux de cesser, et lui dit : « Adore les dieux, méchant que tu es; » adore Mars, Apollon et Esculape. - EUPLIUS. J'adore le Père, » le Fils et le Saint-Esprit ; j'adore la sainte Trinité, il n'y a point » d'autre Dieu. CALVISIEN. Sacrifie, si tu veux avoir la vie. EUPLIUS. Je fais le sacrifice de moi-même à Jésus-Christ mon Dieu. Vous voulez inutilement me faire changer de résolution. Je suis Chrétien. » Alors Calvisien donna des ordres pour qu'on redoublåt les tortures. Pendant ce temps-là, Euplius priait de la sorte : « Je vous rends grâces, ô mon Dieu; Jésus, secourez-moi : >> c'est pour l'amour de vous que j'endure ces tourmens. » Il répéta plusieurs fois cette prière. Ses forces s'affaiblissant, on lui voyait encore remuer les lèvres.

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Enfin, le juge passant derrière le rideau ", dicta la sentence qu'un greffier écrivit; après quoi il revint avec des tablettes à la main, et lut ce qui suit : « Nous ordonnons qu'Euplius, convaincu d'être Chrétien, ait la tête tranchée, en punition de son opiniâ» treté à mépriser les édits du prince et à blasphemer contre les » dieux. Qu'on l'exécute. » On lui attacha au cou le livre des Evangiles qu'il avait sur lui lorsqu'il fut arrêté, et un crieur public, marchant devant lui, disait à haute voix : « Voilà Euplius, ce Chrétien, cet ennemi des dieux et des empereurs. » Euplius ramassant peu de forces qui lui restaient, disait en allant : « Je vous rends grâces, Seigneur Jésus; confirmez ce que vous avez opéré en moi.»>

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a Il y avait derrière les siéges des juges un rideau qui formait une espèce de réduit. Les juges se retiraient là pour aller aux opinions ou pour écrire leurs jugemens.

Etant arrivé au lieu de l'exécution, il pria long-temps à genoux; puis il présenta sa tête au bourreau, qui la lui coupa. Les Chrétiens enterrèrent son corps après l'avoir embaumé. S. Euplius est nommé dans les Martyrologes d'Occident.

Voyez ses Actes sincères dans Baronius, Ruinart, Tillemont, t. 5, et Orsi. Ceux que Métaphraste a publiés sont apocryphes.

S. PORCAIRE, ABBÉ DE LÉRINS,

ET SES COMPAGNONS, MARTYRS.

S. PORCAIRE avait mérité par son éminente vertu d'être mis à la tête de la célèbre abbaye de Lérins, Les Sarrasins se préparant, en 731, à passer dans l'île où son monastère était situé, il fit embarquer pour l'Italie les plus jeunes de ses religieux, au nombre de trente-six, avec quelques enfans qu'on l'avait prié de recevoir comme pensionnaires. Il exhorta ensuite le reste de sa communauté, qui était nombreuse, à mourir courageusement pour JésusChrist. Cette exhortation ne put prémunir contre la crainte deux de ses moines, Eleuthère et Colomb; ils allèrent se cacher dans une grotte, sur le rivage. Les autres, soutenus par l'exemple de leur abbé, et fortifiés par la communion au corps de Jésus-Christ, attendirent la mort sans effroi. Les Sarrasins s'étant rendus maîtres de l'abbaye, qu'ils trouvèrent sans défense, massacrèrent, en haine du christianisme, les cinq cents religieux qui composaient la communauté. Ils commencèrent par les vieillards, dans le dessein d'intimider les plus jeunes; mais il n'y en eut pas un seul qui n'aimât mieux mourir que renoncer à sa religion. Colomb, honteux de sa timidité, rejoignit ses frères et eut part à leur triomphe.

Les Sarrasins laissèrent la vie à quatre, qu'ils emmenèrent avec eux. Ils les firent monter sur un de leurs vaisseaux, qui aborda au port d'Agay ". Et comme on permit à ces religieux de prendre terre, ils se sauvèrent pendant qu'on ne les observait pas, et se cachèrent si bien dans une forêt voisine, qu'on ne put les découvrir. Ils marchèrent toute la nuit, et gagnèrent Arluc, monastère de filles près d'Antibes, lequel était sous la conduite des abbés de

a Agathonis portus.

b Ara luci.

Lérins. Ils y restèrent jusqu'à ce que les Sarrasins eussent évacué la Provence.

Après le départ de ces barbares, ils retournèrent à Lérins. Eleuthère, sorti de sa grotte, se joignit à eux. Quand ils eurent rendu les derniers devoirs à leurs frères massacrés, ils allèrent chercher ceux qui étaient en Italie, et choisirent Eleuthère pour abbé. Celui-ci répara le monastère et y fit revivre l'ancienne discipline.

Les habitans de Monverdan, près du Lignon, en Forez, croient que S. Porcaire se retira chez eux, et qu'il y fut depuis martyrisé par les Sarrasins. Mais si le saint de ce nom qu'ils honorent est le même que l'abbé de Lérins, ce sera quelque translation de ses reliques qui aura donné lieu à l'établissement du culte qu'ils lui rendent.

On célèbre la fête de S. Porcaire à Lérins le douzième jour d'août.

2

Voyez Barralis, Chron. Lirin. pag. 220; Mabillon, sec. Ben. part. 1, pag. 525; Bulteau, lib. 4, cap. 52; Baillet, sous ce jour, etc.

MARTYROLOGE.

A ASSISE en Ombrie, Ste Claire, vierge, première religieuse des pauvres dames de l'ordre des Frères-Mineurs, qui, étant célèbre par l'état de sa vie et de ses miracles, fut mise au nombre des saintes vierges par Alexandre IV.

A Catane en Sicile, fête de S. Euple, diacre, du temps des empereurs Diocletien et Maximien, qui, ayant été tourmenté très-long-temps pour la confession du Seigneur, reçut enfin la couronne du martyre sous le tranchant du glaive.

A Ausbourg, Ste Hilaire, mère de Ste Afre, martyre, qui, veillant auprès de son tombeau, fut livrée au feu sur le lieu même, par les persécuteurs, pour la foi de Jésus-Christ, avec ses servantes Digne, Euprépie et Eunomie.

Dans la même ville, et le même jour, furent aussi martyrisés S. Quiriaque, S. Largion, S. Crescentien, Ste Ninge, Ste Julienne et vingt au

tres.

En Syrie, S. Macaire et S. Julien, martyrs.

A Nicomédie, S. Anicet, comte, et S. Pothin, son frère, martyrs avec plusieurs autres, sous l'empereur Dioclétien.

A Falère en Toscane, supplice de S. Gracilien et de Ste Félicissime, vierge, qui eurent d'abord la mâchoire meurtrie avec des pierres,

pour la confession de la foi, et trouvèrent ensuite, sous le tranchant du glaive, la palme du martyre après laquelle ils soupiraient.

Le même jour, S. Porcaire, abbé du monastère de Lérins, et cinq cents moines, qui, ayant été immolés par les Barbares pour la foi catholique, recurent la couronne dû martyre.

A Milan, mort de S. Eusèbe, évêque et confesseur:

A Bresse, S. Herculan, évêque.

Saints de France.

A Verno, près de Melun, les saints martyrs Félix et Félicissime. A Remiremont, la bienheureuse Cécile, abbesse.

Au mont Sainte-Valburge, près de Cologne, la vénérable Udevolte, vierge, de l'ordre de Citeaux.

Autres.

Chez les Grecs, les saints martyrs Pamphile et Capiton.

36

TOME V.

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