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l'abîme de misères dans lequel nous sommes tombés, ces péchés qui nous souillent continuellement, les dangers innombrables dont nous sommes environnés, et ce poids accablant de maux sous lesquels nous gémissons. Leur compassion pour nous est d'autant plus tendre, leur charité est d'autant plus pure et plus parfaite qu'ils sont plus près de la source même de la charité. A la vue des piéges que les démons nous tendent, ils se rappellent cette guerre dans laquelle ils se sont engagés pour la cause de Dieu, et ils font tous leurs efforts pour déconcerter les projets de nos ennemis, et pour nous défendre contre leur malice. «Ils aiment, dit un ancien auteur » ceux qu'ils regardent comme leurs concitoyens, >> et qu'ils savent destinés à réparer un jour » leurs pertes (13). C'est pour cela, ajoute Hu» gues de Saint-Victor, qu'ils prennent tant de » soin de nous ; qu'ils nous gardent dans tous les >> lieux et à toutes les heures; qu'ils nous assis>> tent; qu'ils pourvoient à nos besoins avec une » sainte sollicitude; qu'ils font, ô mon Dieu ! » l'office de médiateurs entre vous et nous; qu'ils » vous portent nos soupirs et nos gémissemens, >> et qu'ils attirent sur nous vos grâces et vos » bénédictions. Ils nous accompagnent par-tout;

ils entrent, ils sortent avec nous; ils observent > attentivement de quelle manière nous nous » conduisons au milieu d'une génération cor>> rompue; avec quelle ardeur nous cherchons,

mon Dieu! votre royaume et votre justice, et si >> nous vous servons avec crainte et avec amour. Ils > nous aident dans le travail, ils nous protègent >> dans le repos, ils nous encouragent dans le com(13) Solil. e. 27, inter Op. S. Aug. t. VI, App. p. 86, ed. Ben.

Octobre.) » bat, ils nous couronnent dans la victoire; ils se » réjouissent en nous quand nous nous réjouissons > en vous; ils viennent tendrement à notre secours, » lorsqu'ils nous voient souffrir pour vous. Qui » pourroit exprimer le soin qu'ils prennent de »> nous, et les effets de leur charité à notre égard ?

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Ils aiment, ô mon Dieu! celui que vous aimez ; > ils protègent celui sur lequel vous jetez des re» gards de tendresse; ils abandonnent ceux dont >> vous vous retirez vous-même ; ils haïssent ceux >> qui commettent l'iniquité, parce qu'ils sont vos » ennemis. Lorsque nous faisons le mal, nous > donnons de la joie aux démons; mais lorsque nous >> faisons le bien, nous les attristons, et nous faisons triompher les anges. Faites, ô Père cé» leste, que nous soyons toujours un sujet de joie >> pour ces bienheureux esprits !... En me rappelant » tous ces bienfaits, pourrois-je ne pas vous louer, » ne pas vous bénir ? Vous nous avez donné tout >> ce qui est contenu dans la circonférence des >> cieux, et comme si c'étoit peu, vous y avez ajouté » ce qui est au-dessus des cieux, en nous donnant » vos anges pour nous servir et pour assurer » notre salut. Puissent tous vos anges vous louer, » toutes nos œuvres vous glorifier, et tous vos >> saints vous bénir à jamais! De quel honneur ne >> nous comblez-vous pas en nous élevant à un si » haut degré de gloire, et en nous enrichissant > avec tant de magnificence! »

« Nous devons à notre ange gardien, dit saint » Bernard (14), un triple hommage, celui du » respect, celui de la dévotion, celui de la con>> fiance. Nous lui devons le respect pour sa pré» sence, la dévotion pour sa charité, la con> fiance pour sa vigilance. Pénétrés de respect, (14) Serm. 12 in Ps. XC.

» marchez toujours avec circonspection, vous rap» pelant sans cesse que vous êtes en la présence des >> -anges chargés de vous conduire dans toutes vos > voies. Dans quelque lieu que vous soyez, quelque

secret qu'il puisse être, respectez votre ange gar» dien. Oseriez-vous faire devant lui ce que vous ne > voudriez pas faire en ma présence? Considérez, » dit ailleurs le même Père (15), avec quel res » pect et quelle modestie nous devons nous com» porter devant les anges, afin de ne pas blesser » la pureté de leurs regards, et de ne pas nous » rendre indignes de leur compagnie. Malheur » à nous si nous offensons par notre négligence >> ceux qui combattent notre ennemi, et si nous » nous privons de leur visite! Nous devons fuir » tout ce qui les attriste, et pratiquer tout ce qui » leur cause de la joie; être tempérans, chastes, >> amateurs de la pauvreté volontaire, prier avec >> ferveur et avec larmes. Sur toutes choses, les » anges de paix attendent de nous l'union et la » concorde. Quelle joie ne seroit-ce pas pour eux » de nous voir retracer sur la terre la cité sainte >> qu'ils habitent? Au contraire, rien ne les afflige. » plus que les scandales et les dissensions qu'ils découvrent en nous. »

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Saint Basile insiste sur le même sujet, pour engager les vierges, à observer les règles de la plus exacte modestie dans tous les lieux. « Qu'une vierge, dit-il (16), quand elle est seule, se crai» gne et se respecte elle-même, ainsi que sa » propre conscience, et son ange gardien qui est. » toujours avec elle: Leurs anges voient toujours » la face de mon père (17). Si un homme ne » doit point mépriser la face de l'ange auquel le (15) Serm. 1 in festo S. Michaël. n. 5.

-(16), L. de verâ Virginit. n. 740. (17) Matt. XVIII, 10.

>> soin de son ame est confié, à plus forte raison >> une vierge, dont il est le paranymphe, et dont » il garantit la fidélité à son époux. Elle doit sur>> tout respecter son époux qui est toujours avec » elle, et avec lequel sont le Père et le SaintEsprit, sans parler d'une multitude innombrable » d'anges et d'ames bienheureuses; car, quoique » ces esprits célestes soient invisibles à nos yeux, » nous n'échappons cependant point à leurs re» gards incorporels. Si une vierge craint les yeux » d'autrui, beaucoup plus doit-elle craindre la >> vue de ces esprits qui sont si purs, si excel

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lens, et si élevés au-dessus de tous les hommes. » Elle redoute particulièrement les yeux de la >> multitude; or, comme il est impossible qu'elle puisse échapper aux regards d'une multitude si » grande et si sainte, elle aura un soin extrême » de ne rien faire qui soit indigne de son état. » Non seulement nous devons respecter, mais nous devons encore aimer et honorer notre ange tutélaire; c'est un gardien fidèle, un véritable ami, un protecteur puissant. Malgré l'excellence de sa nature, sa charité le porte à se charger du soin de nous défendre et de nous protéger. Il veille à la conservation de nos corps, auxquels les démons ont quelquefois le pouvoir de nuire; mais que ne fait-il pas pour nos ames? Il nous instruit, il nous encourage, il nous exhorte intérieurement, il nous avertit de nos devoirs par des reproches secrets. Il exerce à notre égard l'office qu'exerçoit à l'égard des Juifs cet ange qui les conduisoit dans la terre promise; il fait pour nous ce que fit Raphaël pour le jeune Tobie, il nous sert de guide au milieu des dangers de cette vie. De quels sentimens de reconnoissance, de respect, de docilité et de confiance ne devons

nous pas être pénétrés pour notre ange gardien? Pourrions-nous assez remercier la divine miséricorde du don inestimable qu'elle nous a fait ? Tobie réfléchissant sur les faveurs signalées qu'il avoit reçues de l'ange Raphaël, dit à son père (18): Quelle récompense pourrions-nous lui donner, qui ait quelque proportion avec les biens dont il nous a comblés? Il m'a mené et ramené dans une parfaite santé; il a été lui-même recevoir l'argent de Gabelus; il m'a fait avoir la femme que j'ai épousée; il a éloigné d'elle le démon; il a rempli de joie son père et sa mère; il m'a délivré du poisson qui m'alloit dévorer; il vous a fait voir à vous-même la lumière du ciel, et c'est par lui que nous nous trouvons remplis de toutes sortes de biens. Que pouvons-nous donc lui donner qui égale tout ce qu'il a fait pour nous? Tobie et ses parens, touchés de la plus vive reconnoissance, se prosternèrent, le visage contre terre, pendant trois heures, et bénirent Dieu (19). Tâchons d'entrer dans les mêmes sentimens. « Aimons, dit saint Bernard (20), aimons » tendrement en Dieu les anges, ces esprits bien>> heureux qui seront un jour nos compagnons et >> nos cohéritiers dans la gloire, et qui sont pré» sentement nos tuteurs et nos gardiens. Soyons » dévots et reconnoissans envers de semblables >> protecteurs; aimons-les, honorons-les autant » que nous en sommes capables, etc. »

Nous devons aussi avoir une tendre confiance en la protection de notre ange gardien. « Quelfoibles que nous soyons, dit encore saint » Bernard (21), quelque misérable que soit notre » condition, quelque grands que soient les dan

» que

(18) Tob XII, 2. (20) In Ps. XC. Tome IX.

(19) Ibid. v. 22.
(21) Loc. cit.

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