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vivoit ces jours-là que d'un peu de pain et d'eau.. Ayant fait bâtir le monastère de Wastein, au diocèse de Lincopen, en Suède, elle y mit soixante religieuses; elle mit dans un bâtiment séparé du même monastère, treize prêtres, en l'honneur des douze apôtres et de saint Paul, quatre diacres pour représenter les quatre docteurs de l'église, et huit frères convers; elle leur. donna à tous la règle de saint Augustin, à la-, quelle elle ajouta quelques constitutions particulières. On lit dans quelques auteurs, que JésusChrist lui dicta cette règle dans une vision; mais, cette circonstance ne se trouve ni dans la bulle, de sa canonisation, ni dans la confirmation de son ordre par Martin V. Les papes, en parlant de la même règle, ne font mention que de l'approbation du saint-siége, et ne disent rien qui, soit relatif à la révélation prétendue.

Tous les monastères de l'ordre de sainte Brigite sont soumis aux évêques diocésains; et il faut une permission expresse du pape pour en ériger de nouveaux. On s'y propose principalement d'honorer la passion du Sauveur, et sa sainte mère. Les hommes y sont soumis à la prieure des religieuses pour le temporel, comme dans l'ordre de Fontevrault; mais les religieuses sont sous la conduite des religieux, quant au spirituel. La raison de ce règlement particulier est, fondée sur ce que l'ordre ayant été spécialement institue pour les femmes, les hommes n'y sont admis que pour leur procurer les secours spirituels. L'habitation des unes et des autres est séparée par une clôture inviolable: mais l'église leur est commune; en sorte cependant qu'ils ne peuvent s'y voir. Les monastères du nord furent détruits lors de la révolution causée par le chan

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gement de religion. Il y en a deux 'forts riches à Gênes, et l'on ne reçoit dans l'un que des filles ou femmes de qualité. La plupart des maisons des Brigitins ou de l'ordre du Sauveur, n'observent plus aujourd'hui ce que prescrit la règle par rapport au nombre des personnes religieuses, et à la soumission des hommes aux femmes. Il y a encore quelques doubles monastères en Flandre, an à Dantzick, et environ dix en Allemagne (d).

Brigite, après avoir passé deux ans dans le monastère de Wastein, fit un pélerinage à Rome, dans le dessein d'aller prier sur le tombeau des ápôtres, et de vénérer les reliques de tant de Saints que l'on honore dans cette capitale du monde chrétien. Elle s'y fit admirer par l'éclat de ses vertus: Elle y vivoit dans la retraite, et dans la pratique des veilles et des autres rigueurs de la pénitence. Elle visitoit les églises, et alloit servir les maladed dans les hôpitaux. Dure à ellemême, elle étoit pleine de douceur pour les au

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(d) Il n'y avoit en Angleterre qu'un monastère de l'ordre de sainte Brigite, connu sous le nom de maison de Sion. II étoit près de la Tamise, dans le Middlesex, environ à díx milles de Londres, et il avoit été fondé, en 1413, par Henri V, avec une magnificence vraiment royale. Ce monastère étant fort riche, fut un des premiers que l'on détruisit sous Henri VIII. Edouard VI le donna d'abord à Edouard, duc de Sommerset, et il passa ensuite à Jean, duc de Northumberland. La reine Marie le rendit à l'abbesse; mais il fut détruit de nouveau sous Elisabeth. Les religieuses s'enfuirent, et allèrent successivement à Malines, à Ronen, etc. Elles se retirèrent enfin à Lisbonne, où le roi Philippe II, et plusieurs personnes charitables, vinrent à leur secours. Une dame portugaise ayant embrassé leur règle, elle leur donna une terre dont elle avoit hérité. Voyez Dugdale, Monast. vol. 21, p. 360; Stevens, t. 11, p. 233; la Notitia Monastica de Tanner, ct l'histoire ecclesiast. de Fuller, l. 6, p. 362.

Les revenus du monastère de Sion, lors de sa destruction étoient de dix-sept cent trepte-une livres sterling, suivant Dugdale, et de dix-neuf cent quarante-quatre livres sterling suivant Speed.

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tres. Toutes ses actions portoient l'empreinte de l'humilité et de la charité. On voit encore divers monumens de sa dévotion à Rome et dans le voisinage. Elle fonda dans cette ville une maison pour les étudians et les pèlerins suédois, laquelle fut rebâtie sous le pontificat de Léon X, et est située dans le Campo de Flore, près du palais Farnèze.

Notre Sainte se confessa tous les jours pendant les trente dernières années de sa vie, et elle praticipoit plusieurs fois la semaine à la divine eu charistie. Cette participation fréquente des sacremens nourrissoit et augmentoit chaque jour la ferveur de son ame.

Rien n'est plus fameux dans la vie de sainte Brigite que les révélations dont elle fut favorisée, et qui eurent pour objet principal les souffrances du Sauveur, et les révolutions qui devoient arriver en certains royaumes. Ces grâces ne lui ont point été particulières : Dieu les a accordées à plusieurs autres de ses serviteurs. Quelquefois il leur parloit dans des visions; d'autres fois il leur découvroit les choses cachées, en éclairant leur esprit d'une lumière surnaturelle, ou les peignoit si distinctement et si vivement dans leur imagi nation, qu'il ne leur étoit pas possible de s'y méprendre. Il n'en est pas moins vrai qu'il faut avoir une grande prudence, et être bien versé dans la connoissance du discernement des esprits, pour distinguer les opérations de l'Esprit-Saint, d'avec les illusions de l'ennemi. Les révélations particulières n'auront jamais le même degré de certitude et d'autorité que celles qui sont publiques, qui furent faites aux prophètes, que des miracles évidens confirmèrent, et qui depuis ont été marquées du sceau de l'église. Pour revenir

à celles de sainte Brigite, elles furent écrites, d'après ce qu'elle en avoit dit, par Pierre, moine de Citeaux, et par Matthias, chanoine de Lincopen, qui, l'un et l'autre, avoient été les directeurs de sa conscience (e). Si elle les eût écrites elle-même, on y trouveroit plus de simplicité, plus de cet esprit qui caractérise les Saints, et elles auroient conséquemment plus d'autorité.

Le célèbre Jean de Turre-Cremata, qui fut depuis cardinal, examina, par l'ordre du concile de Bâle, le livre des révélations de sainte Brigite, et l'approuva comme utile pour l'instruction des fidèles. Le concile regarda cette approbation comme suffisante. Il n'en résultoit cependant autre chose, sinon que le livre dont il s'agit ne renferme rien de contraire à la foi, et que les révélations étant appuyées sur une probabilité historique, on peut les croire pieusement. Benoît XIV s'exprime de la manière suivante sur le même sujet (2): « L'approbation de semblables » révélations n'emporte autre chose, sinon qu'a» près un mûr examen, il est permis de les pu»blier pour l'utilité des fidèles..... Quoiqu'elles » ne méritent pas la même créance que les vérités » de la religion, on peut cependant les croire >> d'une foi humaine, conformément aux règles » de la prudence, selon lesquelles elles sont pro» bables, et appuyées sur des motifs suffisans pour » qu'on les croie pieusement. » Telles sont les révélations de la B. Hildegarde, de sainte Brigite et de sainte Catherine de Sienne.

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Ce qu'il y eut de plus admirable dans sainte

(e) Le second, à la prière de la Sainte, traduisit la Bible en suédois en 1352. Voyez Stiernman, sur l'état des sciences en Suède, dans les temps reculės.

(2) De Canoniz. Sanct. l. 2, c. 32, n. 11.

Brigite, ce fut cette simplicité avec laquelle elle soumettoit ses révélations au jugement de l'église. Comme elle se croyoit indigne du simple don de la foi, elle n'avoit garde de se glorifier des faveurs extraordinaires qu'elle ne désira jamais, et dont elle ne se servit que pour s'établir plus solidement dans la charité et dans l'humilité (ƒ). Si

(f) Les œuvres de sainte Brigite contiennent, 1.o des Prières fort dévotes sur les souffrances et l'amour de JésusChrist. On en a inséré quelques-unes dans des livres de prières, et l'on en trouve qnelques autres à la tête des révélations de la Sainte.

par

2. Sa règle, divisée en 31 chapitres, approuvée en 1363 Urbain V, et confirmée par plusieurs autres papes, sous titre de règle de l'ordre du Sauveur ou de Jésus.

3. Ses Révélations. 4. Un discours angélique sur l'excellence de la vierge Marie, et quatre longues prières qui ont pour objet de remercier Dieu des principaux mystères de la vie de la sainte Vierge dans l'incarnation du Verbe.

Les révélations de sainte Brigite ont été imprimées à Lubec en 1492, à Nuremberg en 1521, avec des figures qui font éstimer cette édition ; à Rome en 1521, 1556, 1606, 1608; à Anvers en 1611, à Cologne en 1628, à Munich en 1680. On a donné à Rome une édition de ses prières en 1530 > in-8.°

Le cardinal de Turre-Cremata fit une apologie des révélations de sainte Brigite, que le concile de Bâle l'avoit chargé d'examiner. La première partie de cette apologie a été imprimée avec les révélations. La seconde qui contient les objections que faisoient quelques Pères du concile de Bâle, a été publiée depuis peu par Mansi, t. IV, Supplem. Concilior. p. 910.

Jean, évêque de Chiemsée, dans son fameux livre intitulé, Onus ecclesiæ, c. 3, fait beaucoup d'usage des révélations de sainte Brigite. On les retrouve aussi dans l'Onus mundi, imprimé à Rome en 1485, avec un panégyrique en P'honneur de la Sainte. François Coster prétend que les prédictions contenues dans ces révélations ont été accomplies.

Les révélations de sainte Brigite furent écrites et traduites en grande partie par Pierre, sous-prieur, puis prieur du monastère d'Alvestre, de l'ordre de Citeaux, dans lequel mourut le prince Ulphon. Pierre d'Alcastre compila ou traduisit les nouvelles, appelées Extravagantes, ainsi que le discours angélique sur l'excellence de la bienheureuse vierge Marie, comme on le voit par le prologue. Il fut long-temps confesseur de la Sainte, et l'accompagna dans quelques-uns

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