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dans le pays que les autres, et fixa son siége à Paris. Ce fut à lui ou à ses disciples que la religion chrétienne fut redevable de la fondation des églises de Chartres, de Senlis, de Meaux (5), et peu après de celle de Cologne et de quelques autres qui étoient florissantes dans le quatrième siècle, et gouvernées par de saints évêques, parmi lesquels on compte saint Materne de Cologne, etc. Saint Fuscien et saint Victoric, saint Crespinet saint Crespinien, saint Rufin et saint Valère, saint Lucien de Beauvais, saint Quentin, saint Piat, saint Rieul de Senlis, sont appelés disciples ou coopérateurs de saint Denis, et il est dit d'eux qu'ils vinrent de Rome pour prêcher le nom de Jésus-Christ dans les Gaules.

gaulois. Il n'y avoit cependant point d'églises nombreuses en ce temps, si l'on excepte celles d'Arles, de Marseille, de Lyon et de Vienne. Voyez le Gallia Chr. nova, t. I.

Comme saint Trophime d'Arles étoit évêque avant la mission de saint Saturnin, ou avant l'année 250, il n'est pas pas hors de vraisemblance que quelques-uns des saints évêques dont nous avons parlé au commencement de cette note, ne soient venus dans les Gaules plutôt que lui. Grégoire de Tours cependant les fait arriver la plupart dans le même temps, c'est-à-dire, au milieu du troisième siècle. Il paroît constant que saint Gatien de Tours fut envoyé par saint Fabien, qui occupa le siége de Rome depuis l'an 236 jusqu'à l'an 250. Il résulte du récit de saint Grégoire de Tours, que saint Denis de Paris, saint Saturnin, saint Austromoine et saint Martial, furent envoyés par le même pape, et environ dans le même temps. C'est un sentiment que Bosquet, Tille lemont et d'autres savans critiques regardent comme certain. La paix dont l'empereur Philippe laissa jouir l'église, facilita les succès d'une mission si nombreuse.

il vint encore depuis d'autres évêques de Rome, comme saint Pérégrin d'Auxerre, saint Génulphe de Cahors, qui furent envoyés par saint Sixte II en 257 (D. Rivet, Hist. litt. t. I, p. 309). Mais la plupart des autres églises des Gaules furent fondées par les disciples des sept premiers missionnaires venus de Rome. Ainsi D. Rivet ne doute point que saint Julien du Mans, et le premier évêque d'Angers, n'aient été disciples de saint Gatien de Tours.

(5) Gallia Christ. nova, t. I, p. 521 ; Rivet, t. 1, 308. Tome IX.

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Nous lisons dans les actes de saint Denis, que cet évêque, rempli de zèle, fit bâtir une église à Paris, et convertit un grand nombre d'idolâtres à la foi. Les travaux de son apostolat furent couronnés par un glorieux martyre. L'opinion la plus probable est qu'il souffrit durant la persécution de Valérien, en 272. Quelques auteurs modernes ont différé sa mort jusqu'au commencement du règne de Maximilien-Hercule, qui fit sa principale résidence dans les Gaules, depuis l'an 286 jusqu'à l'an 292. Adon appelle Fescenninus le juge qui le condamna. Selon les actes de son martyre, que suivent saint Grégoire de Tours, Fortunat, et les martyrologistes d'Occident, il fut emprisonné long-temps pour la foi, et termina sa vie par le glaive, avec Rustique, prêtre, et Eleuthère, diacre. L'auteur des mêmes actes ajoute que les trois martyrs furent jetés dans la Seine, mais qu'une femme chrétienne, nommée Catulla, trouva le moyen de les en retirer, et de les enterrer honorablement près du lieu où ils avoient été décapités. Les fidèles bâtirent une chapelle sur leur tombeau.

En 469, les pieuses exhortations de sainte Geneviève firent élever une église sur les ruines de cette chapelle, et les Chrétiens venoient de toutes parts la visiter avec beaucoup de dévotion, comme nous l'apprenons de plusieurs endroits des ouvrages de saint Grégoire de Tours. Il résulte de ces mêmes passages, que l'église dont il s'agit étoit hors des murs de la ville, quoiqu'elle n'en fût pas éloignée (6). Il paroît par une donation

(6) Quelques auteurs pensent que le saint apôtre de la France et ses compagnons souffrirent, non à S.-Denis, mais au village de Montmartre près de Paris. Avant l'établissement du christianisme, il y avoit sur la montagne où est ce village, un temple de Mercure, dont on voyoit encore les restes en 1618; on y

de Clotaire II, qu'il y avoit là une communauté religieuse gouvernée par un abbé.

voyoit aussi une idole de pierre qui étoit dans une niche, mais qui fut alors renversée par un ouragan. C'est de là que Frédégaire appelle cette montagne Mons Morcore, et Hilduin, qui écrivoit sous le règne de Louis le Débonnaire, Mons Mercurii; mais ce dernier auteur dit qu'anciennement on l'appeloit plus communément Mons Martis, d'un temple de Mars situé un peu plus bas que celui de Mercure, et dont les restes furent détruits en 1590, pendant le siége de Paris par Henri IV.

On lit dans Flodoard, écrivain du dixième siècle, qu'en 944 un ouragan renversa un ancien bâtiment dont le mortier étoit plns dur qu'aucune chose connue, et qu'il y avoit auprès une ancienne église de Chrétiens. On conclut de ce passage, ainsi que d'une charte accordée au monastère de Saint-Martin-des Champs, ap. du Breuil, et Morrier, Hist. de Saint-Martindes-Champs, qu'il y avoit anciennement sur la partie la plus basse de la montagne, une église ou chapelle de Saint-Denis, laquelle, tombant de vétusté, fut donnée aux religieux de Saint. Martin. Il y avoit aussi une chapelle souterraine, où, selon quelques auteurs, les corps des saints martyrs restèrent jusqu'à ce qu'on les transportât à Saint-Denis.

En 1611, tandis que l'on creus oit de nouvelles fondations pour agrandir le monastère des religieuses de Montmartre, on découvrit sous la chapelle dite des Saints-Martyrs, une grande cavité, au fond de laquelle étoit une crypte ou catacombe longue de trente-deux pieds, avec un autel de pierre à l'Orient, et une croix aussi de pierre. A droite étoit une autre croix avec les lettres Mar: et à gauche on voyoit gravées ces autres lettres Clemin, et tout auprès celles-ci, Dio. On marqua aussi des traces de quelques autres lettres, mais qu'il n'étoit plus possible de distinguer. C'étoit là l'ancienne chapelle de Saint-Denis et de ses compagnons, célèbre par la dévotion du peuple chrétien, et dite de Martyrio. On prétend que les fideles y célébroient les divins mystères durant les persécutions de la primitive église.

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On bâtit sur cette voûte ou catacombe, une église en l'honneur de saint Denis avant l'année 700. La montagne est appelée Mons Martyrum dans l'histoire manuscrite des miracles du saint apôtre de la France, composée sous le règne de Charles-le-Chauve; et voilà la véritable étymologie du nom de Montmartre. Louis-le-Gros, et la reine Adélaïde, fondèrent en 1134, à l'endroit où étoit l'ancienne église qui couvroit la catacombe, un monastère de religieuses bénédictines qui subsiste encore. L'église de ce monastère fut dédiée en 1147 par le pape Eugène III. Saint Bernard et Pierre le Vénérable servirent le souverain pontife à l'autel, l'un en qualité de diacre, et l'autre en qualité de sous-diacre. La reine

Dagobert, qui mourut en 638, fonda la célèbre abbaye de Saint-Denis, où nos rois ont leur sépulture depuis plusieurs siècles. Pepin et Charlemagne son fils, furent les principaux bienfaiteurs de ce monastère, que l'abbé Suger fit rebâtir avec une

Adélaïde se retira dans ce monastère un an avant sa mort; elle y mourut en 1154, et l'on y voit encore son tombeau au milieu du chœur des religieuses. Les moines de Saint-Denis vont tous les sept ans en procession à Montmartre, et portent avec eux le chef du saint martyr avec d'autres reliques.

En 1392, le roi Charles VI, le lendemain du jour où il avoit pensé perdre la vie par un accident arrivé à un bal, alla nupieds à Montmartre avec toute sa cour, pour rendre grâces à Dieu de sa conservation. Saint Ignace de Loyola y alla avec ses compagnons, afin d'implorer le secours et les lumières du ciel par l'intercession de saint Denis, avant l'institution de son ordre. Le cardinal de Bérulle y conduisit, en 1604, Anne de Jésus et Anne de saint-Barthélemi, avant l'établissement des Carmélites à Paris. Barbe Avrillot, saint François de Sales, saint Vincent de Paul et M. Ollier, firent le même pélerinage avant de fonder les Ursulines, l'ordre de la Visitation, la congrégation des Lazaristes et le séminaire de Saint-Sulpice. La reine Marie de Médicis alla aussi à Montmartre par dévotion avec sa cour.

Mabillon, Op. Post. t. II, p. 336, Lobineau, Hist. de Paris, l. 1, p. 15, Félibien, Hist. de l'abbaye de Saint-Denis, ont prétendu que le saint apôtre de la France et ses compagnons avoient souffert, et avoient d'abord été enterrés près de la Seine, à l'endroit où est présentement l'abbaye de SaintDenis; mais leurs preuves ne démontrent point que les saints martyrs ne furent ni mis à mort, ni enterrés à Montmartre. Au reste, en supposant que Montmartre ait été le premier lieu de leur sépulture, il n'en est pas moins vrai que leurs corps furent depuis portés à Saint-Denis, qui étoit sur le grand chemin, lieu où les Romains avoient coutume d'enterrer les morts. Peut-être cachoit-on les tombeaux durant les persécutions.

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Depuis l'établissement du christianisme, les fidèles ont toujours honoré leurs apôtres et leurs martyrs avec une vénéra tion singulière de là la dévotion des Français pour SaiutDenis et Montmartre, lieux consacrés à leurs pères dans la foi. C'est à la protection spéciale de ces sainrs patrons, que l'église gallicane attribue l'avantage d'avoir conservé, depuis sa conversion, le sacré dépôt de la foi dans toute sa pureté. Voyez D. Félibien, Hist. de l'abbaye de Saint-Denis; Piganiol, Descript. de Paris, t. VIII, p. 1 et sur Montmartre t. II, p. 606'; l'abbé Lebeuf, Hist, du diocèse de Paris,t. III.

grande magnificence. On y garde les reliques de saint Denis, de saint Rustique et de saint Eleuthère, dans trois châsses d'argent (6). Nous avons l'histoire des miracles opérés par l'intercession des trois saints martyrs, laquelle est divisée en trois livres, dont le dernier finit à l'an 877 (7).

Les hommes apostoliques qui convertirent tant de nations à la foi, étoient remplis de l'esprit de Jésus-Christ; ils ne cherchoient que sa gloire, ils n'agissoient et ne vivoient que pour lui. Ils se rappeloient sans cesse que Jésus-Christ, dont ils devoient être les imitateurs, n'avoit envisagé surla terre que la gloire de son père, et qu'il s'étoit offert à lui avec son royaume. Voilà des vérités que les ministres de la religion doivent avoir toujours présentes à l'esprit. Ils ne seront dignes de leur vocation qu'autant qu'ils seront morts au monde, qu'ils mépriseront les biens du monde, et qu'ils se conduiront d'après les maximes des saints pasteurs. Quand un ministre de l'évangile est dans ces dispositions, il n'espère et ne désire rien dans le monde; il est supérieur à tous les motifs de crainte; lorsqu'il s'agit de la cause de son maître, les persécutions, les tourmens, la mort même ne peuvent abattre ou ralentir son courage.

S. DOMNIN, MARTYR EN ITALIE.

SAINT DOMNIN étoit un des officiers de la chambre de l'empereur Maximilien-Hercule, qui tenoit sa cour à Milan dans l'année 304. La persécution faisant sentir ses ravages avec beaucoup de fureur, il s'enfuit secrètement, et prit la route de

(6) Voyez D. Félibien, Hist. de l'abbaye de Saint-Denis ; le Gall. Christ. nova, t. VII; Lebeuf, Hist. du diocèse de

Paris.

7) Act. Ben. t. III, p. 343.

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