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prétendus actes de saint Paul et de sainte Thècle, et le pape Gélase condamna un livre qui portoit ce titre. Il pe nous reste plus rien de ces ouvrages. C'est dans ces sources que Basile de Séleucie, qui écrivoit dans le cinquième siècle, puisa les matériaux qui lui servirent à composer la vie de sainte Thècle. Voyez Stilting, t. VI, Sept. p. 546, et Fabricius, Bibl. Græc. t. IX, p. 146.

Premier siècle.

SAINTE THÈCLE, dont le nom a toujours été fort célèbre dans l'église, et qui est appelée la première martyre de son sexe par saint Isidore de Péluse, ainsi que par tous les Grecs, fut un des plus beaux ornemens du siècle des apôtres. Elle étoit née dans l'Isaurie ou dans la Lycaonie. Saint Méthode dit, dans son Banquet des Vierges, qu'elle étoit fort versée dans la philosophie profane; qu'elle possédoit toutes les parties des belles-lettres, et qu'elle s'exprimoit avec autant de force et d'éloquence, que de douceur et de facilité. Il ajoute qu'elle fut convertie au christianisme par saint Paul, et qu'elle devint trèshabile dans la connoissance de la religion. Il loue l'ardeur de son amour pour Jésus-Christ, qui éclata dans plusieurs occasions importantes, et sur-tout dans les combats qu'elle soutint pour la foi avec un courage et une force de corps dignes de la vigueur de son ame.

Suivant saint Augustin, saint Epiphane, saint Ambroise, etc. ce fut à Icône que saint Paul la convertit par ses prédications. L'opinion la plus vraisemblable est qu'elle embrassa le christianisme vers l'an 45. Les discours de l'apôtre lui firent comprendre toute l'excellence de la virginité, et elle résolut de donner la préférence à cet état, dans un âge encore tendre. Elle renonça sur-le-champ à un mariage avantageux que ses parens étoient sur le point de lui faire contracter.

Elle commença son sacrifice, dit saint Grégoire de Nysse (1), en donnant la mort à la chair, en pratiquant de grandes austérités, en étouffant dans son cœur toutes les affections terrestres, en soumettant ses passions par une vie contraire aux sens; en sorte qu'elle ne paroissoit plus conduite que par la raison et l'esprit. Le monde étoit mort pour elle, comme elle étoit morte pour le monde.

L'auteur d'une homélie composée du temps de saint Chrysostôme, et que l'on a attribuée à ce Père, rapporte que les parens de Thècle, qui ne connoissoient point le motif de la conduite extraordinaire qu'elle tenoit, employèrent les menaces, les caresses, et tous les moyens possibles pour la déterminer à finir l'affaire de son mariage. Le jeune homme, qui devoit l'épouser, se joignit à eux, et fit aussi valoir les raisons les plus capables de la toucher. Enfin tous ceux qui la connoissoient la pressèrent, de la manière la plus persuasive, de se rendre aux désirs de sa famille. Tous ces moyens étant inutiles, on eut recours au magistrat, qui la menaça de la sévérité des lois. Thècle triompha de tous ces différens assauts, et regarda comme ses plus cruels ennemis ceux qui affectoient de lui témoigner tant de tendresse. Se voyant un peu plus libre, elle profita de cette occasion pour s'échapper des mains de ses persécuteurs, et elle se retira auprès de saint Paul, pour y trouver quelque consolation: ainsi elle abandonna ce qu'elle avoit de plus cher dans le monde, ne cherchant que Jésus-Christ qui lui tenoit lieu de toutes choses.

Le jeune homme auquel elle avoit été promise en mariage, la fit chercher de toutes parts, tant (1) Hom. 14 in Cant.

pour satisfaire sa passion que pour se venger de l'affront prétendu qu'il s'imaginoit avoir reçu. L'ayant découverte, et ne pouvant vaincre sa résistance, il la dénonça comme chrétienne aux magistrats, pour qu'ils la condamnassent à être dévorée par les bêtes. Thècle resta toujours inébranlable: elle fut exposée nue dans l'amphithéâtre; mais elle étoit revêtue d'innocence, et l'ignominie dont on vouloit la couvrir, devint pour elle une occasion de gloire et de triomphe. Tranquille au milieu des léopards, des lions et des tigres, elle attendoit avec une sainte impatience le moment où elle alloit être mise en pièces par ces redoutables animaux, dont les rugissemens glaçoient d'effroi tous les spectateurs; mais les lions et les autres animaux oubliant leur férocité naturelle,se couchèrent à ses pieds, et les léchèrent, comme pour lui témoigner leur respect. On eut beau les exciter, ils se retirèrent sans avoir fait de mal à la servante de Jésus-Christ. Cette circonstance merveilleuse est rapportée par saint Ambroise (2), qui s'exprime en cette occasion avec cette éloquence simple et énergique qui lui est particulière; on la trouve aussi dans saint Chrysostôme, dans saint Méthode, dans saint Grégoire de Nazianze, et dans d'autres anciens Pères.

Une autre fois, sainte Thècle n'éprouva point les effets du feu, par une protection visible du ciel, et sortit. du milieu des flammes, sans que son corps en eût été endommagé. Saint Grégoire de Nazianze (3), saint Méthode, et d'autres auteurs qui rapportent ce prodige, ajoutent que la Sainte fut délivrée de plusieurs autres dangers

(2) L. de Virgin., p. 469, in Ps. CIV, et ep. 25. 3 Caro, 4, et orat. 199

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auxquels la rage des persécuteurs l'avoit exposée. On lit dans un ancien martyrologe qui porte le nom de saint Jérôme, et qui a été publié par Florentinius, que ce fut à Rome que Dieu sauva miraculeusement sa servante de l'activité des flammes.

Thècle accompagna saint Paul dans plusieurs de ses courses apostoliques, afin de se former à la perfection chrétienne sur un modèle aussi accompli. Saint Chrysostôme, saint Grégoire de Nazianze, saint Augustin, etc. lui donnent le titre de vierge et de martyre. Ses souffrances lui ont justement mérité le second de ces titres, quoique Bède dise dans son martyrologe qu'elle mourut en paix. Ce dernier sentiment a été adopté par plusieurs auteurs graves (4).

La Sainte passa le reste de sa vie dans la retraite. Elle mourut dans l'Isaurie, et fut enterrée à Séleucie, capitale de ce pays. On bâtit une église sur son tombeau, sous les premiers empereurs chrétiens, et cette église, qui portoit son nom, fut visitée par sainte Marane et sainte Cyre, qui l'une et l'autre menoient une vie anachorétique, comme nous l'apprenons de Théodoret. Il y venoit des pélerins de toutes parts, et il s'y opéra un grand nombre de miracles, suivant le même auteur, saint Grégoire de Nazianze, etc. La cathédrale de Milan est dédiée sous l'invocation de sainte Thècle, et l'on y a gardé longtemps une partie de ses reliques.

Nous ne pouvons plaire à Jésus-Christ, à moins que nous n'imitions l'amour qu'avoient les Saints pour la pureté, et que nous ne suivions les règles de la plus exacte chasteté, chacun selon son

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(4) Voyez Tillemont, t. II, n. 2 p. 489, et Papebroch, t. 1, Mai, p. 42.

état; mais cette vertu ne peut s'acquérir que par les moyens suivans: 1.° nous devons prier Dieu de nous pénétrer de la crainte de ses jugemens, de nous inspirer l'horreur du péché, de purifier nos affections, et de nous apprendre à veiller avec soin sur tous nos sens. 2. Nous devons nous former à la pratique de l'humilité, et vivre dans une entière défiance de nous-mêmes. Ce seroit une folie et un crime que d'oublier notre foiblesse, et de présumer de nos forces. 3.o Il faut éviter tout ce qui est capable d'allumer les passions, comme les amitiés trop tendres, sur-tout lorsqu'il s'agit de jeunes personnes; sans cette précaution, on courroit risque de finir par la chair, après avoir commencé par l'esprit. 4.° On doit toujours s'occuper à quelque chose de sérieux, et ne rester jamais oisif. Il est nécessaire d'entre-mêler le travail aux exercices de piété, afin que le démon ne puisse nous trouver dans le désœuvrement. 5. La pratique de la mortification, qui doit s'étendre aux inclinations et aux sens, doit être ajoutée aux quatre premiers moyens. Si nous laissons une pleine liberté à nos penchans par rapport aux choses qui ne sont pas défendues, bientôt nous n'en serons plus les maîtres, et nous ne pourrons plus les contenir dans les bornes du devoir. Nous nous animerons par le souvenir des biens invisibles, et par celui des austérités auxquelles des vierges délicates s'assujettirent avec joie. L'habitude de la mortification une fois acquise, nous nous éleverons au-dessus · des sens, nous les maîtriserons facilement,

et

nous nous rétablirons, à certains égards, dans l'heureux état dont le péché fit décheoir nos premiers parens Plus le vieil homme sera crucifié, et le

corps du péché détruit en nous, plus nous

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