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venons de le dépeindre; aussi, lui rendit-on, à Rome, la justice qui lui étoit due.

Le pape Jean VI se déclara aussi hautement en sa faveur, que l'avoient fait Agathon et Serge, ses prédécesseurs. Il écrivit aux rois de Mercie et de Northumberland, pour leur recommander -Wilfrid (7). Il y chargeoit Brithwald de Cantorbéry de convoquer un synode pour faire rendre justice à l'évêque persécuté, et dans le cas ou le synode ne pourroit avoir lieu, il ordonnoit aux parties de comparoître en personne devant lui. Le Saint se mit en route pour retourner en Angleterre. Etant en France, il fut arrêté à Meaux par une maladie dangereuse. On lit dans Bède (8), , que Dieu lui fit alors connoître d'une manière surnaturelle que sa vie seroit encore prolongée de quatre ans. Lorsqu'il fut arrivé en Angleterre, Brithwald lui promit de ne rien négliger pour le faire rétablir sur son siége. Ethelred, qui avoit quitté le trône de Mercie pour se retirer dans un monastère, et qui étoit alors abbé de Bardney, le reçut avec beaucoup de joie, et le recommanda fortement à Coenred, son neveu, en faveur duquel il s'étoit démis de sa couronne. Coenred fut si touché des entretiens qu'il eut avec le saint évêque, qu'il forma le projet de renoncer au monde, et il en exécuta le dessein en 709; il se rendit à Rome avec Offa, roi des Saxons orientaux, y prit l'habit monastique, et y passa saintement le reste de ses jours.

On éprouvoit cependant toujours des difficultés de la part d'Alcfrid, roi de Northumberland :

(7) Spelman nous a donné sa lettre, p. 179 et 204. Elle est attribuée à Jean VII, à la page 204; mais c'est une faute, et ce ne sont point deux lettres différentes.

(8) Hist. l. 5, c. 19.

mais les choses changèrent de face à la mort de ce prince arrivée en 705. Il témoigna dans sa dernière maladie un vif repentir de ses injustices envers Wilfrid. Lorsqu'il eut cessé de vivre, tout le royaume se réunit à demander le rétablissement du Saint. Il se fit sous Osred, qui succéda à son père, à l'âge de huit ans, et auquel on donna pour régent le brave et vertueux Brithrick. L'archevêque de Cantorbéry, accompagné de Wilfrid, vint à un concile composé d'évêques, d'abbés et de princes, qui se tint sur le bord de la Nidd, dans le Yorckshire. Le roi honora aussi l'assemblée de sa présence. Brithwald lut les lettres du pape, et insista sur les menaces d'excommunication et de dégradation qui y étoient contenues, dans le cas où l'on refuseroit d'obéir et de se réconcilier avec Wilfrid. Le régent, de son côté, déclara qu'ayant vu le roi exposé à un trèsgrand danger, il avoit fait vou d'exécuter le décret du pape si le prince étoit délivré, et qu'ayant obtenu ce qu'il demandoit, il étoit tenu d'accomplir son vou, qui d'ailleurs s'accordoit avec les derniers sentimens d'Alcfrid. Tout le monde s'écria qu'on ne pouvoit plus différer d'exécuter ce que le pape demandoit. En conséquence, on rendit à Wilfrid le siége d'Hexam, qui n'avoit point été rempli, et dont on s'étoit contenté de donner l'administration à saint Jean de Beverley; on lui rendit aussi l'abbaye de Rippon avec tous les revenus qui en dépendoient. Le Saint prit possession de son diocèse; mais il fit sa principale résidence dans le monastère de Rippon, et laissa Yorck à saint Jean de Beverley. Il reprit le gouvernement des différens monastères qu'il avoit fondés dans la Mercie, et qui depuis furent détruits par les Danois. Il mourut le 24 Avril 709,

dans un de ces monastères nommé Undalum (aujourd'hui Oundle), dans le comté de Northampton. Il étoit âgé de 75 ans, et il en avoit passé 45 dans l'épiscopat. Avant de mourir, il donna tout ce qu'il possédoit aux églises, aux monastères et aux compagnons de ses exils. On l'enterra dans l'église de Saint-Pierre, à Rippon (9). Ce monastère ayant été détruit dans la suite, ses reliques furent transférées en grande partie dans la cathédrale de Cantorbéry, et déposées sous le principal autel de cette église, en 959. Lanfranc les fit renfermer dans une châsse, et saint Anselme les mit au nord du même autel, le 12 Octobre. On commença dès-lors à célébrer en ce jour la principale fête du Saint, qui s'étoit faite précédemment le 24 Avril, comme on le voit par l'ancien missel de l'église britannique, qui se garde à Jumièges, par l'ancien calendrier de saint Maxime, par le martyrologe en vers de Bède, qu'a publié d'Achéry (10), et par les anciens martyrologes anglais. On dit que les reliques de saint Wilfrid sont présentement auprès du tombeau du célèbre cardinal Polus.

La vraie vertu ne se dément jamais; elle est toujours conduite par le même principe, toujours inébranlable dans ses résolutions. Elle est humble et modeste dans la prospérité, grande, active, courageuse dans l'adversité. Souffrir de la part des gens de bien est sans doute une épreuve bien cruelle mais de quelque côté que vienne la persécution, l'homme vertueux ne se laisse point abattre; il doit, au contraire, s'armer de fermeté, en s'humiliant toutefois devant Dieu et

(9) Voyez Dugdale, dans son histoire de l'église collégiale de Saint-Pierre de Rippon, qui fut détruite sous Henri VIII. (10) Spicil. t. X.

les hommes, et en considérant, d'un côté, que la pusillanimité et le désespoir sont le partage des ames lâches, et de l'autre, que l'impatience, l'extrême sensibilité aux injures, la vengeance, viennent d'un fond d'amour-propre et d'orgueil. Telle fut la conduite que tint toujours saint Wilfrid. Il vit avec tranquillité les orages se former sur sa tête; jamais il ne chercha à se venger de ses persécuteurs; on ne l'entendit point se plaindre de la malice de ses ennemis, qui animoient tout le royaume contre lui. Lorsqu'il eut cessé de vivre, l'univers entier rendit justice à la pureté de ses intentions, à l'ardeur de son zèle pour la discipline et pour la gloire de Dieu, à la sainteté de sa vie. Les anciens historiens d'Angleterre s'accordent à payer un juste tribut de louange à sa mémoire, qui est d'ailleurs consacrée dans les fastes de l'église.

S. ÉDOUARD LE CONFESSEUR,
ROI D'ANGLETERRE.

Tiré de Guillaume de Malmesbury, de Reg. Angl. l.2,c. 13, qui est, au rapport de Saville, le meilleur historien d'Angleterre, et qui écrivoit en 1140; de Matthieu de Westminster, ou de l'auteur des Flores Hist. Angl. de Matthien Paris, etc.; de la vie du Saint, par Aclred, abbé de Riéval, qui mourut en 1166, vie dont la meilleure édition est celle qu'a donnée Roger Twisden, inter 10 Angl. Scriptores, Londini, 1652, t. I, p. 370. Nous avons une relation exacte de la mort du saint roi, par Sulcard, moine de Westminster, qui florissoit sous le règne de Guillaume le conquérant, et qui, par l'ordre de Vital son abbé, composa une histoire abrégée de son monastère, sous ce titre : De constructione Westmonasterii. Il y a deux Mss. de cet ouvrage, l'un dans la bibliothèque cottonienne, et l'autre dans les archives de Westminster. Ils ont été communiqués l'un et l'autre à l'auteur anglais. Voyez Ingulphe, publié par Gale; Brompton Knyghton, dans le recueil de Twisden; Hoveden, et Matthieu Paris, sous l'an 1066; Harpsfield, sect. 11, c. 3; Oderic Vital, in Hist. Normant.;

Guillaume de Poitiers, de Gestis Guil. Ducis ; la lettre d'Innocent II sur la canonisation de saint Edouard, an 1138, ap. Wilkens Conc. Brit. t. 1, p. 419; la bulle d'Alexandre III sur la canonisation du même Saint, ibid. p. 434; celle que donna Grégoire IX en 1227, pour célébrer sa fête dans toute l'Angleterre; les Fœdera de Rymer, t. I, p. 297.

L'AN 1066.

DIEU donne souvent les mauvais princes dans sa colère; mais un bon roi est aussi le présent le plus précieux qu'il puisse faire à une nation. Un roi sage est le soutien du peuple (1). Tel qu'est le juge du peuple, tels sont les ministres; et tel qu'est le prince de la ville, tels sont aussi les habitans. Le roi insensé perdra son peuple; et. les villes se peupleront par la sagesse de ceux qui les gouvernent (2). La vérité de ces maximes est confirmée par le bonheur qui accompagna le règne d'Edouard le Confesseur.

Le roi Ethelred II eut d'Elgive, sa première femme, Edmond, surnommé côte de fer, qui lui succéda. Il épousa depuis Emme, fille de Richard I, duc de Normandie, et il en eut deux fils, Alfred, et Edouard dont nous donnons la vie. Le règne de ce prince fut malheureux, parce qu'il fut foible. Les Danois, qui depuis environ soixante ans n'avoient point inquiété la GrandeBretagne, vinrent l'attaquer de toutes parts, et y commirent d'horribles ravages. Ethelred acheta d'eux une paix honteuse, et ne rougit pas de s'engager à leur payer tous les ans un tribut considérable, qui fut levé par une taxe à laquelle on donna le nom de Danegelt. Swein ou Suénon, roi des Danois, fit la conquête de toute l'Angleterre, peu de temps après, c'est-à-dire, en 1015. Ce prince mourut la même année, laissant nn fils nommé Knute ou Canute.

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