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pénétrant et réfléchi, de ce guerrier vertueux, qui ne parloit qu'avec vénération de l'incorruptible probité des héros de l'ancienne Rome, et qui ne voyoit d'honneur que dans le devoir.

Pour nous, qui sommes chrétiens et non païens, qu'avonsnous fait? Nous avons répudié à la fois la royauté du ciel et celle de la terre, « la première et la seconde majesté » (Tertullien); de sorte que la France, comme corps politique, n'a plus de culte, c'est un fait notoire, ni, à vrai dire, de royauté, puisque, sans avoir en lui-même la souveraineté, nul ne sauroit être roi. Deux fléaux qui sympathisent naturellement, la souveraineté du peuple et l'athéisme, travaillent sous nos yeux, avec un effrayant succès, à ne faire qu'un grand cadavre de tout le corps social, par une mortalité spirituelle incomparablement plus funeste que celle qui attaque seulement les corps et sauve souvent les ames. Qu'il nous soit donc permis de terminer ces pages, comme celles dont elles sont la suite, par une citation tellement adaptée à nos besoins, que nous y trouvons la solution de toutes les difficultés qui troublent nos esprits, et le moyen de conjurer les orages qui s'accumulent sur nos têtes. « Il faut placer le souverain législateur à la tête de la législation, et se bien pénétrer de cette vérité philosophique, et la plus philosophique des vérités : que la révolution a commencé par la déclaration des droits de l'homme, et qu'elle ne finira que par la déclaration des droits de Dieu (1). M. A. Č.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES. PARIS. Le lundi de Pâque, jour où M. l'archevêque est allé à Notre-Dame pour l'ouverture des prières de Quarante-Heures, le. prélat a trouvé sur son chemin, en retournant à la sacristie, les petits enfans qu'il avoit fait habiller pour la cérémonie du lavement des pieds. Quoiqu'il n'ait pu faire lui-même la cérémonie cette année comme l'année dernière, il n'a pas voulu que les pauvres se ressentissent de son absence, ni de ses désastres, et il continue de faire habiller vingt-quatre enfans, moitié garçons, moitié filles, comme dans les temps de prospérité. M. l'archevêque s'étoit proposé de retourner à Notre-Dame le mercredi, pour clore les Quarante-Heures ; une indisposition qui heureusement n'avoit rien de grave l'en a empêché. On assure que son intention est de visiter successivement quelques paroisses.

-Le séminaire Saint-Sulpice, où il ne devoit d'abord y avoir qu'environ 50 malades, en a aujourd'hui près de 80. On pourroit

(1) M. de Bonald, Disc. prélim. de la Législ prim.

s'étonner de cette augmentation, dans un moment où le nombre des malades diminue dans tous les autres hôpitaux. Les derniers états de situation des hôpitaux montrent qu'il s'y trouve plus de 2,600 lits vacans, il y en a plus de 500 disponibles à l'Hôtel-Dieu; on ne voit donc pas pourquoi on réunit tant de malades dans les salles et cellules du séminaire, qui n'offrent pas un local aussi favorable, à beaucoup près. On y reçoit même, dit-on, d'autres que des choiériques; ce qui est contre le premier but de l'établissement de cet hospice temporaire. Les jeunes ecclésiastiques du séminaire supportent avec courage cette augmentation de fatigue, ils se relèvent auprès des malades, et il y en a toujours quelques-uns qui passent la nuit. En outre, quatre d'entre eux se sont rendus chaque jour à l'infirmerie de Notre-Dame, à Conflans, pour y soigner les malades recueillis par M. l'archevêque. Ce sont les séminaristes qui ont fait ce service depuis l'ouverture de l'infirmerie, mais M. l'archevêque a cru devoir les en décharger, dans un moment où ils ont un si grand nombre de malades à assister dans le séminaire même. A dater de ce moment, le service sera fait à Conflans par des infirmiers, sous la direction des Filles de la Charite. M. l'archevêque a visité, il y a quelques jours, les hospices des. séminaires et de MM. de Saint-Lazare; il y a porté comme dans les autres hospices des paroles de consolation et d'encouragement, et a donné des éloges au zèle et au dévouement des ecclésiastiques. Il a laissé une somme pour les infirmiers du dehors qui font le service sous les séminaristes.

On auroit cru qu'en présence d'un si grand fléau l'esprit d'impiété auroit suspendu ses plaintes et ses déclamations, et qu'un sentiment de pudeur l'auroit du moins engagé à ne pas troubler, par des dérisions ou des accusations également odieuses, la douleur et les alarmes des familles chrétiennes. Mais, non ; une philosophie. superbe et barbare fait encore entendre ses sifflemens au milieu des ravages de l'épidémie. Pour elle, prier est une superstition, et demander des prières est une foiblesse. La circulaire de M. de Montalivet est une pusillanimité; des cérémonies expiatoires et publiques sont un abus que l'autorité ne doit pas souffrir. A Rouen, il y a eu une procession extérieure, présidée par M. le cardinalarchevêque, et formée de tout le clergé; on a chanté le miserere et d'autres prières, pour demander la cessation du fléau. Cela fait pitié à de beaux esprits, qui se plaignent sérieusement que le culte franchit les bornes où il devroit se renfermer, et qu'il ose se montrer dans les rues; on l'avertit qu'il s'expose à des outrages que heureusement la sagesse de la population lui a évités. A Orléans, M. l'évêque avoit annoncé une neuvaine à St-Aignan, qui devoit commencer le mercredi de Pâque. On espéroit qu'une procession pourroit avoir lieu ce jour-là; mais les libéraux se sont rappelé à propòs un arrêté qu'ils avoient fait rendre l'année dernière par

M. de Riccé, alors préfet, et on a fait craindre aux autorités que la procession ne fût troublée par quelques démonstrations d'impiétés. Il y a des gens qui trouvent beau de ne pas s'humilier devant les signes trop visibles de la colère du ciel, et qui affectent de braver même ses coups, de se moquer des terreurs et du deuil de tant de familles qui sont, frappées dans ce qu'elles ont de plus cher, Ces bravades hautaines et ces moqueries cruelles, ce sont là les consolations qu'une philosophie inhumaine nous ménage dans les temps de calamité publique!

La maladie s'étoit d'abord déclarée avec force à Amiens; il y a eu, depuis le commencement de l'invasion, 224 personnes atteintes, dont 126 sont mortes. La rapidité et la gravité des cas ont fait beaucoup d'impression; elles ont ranimé la piété chez de bons fidèles, et réveillé la foi languissante chez d'autres. On se porte en plus grand nombre dans les églises, et il se fait dans toutes des prières. Une quarantaine a été ordonnée par M. l'évêque; elle a commencé comme à Paris le jour de Pâque. Le prélat monta en chaire dans la cathédrale le même jour, et exhorta son peuple à la pénitence; il rappela l'exemple des Ninivites, et sollicita les assistans de l'imiter. Il n'imiteroit pas, a-t-il dit, la conduite de Jonas, qui parut regretter que Dieu se fut si tôt apaisé, et il remercieroit plutôt le Seigneur d'avoir fait miséricorde à son peuple. Le vénérable évêque annonça que, le lendemain, il beniroit l'antel de Saint-Sébastien, que l'on vient de restaurer et de décorer, et qu'il y célébreroit la messe, pour demander à Dieu la cessation du fléau. Il annonça également qu'on placeroit dans l'église le christ de la croix de mission, qui, depuis la révolution, avoit été déposé à la sacristie, pour le dérober aux insultes. Le lundi de Pâque, M. l'évêque a en effet célébré la messe dans la cathédrale, sur le nouvel autel, et au milieu d'un immense concours. Après la messe, il adressa aux fidèles quelques paroles pleines de piété et d'onction. Tant que durera le fléau, il y aura chaque jour une messe célébrée au même autel. Chaque paroisse s'y rend à son tour en procession, et les fidèles se font un devoir d'accompagner le clergé. La croix de mission a été placée ostensiblement dans l'église, et les fidèles viennent y prier. On a aussi exposé les reliques des saints devant l'autel de Saint-Sébastien. Les dernières nouvelles portent qu'il y avoit quelque diminution dans le nombre des malades et dans celui des décès.

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Un journal qui n'est pas accoutumé à flatter les évêques, et qui dernièrement vouloit en faire traduire un en cour d'assises, pour un mandement sur le choléra; ce même journal vient de faire l'éloge d'un mandement de M. l'évêque de Belley, mandement remarquable, dit-il, par l'esprit de sagèsse qui l'a dicté, et par les prescriptions sanitaires qu'il recommande. Le rédacteur suppose que

les paroles du prélat sont une digne censure du langage de ses collègues, et portent aux populations des paroles plus religieuses et plus vraies. Or, assurément, M. l'évêque de Belley n'a pas songé à faire la censure des mandemens des autres évêques, et un prélat si vénérable, si pieux, si éclairé, seroit fort étonné qu'on le louât aux dépens de ses collègues. Son mandement, du 15 avril, est conçu véritablement dans un grand esprit de sagesse, et renferme des paroles qu'on ne sauroit trop méditer. Plus d'un journaliste pourroit en faire son profit. Par exemple, M. de Belley dit :

« Qu'il y ait çà et là quelques esprits assez légers, peut-être même assez pervers, pour tourner en ridicule ces hautes pensées, 'ce cri de la conscience du genre humain, on le conçoit, surtout dans un siècle où l'on a tant fait pour dénaturer tous les principes, brouiller toutes les idées, fausser toutes les intelligences, renverser toutes les institutions, mettre en problême toutes les vérités et toutes les vertus; mais les esprits justes, les ames droites, et en particulier le peuple, dont on a si hautement vanté la sagesse et le bon sens, le peuple, les artisans, les cultivateurs, les bons habitans de la campagne, lorsqu'ils ne sont pas égarés par des intrigues et des mensonges, s'empressent d'aller à l'église quand ils sont affligés, et s'adressent au ciel pour trouver des remèdes aux maux que la terre ne sauroit guérir.

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N'a-t-on pas vu même les hommes les plus dissipés, les plus opposés à la religion, recourir à Dieu dans le moment des calamités et surtout au moment de la mort ? Combien de fois n'ont-ils pas avoué que leur impiété apparente étoit l'ouvrage de l'orgueil, et que la conscience n'avoit cessé de réclamer contre ce nouveau genre d'hypocrisie si funeste à ceux qui le donnent et à ceux qui en sont témoins ?

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Etrange aveuglement des hommes, ô mon Dieu! il est impossible au plus grand nombre d'effacer dans leur esprit et dans leur cœur les lois saintes que vous y avez gravées; le souvenir de votre adorable présence les suit partout, et cependant ils osent vivre devant vous sans recourir à vous, sans vous rendre aucun hommage. Hélas! souvent ils font plus encore, ils tournent en ridicule ceux qui font profession de vous aimer, de vous servir, de se consacrer à vous; ils cherchent à les flétrir par des noms odieux en même temps qu'ils les vénèrent au fond du cœur et qu'ils envient leur courageux dévouement.

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Il faut espérer que ceux qui approuvent un tel langage ne se montreront plus si hostiles contre la religion et le clergé. Dans le dispositif du mandement, M. l'évêque de Belley engage à recourir à la protection de saint Anthelme, qu'il a choisi pour protecteur du diocèse. Il a la confiance que, si le fléau se déclaroit, son clergé donneroit des preuves de cette charité et de ce dévoûment dont les anciens temps nous offrent tant d'exemples. Il cite à cesujet, après saint Charles Borromée à Milan, et M. de Belzunce à Marseille, le dernier évêque de Toulon, M. Elléon de Castellane,

pendant son exil à Venise. Enfin le prélat exhorte à former, à cette occasion, des associations de charité là où elles n'existeroient pas

encore.

- Dans un mandement à l'occasion du choléra, M. l'évêque de Fréjus a ordonné des prières dans tout son diocèse. Une neuvaine a dû commencer le lundi de Pâque, dans toutes les paroisses, en l'honneur du Sacré-Cœur. Le présat exhortoit les fidèles à la prière et à la confiance en Dieu, en recommandant toutefois de ne négliger aucune des précautions indiquées par l'autorité.

- Un évènement fâcheux a porté le trouble dans l'église cathédrale de Marseille, le jour même du vendredi-saint. A six heures, pendant l'office du soir, un individu y est entré, et s'est promené le chapeau sur la tête. A cette bravade d'impiété, un cri d'indignation partit de toutes parts, et plusieurs jeunes gens accoururent pour inviter l'insolent à se découvrir. Au lieu de céder, le malheureux tira une épée qu'il cachoit dans une canne, et en porta plusieurs coups à une femme et au sacristain, qui sont blessés. On l'entraîna hors du lieu saint, et lui-même reçut des coups sur la tête et fut couvert de sang. On le mena dans cet état à l'Hôtelde-Ville, où il donna des signes de démence. Le juge d'instruction fut obligé de suspendre l'interrogatoire, à cause des incohérences et des divagations de ce misérable, qui est du département de la Haute-Vienne, et qui étoit depuis deux mois à Marseille, où il donnoit des leçons d'écriture. On dit qu'on avoit déjà remarqué le dérangement de sa tête.

- Dans la discussion qui a eu lieu le 19 avril dans la chambre des représentans de la Belgique, sur le budget du clergé, le ministre de l'intérieur a fait connoître le montant des dépenses pour cette partie. L'archevêque de Malines a 10,000 florins, et les évêques chacun 7,000. De plus, on leur accorde pour frais de tournée et de secrétariat de 500 à 2,000 florins, suivant l'étendue du diocèse. Dans chaque diocèse, il y a le traitement des grands-vicaires, des chanoines, des directeurs des séminaires, les bourses et demibourses des séminaires, les réparations et entretien du mobilier, et les dépenses diverses. A Gand, les bourses et demi-bourses vont à 10,000 florins. Les dépenses diverses sont de 6,000 florins pour Malines, et de 4,000 pour les autres diocèses. Le total de cette partie du buget est de 173,812 florins; les traitemens des curés, desservans et vicaires, montent 1,362,125 florins, et les frais d'entretien et de restauration des églises sont de 45,000 florins en tout, les dépenses du clergé catholique s'élèvent à 1,580,937 florins, et la commission de la chambre a proposé une augmentation de 21,500 florins, destinée aux frais de l'érection de l'évêché de Bruges, qui avoit été décidée en 1827, et qui est indispensable, vu l'immense étendue de l'évêché de Gand: l'augmentation a été

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