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Le saint vécut encore onze ans après son retour, et, malgré son grand âge, il ne voulut rien diminuer de ses austérités. L'humilité était, pour ainsi dire, sa vertu favorite. Voici deux traits qui feront connaître jusqu'où il portait cette vertu. Ayant vu un jour deux de ses moines qui disputaient ensemble, il se jeta à leurs pieds pour les conjurer de ne point rompre les liens de la charité, et il ne voulut se relever que lorsqu'ils furent parfaitement réconciliés. Une autre fois il se vit contraint de séparer de la communion un frère qui s'était rendu coupable d'une faute très-griève. Celui-ci, au lieu de se soumettre à la pénitence qu'il méritait, osa à son tour excommunier son supérieur. Théodose se conduisit comme si l'excommunication eût été valide, dans l'espérance que son disciple, dont il ne voulait que le salut, se laisserait toucher par l'exemple de sa soumission. L'événement répondit à ses désirs.

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La dernière année de sa vie, il fut affligé d'une maladie trèscruelle. Il la souffrit avec une patience héroïque, et une entière résignation à la volonté divine. Une personne, touchée de sa situation, lui ayant conseillé de s'adresser au ciel, afin d'obtenir quelque adoucissement à ses maux : « Non, non, répondit le saint ; une telle prière marquerait de l'impatience, et me ravirait ma couronne. » Quand il vit qu'il touchait à son dernier moment, il ranima ses forces pour donner encore quelques avis à ses frères. Il leur prédit ensuite plusieurs choses qui arrivèrent effectivement après sa mort. Enfin il s'endormit dans le Seigneur, l'an de Jésus-Christ 359, et le cent cinquième de son âge. Pierre, patriarche de Jérusalem, assista à ses funérailles avec les habitans de toute la contrée, et il se fit plusieurs miracles durant la cérémonie. Le corps du saint fut enterré dans sa première cellule, appelée la Caverne des Mages a. Un comte du palais qui marchait contre les Perses, à la tête de l'armée de l'Empire, demanda, comme une faveur, le cilice que Théodose portait durant sa vie ; ce qui lui fut accordé. Il se crut toujours redevable à cette précieuse relique de la victoire qu'il remporta sur les ennemis. La fête de S. Théodose est marquée au 11 de janvier dans tous les calendriers grecs et latins.

L'exemple des Nazaréens et des Esséniens parmi les Juifs, et celui de tant d'hommes parmi les Chrétiens, lesquels se sont sanctifiés dans la retraite, prouvent évidemment que Dieu appelle plusieurs de ses élus à la vie contemplative. S. Grégoire le Grand pense même qu'il est des âmes si susceptibles de mauvaises impressions, qu'elles n'ont, pour se sauver, d'autre voie que celle

a Parce qu'on croyait dans le pays que les Mages y avaient logé, lorsqu'ils vinrent adorer Jésus-Christ.

de la solitude. Cette vérité doit fournir une ample matière de réflexions à tous ceux qu'une triste expérience a convaincus de leur faiblesse, et qui ne se sentent point assez forts pour vaincre les charmes de ce monde corrupteur. Ils doivent imiter la conduite d'un guerrier prudent et habile qui, par une sage retraite, évite les occasions de combattre contre un ennemi trop puissant. L'obligation d'embrasser la vie solitaire regarde encore tous ceux qu'une vocation particulière destine à cet état. Qu'on prenne garde toutefois de se déterminer par des motifs étrangers au salut, tels que seraient l'amour du repos, et la fuite de cette gêne que l'on éprouve quelquefois dans le service du prochain. Il faut donc, avant de quitter le siècle, consulter la volonté du ciel, sonder tous les replis de son cœur et mesurer ses forces. Si, après toutes ces précautions, on ne trouve en soi qu'un ardent désir d'éviter les écueils contre lesquels on a si souvent fait naufrage, d'expier ses fautes par les pratiques austères de la pénitence, et de se sanctifier par les exercices de la contemplation, alors on ne doit plus balancer : c'est Dieu qui parle. Il ne reste plus qu'à lui demander la grâce de sortir victorieux de tous les dangers qui se rencontreront (car il n'est point d'état qui n'ait les siens), et de persévérer dans ses premières dispositions: grâce si nécessaire, que sans elle on se perdra infailliblement dans la solitude la plus retirée. Il faut encore avoir soin de s'entretenir dans cet esprit de ferveur qui est l'âme de la religion, et sans lequel toutes nos œuvres sont mortes et n'ont aucun prix aux yeux de Dieu. C'est par là que les vrais solitaires ont opéré leur salut; c'est par là que le peuvent opérer tous ceux qui embrasseront le même genre de vie.

S. HYGIN, PAPE ET MARTYR.

S. HYGIN monta l'an 139 sur la chaire de saint Pierre, vacante par le martyre de saint Télesphore. L'Eglise jouissait alors de quelque tranquillité; ce qui était une suite du règne pacifique de l'empereur Antonin le Pieux. Nous trouvons, il est vrai, plusieurs martyrs du temps même de ce prince; mais la plupart des cruautés que l'on exerçait alors contre les Chrétiens doivent être rejetées sur la fureur d'un peuple superstitieux, ou sur l'inhumanité de quelques magistrats particuliers. En effet, Antonin, quoique ennemi des Chrétiens, ne consentit que rarement aux procédes de rigueur. Il les défendit même par des lettres qu'il écrivit aux gou verneurs d'Asie, d'Athènes, de Thessalonique et de Larisse '. 1 Voyez Eusèbe, Hist. l. 4, c. 26.

Le démon, jaloux du calme qui régnaït dans l'Eglise, entreprit de le troubler. L'instrument dont il se servit fut Cerdon, qui cachait toute la cruauté d'un loup sous la douceur apparente d'un agneau. Cet hérésiarque quitta la Syrie, et prit la route de Rome, où il arriva vers le commencement du pontificat d'Hygin. Il se mit aussitôt à enseigner de monstrueuses erreurs, que Marcion adopta dans la suite, et répandit avec plus de succès ". Le saint pape, à la vigilance duquel rien n'échappait, découvrit ce monstre, et le sépara de la communion des fidèles. Cerdon feignit d'être repentant de ses fautes, rétracta ses impiétés, et fut reçu dans le sein de l'Eglise. Mais, comme sa pénitence n'avait point été sincère, il continua de dogmatiser, observant seulement de le faire en secret. Hygin, qui en fut instruit, l'excommunia une seconde fois '. Dans le même temps parut un autre hérésiarque nommé Valentin. C'était un philosophe platonicien, enivré de sa vaine science. Piqué de ce qu'on ne l'avait pas fait évêque 2, il se mit à renouveler plusieurs impiétés de Simon le Magicien, auxquelles il joignit d'étranges absurdités de son invention . Il publia ďabord ses erreurs à Alexandrie, d'où il vint à Rome quelque temps après. Le pape Hygin, informé de son extravagante doctrine, résolut d'en arrêter le cours. Mais il employa la voie de la douceur dans l'espérance de ramener Valentin, et de le gagner ainsi à Jésus-Christ. Ce fut là le motif qui le détermina à ne point faire usage à son égard de l'excommunication. C'était mal connaître cet hérésiarque. Jamais il ne voulut se rétracter, et S. Pie, successeur immédiat de S. Hygin, fut obligé de le chasser de l'Eglise la première année de son pontificat.

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S. Hygin mourut l'an 142, après avoir siégé près de quatre ans. Plusieurs anciens calendriers et le Martyrologe romain lui donnent le titre de martyr; ce qui peut être fondé sur les différentes persécutions qu'il eut à essuyer, et sur les périls auxquels sa place l'exposait dans ces temps orageux.

Voyez Tillemont, tom. 2, p. 252; Orsi, tom. 1; Berti, tom. 2 Chron.

a Cerdon enseignait qu'il y avait deux dieux; l'un rigoureux et sévère, qui était l'auteur de l'Ancien Testament; l'autre bon et miséricordieux, duquel venait le Nouveau Testament. Le second avait envoyé Jésus-Christ son fils pour délivrer les hommes de la tyrannie du premier Dieu. A cette impiété il en ajoutait une seconde. Selon lui, Jésus-Christ n'était pas né réellement de la vierge Marie, et il ne s'était revêtu de la chair qu'en apparence.

Par exemple, les trentes Eons ou siècles, qu'il disait être des divinités in. férieures. Il débitait les plus grandes extravagances sur ces Æons, ainsi que sur leur origine.

'S. Epiph. Hær. 41; Iren. l. 3, c. 4; Eusèb. etc.

2 Tertul. I. contra Valent. c. 4.

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S. SALVE, ÉVÊQUE D'AMIENS.

SALVE OU Sauve mena dans sa jeunesse une vie assez mondaine; mais, Dieu l'ayant touché, il distribua ses biens aux pauvres, et se retira dans un monastère qu'il fit bâtir sous l'invocation de la Ste Vierge et de S. Pierre. Après y avoir passé plusieurs années dans l'exercice de la prière et dans les austérités de la pénitence, il suivit le zèle qui le pressait, et se mit à prêcher la parole de Dieu, afin d'arracher les pécheurs à leurs désordres. Le succès de ses discours fut si prodigieux, qu'on l'éleva sur le siége d'Amiens pour remplacer S. Honoré, mort dans le septième siècle. Il justifia par sa conduite le choix qu'on avait fait de lui. On le vit toujours s'acquitter des fonctions épiscopales avec un zèle et une piété dignes d'un successeur des apôtres. Il mourut le 28 d'octobre.

Quelques siècles après, le corps de S. Salve fut transféré de la cathédrale d'Amiens à Montreuil-sur-mer, dans la basse Picardie, où il est encore aujourd'hui vénéré avec une grande dévotion. La cathédrale de Cantorbéry possédait une portion des reliques du même saint avant la ruine des monastères d'Angleterre 1. Le Martyrologe romain marque le nom de S. Salve au onzième jour de janvier, qui paraît avoir été celui de la translation de ses reliques. Sa fête était encore autrefois célébrée le 28 d'octobre dans plusieurs églises de France et d'Angleterre .

Voyez dans Bollandus la Vie de S. Salve, écrite par un auteur anonyme qui n'est pas très-ancien, et le Gallia Christiana nova, tom. 10, p. 1154.

Le Martyrologe romain honore encore en ce jour un S. Salve ou Salvius, martyr d'Afrique. S. Augustin a fait un sermon sur sa fête.

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S. EGWIN, ÉVÊQUE DE WORCESTER.

S. EGWIN était issu du sang des rois de Mercie. Il eut le bon heur de se consacrer au service de Dieu dès sa jeunesse. L'éclat de ses vertus l'ayant fait connaître, il fut élevé sur le siége de Worcester en 692. La généreuse liberté avec laquelle il reprenait le vice déplut à quelques pécheurs endurcis qui prirent de là oc

a En latin Salvius.

b C'est ce que nous apprenons d'un ancien catalogue des reliques qui étaient dans la cathédrale de Cantorbéry. Dart l'a donné dans son Histoire de cette église.

Il ne faut pas confondre S. Salve d'Amiens avec S. Salve évêque d'Albi. Ce dernier, connu encore sous les noms de Salvi et de Sauge, vivait dans le sixième siècle. Nous apprenons de S. Grégoire de Tours, que c'était un prélat d'une sainteté extraordinaire. Voyez sa Vic, au 10 de septembre.

TOME I.

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casion de le persécuter. Il employa le temps que dura la persé cution, à faire un pélerinage à Rome. Il revint dans son diocèse en 701, et fonda, avec l'aide de Kenred, roi de Mercie, la fameuse abbaye d'Evesham, sous l'invocation de la Ste Vierge. Il fit un second pélerinage à Rome, avec les rois Kenred et Offa a, qui renoncèrent au gouvernement de leurs états pour s'assurer plus efficacement une couronne immortelle. Le saint évêque mourut le 30 décembre 717, et fut enterré à Evesham. En 1183, on transporta son corps dans un lieu plus honorable. Il y a toute apparence que cette translation se fit le 11 de janvier, jour auquel la fête du saint est marquée dans plusieurs Martyrologes anglais.

Voyez la Vie de S. Egwin dans Capgrave; les annales de Worcester dans le Britannia sacra de Wharton; Guillaume de Malmesbury, l. 4 de Pontif. ang. Harpsfield, sec. 8, c, 15 et 18; Dugdale, Mon. anglic. tom. 1, p. 144, et tom. 2, p. 851; Leland, Collection, vol. 1, p. 240 et 298, et vol. 3, p. 160; l'Histoire des Abbayes, par M. Brown Willis, tom. 1, p. 90, et l'Histoire de la Cathédrale de Worcester, par M. Thomas.

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S. TETHVIN, RELIGIEUX A REDON,

XX" SIÈCLE.

Le Seigneur a voulu nous laisser dans ce saint homme un modèle de patience et de résignation dans les souffrances corporelles qu'il lui plaît quelquefois de nous infliger. A l'exemple de Job, S. Tethvin montra la plus grande soumission dans les épreuve? les plus délicates. Après une vie consacrée entièrement au service de Dieu, il fut affligé par une paralysie qui lui ôta l'usage des membres. Là, étendu sur un misérable grabat, le fervent disciple de Jésus crucifié souffrit un long et cruel martyre en expiation de ses fautes et de celles de ses frères. Le doux nom du Sauveur était sans cesse dans sa bouche, comme son amour était dans son cœur, comme sa loi régnait dans toutes ses actions. Sa résignation était si parfaite, qu'on n'entendit jamais une plainte sortir de sa bouche. On eût dit qu'il ne souffrait nullement. Vers la fin de ses jours il perdit encore l'usage de la parole. Ne pouvant plus alors produire d'actes extérieurs de piété, il demanda, par signe, qu'on placât en face de son lit une image de Jésus-Christ. C'était là son livre, son autel, son tout. Sans cesse occupé à contempler les plaies sanglantes du divin Sauveur, il puisa dans cette consi

a Ce dernier était roi des Saxons orientaux.

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