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tible, parce que Jésus-Christ a prié pour qu'elle ne faillît jamais; à S. Pierre, qui a reçu les clefs du royaume du ciel, et dont Dieu ratifie les jugemens, quoique portés sur la terre. Il presse encore ailleurs les mêmes argumens 2. C'est qu'en effet ils sont décisifs, et qu'il est impossible à l'hérésie d'en éluder la force. L'article de la divinité de Jésus-Christ est aussi traité avec une supériorité de lumières qui ne laisse aucune ressource aux Ariens. Le saint docteur la démontre par les miracles opérés aux tombeaux des apôtres et des martyrs, ainsi que par la vertu de leurs reliques; il la démontre encore3 par des faits éclatans et miraculeux que l'on ne peut révoquer en doute sans renoncer aux premiers principes, surtout par les affreux rugissemens que poussaient les démons, forcés de fuir en la présence des sacrés ossemens de ceux qui avaient répandu leur sang pour Jésus-Christ".

Le livre sur les Synodes, ou sur la foi des Orientaux, parut quelque temps après, c'est-à-dire l'an 358. Le but de cet ouvrage était d'expliquer les termes dont les Ariens se servaient, et de marquer toutes les variations de leur doctrine dans les différens synodes qu'ils avaient tenus.

Notre saint était encore en Phrygie, lorsqu'il apprit que sa fille Apra, qu'il avait laissée dans les Gaules, pensait à se marier. Il eût bien mieux aimé apprendre qu'elle voulait passer toute sa vie dans la virginité, qui est un état plus parfait que le mariage. Il ne désespéra pas cependant qu'elle ne pût obtenir cette grâce de JésusChrist; il se fit son intercesseur auprès de lui, et le conjura de mettre au nombre de ses épouses une fille dont il ne désirait rieu tant que la perfection. Sa prière fut exaucée, comme nous l'allons voir. Il écrivit à sa fille une lettre, où il lui marquait que, si elle était assez généreuse pour ne pas désirer un époux mortel, des habits magnifiques, et tout ce qui flatte la vanité des mondains, elle recevrait de Jésus-Christ une perle infiniment précieuse, dont elle ne pouvait même se former d'idée. « Pourriez-vous, lui disait-il › ensuite, désapprouver mes sentimens, et l'envie que j'ai de vous » voir conserver l'inestimable trésor de la virginité? Je ne veux » que votre bonheur, et que votre plus grand avantage. » Il joignit

L. 6, de Trinit. n. 37, 38, p. 904. In Ps. CXXXI, n. 4, p. 447, et in cap. 16 Matth., n. 7, p. 690.

L. 11 de Trinit, n. 3.

a On retrouve les mêmes argumens dans le livre de S. Hilaire contre Constance, n. 8, p. 1243, edit. Ben.

Nous l'avons encore. Elle est fort estimée des plus habiles critiques, tels que Baronius, Tillemont, Fleury, dom Coustant, etc. Le style en est simple et proportionné à l'âge d'une jeune fille de treize ans. Il était permis à un père de bégayer en quelque sorte avec sa fille. Nous apprenons de Fortunat, que de son temps, c'est-à-dire dans le sixième siècle, l'original de cette lettre se gardait précieusement dans l'église de Poitiers. C'est du même auteur que l'on sait qu'Apra suivit le conseil de son père, et mourut comme nous le rapportons.

à cette lettre deux hymnes; l'une pour le matin, l'autre pour le soir". Apra suivit le conseil de son père, et mourut saintement à ses pieds, quand il fut revenu de son exil.

Cependant l'empereur fit assembler à Séleucie, en Isaurie, un concile presque tout composé d'hérétiques. Son dessein était d'anéantir les canons de Nicée. S. Hilaire, alors dans la quatrième année de son exil, fut invité à ce concile par les Demi-Ariens, qui se flattaient de l'engager dans leur parti, et d'en tirer avantage pour confondre ceux qui enseignaient cruement la doctrine d'Arius. Il s'y rendit, et ne tarda pas à faire connaître qu'il était supérieur à toutes les considérations humaines; car il prit généreusement la défense de la foi, sans que rien fût capable de le faire mollir; mais quand il entendit les horribles blasphêmes que l'on proférait contre la divinité de Jésus-Christ, il se retira à Constantinople. Quoiqu'il y eût trouvé un prince faible, qui protégeait tourà-tour les Ariens et les Demi-Ariens, il ne laissa pas de lui présenter une requête, dans laquelle il lui demandait la permission d'avoir des conférences publiques avec Saturnin, l'auteur de son exil. Il l'exhortait fortement à se déclarer enfin pour la vraie doctrine, que les Ariens s'efforçaient d'obscurcir par leurs impiétés : passant ensuite aux variations continuelles de ces hérétiques, il raillait finement cette multitude de symboles contradictoires, qu'ils faisaient perpétuellement. « L'année dernière, ajoutait-il, ils en ont fait quatre; la foi n'est plus la foi des Evangiles, mais la foi des temps; ou plutôt, il y a autant de fois que de volontés, autant » de diversité dans la doctrine que dans les mœurs; autant de blasphêmes que de vices. Les Ariens, continuait-il, produisent » tous les ans, et même tous les mois, de nouveaux symboles, pour détruire les anciens, et anathématiser ceux qui y adhèrent1. Ils » ne parlent que d'Ecriture sainte et de foi apostolique; mais c'est » pour tromper les faibles, et pour donner atteinte à la doctrine » de l'Eglise. » Il finissait en conjurant ces hérétiques de rentrer dans le port dont les préjugés et l'esprit de parti les avaient éloignés, puisque c'était là l'unique moyen de faire cesser la confusion dans laquelle ils se trouvaient malheureusement plongés.

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a La seconde n'est point parvenue jusqu'à nous. Pour la première, on croit que c'est l'hymne Lucis largitor splendide, etc.

Ceux-ci prévalurent dans le concile de Séleucie, au mois de septembre de l'an 359, et ceux-là dans le concile tenu à Constantinople l'année suivante. Ils eurent même assez de crédit pour faire exiler les Demi-Ariens, quoique moins impies qu'eux.

Connue sous le titre de second livre à Constance. Facta est fides temporum, potiùs quàm evangeliorum, f. 2 ad Const. p. 1227. Tot nunc fides existere, quot voluntates, ibid.... annuas atque men

struas de Deo fides decernimus, decretis pœnitemus, defensos anathemati zamus, ibid. p. 1228.

Le défi que S. Hilaire proposait à Saturnin dans sa requête à l'empereur, alarma les Ariens; ils craignaient les suites d'une dispute qui ne manquerait pas de tourner au désavantage de leur cause. Ils engagèrent donc Constance à délivrer l'Orient d'un homme qui n'était, selon eux, qu'un brouillon et un perturbateur de la paix. Leurs vœux furent exaucés : le saint évêque de Poitiers fut renvoyé dans les Gaules, l'an 360 de Jésus-Christ. On ne révoqua pas toutefois la sentence qui précédemment avait été portée pour son exil.

Notre saint, en retournant dans son diocèse, traversa l'Illyrie et l'Italie, Partout il ranimait les Chrétiens faibles et chancelans dans la foi : enfin il arriva à Poitiers, où il fut reçu avec les démonstrations de la joie la plus vive. Tous les fidèles regardèrent comme un jour de triomphe celui auquel ils avaient eu le bonheur de revoir leur évêque. S. Martin, son ancien disciple, n'eut pas plutôt appris la nouvelle de son retour, qu'il accourut auprès de lui, afin de reprendre ses premiers exercices de piété sous la conduite d'un maître aussi habile.

e premier soin d'Hilaire fut de procurer un concile dans les Gaules". On y condamna les actes de celui de Rimini, qui avait omis le terme consubstantiel. On passa ensuite à l'examen du procès de Saturnin, qui fut excommunié et déposé, comme coupable d'hérésie et de plusieurs autres crimes. Ce concile produisit les plus heureux effets. Les scandales cessèrent; la foi fut rétablie dans toute sa pureté; la discipline de l'Eglise recouvra son ancienne vigueur; la paix succéda aux troubles, et la piété reparut dans toute sa ferveur. On n'avait plus rien à craindre de la persécution des Ariens, qui, en perdant l'empereur, perdaient leur principal appui. Ce fut alors que parut l'Invective de S. Hilaire contre Constance; il s'y sert d'expressions très - fortes, quoiqu'il fût d'une douceur extraordinaire. Apparemment qu'il n'en usait ainsi que pour de bonnes raisons, qui nous sont in

connues.

Le saint fit un voyage à Milan, en 364. Il y eut une dispute avec 'Auxence, qui avait usurpé le siége de cette ville, et il le força d'avouer publiquement que Jésus-Christ était véritablement Dieu, et consubstantiel au Père. Cet hérésiarque, qui joignait l'hypocrisie à l'impiété, présenta une confession de foi équivoque. L'empereur Valentinien s'y laissa prendre, et le crut catholique; mais S.Hilaire découvrit le mystère d'iniquité, et montra qu'Auxence

a L'opinion la mieux fondée est celle qui met ce concile en 361. Voyez Tillemont, tom. 8, p. 456.

b Constance mourut en 361.

était un fourbe qui déguisait ses vrais sentimens. Le succès ne répondit point à son zèle; car, les ennemis de l'Eglise l'ayant peint comme un homme qui troublait la paix, l'empereur lui donna ordre de sortir de Milan. Il fut donc obligé de revenir à Poitiers, où il mourut l'an 368. Sa mort arriva le 13 de janvier ou le 1er de novembre; car son nom est marqué à l'un ou à l'autre de ces deux jours dans des Martyrologes fort anciens ".

Le Bréviaire romain fait la fête de S. Hilaire le 14 de janvier, jour qui fut peut-être celui de quelqu'une des translations de ses reliques, La première se fit à Poitiers, sous le règne de Clovis Ier, si l'on en croit le P. Le Cointe1. Mais il paraît qu'une partie des mêmes reliques était honorée en Limousin avant la translation dont nous venons de parler 2. Au reste, les précieux ossemens de S. Hilaire étaient autrefois dans une grande vénération à Poitiers3, où l'on croit que les Huguenots les brûlèrent en 1561*. Mais il y a toute apparence que la fureur des hérétiques ne tomba que sur une partie des ossemens du saint, ou même sur la poussière restée dans son tombeau, car ses reliques furent transférées de Poitiers à l'abbaye de Saint-Denis en France.

Venance Fortunat, évêque de Poitiers, a donné un livre des miracles de S. Hilaire, qui a été ajouté à la Vie du même saint écrite par l'autre Fortunat. Nous trouvons aussi dans S. Grégoire de Tours, Flodoard, etc. le récit de plusieurs miracles opérés à son tombeau c.

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S. Hilaire remarque que la simplicité du cœur est la vertu la plus essentielle à un disciple de Jésus-Christ. « En effet, dit ce Père, le Sauveur nous assure que personne ne peut entrer dans » le royaume du ciel, s'il ne devient semblable à un enfant; et si, >> par la simplicité naturelle à cet âge, il ne déracine toutes les af» fections déréglées de son cœur. Que voyons-nous dans un enfant? » Il est soumis à la volonté de son père; il aime sa mère; il ne » connaît ni l'orgueil, ni la haine, ni l'avarice; il écoute avec do

a royez, après la Vie du saint, la notice de ses ouvrages.

Ceci se prouve par la tradition de l'abbaye de Saint-Denis, par le témoignage d'un moine de Richenów, qui écrivait dans le neuvième siècle ( Apud Mabil. Analect. tom. 4, p. 644), et par plusieurs autres monumens. Voyez Aimoin, l. 4, c. 17 et 33, et dom Coustant, Vit. S. Hilar. p 124, 125, 129.

Dom Coustant a donné ces pièces avec les oeuvres de S. Hilaire, qui furent imprimées à Paris en 1693, in-fol. et réimprimées à Vérone en 1730 par les soins du marquis Scipion Maffei, qui a ajouté quelques commentaires de S. Hilaire sur plusieurs Psaumes. On trouve aussi une belle lettre de S. Hilaire sur la divinité de Jésus-Christ, avec trois dissertations de l'abbé Trombelli, dans la collection imprimée en 1751 à Bologne, en Italie, sous le titre de Veterum Patrum Latinorum Opuscula numquam antehàc edita. Annal. Franc. ad an. 538, n. 41, Alcuin, Homil. de S. Willibrordo. ↑ Baillet, Vie de S. Hilaire.

422

43.

S. Grég. Turon. 1. de Gloria Con

fess. c. 2.

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cilité, et croit aisément les vérités qu'on lui enseigne. Heureux l'homme dont le cœur est dans cette disposition! il marche dans » la voie qui conduit au ciel. Revenons donc à la simplicité de l'en»fance, qui peut seule nous donner quelque ressemblance avec » un Dieu humilié1. » Voilà en quoi consiste la folie de la croix". C'est cette simplicité qui détruit en nous la prudence de la chair, et cette sagesse du monde, qui est le principe de l'orgueil, la source de l'infidélité, et l'ennemi irréconciliable de l'esprit de JésusChrist. C'est elle qui substitue à nos vices et à nos ténèbres cette prudence parfaite que produit l'assemblage de toutes les vertus, et cette lumière céleste qui est le fruit de la grâce. C'est elle qui nous inspire l'horreur de l'artifice et de la dissimulation, qui nous rend insensibles à nos propres intérêts, et qui nous fait mépriser toutes les attentions dont les partisans du siècle sont si jaloux. Dieu seul est le terme de tous ses désirs: elle ne se propose d'autre fin que de lui être parfaitement unie.

Ne cherchons que dans le défaut de cette simplicité les égaremens pitoyables où sont tombés les hérétiques, et l'affreuse opiniâtreté avec laquelle ils ont fermé les yeux aux lumières de la foi. C'est de la même source que viennent ces systèmes impies et extravagans qui font gémir tous les jours la religion, en même temps qu'ils heurtent les premières notions du sens commun. Les Pères de l'Eglise valaient bien nos prétendus philosophes, pour l'étendue des connaissances et pour la beauté du génie, et cependant ils vivaient dans cette enfance spirituelle recommandée par Jésus-Christ. Ils savaient, ces grands hommes, que Dieu ne se communique qu'aux humbles; que sa conversation n'est qu'avec les âmes simples; qu'il fait ses délices d'habiter en ceux qui marchent avec simplicité, et qu'il rejette tous ceux qui s'approchent de lui avec un cœur double®.

NOTICE DES OUVRAGES DE S. HILAIRE.

LES écrits qui nous restent de S. Hilaire sont 1o des Commentaires sur les Psaumes. Ils ne furent composés qu'après les livres de la Trinité, puisque ceux-ci sont cités dans l'explication du psaume 67. Cela n'a pas empêché qu'on ne les ait mis les premiers, à cause du respect qui est dû à nos saintes Ecritures. Le saint docteur s'applique à développer également la lettre et l'esprit des Psaumes, tenant un juste milieu entre ceux qui, ne s'arrêtant qu'au sens littéral et purement historique, croyaient n'en devoir point chercher d'autre, et ceux qui, rapportant tout à Jésus-Christ, s'imaginaient que les Psaumes n'avaient point de sens propre et littéral. Il paraît qu'il avait expliqué tout le Psautier; mais dom Coustant ne put recueillir qu'une partie de cet ouvrage dans

1 S. Hilar. in Matth. c. 18, v. 1, p. 698. 2 I Cor. 1, 17, et III, 18.

I Paral. xxix, 17.

4 Prov. III, 32.
Prov. XI, 20.
Eccli. 1, 39.

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