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de larmes, lui fit des excuses, et lui promit de ne plus écouter 'ceux qui seraient capables de pouvoir le porter à commettre des injustices. Le patriarche loua de si belles dispositions, puis ajouta que, pour lui, il n'avait nul égard aux rapports, jusqu'à ce qu'il eût bien examiné de quoi il s'agissait, et que sa coutume était de punir tous les délateurs, afin d'ôter aux autres l'envie de les imiter.

Non content de souffrir avec patience les injures personnelles, il travaillait encore de toutes ses forces à réconcilier ceux que la haine divisait. Voici le moyen dont il fit usage pour vaincre l'inflexibilité d'un grand seigneur qui ne voulait point pardonner à son ennemi. Il le pria un jour de le venir voir, et l'engagea à entendre la messe qu'il allait célébrer. Mais, comme ils récitaient tous deux l'oraison dominicale, le saint se tut à ces mots : Pardonnez-nous nos offenses, comme nous pardonnons à ceux qui "nous ont offensés, et le seigneur les dit seul. Il se tourna ensuite de son côté, et le conjura, par la sainteté du plus auguste de nos mystères, de réfléchir sur ce qu'il venait de dire. Le seigneur, qui ne s'attendait à rien moins qu'à ce trait, fut terrassé; il se jeta aux pieds du saint, et lui promit de se réconcilier avec son ennemi; ce qu'il fit effectivement.

Les jugemens téméraires étaient encore une matière sur laquelle notre saint donnait de fréquentes instructions à son troupeau. « Comment, disait-il, osons-nous juger les autres? Les cir>> constances sont si variées, qu'il est presque impossible que nous >> ne tombions dans l'erreur. C'est le devoir des magistrats de ju>> ger les coupables; notre devoir, à nous autres particuliers, c'est » de prendre leur défense. » Il confirmait cette doctrine par l'exemple de plusieurs personnes d'une sainteté éminente, que le monde avait condamnées sur de fausses conjectures. « Un moine, disait»il, avait amené à Alexandrie une femme juive qu'il avait gagnée » à Jésus-Christ. On l'accusa d'entretenir un commerce criminel » avec elle, et on le condamna en conséquence à être fouetté. Ce » saint homme, satisfait du témoignage de sa conscience, fut >> charmé de souffrir cette humiliation pour la gloire de Dieu, et » n'essaya pas même de faire son apologie. Mais son innocence » fut à la fin reconnue, et sa vertu brilla d'un nouvel éclat. » Bien des Chrétiens de nos jours doivent apprendre de là à être plus réservés dans les jugemens qu'ils portent du prochain.

Notre saint se montra toujours très-zélé pour la conservation du dépôt de la foi. Il s'appliquait en même temps, et à prémunir les fidèles contre le poison de l'erreur, et à ramener à l'unité les ennemis de l'Eglise. Il eut le bonheur, avec l'aide de Sophrone et

de Jean Mosch ", de purger son diocèse de toute doctrine étrangère, et de convertir plusieurs hérétiques, entre autres les Sévé riens. C'était surtout par la douceur qu'il venait à bout de tant de choses. Il ne faut pourtant pas croire que cette douceur dégénérât en mollesse. Le saint ne manquait point de fermeté dans l'occasion, et il en donna des preuves toutes les fois qu'il fut question de maintenir le bon ordre. Ayant appris que plusieurs personnes avaient coutume d'aller causer hors de l'église pendant une partie de l'office, qui était alors beaucoup plus long qu'aujourd'hui, il les suivit un jour, et vint s'asseoir au milieu d'eux. Et comme ceux-ci paraissaient fort étonnés de sa conduite, il leur dit: «< Mes enfans, il faut que le pasteur soit avec ses brebis. » Les coupables, pénétrés d'une confusion salutaire, sentirent leur faute, et n'y retombèrent plus.

Nicétas ayant persuadé à notre saint qu'il devait une visite à l'empereur, ils partirent tous deux pour Constantinople; mais ils se séparèrent à Rhodes, à l'occasion d'une vision qu'eut le patriarche touchant la proximité de sa mort. « Vous m'invitez, dit-il » à Nicétas, de rendre une visite à l'empereur : je ne le peux, » parce que le Roi du ciel m'appelle à lui. » Il passa en Chypre, et mourut à Amathonte quelque temps après, c'est-à-dire vers l'an 619. Il était dans la soixante-quatrième année de son âge, et la dixième de son épiscopat. Son corps fut ensuite porté à Constantinople, où il a été gardé long-temps. L'empereur des Turcs en fit présent à Matthias Huniade, roi de Hongrie, qui le mit dans sa chapelle, à Bude. En 1530, il fut transféré à Tall, près de Presbourg; et en 1632, dans la cathédrale même de Presbourg, où il est encore, selon Bollandus. Les Grecs honorent S. Jean l'Aumônier le 11 de novembre, jour de sa mort. Le Martyrologe romain en fait mémoire le 23 de janvier, jour auquel on place la translation de ses reliques'.

S. BARSIMÉE, ÉVÊQUE ET MARTYR.

CE saint, appelé Barsaumas par les Syriens, fut le troisième évêque d'Edesse depuis saint Thadée, l'un des soixante-douze disciples du Sauveur. Son zèle à prêcher la foi aux idolâtres lui coûta la vie. Le président Lysias le condamna à mort en 114, sous le règne de l'empereur Trajan, qui, après avoir passé l'Euphrate, a Ils écrivirent la Vie de notre saint: mais elle n'est point venue jusqu'à

nous.

Voyez Bollandus, qui ne parle que d'après un Ms. qu'il cite.

fit la conquête de la Mésopotamie. Il est nommé le 30 de janvier dans le Martyrologe romain et dans le Ménologe des Grecs."

Ste MARTINE, VIERGE ET MARTYRE.

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CETTE sainte était d'une des plus illustres familles de Rome, où elle scella l'effusion de son sang, foi sa par dans le troisième siècle. Son culte est très-ancien dans cette ville, et nous voyons que, du temps de S. Grégoire le Grand, les fidèles visitaient avec dévotion la chapelle consacrée à sa mémoire. En 1256, le pape Alexandre IV dédia une église sous son invocation. On fit, en 1634, la translation de ses reliques, trouvées dans les ruines de son ancienne église. Urbain VIII, qui siégeait alors, en fit bâtir une magnifique en l'honneur de la sainte, dont il inséra l'office dans le Bréviaire romain. Il voulut composer lui-même les hymnes de cet office. Ste Martine est une des patrones de la ville de Rome. Elle est nommée dans les Martyrologes d'Adon, d'Usuard, etc. L'histoire de la découverte de ses reliques a été publiée par le P. Honorat de Viterbe, oratorien. Voyez Bollandus

Ste ALDEGONDE, VIERGE ET ABBESSE.

ALDEGONDE etait fille de Walbert, sorti de la maison royale de France, et naquit dans le Hainaut, vers le commencement du septième siècle. Les alliances illustres qu'on lui proposa ne purent jamais lui faire quitter la résolution qu'elle avait prise de consacrer à Dieu sa virginité. Elle vécut en véritable épouse de JésusChrist, dans la maison paternelle, qui était le château de Courtsore ou Coursolre. Ses parens, touchés de ses discours et de ses exemples, détachèrent entièrement leurs cœurs de l'amour du siècle, et distribuèrent leurs biens aux pauvres et aux églises. Après la mort de son père et de sa mère, elle alla trouver à Haumont S. Amand, ancien évêque de Maestricht, et S. Aubert, évêque de Cambray, qui lui donnèrent le voile en 661. Elle se retira ensuite dans le bois de Malbode, où elle fonda, sur la Sambre, le monastère de filles dit aujourd'hui de Maubeuge ", dont elle fut la première abbesse. Dieu lui communiqua l'esprit de prière dans

a L'acte de cette fondation, publié par Le Mire, est une pièce supposée, puisqu'il y est fait mention de personnes qui ne vivaient pas dans ce temps-là. Il est faux encore que cet acte soit de la vingtième année de Dagobert : nous y lisons des faits qui ne peuvent se concilier avec l'histoire de ce prince. Voyez la notę de Bollandus, tom. 2, p. 1039, et Chastelain, p. 461.

TOME I

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un degré éminent, et la favorisa de plusieurs révélations. Sa reputation ayant été attaquée par la calomnie, elle fit un bon usage de cette épreuve, et pria même Dieu de lui en envoyer encore de plus rudes. Sa prière fut exaucée, car il lui vint au sein un cancer qui lui causa les douleurs les plus vives. Elle les souffrit, ainsi que les opérations des chirurgiens, avec une patience héroïque. Enfin elle alla recevoir la récompense de ses vertus le 30 de janvier 680, selon Bollandus. La châsse qui renfermait ses reliques était dans l'église des chanoinesses de Maubeuge, qui avaient été substituées aux religieuses. Le nom de Ste Aldegonde se trouve en ce jour dans l'ancien Bréviaire d'Autun, dans le Martyrologe romain, et dans ceux de Raban, d'Usuard et de Notker; il y avait une église paroissiale dédiée sous son invocation à SaintOmer, où le peuple l'appelle Ste Orgonne.

Voyez les trois anciennes Vies de notre sainte. La première fut écrite peu de temps après sa mort, et la seconde dans le huitième siècle. Hucbaud, moine de Saint-Amand, donna la troisième en 900. Le P. Mabillon, Act. Ben. tom. 2, p. 934, et les Bollandistes l'ont publiée avec de savantes remarques. Voyez encore les Fasti Belgici de Le Mire, et la Vie de Ste Aldegonde, par le P. Binet, jésuite. Paris, 1625, in-12.

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S. ALEAUME, MOINE DE LA CHAISE-DIEU,

PUIS ABBÉ DE SAINT-JEAN DE BURGOS EN ESPAGNE.

S. ALEAUME a, né à Loudun en Poitou, porta les armes dans sa jeunesse. Devenu, par la mort de son père et de sa mère, maître d'une fortune considérable, il vendit tout ce qu'il possédait, et le distribua aux pauvres; il partit ensuite avec un seul domestique, encore le renvoya-t-il quand il fut en Auvergne. Etant à Issoire, il rencontra le B. Robert, premier abbé de la Chaise-Dieu, auquel il communiqua le dessein qu'il avait de faire un pélerinage à Rome. Il le fit nu-pieds, et joignit aux fatigues du voyage des austérités extraordinaires. Après avoir satisfait sa piété, il revint à la Chaise-Dieu, comme il l'avait promis au B. Robert, et entra dans ce monastère. Il y vécut dans la pratique la plus parfaite de l'humilité, de la mortification et de l'obéissance. On l'élut maître des novices, et on l'éleva, malgré lui, au sacerdoce. Il n'est pas certain qu'il ait été abbé de la Chaise-Dieu, comme quelques auteurs l'ont avancé. Constance, femme d'Alphonse VI, roi de CasEn latin, Adelelmus. Les Espagnols l'appellent S. Elesme, S. Olesme, S. Lesmes,

tille et de Léon, informée de sa sainteté et de ses miracles, trouva le moyen de l'attirer dans ses Etats, pour les purger de l'infidélité des Maurés, et y établir la vie monastique dans toute sa pureté. Elle lui donna des fonds suffisans pour bâtir un hôpital près de Burgos, avec un monastère dont il fut le premier abbé, et dans lequel il mourut, vers l'an 1100. Son corps fut enterré dans l'église de son abbaye, dédiée sous l'invocation de S. Jean. On le transporta, en 1480, dans une église paroissiale, hors de la ville, laquelle porte le nom du saint. Il est honoré en ce jour à Burgos, avec le titre de patron.

Voyez sa Vie, par Yepès et Mariette, qui ont suivi une Vie manuscrite du saint, composée par un auteur contemporain; Baillet, sous le 30 de janvier, et Chastelain, not. sur le Mart. rom. p. 464.

Ste HYACINTHE MARISCOTTI, VIERGE.

CETTE sainte fille est un exemple de ce que peut une volonté forte soutenue par. la grâce, lorsque celle-ci s'empare d'une âme, et y domine souverainement. Hyacinthe était fille de Marc-Antoine Mariscotti, comte de Vignanelle, et d'Octavie Orsini. Elle reçut le jour en 1588, et fut nommée Clarisse à son baptême. Elle fut élevée dans un couvent, et ne laissa pourtant point de s'occuper de vanités, d'attacher son cœur au monde et d'en aimer les folies. Elle vit avec un sensible chagrin que sa sœur cadette, Hortense, fût recherchée avant elle en mariage par le marquis de Capizucchi, et conçut un tel dépit de cette préférence qu'elle tomba dans une sombre mélancolie. Son père, pour dissiper le chagrin de cette fille si vaine, lui proposa d'entrer dans le monastère où elle avait été élevée. Clarisse y consentit, quoiquelle n'eût nulle envie de se faire religieuse. Ce monastère était situé à Viterbe, et appartenait au tiers-ordre de S. François. Après le temps d'épreuve auquel on soumet les novices, la fille du comte Mariscotti prit le

voile.

Religieuse de nom sans l'être de cœur et d'inclination, Hyacinthe (c'était le nom qu'elle avait pris en religion) continua de vivre comme si elle était encore dans le monde : elle se fit construire un appartement particulier, qu'elle meubla avec luxe, et scandalisa sa communauté par cet esprit mondain qu'elle afficha toujours sans beaucoup se soucier d'acquérir les vertus de son nouvel état. Un jour, sa sœur, nouvellement mariée, alla la voir et lui présenta une superbe bague enrichie d'un diamant. Hyacinthe

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