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nous ne puissions remplir les devoirs que nous imposent les bien

cieux. Voilà l'origine de ces réjouissances profanes du premier jour de l'an, des Rois et du Carnaval, auxquelles tant de chrétiens ne rougissent pas de se livrer. Plusieurs conciles les ont sévèrement condamnées. Nous apprenons de S. Isidore de Séville, . 2 de Offic. c. 40, et d'Alcuin, l. de div. Offic. etc. que quelques églises ordonnèrent un jeune pour le 1er janvier, afin de réprimer plus efficacement ces abus. Dom Martenne observe, de Eccl. Discip. in celebr. div. Offic. c. 13, que le deuxième concile de Tours, tenu en 566 ou 567, ordonna, pour la même raison, de chanter les litanies le propre jour de la Circoncision, et de ne commencer la messe qu'à la huitième heure, c'est-à-dire à une heure et demie après midi, de manière qu'elle ne finît qu'à trois, comme cela se pratiquait dans les jours de station. On voit par les ouvrages des SS. PP. qu'ils s'élevaient avec zèle contre les excès qui se commettaient dans le même temps. Voyez S. Augustin, Serm. in Cul. Jan. S. Pierre Chrysologue, Serm, in Calend. S. Maxime de Turin, Hom. V, ap. Mabil. in Museo Ital. l'évêque Faustin, ap: Bolland. hdc die, etc.

Il faut dire aussi un mot des étrennes. Les Strena ou étrennes, signifiaient chez les anciens des présens faits en l'honneur de la déesse Strenia. Dans le Poitou et le Perche, pays autrefois habité par les Druides, on exprime la même choses par des termes qui font visiblement allusion aux superstitions de ces prêtres idolâtres. Les Poitevins disent Auguilanneuf pour Etrennes ; et les Percherons, Eguilans. Ces deux mots viennent de l'ancien cri des Druides: ad viscum annus novus, c'est-à-dire au gui l'an neuf. On sait que le premier jour de l'année, les Druides allaient chercher du gui dans les forêts de chênes. Voyez les notes de Chastelain sur le Martyrol. rom. p. 7.

L'usage où l'on est aujourd'hui en Europe de commencer l'année au 1er janvier n'a pas toujours subsisté. Parmi les anciens, les uns la commençaient å l'équinoxe du printemps; et les autres, à l'équinoxe de l'automne. Du nombre de ces derniers étaient les patriarches. Le premier mois de leur année était celui que les Hébreux appellent Tisri, et qui répondait à une partie de nos mois de septembre et d'octobre. Il est assez probable que le monde avait été créé en ce temps-là, puisque, selon le récit de la Genèse, 1, 2, la terre était alors couverte d'arbres, de plantes et de fruits dans un état parfait de maturité. Les Juifs, qui avaient retenu des patriarches cette sorte d'année, s'en servaient pour la date des contrats et des autres actes publics, ainsi que pour la supputation des années sabbatiques et jubilaires. Mais Dieu leur ordonna de commencer l'année ecclésiastique, c'est-à-dire celle qui réglait la célébration des fêtes, à l'équinoxe du printemps, ou au mois Nisan, qui répond à une partie de nos mois de mars et d'avril. Les premiers chrétiens ont varié beaucoup dans la manière de commencer l'année. Ceux-ci la commençaient le 25 de mars, ceuxlà le jour de Noël, et d'autres le 1er janvier.

L'année Julienne, ainsi appelée de Jules-César, qui réforma le calendrier romain, était de 365 jours 6 heures; ce qui excédait l'année solaire de 11 minutes; car il est certain, par le calcul des astronomes, que la révolution annuelle du soleil n'est que de 365 jours 5 heures 48 minutes et 37 secondes, selon Cassini, ou 57 secondes, selon Keil; ce qui fait à peu près 49 minutes. L'excédant de ces 11 minutes occasiona dans l'année Julienne une erreur qui devenait tous les jours plus sensible; en sorte qu'à la longue tout aurait été bouleversé. Le nombre d'or, ou cycle grec, composé d'années lunaires, était également défectueux. Pour remédier à tous ces inconvéniens, Grégoire XIII réforma le calendrier en 1582, et établit ce qu'on appelle le nouveau style. On pourrait, comme l'ont observé Scaliger, Tacquet et Cassini, avoir des cycles encore plus exacts de quelques secondes; mais on s'en est tenu à celui qui à été adopté par Grégoire XIII, comme étant le plus facile, sans être d'ailleurs sujet à de grands inconvéniens. L'empereur Rodolphe écrivit le 4 septembre 1583 à tous les évêques d'Allemagne, de faire recevoir le calendrier grégorien dans leurs diocèses. Il fut adopté l'année suivante par tous les Etats catholiques d'Alsace. Mais les Etats protestans, ainsi que Strasbourg, refusèrent de le recevoir. Il fut enfin introduit dans cette ville en 1682, en vertu d'un ordre de Louis XIV. Voyez M. l'abbé Grandidier, Essais hist. et crit. sur l'égl. cathéd. de Strasbourg, liv. 1, p. 114 et 150.

L'Angleterre n'a point voulu non plus pendant long-temps de la correction du vieux style: mais elle y a été enfin reçue en 1752, par un acte du parlement. On en est redevable aux comtes de Chesterfield et de Macclesfield, qui ont fait tant d'honneur à la république des lettres. On trouvera un traité abrégé du calendrier, dans une note à la fin de la vie de Ste Thérèse, sous le 15 d'octobre.

séances de notre état; mais pensons avant tout à prier Dieu de répandre sés bénédictions sur tous les instans de l'année dans laquelle nous entrons, afin que nous ne fassions rien qui puisse déplaire à son infinie majesté. Remercions-le de tous les bienfaits dont il nous a comblés, et spécialement, de ce qu'il nous accorde, pour faire pénitence, un temps qui a été refusé à une multitude de pécheurs beaucoup moins coupables que nous. Gémissons sur nos fautes passées; remontons à la source de nos infidélités, afin de les réparer et de nous précautionner contre les rechutes. Evitons de nous en tenir à ces résolutions vagues et générales dont nous avons si souvent éprouvé l'insuffisance; c'est un écueil d'autant plus dangereux, que l'on s'en défie moins.

Notre piété cependant serait encore imparfaite, si elle se bornait à la réformation de notre vie passée; il faut de plus qu'elle embrasse notre avancement dans la perfection. Chaque année, chaque jour même, la ferveur de notre charité doit s'accroître; notre âme doit acquérir de nouvelles forces et paraître de plus en plus ornée de vertus et de bonnes œuvres. De même qu'une plante qui cesse de croître est en danger de périr, ainsi, dans l'ordre surnaturel, une âme est en danger de se perdre lorsqu'elle n'avance point dans le sentier de la vertu.

Redoublons donc de zèle à mesure que nous approchons de la fin de notre course, et de ce grand jour où chacun sera traité selon ses œuvres. Le moment de notre mort est peut-être moins éloigné que nous ne pensons. Il est incertain si nous verrons la fin de cette année. Une infinité d'hommes, qui actuellement ne s'occupent pas plus que nous de cette vérité, en feront une triste expé rience. Craignons une surprise dont les conséquences sont terribles et irréparables. Préparons-nous au compte exact et rigoureux que le Seigneur nous demandera; veillons, pour n'être pas trouvés endormis lorsqu'il viendra frapper à la porte, et surtout implorons le secours de la grâce, sans laquelle nous ne pouvons rien faire. Veillez, dit Jésus-Christ à chacun de nous, veillez et priez en tout temps, afin que vous méritiez de comparaitre avec confiance devant le Fils de l'Homme.

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S. FULGENCE, ÉVÊQUE DE RUSPE EN AFRIQUE,

DOCTEUR DE L'ÉGLISE.

Tiré des ouvrages du̟ saint, et de sa vie écrite par un homme fort habile qui fut son disciple et son compagnon inséparable, et qui dédia son ouvrage à Félicien, successeur immédiat de Fulgence sur le siége de Ruspe. Les critiques modernes qui prennent cet auteur pour Ferrand le Diacre se trompent visiblement, puisqu'il est clair, par son ouvrage même, qu'il était moine. Voyez Ceillier, tom. 16,

L'AN 533,

FULGENCE a sortait d'une illustre famille, qui avait occupé une place distinguée dans le sénat de Carthage, mais qui, depuis l'invasion des Vandales, était beaucoup déchue de son ancienne splendeur. Claude, son père, qu'on avait injustement dépouillé de sa maison de Carthage, pour la donner aux prêtres ariens, alla s'établir à Télepte, ville considérable de la Byzacène. Ce fut là que notre saint naquit, en 468, environ trente ans après que les Vandales eurent démembré l'Afrique de l'empire romain. Mariane, sa mère, qui devint veuve de bonne heure, se chargea du soin de lui former le cœur sur les grandes maximes de la piété chrétienne; pour la culture de son esprit, elle la confia à des maîtres habiles qui lui enseignèrent le grec, le latin, et les différentes parties de la littérature. La rapidité de ses progrès fut étonnante; il acquit surtout une connaissance parfaite de la langue grecque, et il la parlait avec autant de facilité que de pureté.

Malgré l'application que Fulgence donnait à l'étude, il ne laissa pas d'entrer dans le maniement de ses affaires domestiques, pour soulager sa mère, qui était excessivement surchargée. Ce fut alors que ses heureuses dispositions se développèrent. Une prudence consommée, dont il donnait des preuves en toute occasion, une conduite vertueuse, une douceur admirable envers tous ceux qui avaient à traiter avec lui, et surtout une tendre déférence pour sa mère, sans l'ordre ou l'avis de laquelle il n'entreprenait jamais rien, le firent aimer et admirer de tous ceux qui le connaissaient. Un mérite aussi distingué ne pouvait rester long-temps caché. On jeta les yeux sur lui pour la place de procurateur ou receveur-général des impôts de la Byzacène. Mais à peine fut-il revêtu de cet emploi, qu'il se dégoûta du monde. Justement alarmé des dangers qu'il y courait, il fortifiait son âme par de pieuses lectures, par une prière continuelle, par des jeûnes rigoureux et par la visite fréquente des monastères. La lecture d'un sermon de S. Augustin', a Fabius Claudius Gordianus Fulgentius. C'est le sermon Sur le XXXVI psaume.

şur la vanité du monde et sur la brièveté de la vie, acheva de briser les liens qui l'attachaient au siècle, et lui inspira le désir d'embrasser la vie monastique.

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Huneric, roi des Vandales, infecté de l'hérésie arienne, avait chassé de leurs siéges la plupart des évêques catholiques. Fauste, l'un d'entre eux, avait bâti un monastère dans la Byzacène : ce fut à lui que s'adressa Fulgence pour l'exécution de son dessein. Il le pria donc de le recevoir au nombre de ses disciples. Mais Fauste prit occasion de la délicatesse de son tempérament pour le refuser; il lui répondit même par des paroles qui avaient quelque chose de dur et de rebutant.« Allez, lui dit-il, allez premièrement apprendre à mener dans le monde une vie détachée des plaisirs. Est-il croyable qu'ayant été élevé dans la mollesse et dans les dé» lices, vous puissiez tout-à-coup vous faire à la pauvreté de notre » genre de vie, à la grossièreté de nos habits, à nos veilles et à nos jeûnes?» Fulgence, les yeux baissés, répliqua modestement : « Celui qui m'a inspiré la volonté de le servir, peut bien aussì me » donner le courage nécessaire pour triompher de ma faiblesse. » Fauste, frappé de cette réponse, ferme et humble tout à la fois, consentit à l'admettre pour l'éprouver. Fulgence avait alors vingt-deux ans. Le bruit de sa retraite surprit et édifia en même temps toute la province, où il se trouva bientôt plusieurs imitateurs de sa conduite.

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Aussitôt que Mariane en fut informée, elle courut au monastère, tout en pleurs, et se mit à crier à la porte : « Fauste, rendez-moi >> mon fils; rendez à la province son procurateur. L'Eglise fut toujours la protectrice des veuves: comment donc avez-vous la cruauté de m'arracher mon fils? » Elle continua ses cris et ses larmes plusieurs jours de suite, sans que les pressantes raisons alléguées par Fauste pussent calmer sa douleur. La résolution de Fulgence fut mise sans doute à une rude épreuve. Mais l'ascendant que l'amour divin avait pris dans son cœur le rendit supérieur aux mouvemens de la nature, qui ne doivent jamais contre-balancer "obéissance due à la voix du ciel.

Fauste, assuré de la vocation du jeune novice, le reçut dans sa communauté, et le recommanda aux frères. Fulgence, désormais au comble de ses vœux, ne s'occupa plus que des choses du ciel. Il laissa son bien à sa mère, afin qu'elle en prît l'administration, jusqu'à ce que son jeune frère, à qui il devait revenir, fût en âge de le régir lui-même. Les pratiques de la pénitence la plus austère faisaient toutes ses délices. Il s'interdit absolument l'usage du vin, de l'huile, et de tout ce qui peut piquer le sens du goût. Enfin, ses mortifications allèrent si loin, qu'elles lui causèrent une maladie dangereuse; il n'en diminua cependant rien après le réta blissement de sa santé.

La persécution s'étant rallumée, Fauste fut obligé de prendre la fuite; et Fulgence, par son avis, se retira dans un monastère voisin. Félix, qui en était abbé, sentit tout le prix de l'acquisition qu'il venait de faire. Aussi voulut-il céder à Fulgence le gouvernement de sa communauté. Le saint, effrayé par les dangers d'une place si importante, refusa de s'en charger; mais à la longue on vint à bout de le déterminer à en partager les fonctions avec Félix. Rien de plus admirable que le concert avec lequel ces deux saints gouvernèrent le monastère pendant six ans. Jamais il n'y eut de division parmi eux; chacun étudiait la volonté de son collègue pour s'y conformer. Félix était chargé du temporel, et Fulgence de l'instruction.

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La paix dont les deux abbés jouissaient fut troublée quelque temps après par une incursion des Numides, qui ravagèrent tout le pays. Forcés de sortir de leur monastère, ils se réfugièrent à Sicca-Vénéria, ville de la province proconsulaire d'Afrique. Un prêtre arien du voisinage, informé qu'ils enseignaient la consubstantialité du Verbe, les fit arrêter et les condamna à être frappés rudement. Les bourreaux s'étant saisis de Fulgence, Félix leur cria « Epargnez mon frère, que la faiblesse de sa complexion » met hors d'état de souffrir ce supplice. Tournez votre colère » contre moi qui suis fort et robuste. » Le prêtre leur ordonne de commencer par Félix, qui reçoit les coups dont on le charge, avec autant de joie que de patience. On tombe ensuite sur Fulgence avec une cruauté inouie. Epuisé de force, et près de succomber sous la violence du mal, il s'écrie qu'il a quelque chose à dire au prêtre. Son dessein était de se ménager par là quelques momens de relâche. Le prêtre, ne doutant point qu'il ne voulût abjurer sa foi, ordonne aux bourreaux de cesser; mais il ne tarde pas à être détrompé. Honteux d'avoir paru oublier sa cruauté, il entre dans de nouveaux transports de rage, et commande de redoubler les tourmens. Non content de cette barbarie, il fait raser les cheveux et la barbe aux deux confesseurs meurtris de coups, puis les dépouille ignominieusement et les renvoie dans un état affreux. Les Ariens eux-mêmes en furent indignés, et leur évêque offrit à Fulgence de punir le prêtre, s'il l'exigeait. Le saint répondit que la vengeance était interdite au chrétien, et que pour eux ils ne perdraient, ni le fruit de leur patience, ni la gloire d'avoir souffert des opprobres pour Jésus-Christ. Les deux abbés, pour se soustraire désormais à la fureur des hérétiques, se retirèrent à Ididi, sur les frontières de la Mauritanie.

Fulgence, animé du désir d'une plus haute perfection, s'embarqua à Alexandrie, pour aller visiter les déserts de l'Egypte, renommés par la sainteté des anciens solitaires qui les avaient

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