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vail desquels nous avons le plus profité. Nous mettrons à la tête les savans Bollandistes qui ont publié les Acta Sanctorum avec des notes critiques et des dissertations fort curieuses. Viennent ensuite Mabillon et Bülteau, qui ont si bien fait connaître les saints de l'ordre de SaintBenoît; D. Le Nain et le P. Touron, auxquels on doit les Vies des Saints des ordres de Citeaux et de Saint-Dominique; M. de Tillemont, qui nous a laissé d'excellens Mémoires sur l'histoire ecclésiastique des six premiers siècles; le cardinal Orsi, qui a si parfaitement réussi à peindre les principaux Pères de l'Eglise; Dom Thierri Ruinart, éditeur des Acta sincera Martyrum, qui ont été tirés des registres publics, ou composés d'après les relations de témoins oculaires et dignes de foi;' MM. Etienne Evode et Joseph Assémani, auxquels nous sommes redevables des Acta Martyrum Orientalium et Occidentalium, de la Bibliothèque Orientale, etc. a. Nous ne pousserons pas plus loin cette liste. Il suffira de renvoyer aux citations répandues dans le corps de l'ouvrage.

Nous avertirons toutefois, en finissant, que nous avons surtout pris pour guides les auteurs originaux. Un ruisseau est toujours pur à sa source; ce n'est qu'à mesure qu'il s'en éloigne, qu'il se charge de corps étrangers.

le feu d'un incendie ayant fait fondre la matière visqueuse qui tenait les feuilles collées ensemble, elles se sont tellement retirées et tortillées, qu'on n'y peut plus rien lire.

Nous ne disons rien des hagiographes français, parce qu'ils sont connus de tout le monde. Nous observerons seulement que quelques-uns ont gâté leurs ouvrages, d'ailleurs fort utiles, en donnant dans les écarts d'une critique fausse et dangereuse.

a Les Actes des martyrs d'Orient (de Perse) et d'Occident ( de la Palestine) furent imprimés à Rome en 1748, vol. in-fol. Les premiers ont pour auteur S. Maruthas, évêque voisin de la Mésopotamie. Les seconds paraissent être l'ouvrage entier qu'Eusèbe avait composé sur les martyrs de la Palestine, et dont il a donné un abrégé dans le huitième livre de son Histoire ecclésiastique. M. Etienne-Evode Assémani, archevêque d'Apamée, les a publiés d'après un manuscrit chaldaïque, trouvé dans un monastère de la haute Egypte. Il avait apporté d'Orient cette importante pièce, ainsi que plusieurs autres manuscrits précieux, qui furent achetés par l'ordre et aux dépens du pape Clément XII. Le même savant a eu part à la dernière édition des couvres de S. Ephrem. M. Joseph-Simonius Assémani est oncle du précédent, et premier préfet de la bibliothèque du Vatican. Outre la Bibliothèque Orientale, il a donné encore au public d'autres ouvrages très-intéressans, dont les principaux sont les Italica Historia Scriptores, et les Calendaria Ecclesiæ Universæ, notis illus

trata.

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NOTICE SUR LA VIE D'ALBAN BUTLER.

Alban Butler était le second fils de Simon Butler, ecuyer, d'Appletree dans le comté de Northampton. Il fut envoyé de bonne heure à l'école dans le comté de Lancastre, et montra dès-lors beaucoup d'application pour l'étude. A l'âge de huit ans, on l'envoya au college anglais à Douai. Il perdit, vers ce temps, son père et sa mère; celle-ci adressa, en mourant, à ses enfans, les conseils les plus sages et les plus chrétiens dans une lettre que M. Charles Butler nous a conservée. Un pieux Anglais, M. Holmann de Warkworth, paraît avoir fourni aux frais de l'éducation du jeune Alban. Celui-ci s'appliqua avec ardeur à l'étude; il lisait beaucoup et il faisait des extraits de ses lectures. Quand il eut achevé ses classes, on l'admit comme alumnus du college de Douai, et on le chargea d'enseigner la philosophie, puis la théologie. Il entra dans les ordres, et il reçut la prêtrise à vingt-quatre ans. Il ne se distinguait pas moins par sa piété que par son exactitude à ses devoirs de professeur. Non content des fonctions qu'il remplissait dans la maison, il visitait les hôpitaux militaires de la ville, et assistait les soldats irlandais qui s'y trouvaient. Son zèle eut à s'exercer en ce genre après la bataille de Fontenoy, lorsqu'on amena à Douai beaucoup de prisonniers anglais. Il leur rendit toute sorte de services spirituels et temporels, et les ecclésiastiques du collége suivirent son exemple. On dit que le général anglais, le duc de Cumberland, en ayant été informé, leur fit témoigner sa satisfaction. M. Alban Butler était étroitement lié avec l'abbé de Villers, président du séminaire des évêques à Douai, qui mourut en odeur de sainteté le 7 octobre 1746, et dont on a publié la Vie. Leurs entretiens roulaient toujours sur des sujets de théologie ou de piété. M. Butler, dans ses leçons, se montrait fort opposé au relâchement dans la morale, et fort attaché au saint Siége.

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C'est pendant son séjour à Douai qu'il publia son premier ouvrage, savoir, ses Lettres sur l'Histoire des Papes, d'Archibald Bower; il y réfute avec esprit les erreurs de cet apostat. En 1745 (1) il fut chargé d'accompagner de jeunes Anglais de la famille Talbot dans leurs voyages en France et en Italie; il écrivit la relation de son voyage, et son neveu, Charles Butler, avait promis de la mettre au jour. A son retour, il fut envoyé en Angleterre pour y être employé dans les missions. Il s'était occupé depuis long-temps de recueillir les Vies des Saints. Son désir était donc de rester à Londres, où il aurait trouvé plus de ressources pour les recherches qui lui restaient à faire, et plus de facilité pour l'impression. Mais le vicaire apostolique du district du milieu le réclama comme appartenant à son district, et lui assigna une mission dans le comté de Stafford. M. Butler fit des représentations; le prélat n'y eut aucun égard, et exigea que le missionnaire obéit. Après avoir exercé le ministère pendant quelque temps dans le comté de Stafford, il passa à Warkworth; mais le duc de Norfolk ayant prié l'évêque Challoner de lui procurer un chapelain qui pût en même temps surveiller l'éducation de l'héritier de son nom, le prélat indiqua M. Butler, qui alla demeurer chez le duc. Il accompagna ensuite le neveu du duc au collège d'Esquerchin, près de Douai, et à Paris. C'est pendant son séjour dans cette dernière

(1) C'est la date que donne C. Butler dans sa Notice. Cependant on voit, par cette même Notice, qu'Alban professait encore la théologie à Douai en 1749,

ville qu'il mit la dernière main à ses Vies des Pères, fruit de trente ans de travail. C'est un ouvrage où la vérité et la critique marchent de pair. Loin d'être inférieur à Baillet pour la critique, comme l'a prétendu l'abbé Tabaraud, Butler lui est supérieur sous ce rapport comme sous celui du goût, de la sagesse et de la piété. On est étonné de toutes les recherches qu'il a dû faire, et du talent avec lequel il les a mises en œuvre. Il fait aimer la religion et la vertu. Rien chez lui d'oiseux, rien d'affecté, rien d'outré. On peut dire qu'il a élevé un monument qui restera pour le bien de l'Eglise, et pour la consolation des fidèles. Après avoir achevé son ouvrage, l'auteur donna un exemple de docilité et d'humilité qui l'honore. Le manuscrit dų premier volume ayant été soumis à M. Challoner, alors vicaire apostolique du district de Londres, le pieux prélat fut d'avis de retrancher toutes les notes comme alongeant trop l'ouvrage, et le rendant plus cher, et par conséquent moins utile. Ce dut être un sacrifice pour un écrivain que de condamner à l'oubli ce qui lui avait coûté tant de travail, et ce quí, à notre avis, ajoute beaucoup au mérite de l'ouvrage. Toutefois Butler obéit, et il n'est pas entré de notes dans la première édition qui parut en Angleterre, en différentes parties, de 1754 à 1760, et qui n'était alors qu'en 5 volumes in-8°; mais les notes ont été rétablies dans les éditions postérieures, et on y a joint les matériaux omis dans la première édition, et d'autres que Butler avait recueillis depuis. Peu après la publication de cet important ouvrage, l'auteur fit paraître la Vie de Marie de la Croix, religieuse du couvent des Pauvres Clarisses Anglaises à Rouen; c'est moins une vie qu'un cadre pour expliquer les devoirs d'une religieuse.

Après l'expulsion des Jésuites de France, le collége de Saint-Omer, fondé dans l'origine par des Jésuites anglais, ne put rester sous leur direction. On en offrit la présidence à M. Alban Bulter, qui hésitait à remplacer des hommes arbitrairement dépouillés; mais les évêques d'Amiens et de Boulogne, qu'il consulta, le décidèrent à se charger de cet emploi. Il en remplit les fonctions jusqu'à sa mort. Son mérite, son savoir, sa sagesse le firent bientôt connaître. M. l'évêque de Saint-Omer lui donna des pouvoirs de grand-vicaire. On le consultait de tous côtés, et les affaires du dehors, se joignant aux soins de son collége, lui laissaient peu de momens pour ses travaux favoris. Il montra beaucoup de zèle lors d'une thèse soutenue dans une université voisine, sans doute à Douai, et à laquelle présidait un homme connu depuis par plus d'un écart, Joseph Berington; cette thèse hardie parut à M. Butler un scandale qu'il ne pouvait laisser passer. Il avait formé le projet de divers ouvrages qu'il n'eut pas le temps d'achever. Dans le nombre il faut compter le Traité des fêtes mobiles, qui n'a paru qu'après sa mort, par les soins du prélat Challoner. L'auteur l'aurait probablement revu et abrégé. Il avait fait de grandes recherches pour la Vie de l'évêque Fisher et de Thomas Morus. Il avait commencé un traité sur les vérités de la religion naturelle et révélée. Il avait compose queiques sermons et beaucoup d'exhortations pieuses; on en a fait trois volumes de Méditations et Dis'cours sur les vérités et les devoirs du christianisme, qui ont paru depuis sa mort, ainsi qu'une courte Vie de sir Toby Matthews. La correspondance de M. Butler était fort considérable, et il entretenait des rela lions avec les hommes les plus savans sur les matières de religion. Il jouit long-temps d'une bonne santé. Quelques années avant sa mort, une légère attaque de paralysie affecta sa langue. Il mourut le 15 mai 1773, dans sa soixante-troisième année. Un monument en marbre lui fut élevé, par les soins de son neveu, dans la chapelle du college anglais de Saint-Omer, avec une inscription honorable. On y donnait à M. Butler les titres de grand-vicaire des évêques de

Philomélie et de Dibra, tous deux vicaires apostoliques en Angleterre, et des évêques d'Arras et de Saint-Omer. On faisait un grand éloge de la piété, du savoir et du caractère d'Alban Butler; tous les témoignages s'accordent sur ce point. Charles Butler, neveu d'Alban, publia, en 1799, une Notice (account) sur la vie et les écrits de son oncle, in-8°. Cette Notice, assez longue et mêlée de digressions oiseuses, offre cependant de l'intérêt; mais les dates y sont trop négligées.

Nous joindrons ici quelques renseignemens sur les éditions et traductions des Vies des Pères. Une édition en anglais fut donnée, en 1779, par les soins de M. Carpenter, archevêque catholique de Dublin; elle était en 12 volumes in-8°, avec toutes les notes. Il y en eut depuis une en Ecosse. Nous en avons sous les yeux une publiée à Dublin en 1809, chez Christie. Enfin, dans les derniers temps elles se sont encore multipliées, et on a stéréotypé l'ouvrage. Il y a de plus des éditions de luxe avec gravures. Un prêtre anglais, M. Bell, a donné un Abrégé des Vies des Pères, en 2 vol. in-8°, et un autre prêtre, M. Sawell, de Stonyhurst, a fait paraître un Choix de Vies, en un vol. in-8°. L'ouvrage de Butler n'a pas eu moins de succès sur le continent. L'impression n'était pas encore achevée quand l'abbé Godescard entreprit de le traduire en français. Mais il se permit plusieurs changemens qui lui parurent nécessaires. Il étendit quelques endroits et en resserra d'autres; il ajouta quelques Saints français. Il déclare dans son avertissement qu'il avait communiqué son travail à l'auteur anglais, qui l'avait approuvé, et qui lui avait même fait part d'améliorations importantes, fruit de nouvelles recherches. L'ouvrage parut à Paris, en 12 vol. in-8°, de 1763 à 1788; l'abbé Marie y coopéra. Il y a eu depuis un grand nombre d'éditions françaises, in-8° et in-12, à Maestricht, à Lyon, à Toulouse, à Versailles, à Lille, à Besançon, etc. Il semble que le goût du public augmentait de plus en plus pour cet excellent ouvrage. Les dernières éditions renferment un treizième volume des Fétes mobiles, traduit par M. Nagot. Cet ouvrage ne va que jusqu'à la fête du Saint-Sacrement, Butler étant mort avant d'y avoir mis la dernière main. Ce volume passe pour être fort inférieur aux précédens. Le P. Delpuits, jésuite, a donné en 1802 un Abrégé des Vies des Pères, en 4 vol. in-12. M. Villenave en commença un autre en 1812, dont il n'a paru que quatre volumes; ils s'arrêtèrent au mois de juillet. Nous croyons qu'il y a des traductions de l'ouvrage d'Alban Butler en italien, en espagnol et en allemand, mais nous ne les connaissons pas.

NOTICE SUR LA VIE DE L'ABBÉ GODESCARD.

JEAN-FRANCOIS GODESCARD naquit, le 30 mars 1728, à Rocquemont, paroisse du diocèse de Rouen, qui se trouve à cinq lieues de cette ville, sur la route de Neufchâtel. Il était d'une famille honnête, et ses parens, qui s'adonnaient à la culture des terres et au commerce, jouissaient d'une estime générale parmi leurs concitoyens. Le cure d'Icquebeuf, qui lui était uni par les liens du sang, et qui habitait dans le même canton, commença son éducation; et, voulant cultiver les heureuses dispositions qu'il trouvait dans son élève, il lui fit faire ses premières études,

En 1743, le jeune Godescard alla au collège de Rouen, qui était tenu par les Jésuites. Il entra aussitôt en quatrième, sous le P. Matte, qui ne tarda pas à s'apercevoir combien son élève avait d'aptitude pour les belles-lettres, et qui s'attacha singulièrement à lui.

Après avoir achevé sa rhétorique, il remplit pendant trois ans l'office de répétiteur chez M. Herman, célèbre maître de pension, que les Jésuites de Rouen estimaient beaucoup à cause de son goût pour la bonne littérature. Il se mit ensuite à donner en particulier des leçons de langue latine, et la réputation qu'il s'acquit d'être un très-habile maître en ce genre lui procura un grand nombre d'élèves.

Pendant qu'il enseignait si bien les autres, il étudia lui-même la philosophie et la théologie, et fit ces deux cours avec une grande distinction. Il était tonsure, assistait parmi les clercs aux offices de la paroisse Saint-Nicaise, et partageait son temps entre ses études personnelles et le soin de ses écoliers.

En 1754, les supérieurs ecclésiastiques de Rouen, qui connaissaient les talens et la vertu de M. Godescard, voulurent qu'il se préparât à recevoir les saints ordres. Il entra donc au séminaire de Saint-Vivien, et reçut l'ordre de la prêtrise pendant le carème de 1756.

M. d'Acquiguy, président au parlement de Rouen, magistrat célèbre par ses lumières et sa vertu, cherchait un instituteur qui fût capable d'élever M. d'Enneval, son fils unique. Il s'adressa aux vicaires-généraux du diocèse, qui lui présentèrent M. Godescard comme étant l'homme le plus propre à remplir ses vues. Le président l'accepta, l'introduisit dans sa maison, et lui confia son fils.

En 1758, M. Godescard partit pour Paris avec son élève, et alla continuer au collége du Plessis l'éducation qu'il avait commencée dans la maison paternelle. Il prit alors des leçons de théologie dans les écoles de Sorbonne; et pendant le même temps, M. d'Acquigny lui donna un petit prieuré, situé à Pavilly en Caux.

Personne n'a mieux étudié et mieux saisi le caractère des jeunes gens que M. Godescard: personne n'a mieux connu la manière dont on doit cultiver ces plantes délicates, qui exigent des soins assidus de la part du cultivateur. Sa douceur et son affabilité lui acquirent bientôt la confiance et l'amitié des pensionnaires du collége qu'il était venu habiter. Il ne tarda pas à devenir leur confesseur; et après même qu'il eut quitté le séjour du Plessis, les importantes fonctions qu'il avait alors à remplir ne l'empêchèrent pas d'y aller fréquemment pendant bien des années pour y exercer le ministère ecclésiastique. Il n'avait pas encore achevé l'éducation de M. d'Enneval, quand il s'adonna à l'étude de la langue anglaise, et se mit en état d'entendre

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