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SCENE XII

LA COMTESSE, JULIE, ANDRÉE, CRIQUET.

CRIQUET, à la comtesse.

VOILA Jeannot de monsieur le conseiller qui vous demande, madame.

LA COMTESSE.

HIE bien! petit coquin, voilà encore de vos âneries. Un laquais qui sauroit vivre auroit été parler tout bas à la demoiselle suivante qui seroit venue dire doucement à l'oreille de sa maîtresse : madame, voilà le laquais de monsieur un tel qui demande à vous dire un mot ; à quoi la maîtresse auroit répondu : faites-le

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Autre lourderie! ( A Jeannot.) Qu'y a-t-il, laqua is. Que portes-tu là?

JEANNOT.

C'est monsieur le conseiller, madame, qui vous souhaite le bon jour, et, auparavant que de venir

vous envoie des poires de son jardin avec ce petit mot d'écrit.

LA COMTESSE.

C'est du bon-chrétien qui est fort beau. Andrée, faites porter cela à l'office.

SCENE XIV.

LA COMTESSE, JULIE, CRIQUET, JANNOT. LA COMTESSE, donnant de l'argent à Jeannot. TIENS, mon enfant, voilà pour boire.

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Mon ma tre m'a défendu, madame, de rien pren

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H! prenez, Jeannot. Si vous n'en voulez pas, vous

me le baillerez.

LA COMTESSE.

Dis à ton maitre que je le remercie.

CRIQUET, à Jeannot qui s'en va.

Donne-moi donc cela.

Oui! quelque sot!...

JEANNOT.

CRIQUET.

C'est moi qui te l'ai fait prendre.

JEANNOT.

Je l'aurois bien pris sans toi.

LA COMTESSE.

Ce qui me plaît de ce monsieur Tibaudier, c'est qu'il sait vivre avec les personnes de ma qualité, et qu'il est fort respectueux.

SCENE XV.

LE VICOMTE, LA COMTESSE, JULIE, CRIQUET.

LE VICOMTE.

MADAME; je viens vous avertir que la comédie sera bientôt prête, et que, dans un quart d'heure, nous pouvons passer dans la salle.

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Je ne veux point de cohue, au moins. (A Criquet.) Que l'on dise à mon Suisse qu'il ne laisse entrer per

sonne.

LE VICOMTE.

En ce cas, madame, je vous déclare que je renonce à la comédie; et je n'y saurais, prendre de plaisir lorsque la compagnie n'est pas nombreuse. Croyez-moi si vous voulez vous bien divertir, qu'on dise à vos gens de laisser entrer toute la ville.

LA COMTESSE.

Laquais, un siège. (Au vicomte, après qu'il s'est assis.) Vous voilà venu à propos pour recevoir un petit sacrifice que je veux bien vous faire. Tenez, c'est un billet de monsieur Tribaudier, qui m'envoie des poires. Je vous donne la liberté de le lire tout haut; je ne l'ai point encore vu.

LE VICOMTE,après avoir lu tout bas le billet.

Voici un billet du beau style, madame, et qui mérite d'être bien écouté.

<< Madame, je n'aurois pas pu vous faire le présent » que je vous envoie, si je ne recueillois pas plus >> de fruit de mon jardin que j'en recueille de mon

> amour. »

LA COMTESSE.

Cela vous marque clairement qu'il ne se passe rien

entre nous.

LE VICOMTE.

« Les poires ne sont pas encore bien mûres; mais >> elles en cadrent mieux avec la dureté de votre ame, » qui, par ses continuels dédains, ne me promet pas » poires molles. Trouvez bon, madame, que, sans >> m'engager dans une énumération de vos perfections

» et charmes, qui me jetteroit dans un progrès à l'in– » fini, je couclue ce mot en vous faisant considérer » que je suis d'un aussi franc chrétien que les poires

que je vous envoie, puisque je rends le bien pour » le mal; c'est-à-dire, madame, pour m'expliquer >> plus intelligiblement, puisque je vous présente des > poires de bon-chrétien pour des poires d'angoisse » que vos cruautés me font avaler tous les jours. « TIBAUDIER.

>> Votre esclave indigne. >>

Voi là madame, un billet à garder.

LA COMTESSE.

Il y a peut-être quelque mot qui n'est pas de l'académie ; mais j'y remarque un certain respect qui me plaît beaucoup.

JULIE.

et monsieur le vi

Vous avez raison, madame

comte dût-il s'en offenser, j'aimerois un homme qui m'écriroit comme cela.

SCENE XVI.

M.TIBAUDIER, LE VICOMTE, LA COMTESSE, JULIE, CRIQUET.

LA COMTESSE.

APPROCHEZ, Monsieur Tibaudier, ne craignez point d'entrer. Votre billet a été bien reçu aussi bien que

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