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Une pauvre servante au moins, m'étoit restée,
Qui de ce mauvais air n'étoit point infectée,
Et voilà qu'on la chasse avec un grand fracas,
A cause qu'elle manque à parler Vaugelas !
Je vous le dis, ma sœur tout ce train-là me blesse :
Car c'est, comme j'ai dit, à vous que je m'adrese.
Je n'aime point céans tous vos gens à latin,
Et principalement ce monsieur Trissotin:
C'est lui qui, dans des vers, vous a tympanisées;
Tous les propos qu'il tient sont des billevesées,
On cherche ce qu'il dit après qu'il a parlé ;
Et je lui crois, pour moi, le timbre un peu fèlé.

PHILAM INTE.

Quelle bassesse, ô ciel! et d'ame et de langage!

BÉLISE.

Est-il de petits corps un plus lourd assemblage,
Un esprit composé d'atômes plus bourgeois !
Et de ce même sang se peut-il que je sois !
Je me veux mal de mort d'être de votre race;
Et, de confusion, j'abandonne la place.

SCENE VIII.

PHILAMINTE, CHRYSALE.

PHILAMINTE.

Avez-vous à lâcher encore quelque trait?

CHRYSALE.

Moi, non. Ne parlons plus de querelles, c'est fait.
Discourons d'autre affaire. A votre fille aînée
On voit quelques dégoûts pour les noeuds d'hyménée
C'est une philosophe enfin ; je n'en dis rien,
Elle est bien gouvernée, et vous faites fort bien :
Mais de toute autre humeur se trouve sa cadette ;
Et je crois qu'il est bon de pourvoir Henriette,
De choisir un'mari...

PHILAMINTEA

C'est à quoi j'ai songé.
Et je veux vous ouvrir l'intention que j'ai.
Ce monsieur Trissotin dont on nous fait uu crime,
Et qui n'a pas l'honneur d'être dans votre estime,
Est celui que je prends pour l'époux qu'il lui faut,
Et je sais mieux que vous juger de ce qu'il vaut.
La contestation est ici superflue,

Et de tout point, chez moi l'affaire est résolue.
Au moins ne dites mot du choix de cet époux;
Je veux à votre fille en parler avant vous.
J'ai des raisons à faire approuver ma conduite;
Et je connaitrai bien si vous l'aurez instruite.

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HÉ BIEN? la femme sort, mon frère, et je vois bien Que vous venez d'avoir ensemble un entretien.

CHRYSALE.

Oui.

ARISTE.

Quel est le succès? Aurons-nous Henriette ? A-t-elle consenti, l'affaire est-elle faite,

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C'est que pour gendre elle m'offre un autre hommes•

ARISTE.

Un autre homme pour gendre?

CHRYSALE.

Un autre.

ARISTE.

Qui se nomme?

CHRYSALE.

Monsieur Trissotin.

ARISTE.

Quoi ! ce monsieur Trissotin...

CHRYSALE.

Oui, qui parle toujours de vers et de latin.

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Rien ; et je suis bien aise

De n'avoir point parlé, pour ne m'engager pas.

ARISTE.

La raison est fort belle; et c'est faire un grand pas! Avez-vous su du moins lui proposer Clitandre!

CHRYSALE.

Non; car comme j'ai vu qu'on parloit d'autre gendre, J'ai cru qu'il étoit mieux de ne m'avancer point.

ARISTE.

Certes! votre prudence est rare au dernier point!
N'avez-vous point de honte, avec votre mollesse ?
Et se peut-il qu'un homme ait assez de foiblesse
Pour laisser à sa femme un pouvoir absolu,
Et n'oser attaquer ce qu'elle a résolu ?

CHRYSALE.

Mon dieu ! vous en parlez, mon frère, bien à l'aise,
Et vous ne savez pas comme le bruit me pèse.
J'aime fort le repos, la paix et la douceur;
Et ma femme est terrible avecque son humeur.
Du nom de philosophe elle fait grand mystère,
Mais elle n'en est pas pour cela moins colère;
Et sa morale, faite à mépriser le bien,
Sur l'aigreur de sa bile opère comme rien.

Pour
peu que l'on s'oppose à ce que veut sa tête,
On en a pour huit jours d'effroyable tempête.
Elle me fait trembler dès qu'elle prend son ton;
Je ne sais où me mettre, et c'est un vrai dragon ;
Et cependant, avec toute sa diablerie,

Il faut que je l'appelle et mon cœur et ma mie.

ARISTE.

Allez, c'est se moquer. Votre femme, entre nous Est, par vos lâchetés, souveraine sur vous.

Son pouvoir n'est fondé que sur votre foiblesse ;

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