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Je démens un discours dont je n'ai que trop peur.

(à Mascarille.)

Tu penses fuir.

MASCARILLE.

Nenni.

ERASTE.

Quoi! Lucile est la femme...?

MASCARILLE.

Non, monsieur; je raillois.

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Je ne dis pas cela.

ERASTE.

Que dis-tu donc ?

MASCARILLE.

Je ne dis rien, de peur de mal parler."

É RASTE.

Hélas!

Assure

Ou si c'est chose vraie, ou si c'est imposture.

MASCARILLE.

C'est ce qu'il vous plaira; je ne suis pas ici
Pour vous rien contester.

ERASTE, tirant son épée.

1

Veux-tu dire? Voici, Sans marchander, de quoi te délier la langue.

MASCARILLE.

Elle ira faire encor quelque sotte harangue.
Hé! de grace, plutôt, si vous le trouvez bon,
Donnez-moi vitement quelques coups de bâton,
Et me laissez tirer mes chausses sans murmure.
É RASTE.

Tu mourras, ou je veux que la vérité pure
S'exprime par ta bouche.

MASCARILLE.

Hélas! je la dirai:

Mais peut-être, monsieur, que je vous fâcherai.

É RASTE.

Parle: mais prends bien garde à ce que tu vas faire.
A ma juste fureur rien ne te peut soustraire,
Si tu mens d'un seul mot en ce que tu diras.

MASCARILLE.

J'y consens, rompez-moi les jambes et les bras;
Faites-moi pis encor, tuez-moi, si j'impose,
En tout ce que j'ai dit ici, la moindre chose.
É RASTE.

Ce mariage est vrai?

MASCARILLE.

Ma langue en cet endroit A fait un pas de clerc dont elle s'apperçoit: Mais enfin cette affaire est comme vous la dites; Et c'est après cinq jours de nocturnes visites, Tandis que vous serviez à mieux convrir leur jeu, Que depuis avant-hier ils sont joints de ce nœud; Et Lucile depuis fait encor moins paroître Le violent amour qu'elle porte à mon maître, Et veut absolument que tout ce qu'il verra, Et qu'en votre faveur son cœur témoignera, Il l'impute à l'effet d'une haute prudence, Qui veut de leurs secrets ôter la connoissance. Si, malgré mes serments, vous doutez de ma foi, Gros-René peut venir une nuit avec moi;

Et je lui ferai voir, étant en sentinelle,

Que nous avons dans l'ombre un libre accès chez elle. ÉRASTE.

Ote-toi de mes yeux, maraud.

MASCARILLE.

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Nous en tenons tous deux, si l'autre est véritable.

ÉRASTE.

Las! il ne l'est que trop, le bourreau détestable!
Je vois trop d'apparence à tout ce qu'il a dit;
Et ce qu'a fait Valere en voyant cet écrit

Marque bien leur concert, et que c'est une baie Qui sert sans doute aux feux dont l'ingrate le paie.

SCENE VÍ.

ÉRASTE, MARINETTE, GROS-RENÉ.

',

MARINETTE.

Je viens vous avertir que tantôt, sur le soir,
Ma maîtresse au jardin vous permet de la voir.
ÉRASTE.

Oses-tu me parler? ame double et traîtresse!
Va, sors de ma présence; et dis à ta maîtresse
Qu'avecque ses écrits elle me laisse en paix,
que voilà l'état, infàme! que j'en fais.

Et

(Il déchire la lettre, et sort.)

MARINETTE.

Gros-René, dis-moi donc quelle mouche le pique.

GROS-REN É.

M'oses-tu bien encor parler? femelle inique,
Crocodile trompeur, de qui le cœur félon
Est pire qu'un satrape, ou bien qu'un Lestrigon!
Va, va rendre réponse à ta bonne maîtresse;
Et lui dis bien et beau que, malgré sa souplesse,
Nous ne sommes plus sots, ni mon maître, ni moi,
Et désormais qu'elle aille au diable avecque toi.

MARINETTE, seule.
Ma pauvre Marinette, es-tu bien éveillée ?
De quel démon est donc leur ame travaillée ?
Quoi! faire un tel accueil à nos soins obligeants!
Oh! que ceci chez nous va surprendre les gens!

FIN DU PREMIER ACTE.

ACTE SECOND.

SCENE I.

ASCAGNE, FROSINE.

FROSINE.

ASCAGNE, je suis fille à secret, Dieu merci.

ASCAGNE.

Mais, pour un tel discours, sommes-nous bien ici? Prenons garde qu'aucun ne nous vienne surprendre, Ou que de quelque endroit on ne nous puisse entendre.

FROSINE.

Nous serions au logis beaucoup moins sûrement:
Ici de tous côtés on découvre aisément,

Et nous pouvons parler avec toute assurance.

ASCAGNE.

Hélas! que j'ai de peine à rompre mon silence!

FROSINE.

Ouais! ceci doit donc être un important secret!

ASCAGNE.

Trop, puisque je le dis à vous-même à regret,
Et que, si je pouvois le cacher davantage,
Vous ne le sauriez point.

FROSINE.

Ah! c'est me faire outrage! Feindre à s'ouvrir à moi, dont vous avez connu Dans tous vos intérêts l'esprit si retenu! Moi, nourrie avec vous, et qui tiens sous silence Des choses qui vous sont de si grande importance! Qui sais...

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