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ceste irrécupérable perte. » PERCEFOREST, vol. iv, fol. 23 vo, col. 2.

« Se cliner devant quelqu'un » pour s'incliner. » CL. MAROT, pag. 882, édit. de 1571.

« Comme si à ce roy là (Dieu), c'estoit plus et moins de remuer un empire, ou la feuille d'un arbre : et si sa providence s'exerçoit autrement inclinant l'événement d'une bataille, que le sault d'une puce. » MONT. liv. 11, ch. 12.

Mais Alète, en voyant ces traits majestueux,
Profondément incline un front respectueux.

BAOUR-LORMIAN, Jérusalem délivrée, ch. 11.

Et l'Olympe ébranlé s'incline avec ses dieux. Libre à la cour des rois, soumis, mais sans bas[sesse, Devant eux il (l'écrivain sage) s'incline et ja[mais ne s'abaisse. MILLEVOTE, l'Indépendance de l'homme de lettres.

INCOERCIBLE, adj. qu'on ne peut maitriser, du latin coercere (contenir). « Cet atôme, qu'on appelle le génie est un élément incoërcible. » DIDEROT, lettr. v, à Falconet.

INCOGNITO, mot italien fort usité dans notre langue. Vaugelas en parle comme d'un terme nouveau. Les Italiens venus avec Marie de Médicis, femme de Henri IV, l'avaient sans doute mis à la mode. La Mothe le Vayer ne pouvait pas le souffrir. Th. Corneille l'approuvait fort, et depuis long-temps il est bien établi.

Non, l'esprit des aimables sages

N'est point né pour les gros ouvrages
Souvent publics incognito.

GRESSET.

Heureux l'auteur marqué du sceau des coteries! Cent bouches vont pronant ses froides rêveries; De journal en journal son nom roule en écho : Il est, dès son vivant, grand homme... incognito. Laissons-le s'enivrer d'un stérile suffrage.

CHAUSSARD, Poétique secondaire, chant 1.

INCOMMODANT, ANTE, adj. qui incommode, importun, fâcheux.

« C'est, dit l'abbé Féraud, un de ces mots qu'on dit, et qu'on n'écrit pas. »

INCOMMODE, adj. Mascaron refusa de faire l'oraison funèbre de M. de Harlay, archevêque de Paris, sous prétexte qu'il était incommode. « Mon

seigneur, lui dit l'évêque de Noyon, vous ne dites pas tout, c'est que la matière est incommode. »

Une femme écrivait à une de ses amies, qu'elle n'avait pu l'aller voir, parce que son mari était fort incommode; elle avait oublié l'accent aigu sur l'e; il n'en fallut pas davantage pour donner au pauvre mari la réputation d'un jaloux.

INCOMMODER, v. du latin incommodare (nuire, incommoder).

«On incommode toujours les autres, quand on croit ne les pouvoir jamais assez incommoder. » LA ROCHEFOU

CAULD.

Dans les Précieuses ridicules, un des valets qui s'introduisent chez elles, et qu'on presse de faire des vers, dit qu'il est fort incommode de la veine poétique. MOLIÈRE.

Le duc de Vivonne étant malade, on envoya chercher un médecin sans son ordre; il vint, on l'annonça au duc qui répondit : « Dites à cet homme qu'étant incommodé, je ne puis le voir. »

INCOMMUNICABLE, adj. mot créé par Balzac dans sa Lettre au cardinal Mazarin.

INCOMPRÉHENSIBILITÉ, s. f. C'est un mot que nous devons à Montaigne, de même que l'adj. incompréhensible, qui ne se trouve ni dans Nicot ni dans Cotgrave.

Catherine de Médicis fut caractérisée sons le titre de princesse incompréhensible.

Le Dr Hill disait d'un prédicateur anglais que ses dettes obligeaient de se tenir caché : « Il est invisible six jours de la semaine, et le septième il est incompréhensible. »

INCOMPRENABLE, adj. qu'on në peut comprendre. « Aristote estime la forme de Dieu incomprenable

MONTAIGNE.

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INCONDUITE, s. f. défaut de conduite, mauvaise conduite. Il ne s'est dit d'abord que dans la conversation; il n'était pas encore accrédité vers 1771. Linguet est un des premiers écrivains qui en ont fait

usage.

INCONGRU, UE, adj. qui pèche contre la syntaxe ou contre la bienséance; peu usité. Molière le place dans la bouche d'une de ses Précieuses: « Le moyen de bien recevoir des gens qui sont tout-à-fait incongrus en galanterie?» et cet exemple prouve peut-être que l'usage de cette expression n'était pas d'un très-bon goût.

INCONNU, UE, adj. qu'on écrivait autrefois incognu, du latin incognitus (qui n'est pas connu). Il ne va point fouiller aux terres incognues.

BACAN, les Plaisirs de la Solitude.

« Toute la vertu des femmes consiste à être inconnues, sans s'attirer ni blâme ni louange.» FLÉCHIER. INCONSÉQUENCE, s. f. défaut de conséquence.

« Ce mot d'inconséquence, dit l'abbé Féraud, n'était pas apparemment fort usité du temps de Bossuet, car il demande la permission de l'employer. C'est une marque de fausseté et d'inconséquence (qu'on me permette ce mot) dans la doctrine. - Il n'a plus besoin de correctif, ajoute Féraud, et il est assez à la mode. Il est vrai que les occasions de l'employer deviennent tous les jours plus fréquentes, et en littérature, et en morale. »

INCONSISTANCE, s. f. défaut de consistance; mot nouveau, peu usité.

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Une indolente et molle disposition....capable d'autant d'inconsistance que la folie et l'imbécillité. » Histoire des Stuarts.

« L'inconsistance des idées, du caractère d'un ministre, d'un gouvernement, sont des expressions trèsclaires; elles présentent avec précision ce qu'il faudrait appeler autrement le défaut de consistance. Il y a tout à gagner pour l'élégance du style. » LA HARPE.

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Elle (l'Inconstance) a toujours confondu la pru-
[dence,
Une girouette exposée à tout vent
Est à la fois son trône et son emblème;
Gent papillons forment son diadème :
Par son pouvoir magique et décevant
Elle envoya Charles-Quint au couvent,
Jules second aux travaux de la guerre,
Fit Amédée et moine, et pape, et rien;
Bonneval turc, et Macarti chrétien.
Elle est fêtée en France, en Angleterre.
Contre l'ennui son charme est un secours.

VOLTAIRE, Guerre de Genève, ch. 1.

INCONSTANT, ANTE, adj. et s. Sé- ́ nèque dit à un inconstant: « Fais du moins qu'on puisse te reconnaître quelquefois. >>

Il vent, il ne veut pas, il accorde, il refuse,
Il écoute la haine, il consulte l'amour;
Il assure, il rétracte, il condamne, il excuse,
Le même objet lui plaît et déplaît tour à tour.

INCONSULTÉ, ÉE, adj. qu'on ne consulte pas.

Dodone inconsultée a perdu ses oracles;
Nos vergers sont sans dieux, nos forêts sans mi-
[racles.
DELILLE, les Trois Règnes de la Nature, ch. vi.

On peut appliquer à ce néologisme ce que La Harpe a dit plus haut du mot inconsole.

INCONTESTÉ, ÉE, adj. Ce mot qui se trouve dans Mézeray, a été employé par quelques écrivains modernes.

Un axiome inconteste nous apprend que, etc.... Don Quichotte, trad. de Bouchon-Dubournial, tom. iv, pag. 225, Paris, 1807.

« Les tissus en laine et en duvet de cachemire, dans la fabrication desquels la supériorité de nos manufactures est incontestée. » Dict. des

découvertes en France de 1789 à la
fin de 1820, tom. ix, pag. 335.

Il est admis surtout dans le langage
parlementaire.

INCONVENANCE, s. f. défaut de

de bienséance. Nous pen-

sons, avec M. Laveaux, que ce néo-
logisme est utile dans plusieurs cir-
constances, et qu'on peut dire incon-
venance de lieu, inconvenance de temps,
inconvenance de style, etc.

INCONVENANT, E, adj. qui ne con-
vient pas, qui manque de bienséance.

« Si l'Académie française, dit M.

Pougens dans son Archeol. française,

eût sanctionné l'adjectif inconvenant,

dont on se sert dans le langage usuel,

je n'eusse point proposé de réintégrer

le vieux français inconvenable. »

>> Inconvenant est un de ces mots

que l'Académie n'admet point, et que
tout le monde croit français. Comme
nous n'avons pas l'adjectif conve-
nant, j'avoue qu'inconvenable vau-

drait mieux, et on pourrait l'appuyer

:

INCORPOREL, ELLE, adj.

« Les

autheurs mesmes plus serrez et plus

sages, voyez, autour d'un bon argu-

ment, combien ils en sèment d'au-

tres légers, et, qui y regarde de près,

incorporels?» MONT. liv. 111, ch. 12.

«Nos filles ne pensent qu'en trem-

blant au jour qui doit les priver de
cette vertu quí les rend semblables
aux anges et aux puissances incorpo-
relles. » MONTESQUIEU, Letires per-
sanes, Lettr. XLVIII.

INCORPORER, . du lat. incorporare
(mêler, joindre des choses ensemble
pour n'en faire qu'un corps). Il se
dit au propre et au figuré.

Charron n'a pas manqué de répé-

ter, après son maître : « Il faut pren-

dre les affaires en main, non à cœur ;

s'en charger, et non se les incorpo-

rer. » Liv. 11, ch. 2.

<< Si les songes se peuvent incorpo-

rer en effect; encore ne crois-je pas
que nostre volonté en fust tenuë à la
justice. » MONT. liv. III, ch. 2, en
parlant des rêveries des sorciers.

Bossuet a employé ce mot d'une
manière aussi hardie qu'elle est heu-
Les richesses s'attachent, et

pour ainsi dire, s'incorporent à notre

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tit-maitre. L'usage de ce mot vient de celui où étaient les jeunes gens à la mode, de répéter avec une sorte d'affectation: c'est incroyable, et de dire ces mots, à propos et hors de propos.

«Cette espèce de petits-maîtres niais que nous avons quelque temps appelés incroyables, parce qu'en effet leur sottise et leur fatuité passaient toute croyance.» GEOFFROY, Journal de Empire, feuilleton (du 2 juillet 1806).

Voy. MERVEILLEUX, MERVEILLEUSE. INCRUSTATION, s. f. « C'est dommage qu'un meschant homme ne soit encore un sot, et que la décence pallie son vice. Ces incrustations n'appartiennent qu'à une bonne et saine paroy, qui mérite d'estre conservée, d'estre blanchie.» MONT. I. 111, c. 5.

INCRUSTÉ, adj. « Une probité exacte, beaucoup d'honneur.... faisait le fond de son caractère, d'ailleurs incrusté d'une ambition extrême. » SAINT-SIMON, t. v, l. xn, c. 17. INCULPABILITÉ. s. f. « Près de se voir englouti, au moment où son inculpabilité était devenue incontestable.» LINGUET.

a

INCULPABLE, adj. peu usité. J. J. Rousseau l'a employé dans cette phrase: « Quelque effet qui résulte de la vérité, on est toujours inculpable quand on l'a dite, parce qu'on n'y a rien mis du sien.» Rev. 1ye promenade.

INCULTE, adj. qui n'est pas cultivé, du latin incultus (sans culture). Strabon a dit: Nulla pars Galliæ inculta jacet (aucune partie de la Gaule ne reste sans culture). Nous disons au figuré un esprit inculte; on voit de même, dans Horace, incultum ingenium.

Bourdalone a dit du grand Condé : « Il n'était pas un de ces héros incultes, qui de la bravoure et de la science de la guerre se font un titre et un droit d'ignorance pour tout le

reste. »

INCULTURE, S. f. état de ce qui est inculte. L'abbé Féraud faisait des

vœux pour que ce mot fût adopté au figuré. La Harpe a dit depuis «l'inculture des terres est un mot nécessaire. Incultivé est inutile au propre comme au figuré, puisque nous disons également des terrains incultes, des esprits incultes. »

INCURABLE, adj. Richelet nous apprend que les censeurs de la Phèdre de Racine blâmèrent dans le temps l'emploi de cet adjectif dans ce vers : D'un incurable amour remèdes impuissans.

Act. 1, sc. 3.

« Incurable, disaient-ils, est d'un trop bas étage pour l'associer à l'amour; il faut le renvoyer à l'hôpital ou dans la boutique d'un chirur— gien. »

Ces censeurs si délicats ont été seuls de leur avis; ils n'ont pas vu que c'était là un de ces artifices de style propres à Racine, qui sait ennoblir les mots par la manière dont il les place. Un incurable amour est noble; un amour incurable serait bas et repoussant. Voyez quel effet il produit dans ce vers de Corneille :

L'amour dont je me plains est un mal incurable, et comparez.

INCURIE, s. f. du latin incuria (défaut de soin). Il se prend aussi dans le sens de tranquillité, absence de soucis, d'inquiétude.

« Je me livrai pleinement à l'incurie et au repos d'esprit qui fit toujours mon goût le plus dominant. >> J. J. ROUSSEAU, Rev. шe prom.

Heureux qui voit couler ses jours
Dans la mollesse et l'incurie,
Sans intrigues, sans faux détours,
Près de l'objet de ses amours
Et loin de la coquetterie!
VOLTAIRE,

Lettres en vers et en prose, Lett. Ire, Ce mot, qui sentait le pays latin, a fait place à celui d'insouciance, plus usité, et pourtant ceux qui écrivent en vers doivent le regretter.

INCURIEUSEMENT, adv. « On a de quoy couler plus incurieusement en la pauvreté, qu'en l'abondance, justement dispensée. » MONT. 1. 11, c. 33.

« Combien de gens reçoivent laschement et incurieusement leur bonne fortune!» Le méme, l. 111, c. 13.

INCURIEUX, EUSE, adj. «Combien et aux loix de la religion et aux loix politiques, se trouvent plus dociles et aisez à mener, les esprits simples et incurieux, que ces esprits surveillans et pédagogues des causes divines et humaines! » Le même, l. 11, c. 12. Mercier voulait réhabiliter ce mot, et M. Laveaux croit qu'il pourrait être utile.

incuriosité, s. f. insouciance d'apprendre.

" O que c'est un doux, mol et sain chevet, que l'ignorance et l'incuriosité, à reposer une tête bien faicte! >> MONT. Ce mot tombé en désuétude, et qu'on lit dans Montaigne, dans Cl. Fauchet et dans Brantóme, reprit vigueur en 1777.

« L'ignorance et l'incuriosité sont deux oreillers fort doux; mais, pour les trouver tels, il faut avoir la tête aussi bien faite que Montaigne. »

DIDEROT.

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por

INDAGUE, adj. Il est rendu, dans le Dict. franç.-italien d'Oudin, par dishonnesto, torpe, brutto. Ce vieux mot signifiait dans l'origine mal vêtu ou décontenancé, parce que c'était autrefois la mode de ter la dague au côté; de sorte que celui qui sortait sans dague était appelé indague, c'est-à-dire sans gráce, sans élégance. Dans la suite on appliqua aux choses ce qui ne se disait d'abord que des personnes; on en trouve déjà un exemple dans Rabelais :

« J'entends bien que lisans ces motz, vous vous mocquez du vieil beuveur, et réputez l'exposition des couleurs par trop indague. » Liv. 1, ch. 9.

Le peuple disait encore en 1727: «C'est indague, pour vilain, malhonnête, indigne.

>>

INDÉBROUILLABLE, adj. nouveau vers 1787 « Le chaos poli

:

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« Et que n'oseront pas des hom

mes qui n'ont pour dieu que leurs passions ou d'impuissantes idolas? ils voudront s'emparer de ma femme, et, pour le faire sans opposition, ils mettront à mort un étranger indéfendu, qu'ils regarderont comme un obstacle à l'injustice de leurs désirs. » Le P. BERRUYER.

L'abbé Velly l'emploie substantivement « Protéger les veuves, les orphelins, les indéfendus. >> On ne voit pas que son autorité l'ait fait prévaloir.

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INDÉFENSIBLE adj. « Ceux qui prennent mon dédain (à l'égard des accusations) pour une trop hautaine confiance, ne m'en veulent guères moins de mal, que ceux qui le prennent pour foiblesse d'une cause indéfensible. » MONT. l. 111, c. 12.

Indefensable se lit dans la critique de l'Ecole des Femmes de Molière; mais ni l'un ni l'autre n'ont obtenu la sanction de l'usage.

INDÉFINI ou INFINITIF, s. m. qui ne marque ni nombre ni perterme de grammaire, mode du verbe

sonne.

« Quand de l'infinitif nous en faisons un nom, en mettant l'article devant, nous tenons cest usage des Grecs, car comme nous disons le boire, le manger et autres, ainsi disent-ils τὸ πιεῖν, τὸ φαγεῖν, ce que Perse a imité quand il a dit :

Seire tuum nihil est (votre savoir n'est rien).
Velle suum cuique est (chacun a son vouloir). »
H. ESTIENNE, Traité de la conformité
du langage françois avec le grec,
pag. 67, Paris, 1569.

Florus, pour nous donner une idée de la guerre de Macédoine, s'exprime ainsi :

« Introïsse victoria fuit» (ce fut vaincre que d'y étre entré).

« Use hardiment, dit Joachim du

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