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Les Amours de Ronsard, CLXXXVe sonnet.

Les Muses, hautaines et braves, Tiennent le flatter odieux.

MALHERBE.

Le simple vivre est incomparable

ment plus malaisé que le bien vivre, »
FASCAL, Lettres prov. ixe Lettre.
Partageons le parler du moins, ou je m'en vais.
MOLIERE, Dépit amoureux, act. II, se. 7.

Et le financier se plaignoit
Que les soins de la Providence
N'eussent pas au marché fait vendre le dormir
Comme le manger et le boire.

LA FONTAINE, liv. vi, fable 2. Dans les récits nous employons quelquefois l'indéfini avec la préposition de, en laissant sous-entendre le verbe qui régit cette préposition. Ainsi dit le Renard, et flatteurs d'applaudır.

LA FONTAINE.

Grenouiles aussitôt de sauter dans les ondes, Grenouilles de rentrer dans leurs grottes profondes. Le méme.

Ces tours elliptiques, qui donnent plus de rapidité au discours, sont imités des auteurs latins.

« Quem is, uti Panormum venit, ad se vocari et de tribunali citari jussit, concursu magno, frequentiáque conventus. Homines statim loqui; mirari, quòd Apollonius, homo pecuriosus, tamdiù ab isto maneret integer. » CICERON, contre Verrès, tou

chant les supplices, chiffre 16. (Verrès n'est pas plus tôt arrivé à Palerme, qu'assis sur son tribunal, environné d'un grand concours de peuple, il ordonne à Apollonius de comparaître. Chacun d'en parler d'abord, et de s'étonner qu'un homme aussi riche eût échappé si long-temps à l'avarice du préteur.)

On emploie aussi l'indéfini au commencement des phrases qui marquent la surprise, l'opposition, l'indignation, etc. «< Quoi! tirer un homme de sa patrie... et puis l'abandonner dans cette ile déserte pendant son sommeil! » FÉNÉLON, Télémaque.

« Quel usage plus doux et plus flatteur pourriez-vous faire de votre élévation et de votre opulence? vous attirer des hommages? mais l'orgueil lui-même s'en lasse. Commander aux hommes et leur donner des lois? mais ce sont là les soins de l'autorité, ce n'en est pas le plaisir. » MASSILLON. Darius me trahir! je ne le puis penser.

CREBILLON, Xercès, act. 1, sc. 2.

Mais la biche abattue
Le regardait avec tant de douceur,
Et pleurait tant que l'aimable chasseur
Par la pitié se sentit l'ame émue.
Il la caresse; et, calmant ses frayeurs :
« Moi t'immoler! oh! non, etc. »

BAOUR-LORMIAN, l'Atlantide, ch. 1. Nous ne faisons encore ici qu'imiter les Latins.

Mene incæpto desistere victam!

VIRG. Eneid, lib. 1, v. 37.

(Moi renoncer à mes desseins! moi céder la victoire!)

INDÉFINISSABLE, adj. Dufresny prétend qu'une femme ne peut se définir, et que de toutes les femmes les Parisiennes sont les plus indéfinissables. Amusemens sérieux et comiques. INDÉFRICHABLE, adj. qui ne peut être défriché.

« Molière, avec le même secours s'ouvrit un champ vaste et fertile, où d'autres yeux que les siens n'auroient vu que des landes indéfrichables. » BRET, Avertissement sur les Femmes savantes, Euvres de Molière, t. vii, p. 6.

Indefrichable n'est pas plus usité

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que défrichable; cependant ces deux mots seraient utiles.

INDÉLÉBILE, adj. du latin indelebilis (ineffaçable). Il paraît que ce terme ne date guère que du commencement du dernier siècle. La Touche le met au nombre des mots nouveaux dont on peut se servir sans scrupule.

Linguet a employé indélébilité : «Depuis que le mariage a acquis l'indélébilité majestueuse attachée au caractère de sacrement. »

INDELIBÉRÉ, ÉE, adj. On trouve dans les plaidoyers de Lemaitre : « Les mouvemens de la douleur et de Fiudignation sont presque entièrement innocens, parce qu'ils sont presque entièrement indélibérés. »

INDÉLICAT, E, adj. qui est sans délicatesse. C'est un mot nouveau qui prend faveur, ainsi que le substantif indélicatesse, dit Laveaux dans son Dict. qui a paru en 1820.

INDEMNITÉ, s. f. « L'indemnité n'est pas monnoye suffisante à un homme qui faict mieux que de ne faillir point. » MONT. 1. 111, c. 13, en parlant des lois qui savent punir, et non récompenser.

INDÉPENDANCE, s. f. « Tous les hommes aspirent à l'indépendance; mais cet heureux état, qui est le but et la fin de leurs désirs, est celui dont ils jouissent le moins. » D'A

GUESSEAU.

aux objets qu'on manic et indivinables.» Liv. 111, ch. 2.

« Il y a des choses indevinables pour un jeune homme bien né. Comment se serait-on défié à vingt ans d'un espion de police qui avait le cordon rouge ?» CHAMFORT.

INDÉVOTION, s. f. C'est, selon le P. Bouhours, un mot de la façon des solitaires de Port-Royal; il se trouve dans le Thrésor de l'Histoire des Langues, par Cl. Duret, imprimé en 1619

« On attribuait à l'indévotion du duc de Vendôme les succès de l'hérétique Malborough. » CONDORCET Vie de Voltaire.

INDEX, s. m. mot emprunté du latin qui signifie la table d'un livre.

Taubmann, savant allemand, comparait les livres sans index à des magasins sans clefs et à des boites d'apothicaire sans étiquette.

Quand on demandait à Baluze, un siècle, à quoi il s'occupait, « je trades plus profonds écrivains du 17e vaille pour l'index, répondait-il. »

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INDEX. Congrégation établie à Rome pour juger les livres. Tel ouvrage a été mis à l'index, c'est-à-dire, la lecture en est défendue par la con grégation de l'index ou de l'indice, qui ne fait pas loi partout.

Vienne, comme Rome, publie tous les ans son index; on en trouve des échantillons vraiment curieux dans le Magasin encyclopédique.

« La fortune règne despotiquement sur un empire immense, mais il n'est INDICIBLE, adj. qu'on ne saurait pas sans limites. Ayez le courage de dire. Ce mot a été créé par Monles franchir, et vous vivrez libre et taigne «Elles (ces imaginations ) heureux dans le pays de l'indépen-Lettr. v, à la suite des Essais. sont admirables, infinies, indicibles." dance. » Le duc DE LÉVIS. La noble indépendance est l'ame des talens.

MILLEVOYE.

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« Pour les grâces indicibles qui sont en elle, tu l'appelleras Marguerite des Marguerites. » Les Epithètes de De la Porte, Paris, 1571, au mot Marguerite de Vallois.

«J'avais un plaisir secret et indi

cible. » LA HARPE,

INDIFFÉRENCE, s. ƒ.

L'indifférence est pour les cours que l'hiver est pour la terre.

Ce

MME DESHOULIÈRES.

L'indifférence fait des sages, et l'insensibilité fait des monstres. »> BEAUZEE.

INDIGÈNE, adj. et subst. du latin indigena, comme on dirait indè ou indu genitus, né dans le pays. INDIGENT, E, s. et adj. « L'indigent valide a droit au travail, et l'infirme au secours.

» Voilà le tribut que la civilisation impose aux hommes réunis en société, et le premier devoir des gouvernemens. » Le duc DE LÉVIS.

Le riche qui tarit les pleurs de l'indigent,
Au plus haut intérêt a placé son argent.

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BARTHE.

Une traduction sèche et indigente. VOLTAIRE.

En prose il ne se dit guère que des personnes, mais en vers it est beau en parlant des choses.

Que de mortels pareils à ces riches fontaines
Quimplore un voyageur en ses courses lointaines !
Leur bronze avec orgueil verse un flot indigent,
Plus heureux s'il rencontre une rustique source
Qui libre dans sa course,

Aime à lui prodiguer tout son liquide argent.
LE ERUN, ode XXIV,
liv. 1.

Là, sous des rocs pendans,

Elle la voit qui rampe, et ronge de ses dents Quelques brius d'herbe épars sur la roche indi[gente.

DESAINTANGE,

Les poètes donnent à ce mot un complément indirect amené par la préposition de. C'est ainsi que Rousseau, en parlant de Saturne, a dit :

Le vieur Saturne

Donna la terre, indigente d'appui, A gouverner à des dieux comme lui. Vous, riches des forfaits qu'enfantent les trésors, Indigens de vertus, de mœurs et d'innocence. LE ERUN, ode 101, au jeune Racine.

INDIGÉRÉ, ÉE, adj. qui n'est pas digéré.

De mets indigérés le pénible fardeau

Ne doit point s'aggraver d'un aliment nouveau. DOMERGUE, Man. des Etrang. p. 217. Pourquoi ne pas admettre ce néologisme?

INDIGESTE, adj. du latin indigestus (qui n'est pas dígéré); mais, comme indigeste signifie qui ne peut être digéré, indigérable, ou plutôt indigestible, conviendrait mieux, comme

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INDIGNE, adj. du latin indignus (qui ne mérite pas).

Si l'on en croit l'abbé Féraud, indigne se prend toujours en mauvaise part. On est indigne du bien et non pas du mal. Pour signifier donc que quelqu'un ne méritait pas les malheurs qu'il essuie, on ne doit pas dire qu'il en était indigne. Ainsi, ajoute notre critique, Racine a employé une expression impropre quand il a dit : Ménécée, en un mot digne frère d'Hémon, Et trop indigne aussi d'être fils de Créon. Les Frères ennemis, act. III, sc. 3. Féraud peut avoir raison, pour l'usage ordinaire; mais ici son opinion n'est partagée ni par Geoffroy ni par M. Aimé-Martin.

Et trop indigne aussi d'être fils de Créon.

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C'est, dit le premier, un latinisme dont Racine voulait enrichir notre langue. Indignus en latin se prend très-souvent en bonne part : Flebilis indiguos elegeia solve capillos,

dit Ovide, dans son Elégie sur la

mort de Tibulle; mais, en français, dans le style sérieux, indigne a presque toujours un mauvais sens. Peutêtre faudrait-il laisser à nos poètes la liberté de l'employer même en bonne part? L'usage que fait ici Racine de ce mot indigne me parait heureux. »

«Le second remarque que Racine a employé plusieurs fois ce mot dans le même sens; il ajoute que « notre tragique lui a même donné très-heureusement les deux acceptions dans Bajazet, lorsque Acomat dit à Ibrahim :

Indigne également de vivre et de mourir. »

Cinq ans après avoir donné les Frères ennemis, c'est-à-dire à une époque où le style de Racine devait faire autorité, ce grand tragique n'a pas craint d'employer ce mot en bonne part:

Si vous daigniez, seigneur, rappeler la mémoire
Des vertus d'Octavie, indigne de ce prix.

Britannicus, act. 11, sc. 1.

C'est le cas de remarquer que Ronsard, avant Racine, avait pris ce mot en bonne part:

Cette belle Angevine,

Par ses vertus indigne De voir sitost la nuit (la mort ). Epitaphe de Mademoiselle Anne d'Esrat. L'épithète d'indigne que prennent les capucins n'est pas le produit de l'humilité des fils de saint François ; il est ancien chez nous. Gerson, qui vivait sous Charles vi, finit ainsi une lettre « Gerson, chancelier de Paris, indigne. »

INDILIGENT, E, adj. « C'est l'indiligent lecteur, qui perd mon subject, non pas moy. Il s'en trouvera tousiours en un coin quelque mot, qui ne laisse pas d'estre bastant, quoiqu'il soit serré. » liv. 1, c. 9.

MONT.

INDISCIPLINABLE, adj. « Solon peignit d'un seul trait l'indisciplinable caractère des Athéniens. » BARTHELEMY, Voy. du jeune Anacharsis.

INDISCIPLINE, s. f. mot nouveau, vers 1787. Ne dirait-on pas bien aujourd'hui l'indiscipline des troupes ? INDISCRET, ÈTE, adj. On a dit

d'un indiscret que c'est le plus grand ennemi que le silence et le secret aient jamais eu. Les indiscrets sont comme le cadran d'une horloge, qui marque au dehors ce qu'elle marque au dedans.

INDISCRETION, S. f. Patru a fait un usage délicat de ce mot. « On n'a vu que trop de ces malheureuses entretenir l'audience des indiscrétions de leurs vices. » C'est un véritable euphémisme.

INDISPENSABLE. s. m. nom que les femmes ont donné pendant quelque temps aux sacs dans lesquels elles mettent leur mouchoir, leur argent, etc.

INDISPOSÉ, ÉE, adj. et part. Dans la première acception, il signifie qui n'est pas dispos, malade dans la seconde, il signifie fáché contre quelqu'un, prévenu désavantageusement. Un ancien auteur, Gilles Corrozet, s'en est servi dans le sens de pas disposé, pas propre à : « Jean, fille du roy Loys onziesme fut répudiée pour avoir esté trouvée indisposée d'avoir lignée.» Thrésor des Histoires de France, feuille 14 vo.

Indisposé, demande le P. Bouhours, signifie-t-il autre chose, en notre langue, que malade? Le sieur de Beüil lui donne une signification toute nouvelle dans l'Imitation de J. C. : « Ainsi vous pourriez, dit-il, différer long-temps de communier et vous y trouver plus indisposé dans la suite. » Il fait là indisposé participe, comme vous voyez; et, afin qu'on n'en doute pas, il fait un verbe d'indisposer.

« Celui qui après m'avoir receû (reçu) se répand aussitost en des satisfactions extérieures, s'indispose beaucoup pour me recevoir.» «Cet indisposer me paroist, si je l'ose dire, quelque chose de monstrueux en nostre langue. A la vérité in joint avec les noms marque une négation en françois comme en latin, témoin : indigne, injuste, inutile; mais in joint avec les verbes ne marque point de négation, ni en latin, ni en françois, comme on peut juger par in

scribo, infringo, inuro, imprimo, etc. et je ne vois qu'infirmo et improbo qui soient irréguliers..... au lieu de in qui, étant joint avec un verbe, signifie dans, comme il paroist aux verbes inscrire, imprimer, etc. nous avons mis de à la tête des verbes simples, afin d'en faire des verbes négatifs dérégler, déplaire, délier. Voilà notre usage, de sorte qu'indisposer et indisposé, dans le sens que le traducteur lui donne, sont hors de la règle générale, et c'est ce qui m'en donne mauvaise opinion. » Doutes sur la langue françoise, proposés à Messieurs de l'Académie, par un gentilhomme de province, pag. 28, Paris, 1674.

M. Ramazzini a remarqué qu'on ne voit jamais plus de médecins indisposés, que lorsque tout le monde se porte bien.

INDISPUTABLE, adj. « Pour confirmer cette vérité indisputable.

GIRAC.

Bouhours le blâme, et Ménage le défend.

De ces dieux, fantômes charmans,
De votre verve poétique
Indisputables démens.

J. B. ROUSSEAU.

Ce mot ne parait pas très-lyrique; mais pourquoi ne l'emploierait-on pas en prose et dans le discours familier, puisqu'il épargne une périphrase?

INDOCILE, adj. Bossuet a dit du grand Condé : « Indocile à la flatterie, il en craignait jusqu'à l'apparence. On se rappelle le vers d'Horace :

Indocilis pauperiem pati.

Mais l'orateur français paraît ici supérieur au poète latin dont il a emprunté l'expression. « La langue française pourrait être enrichie de cette acception du mot indocile.» LAVEAUX. « Les faux dévots sont d'ordinaire indociles et visionnaires. » BOSSUET.

INDOCTE, adj. du latin indoctus (non docte, qui n'a pas été instruit). « N'avons-nous veu l'indocte ariogance de quelques acrestés mignons.>> Preface de Muret, sur ses Commentaires des Amours de Ronsard. Paris,

1553. Ce mot se trouve dans la comédie des Visionnaires :

Ce n'est pas pour toi que j'écris,
Indocte et stupide vulgaire,

DES-MARAIS.

INDOLENCE, s. f. INDOLENT, ENTE, adj. Indolent (qui ne se met en peine, qui ne se deult de rien), du latin dolere, qui nous a donné l'ancien verbe se douloir. Ces mots étaient nouveaux du temps de Scarron, qui les avait vus naître, et s'en moque dans ces vers:

Mille à la cour se servent d'indolence,
Pour exprimer langueur et nonchalance,
Et vous diront d'un ton triste et dolent:
Depuis huit jours je me trouve indolent.

Il parait qu'ils étaient établis du temps de Boileau, témoin ces deux

beaux vers:

Quatre bœufs attelés, d'un pas tranquille et lent, Promenaient dans Paris le monarque indolent.

Delille en a fait un usage hardi :

Une rivière lente Déroule en paix les plis de son onde indolente.

INDU, UE, adj. du latin indebitus (non dû, qui n'est pas dû), par extension, qui est contre la règle, contre l'usage, contre la bienséance. « Ils nuysoient les uns aux autres, entrans à heures dues et indues en la maison. » Les Contes de Despériers.

INDULGENCE, s. f. du latin indulgentia, qui a la même significa

tion.

« L'indulgence, dit quelque part M. Ch. Pougens, est la justice modifiée par la bonté. Une pareille définition ne se trouve que dans le cœur de l'homme essentiellement juste et bon; aussi M. Pougens l'at-il trouvée.

INDULGENT, E, adj. « Un homme inexorable à soi-même, n'est indulgent aux autres que par un excès de raison. » LA BRUYÈRE.

INDUSTRIEL, ELLE, adj. qui provient de l'industrie, qui est le produit de l'industric. Ce mot est de formation nouvelle.

C'est encore plus récemment qu'on dit substantivement les industriels, pour exprimer les partisans de l'industrie.

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