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AVERTISSEMENT DES ÉDITEURS.

Ainsi que les autres études déjà publiées, ce volume, qui reproduit l'une des parties les plus importantes de l'enseignement littéraire de M. Vinet, contient des fragments étendus écrits tout entiers de sa main. Pour les autres parties, les éditeurs ont eu à leur disposition les cahiers de plusieurs de ses élèves; ils les ont confrontés ensemble avec soin, et comparés jusque dans les moindres détails avec les notes abondantes laissées par l'auteur.

Le plan d'une histoire complète de la littérature française a toujours servi de base aux leçons de M. Vinet. Son intention, si sa vie s'était prolongée, était de revoir dans ce but les différents cours qu'il a donnés. Il fait allusion à ce projet dans sa correspondance, et il pensait que peu de temps lui aurait suffi pour achever le travail qu'il avait en vue. Cette révision n'a pu avoir lieu; mais peut-être trouverat-on que le cours donné à Lausanne de 1844 à 1845 sur les Poëtes du siècle de Louis XIV, pouvait s'en passer. Les éditeurs n'ont eu qu'à reproduire, avec autant d'exactitude qu'il leur a été possible, les paroles du maître.

L'élévation, la profondeur, la finesse des remarques sur notre grande époque littéraire, font du cours de M. Vinet une œuvre digne de l'attention de tous les lecteurs; son caractère essentiel est cependant celui d'un enseignement proprement dit.

DU

SIÈCLE DE LOUIS XIV.

I.

INTRODUCTION.

CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES.

MESSIEURS,

Nous voici arrivés au beau, au grand siècle de la littérature française. Mais ce n'est pas à ce titre seul que nous allons l'étudier. Pour le développement de l'intelligence, la littérature du dix-septième siècle a un intérêt pratique. Elle est ancienne déjà; elle est indépendante de notre époque, et par là même elle se trouve plus littéraire. L'étude de la littérature contemporaine, si tant est que ce soit une étude, n'offre pas les mêmes avantages. Elle peut devenir une véritable étude, sans doute; elle est capable de fournir, à des esprits fort exercés, matière à bien des appréciations; mais pour d'autres, et pour la jeu

nesse surtout, elle n'est pas littéraire. Il y a deux choses dans la littérature du temps : la littérature, soit, mais le temps aussi, le temps surtout, c'est-àdire tout ce qu'on aime, on sent, on souffre, on espère autour de vous, tout ce que vous-mêmes vous aimez, vous sentez, vous souffrez et vous espérez; une vie trop réelle, trop saisissante pour être de la littérature. Les émotions littéraires sont d'une autre sorte; humaines, j'en conviens, et comment non, puisque la littérature c'est l'homme? humaines, mais non contemporaines, présentes, individuelles. Ce qui reçoit en nous l'impression littéraire, c'est moins l'individu que l'homme; c'est dans les parties les plus générales de notre être que nous sommes atteints; et une émotion qui trouble l'âme, qui y jette l'incertitude et le désordre, qui réagit trop immédiatement sur la vie, n'est pas une émotion purement littéraire.

Ce n'est pas mon meilleur moi qui est impressionné par l'auteur qui me touche si vivement; l'action produite sur mon esprit se rapproche trop de celle d'un événement. Une œuvre littéraire ne doit être qu'un événement intellectuel d'une nature supérieure; elle ne doit exciter en nous qu'un intérêt, pour ainsi dire, désintéressé. Le propre de l'émotion vraiment littéraire, c'est de laisser de la place et de l'emploi à la pensée, c'est de s'aider même du concours de la pensée; la jouissance littéraire est humaine, je le répète encore; elle intéresse, elle remue tout l'homme; elle n'en laisse rien d'oisif et d'inoc

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