GALOPIN. Je vais lui dire, Madame, que vous voulez être sortie. URANIE. Arrêtez , animal, & la laissez monter', puisqus la sottile est faite. GALOPIN. URANIE. Ah, Cousine ! que cette visite m'embarralle à l'heure qu'il est ! ELISE. Il est vrai que la Dame est un peu embarrassante de son naturel ; j'ai toujours eu pour elle une furieuse aversion; &, n'en déplaise à la qualité, c'est la plus forte bête qui se soit jamais mêlée de raisonner. URAN I E. L'épithete est un peu forte. ELISE Allez , allez, elle mérite bien cela , & quclquc chose de plus, si on lui faisoit justice. Est-ce qu'il yaune personne qui soit, plus véritablement qu'elle, ce qu'on appelle précieuse, à prendre le mot dans fa plus mauvaise fignification ? URANIE. ELISE mais non pas de la chose : car enfin elle l'est depuis les pieds jufques à la tête, & la plus grande façonniere du monde. Il semble que tout son corps soit démonté, & que les mouvemens de ses hanches, de ses épaules & desa tête n'aillent que par ressorts. Elle affecte toujours un ton de voix languissant & niais, fait la moue pour montrer une petite bouche, & rouleles 'yeux pour les faire paroître grands. URANIE. ELISE. fort par con silence; & la Dame fut ausili mal fatisfaite de lui, que je le fus d'elle. URANIE. Tais-toi. Je vais la recevoir à la porte de la chambre. ELISE. Encore un mot. Je voudrois bien la voir mariée avec le Marquis, dont nous avons parlé. Le bel assemblage que ce seroit d'une précieuse & d'un turlupin ! URAN I E. Veux-tu te taire ? La voici. SCENE III. CLIMENE, URA NIE, ELISE. URANIE. VRAIMENT, c'est bien tard que... CLIMEN E. Hé , dc grace! ma chere, faites-moi vite donner un liege. URANIE à Galopin, Un fauteuil promptement. CLIME NE. URANIA, CLIMENE. URANI E. CLI ME NE, URANIE. CLIMEN E. Non, URANIE. Voulez-vous qu'on vous délace? CLIMENE. Mon Dieu, non. Ah ! URANI E. CLIMENE. URANIE CLIMEN E. Je viens de voir, pour mes péchés, cette méchante rapsodie de l'Ecole des Femmes. Je suis en. core en défaillance du mal de cæur que cela m'a donné, & je pense que je n'en reviendrai de plus de quinze jours. ELISE. Voyez un peu comme les maladies arrivent , sans qu'on y songe ! URANIE. Je ne sais pas de quel tenipérament nous sommes, ma cousine & moi; mais nous fûmes avant-hier à la même Piece, & nous en revînmes toutes deux saines & gaillardes. CLIMEN E. URAN I E 1 1 CLIMENE, Et vous n'en avez pas été jusques aux convulfions , ma chere? URAN I Ë. Je ne suis pas si délicate, Dieu inerci ; & je trouve pour moi que cette Comédie seroit plutôe capable de guérir les gens, que de les rendre malades, CLI MENE, Ah! mon Dieu , que dites-vous là ? Cette proposition peut-elle être avancée par une personne qui ait du revenu en sens commun? l'eut-on impunément, comme vous faites , rompre en visière à la raison ? & dans le vrai de la chole, eft-il un esprit si affamé de plaisanterie, qu'il puisse tårer dcs fadaises dont cette Comédie est assaisonnéc? Pour moi, je vous avoue que je n'ai pas trouvé le moindre grain de sel dans tout cela. Les enfans par l'oreille m'ont paru d'un goût déteftable ; la tarte à la crême m’a affadi le cour , & j'ai pensé vomir au potage. ELISE. Mon Dieu, qué tout cela est dit élégamment ! J'aurois cru que cette Picce étoit bonne ; mais Madame a une éloquence fi persuasive, elle tourne les choses d'une maniere fi agréable, qu'il faut être de son sentiment, malgré qu'on en ait. URANIE. Pour moi, je n'ai pas tant de complaisance; &, pour dire ma pensée, je tiens cette Comédie une des plus plaisantes que l'Auteur ait produites, |