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CONVENTION SÉPARÉE

en date du 4 août 1791 (4 zilhidjé 1205).

Au nom de la très sainte et indivisible Trinité.

La cour impériale et royale et la Sublime-Porte ottomane voulant, à l'heureuse époque de la pacification conclue, se donner des preuves réelles de leur amitié, prévenir tout ce qui pourrait dans la suite déranger l'harmonie parfaite des vastes confins de leurs dominations, et sanctionner, pour l'utilité réciproque, les seuls changements qu'elles se permettront jamais aux articles de tout le traité définitif de paix, signé à Sistow ce jourd'hui 4 d'août 1791, sont convenues par le canal de leurs ministres plénipotentiaires, savoir de la part de la cour impériale le baron Pierre Philippe d'Herbert Rathkeal, son conseiller aulique actuel, et le comte François Esterhazy de Galantha, son chambellan actuel, seigneur de la seigneurie de Tottis, et seigneur héréditaire du comté de Forchtenstein; et de celle de la Sublime-Porte ottomane, le reis effendi ou ministre des affaires étrangères, Birri Abdulah Effendi, l'ordou kadissi ou grand juge des armées ottomanes, Ismet Ibrahim Bey, et le rusnamegi ou contrôleur-général des finances, Durri Mehmed Effendi, des articles suivants.

ARTICLE PREMIER. Comme il y avoit, avant la guerre, une négociation ouverte sur les demandes de la cour impériale, des terrains du Banat de Temesvar, possédés par l'Empire ottoman, et les districts situés à la gauche de l'Unna; les deux hautes parties, considérant d'un côté les défectuosités de l'ancienne frontière dans ces parties, et voulant de l'autre y remédier, d'une manière invariable, à la satisfaction commune, ont arrêté l'arrangement final spécifié dans les articles 2 et 3, de la présente convention, par lequel arrangement elles consentent de terminer, foncièrement et définitivement,

tous les sujets de réclamation qui faisoient l'objet de la négociation citée.

ART. 2. En conséquence de quoi, la Sublime-Porte ottomane consent que le bourg et terrain du Vieux-Orsowa, jusqu'à la Czerna, reste et demeure dans la possession et souveraineté de la Cour impériale et royale; de façon que la Czerna fasse de ce côté-là, désormais et à perpétuité, la frontière de la monarchie Autrichienne, mais avec la condition expresse, que ladite cour impériale et royale ne puisse jamais fortifier ni le Vieux-Bourg d'Orsowa, ni aucune partie du terrain cédé par la Sublime-Porte en vertu du présent article. Pour la petite plaine, vis-à-vis le fort de l'Isle d'Orsowa, bornée par les confins spécifiés dans l'article 5 du traité de paix de Belgrade, elle restera pour toujours, dans le sens le plus strict, neutre entre les deux dominations. C'est-à-dire, que la souveraineté n'en appartiendra ni à l'une ni à l'autre, et les parties contractantes s'engagent à laisser ladite plaine absolument déserte, sans jamais permettre à personne d'y bâtir, d'y demeurer, ni d'exercer la culture.

ART. 3. Quant aux districts à la gauche de l'Unna, les deux hautes parties contractantes sont convenues que les limites des deux empires seront désormais, et à perpétuité, réglées de la manière que voici : La nouvelle ligne de séparation, d'après le dessin tracé en couleur rouge sur la carte annexée au présent article, commencera dans ces endroits, à la rive droite de la Glina, par le point marqué sur ladite carte, sera continuée le long d'un petit ruisseau, en laissant Czettin avec son district sous la domination impériale et royale; se dirigera le long de la banlieue du fort ottoman Sturlick ou Sturliz, marqué sur la carte en jaune, de façon que ce fort ainsi que la banlieue, déterminée par la portée d'un coup de canon, restent dans la possession de l'Empire ottoman; d'où cette ligne se portera en droit chemin sur la Corana, pour suivre, en remontant, le cours de cette rivière, jusque et compris Dresnick, qui restera, avec son district, sous la domination impériale et royale. Ensuite de quoi, ladite ligne se prolongera par la montagne de Smolianatz, et l'endroit de Tischiewo, elle longera la haute montagne, au pied de laquelle se trouve

l'endroit de Lapatz, marqué sur la carte en jaune; et sera continuée jusqu'à l'Unna à une heure de chemin au-dessus de Vacoup, marqué en jaune; d'où cette ligne prendra, en remontant, la rive gauche de l'Unna jusqu'à ses sources occidentales, suivant la ligne marquée en rouge, pour se terminer, par le plus droit chemin que donne la direction de hautes montagnes, au triple confin actuel, en laissant ainsi Sterniza turc sous la domination ottomane. La cour impériale et royale s'engage à ne jamais réparer, ni construire aucunes fortifications quelconques, sous quelque titre et pour quel motif que ce puisse être, dans toute l'étendue, sans exception, du district que la Sublime-Porte lui cède en vertu du présent article.

ART. 4. La cour impériale et royale, afin de répondre de son côté aux dispositions amicales, que la Sublime-Porte a montrées dans l'arrangement final des confins, tant du côté du bourg et terrain du Vieux-Orsowa, que sur la Haute-Unna, tel qu'il se trouve arrêté par les articles 2 et 3 de la présente convention séparée, et pour affermir et consolider d'autant plus l'heureuse paix qui vient d'être conclue entre les deux empires, déclare, de la manière la plus solemnelle, qu'elle reconnoit le présent arrangement de confins comme définitif, et s'engage à ne former à l'avenir aucune prétention au delà des limites fixées ci-dessus.

ART. 5. La cour impériale et royale, pour marquer sa satisfaction de l'arrangement des limites fixé ci-dessus, s'engage de rendre à la Sublime-Porte toutes les forteresses, châteaux et palanques, conquises sur l'Empire ottoman, dans l'état où elles se trouvent à présent, et sans détruire aucune des réparations, ni les ouvrages nouveaux qu'on y a faits, renonçant en conséquence à la clause de démolition stipulée à la fin de l'article 6 du traité définitif.

ART. 6. Pareillement la cour impériale et royale, secondant le désir, manifesté par la Sublime-Porte ottomane, de rentrer promptement dans la possession de toutes les conquêtes, concourt volontiers à rapprocher les délais fixés aux évacuations dans l'article 6 dudit traité, et établit avec la SublimePorte ottomane qu'on comptera ces délais du jour de la

signature du traité, et non plus de celui de l'échange des ratifications, savoir, 30 jours à compter de ce jourd'hui, 4 d'août, pour l'évacuation, cession et restitution de toute la Vallachie, et des cinq districts de la Moldavie; et de 60 jours à compter de la même époque pour toutes les autres conquêtes. Les deux parties s'engagent à effectuer l'échange des ratifications du traité de paix en 15 jours au plus tard, au lieu de 40, fixés par l'article 14 du traité définitif.

ART. 7. Les ratifications de cette convention séparée seront dressées séparément, mais échangées le même jour que les ratifications du traité de paix.

En conséquence de quoi, et en vertu des pleins pouvoirs de Sa Majesté impériale et apostolique, nous Pierre Philippe baron d'Herbert Rathkeal, et nous François comte Esterhazy de Galantha, ses ministres plénipotentiaires au congrès de paix, avons signé la présente convention et instrument authentique, et y avons fait apposer le cachet de nos armes. Fait à Sistow, à la salle des conférences, le quatrième jour du mois d'août, l'an de grâce 1791.

Le baron D'HERBERT RATHKEAL,

Le comte François ESTERHAZY DE GALANTHA.

APPENDICE

1. Extrait du journal du conseiller Barthélemy de Testa, en date de février 1788 (djémaziul-éwel 1202).

Le 7 du mois courant de février 1788, le jour de jeudi, vers dix heures du matin, arriva le courrier de Vienne, par lequel la très auguste cour impériale et royale envoyait à M. le baron d'Herbert Rathkeal, son internonce et ministre plénipotentiaire, le manifeste ou la déclaration de la guerre que S. M. l'Empereur avait pris la résolution de faire à la puissance ottomane, avec l'ordre exprès de la faire présenter au plus tôt à la Sublime-Porte. Ces deux documents étant parvenus en chiffres, le susdit ministre ordonna aussitôt que le tout fut déchiffré et traduit en langue turque, ensemble avec deux déclarations concernant l'une les sujets impériaux qui

se trouvent, tant dans la capitale que dans les Etats ottomans, placés sous la protection de la France, et l'autre les Toscans, placés sous celle des Deux-Siciles, de même qu'un mémoire d'accompagnement fait par le ministre impérial. Mais, bien que pour cette tâche on eût travaillé sans interruption toute cette journée et la nuit entière, rien ne put être prêt, si ce n'est vers minuit du jour subséquent du vendredi, 8 courant. Il s'ensuit que le matin venu du jour même du samedi, 9, le ministre, après avoir donné les instructions nécessaires au conseiller de Testa, lui remit les actes susmentionnés, avec l'ordre de se transporter immédiatement à la Porte et de les présenter.

Alors, ledit conseiller de Testa, ayant pris avec lui M. de Walemburg, se transporta à la Porte vers les dix heures du matin et demanda à avoir audience du Reïs effendi. Ayant su que ce ministre était en compagnie de quatre ou cinq ex-ministres et conseillers d'Etat actuels, il prit le parti d'avertir ledit ministre, par le drogman de la Porte, M. Alexandre Callimachi, qu'il avait ordre de le voir seul et de lui parler le plus tôt possible d'une affaire de grande importance, et qu'il le priait, s'il le pouvait, de passer pour un quart d'heure dans son cabinet. A cet avis, Rassid effendi y alla et y fit appeler ledit conseiller de Testa qui se présenta aussitôt et remplit sa commission. Le grand chancelier lui dit d'attendre il irait tout de suite informer le grand vizir et donnerait réponse. Une heure après environ, revenu dans ses appartements, il fit appeler M. de Testa et lui donna de la part de la Porte et du grand vizir la plus courtoise et la plus agréable réponse, à savoir que, malgré la déclaration de la cour impériale, la Porte considérait le ministre de S. M. comme son cher hôte jusqu'à son heureuse arrivée à la frontière, et qu'à la suite de la demande faite par le ministre de S. M. par ordre de sa cour, elle consentait au départ de ce dernier et donnerait les ordres nécessaires afin qu'il pût se transporter, tant par mer que, s'il le jugerait à propos, par terre, jusqu'aux frontières, en toute tranquillité et sécurité et avec tous les honneurs et toute la courtoisie dus à son caractère.

Lorsque ledit conseiller de Testa eut apporté cette réponse non moins digne qu'aimable et agréable à son ministre, celui-ci ordonna tout de suite de faire noliser, outre le bâtiment français appelé la Candeur, et commandé par le capitaine Bernis, qu'on avait entretenu déjà depuis trois mois, un autre bâtiment pour que toute la mission pût partir dans le même délai. Par suite de l'ordre donné par le ministre, le jour suivant du dimanche, 10 courant, on nolisa le navire appelé l'Heureuse-Marie, et commandé par le

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