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» de moi; mon cœur a besoin de votre présence >> et de votre affection... Je n'ai jamais été séduit par la prospérité; l'adversité me trouvera au-des>> sus de ses atteintes. J'ai plusieurs fois donné la paix aux nations lorsqu'elles avaient tout » perdu. D'une part de mes conquêtes, j'ai élevé » des trônes pour des rois qui m'ont abandonné. >> J'avais conçu et exécuté de grands desseins » pour la prospérité et le bonheur du monde... >> Monarque et père, je sens que la paix ajoute à » la sécurité des trônes et à celle des familles.

» Des négociations ont été entamées avec les » puissances coalisées. J'ai adhéré aux bases » préliminaires qu'elles ont présentées..... J'ai or» donné qu'on vous communiquât toutes les piè>> ces qui sont en original au portefeuille de » mon département des affaires étrangères. Rien » ne s'oppose de ma part au rétablissement de la » paix... Je connais et je partage tous les senti>> mens des Français... Je dis des Français, parce » qu'il n'en est aucun qui désirât la paix au prix >> de l'honneur... Sénateurs, conseillers d'État, » députés des départemens, vous êtes les orga>> nes naturels de ce trône, c'est à vous de don>> ner l'exemple d'une énergie qui recommande >> cette génération aux générations futures... >> Qu'elles ne disent pas de nous : Ils ont sacrifié

» les premiers intérêts du pays, ils ont reconnu » les lois que l'Angleterre a cherché vainement >> pendant quatre siècles à imposer à la France. » Vous ne devez pas craindre que la politique de » votre empereur trahisse jamais la gloire na» tionale. Le mon côté, j'ai la confiance que les >> Français seront constamment dignes d'eux et >> de moi... »

On m'apporta ce discours avant son impression.. Je fondis en larmes en le lisant... Chaque parole allait éveiller une émotion dans mon âme... Dans cette admirable et noble manifestation d'un héros venant demander assistance dans les revers d'une grande destinée, il y avait toute la vie d'un homme... Il y avait tout Napoléon dans ces vingt lignes...Oh! malheur!...malheur à qui a pu le méconnaître, et discuter froidement sur cette page de son existence politique!

Les amis qui me rendirent compte de cette séance, me dirent Tous que l'émotion avait été profonde lorsque l'empereur avait parlé, et que sa voix sonore et si gravement accentuée avait dit ces mots admirables aux représentans de la France...Là,il n'y avait pas de traîtres. Mon Dieu! devait-il donc les trouver autour de lui?... dans sa propre famille!... Lorsque ma pensée s'arrête

sur ces scènes déplorables, mon cœur se gonfle... Il me prend.comme un vertige et je souffre...je

souffre à mourir.

Il existait une pièce importante, que l'on tâchait de soustraire aux provinces et à la masse du peuple, parce qu'elle n'était autre chose qu'un manifeste incendiaire, qui mettait pour ainsi dire la tête de l'empereur à prix... Cette phrase seule était indigne, selon moi, des souverains alliés.

« Les souverains alliés ne font pas la guerre à » la France... Ils désirent qu'elle soit forte et heu» reuse... C'est à l'empereur-SEUL qu'ils font la » guerre..... ou plutôt à cette prépondérance qu'il » a trop long-temps exercée hors des limites de son » empire, pour le malheur de l'Europe et de la

>> France...>>

Ainsi, dans le même moment où l'on traitait avec Napoléon, on dévouait sa tête à une sorte de proscription... on la signalait à ses sujets comme une tête proscrite par le collège des rois d'Europe!... Cette proclamation de Francfort est bien adroite... Elle tendait à désunir la France elle-même, et jetait au milieu de nos provinces un sujet de discordes civiles, qui devait nous être mortel dans le moment fatal où nous avions

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surtout besoin d'accord et d'union entre la tête qui concevait et le bras qui exécutait.

Cependant, malgré ces premiers efforts, l'énergie naturelle à la France répondit d'abord à l'appel de Napoléon. D'épais bataillons se levaient encore, et ils auraient été une muraille vivante à son trône, si lui-même ne l'eût abattue par sa volonté.

Nous sommes arrivés maintenant à un sujet d'autant plus important, que jamais la France n'aurait pensé qu'un jour elle aurait à redouter l'homme qui va nous occuper. C'est Murat'. Déjà depuis long-temps sa conduite incertaine faisait soupçonner une défection... Il est pénible d'avoir à tracer ce mot... mais

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Je déclare que tout ce que je dis dans ces Mémoires relativement à la conduite du roi de Naples envers la France et l'empereur ne m'a en aucune manière été communiqué par M. le duc de La Vauguyon, qui, au contraire, conserve le plus grand attachement et le plus grand respect pour sa mémoire. Comme il craignait qu'on ne pût le penser parce qu'il est de mes amis, je lui ai promis de dire la vérité à cet égard. Je n'avais d'ailleurs besoin de personne pour établir mon opinion sur Murat. La France ainsi que moi n'avons qu'à regarder les faits. Murat a été malheureux, dira-t-on... Et Napoléon!!... Une agonie de sept années sur le rocher de Sainte-Hélène fait regarder la mort donnée par une balle comme un bonheur!...

XVII.

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quel autre terme puis-je employer, pour exprimer ce que j'éprouve moi-même, en reportant mes souvenirs à cette époque de la vie de Murat? Il le faut pour être au contraire impartiale, et cependant, peut-être au fond du cœur Murat ne voulait-il pas trahir. Il croyait même servir l'empereur en conservant l'Italie dans la main d'un prince de sa maison. Voilà du moins ce que peut faire croire sa correspondance. Je possède des lettres de lui, écrites à Napoléon, à la fin de 1813. Ces lettres sont d'une grande importance pour l'histoire, parce qu'elles montrent les grands projets qu'on avait alors sur l'Italie; elles sont d'ailleurs très peu connues parce que l'empereur était bien éloigné de l'intention de les rendre publiques lorsqu'il les reçut, et que de son côté Murat ne pouvait pas les publier, parce qu'elles auraient montré ses véritables intentions à l'Autriche, qui était jouée par lui avant le traité qu'il signa enfin avec elle. Pour être bien comprise, il me faut parler de la situation de l'Italie en 1813.

Les Autrichiens ne sont pas aimés aujourd'hui en Italie... Ce n'est pas que leur domination soit plus pénible à supporter qu'une autre, c'est parce que les Italiens ne peuvent en supporter aucune, si ce n'est celle de leurs compatriotes.

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