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Le troisième et le quatrième pape sont Félix IV et Boniface II, dont le premier a envoyé les chapitres dont a été composé le second concile d'Orange, et le second a confirmé le même concile, où la doctrine de saint Augustin a reçu une approbation qu'on verra bientôt'.

CHAPITRE XVI.

Des quatre conciles qui ont prononcé en faveur de la doctrine de saint Augustin, on rapporte les trois premiers, et notamment celui d'Orange.

Pour les conciles, le premier est celui de soixante-dix évêques tenu à Rome par le pape saint Gélase, en 494, où saint Augustin et saint Prosper sont mis au rang des orthodoxes: au contraire les livres de Cassien, le plus grand adversaire de saint Augustin, sont réprouvés; «et Fauste, son autre adversaire est rangé avec Pélage, Julien et les autres qui sont rejetés par les anathèmes de l'Eglise Romaine, catholique et apostolique. »

Le second concile est celui des saints évêques d'Afrique, bannis dans l'île de Sardaigne pour avoir confessé la foi de la Trinité". La lettre synodique de ces saints confesseurs porte une expresse condamnation de la doctrine de Fauste, et déclare que pour savoir ce qu'il faut croire, «on doit s'instruire avant toutes choses des livres de saint Augustin à Prosper et à Hilaire3, » en faveur desquels ils citent le témoignage de saint Hormisdas qu'on vient de voir.

Le troisième concile tenu sur cette affaire fut celui d'Orange II, le plus authentique de tous. Je passe sur ces matières le plus légèrement qu'il m'est possible, à cause qu'elles sont connues, et selon la même méthode, je n'observerai que cinq ou six choses sur le concile d'Orange.

CHAPITRE XVII.

Huit circonstances de l'Histoire du concile d'Orange, qui font voir que saint Augustin étoit regardé par les papes et par toute l'Eglise comme le défenseur de la foi ancienne. Quatrième concile en confirmation de la doctrine de ce Père.

La première observation est que ce concile assemblé principale1 Vid. ibid., p. 157 et seq. P. 157.

2 In ead. append., p. 152. ·

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3 Cap. XVII. - Ibid.,

ment de la province d'Arles et des lieux où les écrits de Fauste avoient réveillé les restes des pélagiens qui y étoient demeurés cachés depuis trente ans, traita les matières de la grace «par l'autorité et par un avertissement particulier du Saint-Siége : » secundùm auctoritatem et admonitionem Sedis apostolicæ1.

Secondement le Saint-Siége et le pape Félix IV qui y présidoit, non contens d'exciter la diligence de saint Césaire, archevêque d'Arles et de ses collègues, leur avoient envoyé « quelques chapitres tirés des saints Pères pour l'explication des saintes Ecritures,» ce qui montre en tout et partout le désir de conserver l'ancienne doctrine.

Troisièmement le pape Hormisdas avoit déjà parlé dans la querelle de Fauste «de ces chapitres conservés dans les archives de l'Eglise, » qu'il offrit même d'envoyer à un évêque d'Afrique, qui sembloit favoriser les écrits de Fauste.

Quatrièmement on voit par là qu'outre les décisions des conciles, où l'on exprimoit les principes les plus généraux pour la condamnation de l'erreur, le Saint-Siége conservait des instructions plus particulières tirées des écrits des Pères, pour les faire servir dans le besoin à un plus grand éclaircissement de la vérité; et ce fut apparemment ces mêmes chapitres que Félix IV envoya à saint Césaire «pour être souscrits de tous*,» ainsi qu'il est marqué dans la préface du concile d'Orange.

Cinquièmement il est bien constant que ces chapitres du concile d'Orange contiennent le pur esprit de la doctrine de saint Augustin et pour la plupart sont extraits de mot à mot de ses écrits, ainsi que l'ont remarqué le P. Sirmond dans ses notes sur ce concile, et tous les savans.

C'est aussi pour cette raison, et c'est la sixième observation, que le pape saint Boniface II, qui dans ce temps succéda à Félix IV, fait une expresse mention dans la confirmation de ce concile, « des écrits des Pères, principalement de ceux de saint Augustin et des décrets du Saint-Siége, » pour marquer les sources d'où la doctrine de ce concile étoit tirée.

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1 Præf.- 2 Ibid. 3 - Epist. ad Possess., sup. citat. Conc. Araus., Præf. —'Epist. ad Cæsar., ibid., p. 161.

En septième lieu on trouve dans ce concile tous les principes dont le même saint Augustin s'est servi pour établir la doctrine de la prédestination et de la grace, comme la suite le fera paroître.

En huitième et dernier lieu, loin qu'on soupçonnât ce Père d'avoir innové, c'étoit ses écrits qu'on employoit à combattre les nouveautés; et c'étoit lui qu'on citoit, lorsqu'il s'agissoit de soutenir la tradition des saints Pères, et on croyoit la doctrine renfermée et recueillie dans ses ouvrages: ce qui est quant à présent tout ce que je prétends prouver.

Il est encore à remarquer que le concile d'Orange fut confirmé par un concile de Valence, où saint Césaire ne put assister à cause de son indisposition', mais où il envoya seulement des évêques (de la province) avec des prêtres et des diacres; et ce fut de là qu'on envoya demander la confirmation au pape saint Boniface : ce qui nous fait voir encore un quatrième concile pour saint Augustin et contre Fauste, après quoi les semi-pélagiens ne furent plus ni écoutés ni soufferts.

Il faut remarquer que dans l'ancien manuscrit d'où le P. Sirmond a tiré la lettre qu'on vient de voir de Boniface II, ces mots étoient à la tête : «On trouve dans ce volume le concile d'Orange, que le pape saint Boniface a confirmé par son autorité; et ainsi quiconque croit autrement de la grace et du libre arbitre que ne l'exprime cette autorité (cette confirmation authentique du concile d'Orange), ou qu'il n'a été décidé dans ce concile, qu'il sache qu'il est contraire au Saint-Siége apostolique et à l'Eglise universelle répandue par tout l'univers. » En effet personne ne doute que ce concile ne soit universellement reçu, et par conséquent n'ait la force d'un concile œcuménique.

▲ Cypr., In vit. Cæsar. Arel., n. 35; vid. in append. jam cit., p. 162. — 2 Apud August., tom. X append., p. 161.

CHAPITRE XVIII.

Troisième contestation sur la matière de la grace à l'occasion de la dispute sur Gotescale, où les deux partis se rapportoient également de toute la question à l'autorité de saint Augustin.

La troisième contestation sur les matières de la grace, est celle du IXe siècle à l'occasion de Gotescalc. Les soutenans des deux côtés étoient orthodoxes, également attachés à l'autorité et à la doctrine de saint Augustin. C'est de quoi on ne peut douter à l'égard de saint Remi archevêque de Lyon, de Prudence évêque de Troyes, et des autres qui entreprirent en quelque façon la défense de Gotescalc 1; car tous leurs livres ne sont remplis que des louanges de saint Augustin; et ils posoient tous pour fondement la doctrine inviolable de ce Père, approuvée par les papes, et reçue par toute l'Eglise. Mais Hincmar archevêque de Reims, et les autres chefs du parti contraire, n'étoient pas moins affectionnés à ce saint docteur, à qui Jean Scot, dans son écrit de la Prédestination contre Gotescalc, donne l'éloge « de très-pénétrant dans la recherche de la vérité 2. » Il allègue ses derniers ouvrages de la Grace, en disant : « Que se soumettre à l'autorité de ce Père, c'étoit par elle se soumettre à la vérité même. Qui, dit-il, osera résister à cette trompette du camp des chrétiens? » Prudence lui disoit aussi : « Vous avez suivi saint Augustin, et si vous vous étiez opposé à ses discours très-véritables, aucun des catholiques n'auroit imité votre folie'; » tant les paroles de saint Augustin étoient réputées authentiques. Scot avoit écrit son traité par ordre d'Hincmar et de Pardule, évêque de Laon, comme il paroît par sa Préface. On voit donc par son sentiment combien ces évêques étoient attachés à la doctrine de saint Augustin. Aussi Hincmar le cite partout dans sa lettre à saint Remi de Lyon et dans son grand livre de la Prédestination, où il établit à la tête l'autorité de ce Père en cette matière par les mêmes preuves et avec autant de

2 De

Prud., ad Hincm. et Pardul, Vindic., tom. II, p. 6; Lup. Leon., q. 2; De præd., 1, 31; Rem. De Trib., epist. CVIII; Defens. Script. ver., cap. XLIX, etc. prædest., cap. XI, XV, XVIII. - 3 Prud., De prædest,, cap. IV.

TOM. IV.

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force que ses adversaires. Le principal fondement des défenses de Gotescale étoit le livre intitulé Hypognosticon ou Hypomnesticon, auquel ils ne donnoient cette autorité qu'à cause qu'ils présupposoient qu'il étoit de ce saint docteur. Ainsi dans une occasion dans laquelle il s'agissoit ou d'excuser, ou de combattre les excès et les duretés de Gotescale, saint Augustin, dont il abusoit, demeura la règle des deux partis; et sa doctrine sur la grace et la prédestination subsista partout en son entier : ce qui est le témoignage le plus assuré qu'on puisse produire de l'autorité qu'elle avoit acquise dans tout l'Occident; et ce qui fait le plus à notre sujet, c'est qu'elle n'étoit si révérée que parce qu'on supposoit comme indubitable que ce Père avoit parlé dans cette matière, «en conformité des Pères ses prédécesseurs : » Juxta Scripturæ veritatem et præcedentium Patrum reverendam auctoritatem1.

CHAPITRE XIX.

Quatrième contestation sur la matière de la grace à l'occasion de Luther et de Calvin, qui outroient la doctrine de saint Augustin; le concile de Trente n'en résout pas moins la difficulté par les propres termes de ce Père.

La quatrième et dernière contestation sur la matière de la grace, est celle qui fut suscitée au siècle passé par Luther et Calvin, qui se servoient du nom de saint Augustin pour détruire le libre arbitre, outrer la doctrine de la prédestination et de la grace, et faire Dieu auteur du péché. Mais le concile de Trente sut démêler leur artifice; et loin de donner atteinte à la doctrine de saint Augustin, il a composé ses décrets et ses canons des propres paroles de ce Père. C'est ce qui n'est ignoré d'aucun catholique, et c'est ce qui a fait dire au savant P. Petau, « que saint Augustin, après l'Ecriture, est la source d'où le concile de Trente puisé sur le libre arbitre, et la forme des sentimens et la règle des expressions: » Hic fons est à quo post canonicas Scripturas Tridentinum concilium et sentiendi de libero arbitrio formam et loquendi regulam accepit de sorte que la matière où l'on prétend trouver les in

1 Remig., cap. IV, IX. - Theolog. dogm., tom. III De opif. sex dier., lib. IV,

cap. v, n. 9.

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