Images de page
PDF
ePub

Ruisseau pur et sacré, qui, coulant à jamais, En dérobant ta source, épanches tes bienfaits.

DELILLE, trad. du Paradis perdu, ch. III. Le soleil de ses feux épanchant les trésors.

Le même, même chant.

On dit au figuré épancher son cœur, pour dire, Pouvrir avec sincérité, avec tendresse, avec confiance. Epancher son cœur dans le sein de l'amitié. Acad.

Il se construit aussi avec le pronom personnel.

Mon cœur pour s'épancher n'a que vous et les dieux.

RACINE, Phèdre, act. V, sc. 1.

Et lorsqu'avec mon cœur ma main peut s'épancher,

Vous fuyez mes bienfaits tout prêts à vous chercher.

Le même, Bérénice, act. III, sc. 1.

Le mot cœur fait passer l'expression de la main qui s'épanche. D'ailleurs la main qui s'épanche est dit pour les bienfaits, les grâces qui s'épanchent de la main qui les distribue, c'est une ellipse heureuse et hardie.

Racine dit s'épancher même des personnes, ce qui est une plus grande hardiesse. Il s'épanchait en fils, qui vient en liberté, Dans le sein de sa mère oublier sa fierté.

Britannicus, act. V, sc. 4.

ÉPANDRÉ. v. tr. Syn. Disperser, éparpiller, répandre étendre, semer.

Epandre, dit Voltaire, sur ce vers de Corneille :

Elle a soif de mon sang, elle a voulu l'épandre. Rodogune, act. V, sc. 4.

était un terme heureux qu'on employait au besoin au lieu de répandre : ce mot a vieilli; l'Académie dit également qu'il est vieux. Cela est vrai dans le style familier et surtout en prose. Mais en vers et même dans la prose poétique, il peut utilement remplacer le verbe répandre, il a même plus de noblesse que ce dernier.

Daigne du juste ciel la bonté souveraine

[ocr errors]

Et n'épandre sur vous que des prospérités.
CORNEILLE, Rodogune, act. II, sc. 3.
Ce fleuve épand ses eaux dans les vertes prairies.
Le char s'est arrêté près des murs de Pergame,
Aux bords où le Scamandre épand ses flots d'ar-
gent.

AIGNAN, trad. de l'Iliade, liv. XIV.
Quand quelquefois je porterai mes pas
Où le permesse épand ses eaux chéries.
GRESSET, Epitre à ma Muse.

Et l'olive onctueuse épandait ses flots d'or.

MILLEVOYE. L'astre éclatant sur son trône de flamme Des nuits en vain bannit l'obscurité.

Quand sur le monde if épand sa clarté

L'ombre des nuits est encor dans mon âme. Le même, Chant d'amour, tiré du poème d'Emma et Eginard.

Le Rhône dont les flots s'épandent dans les plaines, Sort des flancs tortueux de ces rochers lointains.

LA HARPE, Épitre à M. le comte de Schowaloff. ÉPÉE. n. f. (é-pe-e). Syn. Glaive, fer, cimeterre, dans le style noble. Lame, sabre, flamberge, brette, dans le style familier ou badin. Epit. Fidèle, invincible, homicide, terrible, sanglante, étincelante, flamboyante, tranchante, fumante, redoutable. Périph. Le tranchant de l'épée.

Il a brisé la lance et l'épée homicide
Sur qui l'impiété fondait son ferme appui.

J. B. ROUSSEAU, Ode XVI, liv. 1.
Ils s'attaquent cent fois, et cent fois se repoussent,
Leur courage s'augmente, et leurs glaives s'émous-

sent.

ÉPERDU, UE. adj. Qui est tout étonné, qui a l'esprit comme troublé par la crainte, ou par quelque autre passion. Elle sut qu'on altaquait son mari, elle courut aussitôt toute éperdue pour le secourir. Toute éperdue d'amour. Acad. Syn. Interdit, troublé, saisi, surpris, étonné, effrayé, épouvanté, consterné, abattu, découragé, égaré.

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue;
Un trouble s'éleva dans mon ame éperdue.

RACINE, Phedre, act. I, sc. 3.
Mais il me faut te perdre après l'avoir perdu;
Et
pour mieux tourmenter mon esprit éperdu, etc.
CORNEILLE, le Cid, act. III, sc. 4.

a Perdu et éperdu ne peuvent rimer, cause que l'un est le simple et l'autre le composé.

Sentiments de l'Académie sur le Cid.

Éperdu et perdu, signifiant deux choses absolument différentes, laissons aux poètes la liberté de faire rimer ces mots. Il n'y a pas assez de rimes dans le genre noble pour en diminuer encore le nombre. >>

VOLTAIRE, remarques sur Corneille, au lieu cité.

ÉPERON. n. m. Éperon dans la significa

tion de cette branche de fer dont le cavalier pique les flancs du cheval, n'est que du style familier, c'est pourquoi on le remplace, dans le style soutenu, par un équivalent ou par une périphrase.

[ocr errors][merged small]

C'est Fulgurin. Son pied frappe la poudre ;
Son flanc jamais n'a senti l'aiguillon.

MILLEVOYE, Charlemagne, chant III. Cependant à l'aide de l'encadrement ce mot peut être admis dans la plus haute poésie. C'est ainsi que M. Baour-Lormian a su l'employer dans la Jérusalem délivrée.

Soliman qui plus loin signalait sa furie,
Dès qu'il voit en péril cette tête chérie,
Aux flancs de son coursier plonge les éperons.
Chant IX.

et encore chant XVII :

Cent écuyers, cent pages, Rangés autour du char montent des coursiers blancs, Et d'un éperon d'or aiguillonneut leurs flancs. Voltaire a dit dans la Pucelle, chant XIV: La molette dorée

Des éperons armés de courtes dents
De son coursier pique les nobles flancs,

ÉPERON se dit aussi de l'ergot que quelques animaux, comme les coqs, ont au derrière de la patte. C'est ainsi que Rosset a dit de

cet oiseau :

De sanglants éperons arment ses pieds nerveux. Chevalier belliqueux, de ses deux éperons, 11 (le coq) défend ses plaisirs et venge ses affronts.

LALANNE.

ÉPERVIER. n. m. (é-pèr-vie devant une consonne). Epit. Cruel, furieux, vorace, ravisseur, prompt ¬, rapide, avide.

Un épervier vorace Au bec dur et tranchant, à la serre tenace. BAOUR-LORMIAN.

Selon la Fable, cet oiseau est le roi Nisus, frère d'Égée, roi d'Athènes, que les dieux ont métamorphosé en épervier, et qui ne cesse de poursuivre dans les airs et de déchirer à coups de bec Scylla, sa fille, qui elle-même a été changée en alouette. V. ALOUETTE.

Selon d'autres mythologues, Dédalion, fils de Lucifer, frère de Céys, et père de Chioné, fut si affligé de la mort de sa fille, que de désespoir il se précipita du sommet du Parnasse; mais Apollon touché de compassion, le soutint dans sa chute et le changea en épervier.

Il résulte de ces deux versions que Nisus, le vindicatif Nisus, et Dédalion sont quelquefois pris par les poètes comme synonymes d'épervier; il en résulte encore diverses périphrases. Le père de Scylla, le frère d'Égée, le roi de Nisa. Le fils de Lucifer, le frère

de Céyx, le père de Chioné.

DEDALION CHANGÉ EN ÉPERVIER. Peut-être croyez-vous que l'épervier sauvage Qui se repaît de sang, de proie et de carnage,

Fut de tout temps l'effroi du peuple des oiseaux?
Non, ce tyran des airs fut jadis un héros,
Un guerrier affamé de meurtre et de rapine.
Il dut, ainsi que moi, son illustre origine
A l'astre précurseur du jour et de la nuit,
Qui paraît le premier et le dernier s'enfuit.
Je cultivai la paix, l'hymen et ses doux charmes :
Dédalion n'aima que la gloire des armes.
Comme on le vit jadis par de sanglants exploits
Combattre, subjuguer les peuples et les rois,
Armé d'un bec tranchant, d'une cruelle serre,
Aux timides pigeons il déclare la guerre.

Après avoir peint la douleur que Dédalion ressentit de la mort de Chioué sa fille, que Diané avait percée d'une flèche pour se venger de ses mépris, le traducteur ajoute :

Au sommet du Parnasse il va chercher la mort;
Il s'élance. Apollon a pitié de son sort.
Soutenu dans les airs, il vole, il a des ailes :
Ses doigts sont transformés en des serres cruelles ;
Sa bouche, en s'alongeant, s'arme d'un bec retors:
Son courage est le même, et plus grand que son
corps ;

Et livrant aux oiseaux une guerre sanglante,
Il punit de son deuil la colombe iunocente.

DESAINTANGE, trad. des Métamorph., liv. II.

« Chez les Grecs cet oiseau était consacré au soleil, dont il était le prompt et fidèle messager. » NOEL, Dict. de la Fable.

ÉPI. La tête du tuyau de blé dans laquelle est le grain. Epit. Blond, doré, jaunissant, mûr, riche, fécond, hérissé. barbu, abondant, nourricier, pliant, ondoyant, longsuperbe, humble-, vert, précoce, hâtif, tardif, frêle, paresseux, languissant, maigre, mourant, riant, flottant. Périph. L'or des blonds épis, For fécond des épis, l'or des épis flottants; une moisson, une forêt d'épis; les présents de Cérès.

Ces épis balançant leurs têtes jaunissantes.

LÉONARD.

Dans un champ couronné des présents de Cérès,

AIGNAN.

Ces champs où frêle encor l'humble epi se balance. MILLEVOYE.

L'épi germe et s'élance impatient d'éclore.

ROUCHER, poème des Mois, chant II.
Te's les épis dorés qu'agite un vent folâtre
Dans le sein de Cérès se bercent mollement.
DE BRIDEL.

L'épi, sur les sillons mollement agité,
Jaunit et prend l'éclat des beaux jours de l'été.
MICHAUD.

Loin des yeux de Cérès, le blé monte, jaunių,
S'alonge, en nappe d'or mollement s'applanit;
Tantôt les blonds épis dont la tige vacille,
Se foulent onduleux dans un lointain mobile,
Et tantôt de leurs fronts humiliant l'honneur,
Ils semblent inviter la faux du moissonneur.

BOISJOSLIN, la Forêt de Windsor.

Dans son germe, en naissant, on voit mourir l'épi. THOMAS.

V. FROMENT, MOISSON. ÉPICIER. n. m. (é-pi-cié devant une consonne). Nous disons, dans le style familier, et proverbialement, qu'un ouvrage est bon à mettre à la beurrière, à envoyer chez l'épicier, pour faire entendre qu'un livre, qu'un ouvrage est mauvais. C'est en ce sens que Boileau a dit, en parlant du sonnet :

A peine dans Gombaut, Mainard et Malleville, En peut-on admirer deux ou trois entre mille. Le reste aussi peu lu que ceux de Pelletier, N'a fait de chez Sercy qu'un saut chez l'épicier. Art poétique, ch. II.

Cette expression vient de l'usage de vendre aux épiciers le papier inutile pour leur sérvir à envelopper leurs marchandises,

Il est fàcheux, grand roi, de se voir sans lecteur,
Et d'aller du récit de ta gloire immortelle
Habiller chez Fruncœur le sucre et la canelle.

[blocks in formation]

L'épigramme plus libre (que le sonnet) en son tour plus borné,

N'est souvent qu'un bon mot de deux rimes orné. BOILEAU, Art poétique, ch. II.

« L'un de ses plus grands mérites, dit M. Pommereul, étant de pouvoir se graver facilement dans la mémoire, elle s'expose à le perdre, si sa longueur peut la fatiguer. La brièveté, la concision sont ses principaux attributs, l'élégance, la singularité et le piquant de son expression achèvent de la rendre recommandable. »

Notice sur Martial, en tête de sa traduction de quelques épigrammes de Martial.

L'épigramme n'est pas toujours satirique, et lorsqu'elle n'est point assaisonnée du sel mordant de la satire, elle doit, et c'est ce qui la distingue des autres pièces de poésie, renfermer un trait délicat de sentiment ou une moralité piquante. Entr'autres exemples de ce genre d'épigramme, nous citerons la suivante tirée du livre premier des épigrammes du poète Lebrun.

LE POÈTE RÉSIGNÉ.

La foudre en main quand Jupiter fait rage,
Sur des lauriers tomba-t-elle jamais ?
Ses feux, dit-on, en respectent l'ombrage;
Mais de l'Amour comment parer les traits?
Amour peut tout: Phébus, Jupiter même
Contre un enfant ne sauraient prévaloir.
Il fit Adèle; il prétend que je l'aime :
Ce qu'Amour veut, il faut bien le vouloir.

Quelquefois aussi l'épigramme renferme une historiette plaisante ou le récit d'un fait sérieux. Les deux épigrammes suivantes empruntées à Marot, fourniront des preuves de ce que j'avance :

Un gros prieur son petit-fils baisait
Et mignardait au matin en sa conche,
Tandis rôtir sa perdrix l'on fesait :

Se lève, crache, esmeutit (éternue) et se mouche;

La perdrix vire (considère); au sel de broc en bouche,

La dévora, bien savait la science,

Puis, quand il eut prins (pris) sur sa conscience
Broc de vin blanc, du meilleur qu'on élise,
Bon Dieu, dit-il, donne-moi patience;
Qu'on a de maux pour servir sainte église.

Lorsque Maillard, juge d'enfer, menait
A Montfaucon Sanıblançai l'ame rendre,
A votre avis lequel des deux tenait
Meilleur maintien ? Pour vous le faire entendre,
Maillard semblait homme que mort va prendre,
Et Samblançai fut si ferme vieillard,
Que l'on cuidait (pensait) pour vrai qu'il menât
pendre

A Montfaucon le lieutenant Maillard.

« Voilà, dit Voltaire, en parlant de cette dernière pièce, de toutes les épigrammes, dans le goût noble, celle à qui je donnerais la préférence. »

Il est vrai cependant de dire qu'une opinion assez générale restreint ce genre de poésie, et qu'une épigramme n'est guère pour nous qu'un trait de satire ou de critique. Mes malades jamais ne se plaignent de moi, Disait un médecin d'ignorance profonde;

Ah! repartit un plaisant, je le croi, Vous les envoyez tous se plaindre en l'autre monde.

La pointe de l'épigramme n'est jamais plus piquante que lorsqu'elle est si détournée qu'elle en devient, pour ainsi dire, imprévue.

L'épigramme est un jeu d'escrime :
L'adresse à la force s'y joint.
Qui sait mal déguiser sa rime
De la cuirasse offre le joint.
On évite aisément l'atteinte
D'un coup pesant et porté droit;
Mais comment esquiver la feinte
Que vous glisse un tireur adroit?

LEBRUN.

Qui croirait que c'est Racine qui, par cette épigramme si connue, nous a donné en ce geure, le meilleur modèle que nous ayons:

A sa Judith, Boyer, par aventure,
Était assis près d'un riche caissier;
Bien aise était, car le bon financier
S'attendrissait et pleurait sans mesure.
Bon gré vous sais, lui dit le vieux rimeur;
Le beau vous touche, et ne seriez d'humeur
A vous saisir pour une baliverne.

Lors le richard, en larmoyant, lui dit :
Je pleure hélas ! pour ce pauvre Holopherne,
Si mechamment mis à mort par judith.

La plupart des épigrammes de l'anthologie grecque sont fines et gracieuses, en voici quelques-unes traduites avec une brièveté dont on a souvent reproché à notre langue d'être privée.

Sur Laïs qui remit son miroir dans le
temple de Vénus.

Je le donne à Vénus puisqu'elle est toujours belle,
Il redouble mes ennuis :

Je ne saurais me voir dans ce miroir fidèle
Ni telle que j'étais, ni telle que je suis.

Sur une statue de Vénus.

Oui, je me montrai toute nue
Au dicu Mars, au bel Adonis,
A Vulcain même, et j'en rougis;
Mais Praxitele! où m'a-t-il vue?

ÉPIQUE. adj. des deux genres. Il se dit d'un poème d'une certaine étendue, où le poète raconte quelque action' héroïque qu'il embellit de fictions, d'épisodes, d'évènements merveilleux.

La poésie épique Se soutient par la fable et vit de fictions.

On dit aussi la trompette épique, la muse épique, des vers épiques, un poète épique. V. ÉPOPÉE.

ÉPISODE. n. m. (é-pi-zo-de). Ce mot pendant long-temps n'a point eu de genre fixe, aujourd'hui il est masculin.

Suspendez votre cours, et, reprenant haleine,
Au lecteur fatigué présentez à propos
D'un épisode heureux l'agréable repos.

DELILLE, l'Homme des champs, ch. IV. L'épisode est un incident, une action détachée que le poète lie à l'action principale, pour l'embellir et pour récréer le lecteur par une variété étrangère en quelque sorte à celle du sujet même. L'épisode d'Aristée dans le quatrième livre des Georgiques, épisode qu'on peut lire dans l'excellente traduction de Delille, est certainement un des plus

beaux modèles du genre. Après Virgile, je citerai le portrait de la Mollesse dans le Lutrin et la description du temple de l'Amour dans la Henriade.

La tragédie comporte peu d'épisodes, encore doivent-ils y être très-courts; ceux du poème épique ont plus d'étendue.

« La tragédie développant un seul fait dans un seul lieu et dans un seul jour, doit jusqu'au dénouement agiter l'ame des spectateurs par le passage continuel de la crainte

l'espérance et de l'espérance à la crainte. Elle doit les effrayer ou les attendrir, sans leur permettre aucun repos. Si elle leur laisse quelque distraction, la terreur et la pitié s'éloignent et disparaissent. Mais l'épopée a plus d'espace et de temps pour disposer son action en marchant vers le but, elle peut prendre quelques détours agréables pour embellir son chemin. Tour-à-tour pathétique et riante, voluptueuse et terrible, guerrière et champêtre, elle doit avoir, en quelque sorte, la variété de toutes les scènes de la nature qu'elle embrasse. Les épisodes qui sout un défaut dans la tragédie deviennent, au contraire, l'ornement de l'épopée, quand le goût sait les choisir et les placer, en les subordonnant à l'action principale. >>

DELILLE, Traduction de l'Énéide, remarques sur le 5e livre.

Les épisodes sont des sites agréables qui délassent par intervalle le voyageur dont les regards embrassent un vaste horizon.

L'esprit veut des repos. Au fond du Louvre an. tique,

Si du Laocoon le marbre pathétique

Développe aux regards ses tragiques donleurs,
Un plaisir sombre et doux a fait couler mes pleurs;
Il arrête vos pas dans ces lieux pleins de charmes ;
Vous leur viendrez souvent redemander des larmes.
C'est ainsi qu'animé d'un rapide intérêt,
L'épisode à vos chants donne un nouvel attrait.
Que Pandore a de grâce, ou plutôt d'artifice!
Je pleure avec Orphée, et répète Eurydice!...
Osez donc, élevés sur les sommets de l'art,
Égarés savamment, tenter un bel écart.
L'ordre, dans ces détours, trace une marche sûre,
Les détours vont au but: c'est l'art de la nature,
Admirable, puissante en sa vaste unité,
Riante, inépuisable en sa variété.

CHAUSSARD, Poétique secondaire, chant I. ÉPISODIQUE. adj. des deux genres. Qui appartient à l'épisode. Action épisodique, personnage episodique. Acad.

On appèle encore épisodique ce qui sert d'épisode un morceau épisodique, une scène épisodique.

ÉPITAPHE. n. f. Inscription que l'on met sur un tombeau, ou supposée faite pour être mise sur un tombeau. Epit. Funéraire,

sépulcrale, honorable, triste, familière pompeuse, courte, laconique, impertinente, satirique.

L'épitaphe renferme ordinairement une lonange ou un trait de satire; on aime à y trouver une réflexion morale.

ÉPITAPHE DE J. RACINE.

Dn théâtre français l'honneur et la merveille,
Il sut ressusciter Sophocle en ses écrits;
Et dans l'art d'enchanter les cœurs et les esprits
Surpasser Euripide et balancer Corneille.

BOILEAU.

Ci-git ma femme: ah ! quelle est bien
Pour son repos et pour le mien !

Une des qualités principales de l'épitaphe qui n'est qu'une inscription, est d'être laconique, afin qu'elle reste plus facilement gravée dans la mémoire; elle s'écrit d'ailleurs en vers de toutes mesures; la disposition des rimes est à la volonté du poète.

ÉPITHALAME. n. m. Chanson ou petit poème composé à l'occasion d'un mariage, et à la louange des nouveaux mariés. Epit. Tendre, amoureux, gaillard, ingénieux, froid, glacé, Gresset a dit un épithalame à la glace.

Déja dans mon cerveau roule un épithalame Que devant qu'il soit peu je prétends mettre au net. PIRON, la Métromanie, act. II, sc. 8.

Quand par les nœuds d'hymen la fille devient femme

Quand mademoiselle est madame, Parents, amis, voisins, tout vient se réjouir De l'heureux succès de sa flamme; Phébus même en ses vers a soin de l'applaudir, Mais bientôt le regret cause plus d'un soupir. Si j'osais hasarder une fausse épigramme, Je dirais que l'épithalame

Est l'épitaphe du plaisir.

PANNARD.

Dans ce genre de poésie les rimes et la mesure des vers dépendent de la volonté du poète.

ÉPITHÈTE. n. f. L'épithète est un adjectif ou un participe joint à un nom ɔu à un pronom pour lui communiquer de la grâce ou de la force. Epit. Heureuse, riche, belle, juste, gracieuse, expressive, énergique, froide, vague, oisive, ridicule, forcée, déplacée, fausse.

Encor si pour rimer, dans sa verve indiscrète, Ma muse au moins souffrait une froide épithète, Je ferais comme un autre, et, sans chercher si loin,

J'aurais toujours des mots pour les coudre au besoin.

ROILEAU.

a Toute épithète qui ne produit aucun effet, et qui n'ajoute rien à la chose dont on parle est vicieuse. » ROLLIN.

Le mot table n'a rien de noble par luimême, Delille relève cette expression par une seule épithète :

Il (Enée) n'a pas oublié les services d'Evandre,
Sa table hospitalière et son accueil si tendre.
Trad. de l'Enéide, liv. X.

Il s'éloigne et reprend sa morne rêverie :
Mais la chanson du pâtre assis dans la prairie
Apprivoisa du moins sa farouche douleur.
LAHARPE, Epitre à M. le comte de Schowaloff,
sur les effets de la nature champêtre.

[ocr errors]
[merged small][ocr errors][merged small]
[ocr errors]

ÉPITHÈTE, ADJECTIF. Syn. L'épithète et l'adjectif se joignent au substantif, pour en modifier l'idée principale par des idées secondaires; mais l'idée de l'adjectif est nécessaire, elle sert à déterminer et compléter le sens de la proposition; et l'idée de l'épithète n'est souvent qu'utile, elle sert à l'agrément et à l'énergie du discours. Retranchez l'adjectif d'une phrase, elle est incomplete, ou plutôt c'est une autre proposition; retranchez-en l'épithète, la proposition pourra rester entière, mais elle sera déparée ou affaiblie. L'adjectif appartient à la grammaire et à la logique; l'épithète appartient à la poésie et à l'éloquence. Dans cette phrase, la vertu sévère n'attire point les cœurs, sévère est adjectif; dans celle-ci, on moissonne les épis dorés, dorés est épithète. » ROUBAUD, Dict. des Synon. franç., no 431. V. Traité de la Versific., pag. 2.

ÉPITRE. n. f. Syn. Lettre. Epitre se dit plus particulièrement des lettres écrites en vers. Les Epitres de Boileau.

Epit. Jolie, agréable, gracieuse, aimable, légère, facile, aisée, charmante, familière, béroïque, satirique, sublime, badine, enjouée.

« PrécédentContinuer »