Et, pour les bien goûter, mon amour, chere Alcmene, ALCMENE. C'est de ce nom pourtant que l'ardeur qui me brûle JUPITER. Ah! ce que j'ai pour vous d'ardeur et de tendresse Passe aussi celle d'un époux; Et vous ne savez pas, dans des moments si doux, Vous ne concevez point qu'un cœur bien amoureux De la maniere d'être heureux. En moi, belle et charmante Alcmene, Vous voyez un mari, vous voyez un amant; Mais l'amant seul me touche, à parler franchement, Et je sens, près de vous, que le mari le gêne. Cet amant, de vos vœux jaloux au dernier point, Souhaite qu'à lui seul votre cœur s'abandonne; Et sa passion ne veut point De ce que le mari lui donne. Il veut de pure source obtenir vos ardeurs, Dans le scrupule enfin dont il est combattu, Que vous le sépariez d'avec ce qui le blesse, Amphitryon, en vérité, Vous vous moquez de tenir ce langage; JUPITER. Ce discours est plus raisonnable, Alcmene, que vous ne pensez. Mais un plus long séjour me rendroit trop coupable, Et du retour au port les moments sont pressés. Adieu. De mon devoir l'étrange barbarie Pour un temps m'arrache de vous; Mais, belle Alcmene, au moins, quand vous verrez l'époux, Songez à l'amant, je vous prie. ALCMENE. Je ne sépare point ce qu'unissent les dieux; SCENE IV. CLEANTHIS, MERCURE. CLEANTHIS, à part. O ciel! que d'aimables caresses Est loin de toutes ces tendresses! La Nuit, qu'il me faut avertir, Et, pour effacer les étoiles, Le Soleil de son lit peut maintenant sortir. MERCURE. Et comment donc ? ne veux-tu pas Mais avec cette brusquerie, MERCURE. Le beau sujet de fâcherie! Nous avons tant de temps ensemble à demeurer! Mais quoi! partir ainsi d'une façon brutale, MERCURE. Diantre! où veux-tu que mon esprit Quinze ans de mariage épuisent les paroles; Regarde, traître, Amphitryon; Vois combien pour Alcmene il étale de flamme; MERCURE. Hé! mon dieu! Cléanthis, ils sont encore amants. Et ce qui leur sied bien dans ces commencements, A pousser les beaux sentiments! CLEANTHIS. Quoi! suis-je hors d'état, perfide, d'espérer Qu'un cœur auprès de moi soupire ? MERCURE. Non, je n'ai garde de le dire; Mais je suis trop barbon pour oser soupirer, Mérites-tu, pendard, cet insigne bonheur MERCURE. Mon dieu! tu n'es que trop honnête; Comment! de trop bien vivre on te voit me blâmer! MERCURE. La douceur d'une ferme est tout ce qui me charme; CLEANTHIS. Il te faudroit des cœurs pleins de fausses tendresses, MERCURE. Ma foi, veux-tu que je te dise? Un mal d'opinion ne touche que les sots; Comment! tu souffrirois, sans nulle répugnance, MERCURE. Oui, si je n'étois plus de tes cris rebattu, |