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LES AVENTURES

DE TÉLÉMAQUE

SUIVIES DES AVENTURES D'ARISTONOUS

ÉDITION REVUE SUR LES MEILLEURS TEXTES

ET ACCOMPAGNÉE DE NOTES GÉOGRAPHIQUES

PARIS

LIBRAIRIE HACHETTE ET Cia

79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79

HARVARD UNIVERSITY LIBRARY

42*302

NOTICE SUR FÉNELON

ET LE TÉLÉMAQUE.

François de Salignac de la Mothe Fénelon naquit le 6 août 1651 au château de Fénelon, dans le Périgord. Après avoir fait ses premières études au milieu de sa famille, il alla terminer ses humanités à l'université de Cahors, et étudier la philosophie à Paris, au collége Du Plessis. On rapporte que, comme Bossuet, il fit éclater un jour dans les exercices de l'école l'éloquence qui devait plus tard l'illustrer.

Au sortir du séminaire de Saint-Sulpice, à peine âgé de vingt-quatre ans, il songe à se consacrer aux missions du Canada: on l'en détourne; son imagination le porte aussitôt vers la Grèce et le Levant; mais la faiblesse de sa santé et les conseils de ses supérieurs le retiennent en France. Il est chargé de la direction des Nouvelles-Catholiques, couvent de jeunes protestantes récemment converties, et demeure pendant dix ans à la tête de cette institution. C'est là qu'il conçut et composa son premier ouvrage, le traité de l'Education des filles. Mais il ne le publia que quelques années plus tard (1687).

Lors de la révocation de l'édit de Nantes (1685), une mission lui fut confiée dans la Saintonge et l'Aunis; on offrait de prêter à son zèle apostolique le secours des dragons du roi; Fénelon refusa de s'appuyer sur la terreur des armes, et il eut la joie d'opé rer sans leurs concours de nombreuses conversions.

Fénelon était arrivé à l'âge de trente-huit ans; l'éclat de son éloquence, qui s'était déployée dans sa mission en Saintonge et dans son célèbre Sermon pour la fête de l'Épiphanie, ses vertus, et l'estime qu'il avait inspirée aux plus hauts personnages de la cour et de l'Eglise, tout le désignait pour l'épiscopat ou pour une autre fonction éminente. Le lendemain du jour où le duc de Beauvillier fut nommé gouverneur du duc de Bourgogne (1689), Fénelon se vit appelé auprès du jeune prince en qualité de précepteur, comme Bossuet l'avait été auprès du dauphin. Le duc de Bourgogne annonçait les plus mauvaises dispositions: c'était un caractère dur, emporté, opiniâtre, hautain, incapable de souffrir la moindre résistance à ses caprices; mais son esprit était juste et son intelligence très-vive. C'était peu pour Fénelon de développer les qualités de son élève : il entreprit de dompter l'humeur farouche du jeune prince, et il en vint à bout; mais ce ne fut pas sans efforts et sans luttes: il annonça même un instant à son élève l'intention de renoncer à une éducation si pénible. Enfin, tel fut l'ascendant qu'il sut exercer sur le duc de Bourgogne, en s'adressant à la fois à son esprit et à son cœur, qu'il devint maître de cette nature rebelle et la transforma au gré de ses désirs. Cette impétuosité se changea en douceur, cette fierté en modestie, cette opiniâtreté en soumission, et presque en faiblesse.

Nous devons à l'éducation du dauphin par Bossuet quelques uns des ouvrages les plus remarquables de l'évêque de Meaux, par exemple, le Discours sur l'histoire universelle et le traité de la Connaissance de Dieu et de soi-même : comme Bossuet dont il était

déjà l'émule, Fénelon composa pour son élève plusieurs écrits qui sont des modèles, et qui restent comme consacrés à l'éducation de l'enfance et de la jeunesse les Fables, les Dialogues des morts, le Télémaque. Aucun de ces livres, ce dernier moins que tout autre, n'était destiné à la publication.

Les heureux résultats obtenus par Fénelon dans l'éducation du duc de Bourgogne, joints à sa réputation d'éloquence, lui valurent, en 1693, une place à l'Académie française, et en 1695, l'archevêché de Cambrai. A peine venait-il d'être sacré par Bossuet, son protecteur et son ami, qu'une fâcheuse querelle théologique désunit et irrita l'un contre l'autre deux hommes que la postérité confond dans une égale admiration. L'âme tendre de Fénelon s'était laissé séduire par certaines rêveries mystiques, et lui avait inspiré un livre dont l'orthodoxie parut suspecte, les Maximes des saints (1697). Bossuet déféra ce livre à la cour de Rome; mais les rigueurs du roi précédèrent l'arrêt qui devait le condamner. Fénelon fut éloigné de la cour ainsi que du prince son élève, et relégué à Cambrai. Il s'éloigna sans se plaindre, et montra dans sa retraite la plus grande dignité. Soumis et résigné, il s'inclina devant la censure qui ne tarda pas à frapper les Maximes des saints, et abjura ses erreurs dans un mandement plein d'une humilité touchante.

Bientôt un nouveau coup vint accabler Fénelon et rendre sa disgrâce irrévocable. Il avait composé une espèce de roman ou de poëme épique en prose, les Aventures de Télémaque. Dans sa pensée, ce livre était destiné au duc de Bourgogne, et son intention était sans doute de l'offrir au prince vers l'époque

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