N'est qu'un pur stratagème, un trait facétieux, MASCARILLE. Voyez un peu la fourbe! LÉANDRE. Et pourtant Trufaldin Est si bien imprimé de ce conte badin, Mort si bien à l'appât de cette faible ruse, MASCARILLE. C'est pourquoi désormais il la gardera bien, LÉANDRE. Si d'abord à mes yeux elle parut aimable, Et je suis en suspens, si pour me l'acquérir MASCARILLE. Vous pourriez l'épouser ? LÉANDRE. Je ne sais mais enfin, Si quelque obscurité se trouve en son destin, Sa grâce et sa vertu sont de douces amorces Qui, pour tirer les cœurs, ont d'incroyables forces. MASCARILLE. Sa vertu, dites-vous ? LÉANDRE. Quoi ! que murmures-tu? Achève : explique-toi sur ce mot de vertu. MASCARILLE. Monsieur, votre visage en un moment s'altère, Non, non, parle. LÉANDRE. MASCARILLE. Hé bien donc, très-charitablement Je vous veux retirer de votre aveuglement. Cette fille... LÉANDRE. Poursuis. MASCARILLE. N'estrien moins qu'inhumaine; Dans le particulier elle oblige sans peine ; Et son cœur, croyez-moi, n'est point roche après tout LÉANDRE. Célie... MASCARILLE. Oui, sa pudeur n'est que franche grimace, Qu'une ombre de vertu qui garde mal la place, Et qui s'évanouit, comme l'on peut savoir, Aux rayons du soleil qu'une bourse fait voir. LÉANDRE. Las! que dis-tu? Croirai-je un discours de la sorte? MASCARILLE. Monsieur, les volontés sont libres; que m'importe ? LÉANDRE. Quelle surprise étrange! MASCARILLE, à part. Courage! s'il se peut enferrer tout de bon, Nous nous ôtons du pied une fàcheuse épine. LÉANDRE. Oui, d'un coup étonnant ce discours mʼassassine. MASCARILLE. Quoi, vous pourriez...? LÉANDRE. Va-t'en jusqu'à la poste, et voi Je ne sais quel paquet qui doit venir pour moi. (Seul, après avoir révé. ) Qui ne s'y fût trompé? Jamais l'air d'un visage, SCÈNE III. LÉLIE, LEANDRE. LÉLIE. Du chagrin qui vous tient quel peut être l'objet ? LEANDRE. Moi? LÉLIE. Vous-même. LÉANDRE. Pourtant je n'en ai point sujet. Je vois bien ce que c'est, Célie en est la cause. LÉANDRE. Mon esprit ne court pas après si peu de chose. LÉLIE. Pour elle vous aviez pourtant de grands desseins: Mais il faut dire ainsi lorsqu'ils se trouvent vains. LÉANDRE. Si j'étais assez sot pour chérir ses caresses Je me moquerais bien de toutes vos finesses. Quelles finesses donc ? LÉLIE. LÉANDRE. Quoi ? Mon dieu! nous savons tout. LÉANDRE. Votre procédé de l'un à l'autre bout. LÉLIE. C'est de l'hébreu pour moi, je n'y puis rien comprendre. Feignez si vous voulez de ne me pas entendre; LÉLIE. Tout beau, tout bean, Léandre! LÉANDRE. Ah!que vous êtes bon! Allez, vous dis-je encor, servez-la sans soupçon; Léandre, arrêtez là ce discours importun. Mais sur-tout retenez cette atteinte mortelle. Sachez que je m'impute à trop de lâcheté D'entendre mal parler de ma divinité, Et que j'aurai toujours bien moins de répugnance A souffrir votre amour qu'un discours qui l'offense. LÉANDRE. Ce que j'avance ici me vient de bonne part. |