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un clerc de la Saintonge. Voy. son édition et son étude à la suite de la publication de dom Plaine, loc. cit., p. 265-312, et tirage à part à la suite de celui de dom Plaine.

M. de la Borderie a ignoré que cette rédaction figure, avec des changements notables, parait-il, dans le ms. 8690-8702 (fol. 95-112) aujourd'hui 3213 de la Bibl. roy. de Bruxelles. Voy. Catalogus codicum hagiogr. Bruxell., II, 237, et Van Den Gheyn, Catalogue des Manuscrits de la bibl. roy. de Belgique, t. V, 1905. Je n'ai pu obtenir ce ms., dont j'avais sollicité l'envoi à Paris, dans le but de le collationner et de l'utiliser pour le présent mémoire.

Cette rédaction anonyme nous l'appellerons A.

3o Jean du Bois (Joannes a Bosco) a publié en 1605, dans sa Floriacensis vetus bibliotheca, p. 485-515, une vie, également anonyme, tirée d'un manuscrit de Saint-Benoît-surLoire aujourd'hui disparu. Cette rédaction se retrouve dans plusieurs mss. que nous signalerons dans un Appendice où le texte en sera reproduit. Bien qu'il mentionne la rédaction de Sigebert de Gembloux, dont nous allons parler, c'est à une version identique ou très analogue à celle qu'a publiée Joannes a Bosco que Vincent de Beauvais, au XIIIe siècle, a emprunté les extraits qu'il donne dans son Speculum historiale, 1. 21, cap. 93-100 (éd. in-folio de Douai, 1624, p. 847-849). Cette rédaction nous l'appellerons F.

4° Mabillon dans ses Acta sanctorum ordinis sancti Benedicti, saeculum I, 1668, p. 217-221 (éd. de Venise, p. 177-181), a publié un texte que lui avait communiqué Vyon d'Hérouval d'après un manuscrit qui n'est autre que le ms. lat. 11759 (fol. 228), de la Bibl. Nat., XIVe siècle. Voy. le Catalogus codicum hagiographicorum latin. Paris. des Néo-Bollandistes, III, 106. Cette rédaction figure également à ma connaissance: 1° dans le ms. 7461 (fol. 76-82), aujourd'hui ms. 3076 (fol. 38-41), XIIIe siècle, de la Bibl. roy. de Bruxelles. Voy. Catalogus cod. hagiogr. bibl. Bruxell., II, 14; et J. Van Den Gheyn, Catalogue des Manuscrits de la bibl. roy. de Belgique, t. V, 1905; 2° dans le ms. 9394 (fol. 158-161), XVe siècle, de la Bibl. impériale de Vienne, copie exécutée

sans doute par Johannes Gielemans, qui mentionne dans son Sanctilogium deux Vies de saint Malo. Voy. Analecta Bollandiana, XIV, 259 et 31; 3° cette version se retrouve, divisée en douze leçons, dans un Lectionaire du XIII°XIVe siècle, provenant de Saint-Magloire de Paris, conservé à la Bibl. Mazarine, ms. 399, fol. 230-236.

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Nous désignerons cette rédaction par la lettre M.

5° Enfin, dans le dernier tiers du XIe siècle, Sigebert de Gembloux, récrivit à la demande de son abbé, Thietmar, la Vita Maclovii. Elle est publiée dans les divers recueils des Vitae sanctorum de Surius (1r éd. de Cologne, 1575, t. VI, p. 341-351; réimpr. de Venise, 1580, VI, 373-383; 2o éd. de Cologne, 1618, t. VII, p. 349-354; réimp. de 1875, t. III, p. 609621) et utilisable d'une manière commode dans la réimpression de Migne, Patrol. lat., t. CLX, col. 729-746.

Cette rédaction se retrouve : 1o à Bruxelles : dans le ms. 9289 (fol. 79-84), aujourd'hui 3223, XII° siècle (voy. Catalogus cad. hagiogr. Bruxell., II, 288); -2° dans le ms. 7483-86 (fol. 19121932), aujourd'hui 3181, XIII° siècle, mais ici très fragmentaire (ibid., p. 64); --3° dans le ms. XV no 42 (fol. 51-54), XIIIe siècle, de Namur, mais abrégée (voy. Analecta Bollandiana, 1, 499). Nous désignerons cette rédaction par la lettre S.

I

Une première constatation c'est que A, F, M, S forment un groupe nettement opposé à B. Ils s'accordent à donner un récit identique pour le fonds, dont les particularités typiques sont que le saint reçoit la consécration épiscopale en Grande-Bretagne et non sur le continent, qu'il aborde à l'île d'Aaron et non à l'ile de Cézembre, que ces versions n'ont rien qui corresponde aux chap. 60-91 du livre I de B ni aux miracles et à la translation qui forment son livre II. Dans ce groupe même il apparaît que A et F sont dans un rapport étroit. Le lecteur qui se donnera la peine de com

parer quelques pages ou même quelques lignes de ces diverses rédactions s'en convaincra aisément. Il suffira de noter deux traits 1° A et F s'accordent contre M et S à couper en deux le voyage de Machutus et de Brendan à la recherche de l'île d'Ima et à placer dans l'intervalle des deux expéditions l'élévation du saint à l'épiscopat; 2° le miracle du bitriscus qui pond dans la chape du saint n'est à sa place ni dans A ni dans F; la suite des idées exige que, après le récit de la guérison du duc Hailoch, vienne la mention de la mort de cet ennemi, devenu le soutien de Machutus, puis le tableau des persécutions que le saint, demeuré sans appui, endure de ses ennemis, enfin sa fuite en Saintonge. Il est inadmissible de placer une historiette de ce genre au milieu de ces évènements graves. A et F commettent cette faute, évitée par S et M.

Mais quel est le rapport de A et de F?

Selon M. de la Borderie (1) F n'est qu'une amplification de A. Il est facile de montrer que la vérité est dans la proposition inverse: A est un abrégé de F ou d'un parent de F. Un exemple suffira au hasard à établir notre assertion.

Prenons le miracle de la vue rendue au duc de Bretagne. Il est ainsi raconté dans A: « Dum quondam coepisset dux » Britanniae regionis nomine Hailoc destruere basilicam in » sancto predio Machloui fundatam adest idem homo Dei, » precibus moliens avertere eum a dissidiacione (sic) venera» bilis loci quem ipse sanctus construxerat, sed minime » potuit. Unde non post multum temporis caecitatem occulo>> rum incurrit. Postmodum vero, ad cor reversus, poenitentia » introrsus graviter perculsus, ad virum Dei cum fletu et >> planctu rediit, sese reum clamans, suaque culpa visu damp»> natum deplorans. Quem misericorditer homo Dei susci» piens, aqua benedicta eum perfundens oleoque sacrato » occulos perungens, pristinum reddidit ei visum, indicens, » ei poenitentiam pro scelerata temeritate. Quamobrem dux » Ailoc, magno gravisus gaudio, obtulit beato viro optimam

(1) Loc. cit., p. 294-5, 304 (tir. à part, p. 158-159, 168).

» terram in hereditatem ac copiosam in auro et argento bene» dictionem (1).

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Quel exorde abrupt ! Quelle sécheresse de rédaction! Quel manque d'onction! Les vies de saints mérovingiens et carolingiens peuvent renfermer des barbarismes et des solécismes, elles ne sont pas rédigées en ce style télégraphique. Rien de plus contraire à la verbosité, à la garrulité bretonnes. Lisez maintenant F et voyez la différence (2).

« Cum aliquando quidam Britannicae regionis dux nomine » Hailoch, decipiente se vel inimico daemone, omnium malo» rum semper incentore, vel invidia superbiave stimulante » et dominante, seu iniquo consilio depravante, coenobialem » basilicam in praedio sancti Machutis ab ipso fundatam ele»ganterque structam conaretur et inciperet evertere et di>> ruere, adest sanctus Dei, obnixis precibus avertere moliens >> praefatum irreverentem principem ab audaci et sacrilega » loci illius diruptione, sed minime typum vel arrogantiam >> ejus timidi cordis potuit emollire. Proinde ad Deum hac » de re exorandum totum se contulit beatus praesul. Unde »> non post multum temporis, princeps ille vel dux imagine >> mortis obtectus, caecus, sicut erat corde, ita oculis est » effectus. Postmodum vero resipiscendo reversus ad cor, » compunctus et anxius et lacrimis madidus, abiit ad » virum Dei, sese offendisse et reum esse coram sancto >> praesule confitendo deplorat, verbisque, ut poterat, humi>> liter editis, veniam praecabatur. Quem beatus praesul uti » semper erat ad miserandum facilis, placabiliter suscipiens, » prius a vinculo noxae admissae, ut expediebat, eum absol» vit. Deinde quasi jam divina ope et curatione dignum aquae >> eum benedictae aspergine irroravit, oleoque sacrato ocu» los ejus perungens, pristinum ei restituit lumen, indixitque

(1) Cap. XIX, p. 285 (tir. à part, p. 149).

(2) Ici et plus loin je donnerai sous ce titre (F) non une copie servile de l'imprimé de 1605, mais un texte amélioré au moyen des mss. de la Bibl. Nationale de Paris. On trouvera l'édition complète de cette version avec les variantes dans un Appendice placé à la fin de notre mémoire. La numérotation des chapitres, pour rendre la comparaison plus facile, sera celle de A.

» eidem principi Hailoch humiliter id expetenti quam et quan» tam ageret poenitentiam pro reatus temeritate et offensa. >> Qui praefatus dux ampliorem quam unquam habuerit vir» tute sancti Machutis vigorem meruit habere videndi. Qui » tantae gratiae beneficio pervalde congaudens, optimam et >> frugiferam terrae possessionem beato episcopo donando su» begit, copiosamque auri et argenti locupletationem libens » contulit, miroque deinceps affectu excoluit eum et hono

>> ravit. >>>

Mettons sur deux colonnes une partie du chapitre III (Machutus enfant sauvé de la marée montante) :

F

Tunc Deo acceptabilis puer Machutus, prae horrore sonitus fluctuum maris evigilans, dum circumcirca aspiciens neminem videret, excelsa voce condiscipulos nominatim coepit inclamare. Cui cum nemo responderet, ait secum « Deus omnipotens qui non derelinquis sperantes in te, ubi nunc positus sum ego? Ne derelinquas me, Domine, sed adjuva et salva tuae magnitudinis et misericordiae servulum. » Interim sodalibus ejus qui discrimen pelagi accedentis aufugerant domum convenientibus, cum non videret eum inter eos, coepit ab eis magister sollicite quaerere ubi esset suus carissimus alumnus...

A

Tunc sanctus Machutes pro sonitu fluctuum maris evigilans, dum circumcirca aspiciens neminem videret, excelsa voce condiscipulos nominatim cepit clamare. Cui cum nemo responsum daret, secum ait : « Deus omnipotens, qui non dereliquis sperantes in te, ubi positus sum ego? »

Deinde, sociis

ejus venientibus et magistro inter eos querente suum carissimum discipulum....

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