indiqué pour la ville de Pise, et non pas pour une ville d'Allemagne, et ce mécontentement apparent lui servit à ne pas presser l'arrivée des évêques de Germanie. Il ne s'y rendit que quelques Français et quelques Italiens, qui se joignirent aux cardinaux mécontens. Le concile fut ensuite transféré à Milan, parce que la ville de Pise ne paroissoient pas assez sûre. Jules opposa à cette assemblée la convocation d'un concile général, qui devoit se tenir dans le palais de Latran. En attendant, il déclara les membres du concile schismatiques, et jetta l'interdit sur les villes qui le recevroient. Ce fut une des causes de la défaveur qu'éprouva le concile à Pise, et qui obligea ses membres de le transférer à Milan. Enfin Jules eut l'adresse d'engager Ferdinand-le-Catholique, infidèle à tous ses traités avec la France, à se déclarer ouvertement pour lui. 11 obtint la même complaisance du roi d'Angleterre, qui fit même auprès du roi de France des instances mêlees de menaces, si on ne rendoit pas Bologne à l'église. De ces princes et des petits souverains d'Italie, ainsi que de la grande république de Venise et de quelques autres moindres, Jules forma une association
qu'on appela la ligue sainte ou la ligue de la sainte union. Les Suisses s'y joignirent, partie par zèle de re- ligion, partie par ressentiment des paroles méprisantes de Louis XII, et bientôt parut en campagne, sous les étendards de l'Eglise, une mée composée de ces mêmes Suisses entraînés contre la France; de ces troupes mercenaires, qui vendoient leur sang aux princes Italiens dans leurs querelles; de bataillons napo- litains, nommés bandes Espagnoles, que Ferdinand licentia afin qu'elles s'engageassent au pape; et enfi de Turcs même soldés par les Vénitiens, et qui arboroient le croissant de Mahomet à côté des clefs de Saint-Pierre. Un agent du pape en Angleterre trahit les secrets du pontife et livra sa cor- respondance à Louis XII. Ce prince reconnut alors avec étonnement quels étoient ses ennemis. Dissimulé pour la première fois de sa vie, il affècia de croire aux protestations d'amitié qu'ils continuoient à lui faire, ou aux jus- tifications qu'ils offroient de leur con- duite et il ne pensa plus qu'à dé- jouer leurs complots par des mesures vigoureuses.
Cependant l'humeur belliqueuse de
Jules, qui appeloit sur Rome les fléaux de la guerre, déplut à ses ha- bitans. Les manifestes que le roi de pape. France y répandit avec profusion, et les manœuvres des agens qu'il y fit glisser, réussirent si bien, que le pen- ple se révolta, et que le pape fut contraint de se réfugier pour un temps dans le château Saint-Ange. La haine entre le souverain pontife et le monarque étoit à son comble: celui-ci fit frap- per une médaille ou monnoie qui exprimoit son ressentiment et ses projets. Elle portoit pour légende Perdam Babylonis nomen. « J'efface- << rai jusqu'au nom de Babylone. ». C'est ainsi qu'il qualifioit le pape et la partie du sacré collège qui lui restoit attachée, et ce n'étoit pas une menace vague. Il se préparoit à y donner tous les effets pos- sibles. Son projet auquel l'armée for- midable qu'il envoyoit en Italie don- noit l'espérance d'un plein succès, étoit d'aller droit à Ronie, d'y entrer de gré ou de force, de faire le pape prisonnier, d'amener en triomphe son concile de Milan dans la capitale du monde chrétien, de déposer Jules de placer sur son trône un pontife dé- voué à ses intérêts, et d'envoyer ensuite son armée, continuant ses exploits,
s'emparer du royaume de Naples. Il en donna le commandement à Gaston de Foix, duc de Nemours " fils de sa sœur, neveu jeune homme de vingt-deux ans, qu'il aimoit tendrement, plein de grâce et de va- leur, enjoué et sensible, aimable et généreux, chéri à la cour par sa galan- terie noble, adoré dans les camps pour ses vertus guerrières, et auquel Louis destinoit sa seconde fille et la couronne qu'il l'envoyoitconquérir. Gaston com- mença ses exploits avec une rapidité qui lui fit donner le surnom de Fou- dre d'Italie. La ville de Bologne, en- levée au pape après qu'il s'en étoit sauvé en amusant le maréchal Chau- mont, étoit pressée par l'armée de la sainte union, commandée par Rai- mond de Cardonne, vice- roi de Na- ples. Gaston, à la faveur de la nuit et de la neige, y pénètre avec toute l'armée sans que les assiégeans s'en' apperçoivent et par cette seule mesure i en fait lever le siège. Sans se reposer, il vole à Bresse que les Vénitiens venont de surprendre, et la leur enlève après un combat terrible. Avec la même rapidité il revient sur ses pas chercher l'armée de l'union qu'il s'étoit borné d'abord à faire reculer.
Il étoit instant de la dissiper. Ferdi- nand menaçoit d'entrer en Languedoc, Henri VIII son gendre, de descendre en Picardie, et Maximilier enfin avoit donné ordre à cinq mille lansquenets, levés dans ses états et à son invita- tion par Louis XII, de rentrer dans leur patrie. Le brave capitaine Jacob (Jacques d'Empser) qui les comman- doit, indigné de la lâcheté qu'on lui ordonne, en fait part à Gaston, et lui demande sur-le-champ la bataille, pour prévenir la nécessité où il se trouvoit d'obeir. Elle fut fixée au lendemain, jour de Pâques, et la défaite de l'armée papale fut complète; elle perdit son artille- rie et ses bagages, et laissa quinze mille hommes sur le champ de bataille. Pierre Navarre, Fabrice Colonne, le jeune marquis de Pescaire et le cardinal de Médicis, qui fut pape l'année suivante sous le nom de Léon X, furent faits prisonniers. Les seules bandes Espa- gnoles commandées par Navarre, soutinrent noblement l'honneur qu'el- les avoient acquis sous Gonzalve Grand Capitaine: plusieurs fois enfon- mais jamais jamais vaincues, elles
cées, s'étoient ralliées au nombre de deux mille hommes, qui, enseignes dé- ployées, tambour battant et marchant au
« PrécédentContinuer » |