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par lequel Henri VIII s'engageoit à entrer en France, par la Picardie ou la Normandie, avec une armée de cinq mille chevaux et quarante mille hommes de pied, et Maximilien par la Bourgogne, à la tête de trente mille Suisses. La confédération comptoit aussi sur Ferdinand, roi d'Espagne dont Henri VIII avoit épousé la fille, et qui, établi en Navarre, devoit pénétrer delà dans les provinces méridionales. Il y a même lieu de croire qu'il contribua beaucoup à entraîner son gendre dans la ligue. Le roi n'attendit pas l'attaque des Anglais. Comme ses galères, par les désastres d'Italie, devenoient inutiles sur la Méditerranée, il ordonna au viceamiral Prejean de les mener dans l'Océan. « Ce fut, remarque Mézeray, «la première fois que le détroit de « Gibraltar vit entrer de ces sortes « de vaisseaux dans la grande mer, << lesquels néanmoins, à raison des <<<rames dont ils se remuent avec beau« coup d'agilité durant le calme, sont « très-propres à battre les grands na<< vires, qui, durant presque tout l'été, <<<< ne sauroient se tourner faute de «vent ». Primaudet, capitaine bre

joignit vingt gros vaisseaux aux galères; les deux escadres, anglaise

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1513.

et française, eurent des engagemens qui ne furent pas décisifs. Le Breton n'ayant un jour que vingt navires, fut rencontré par quatre-vingts des ennemis. « Ce combat, dit Mézéray, est re<<marquable. Après que Primaudet << en eut fracassé et coulé à fond près « de la moitié, les ennemis ne pouvant « plus se défendre contre les coups de <<< main des Bretons et des Normands, <<< deux nations qui, pour se sentir << moins adroites dans la marine, que << ne sont les Anglais et les Flamands, <<< vont d'ordinaire tout d'un coup à « l'abordage avec une terrible furie, <«<< jetérent du feu d'artifice dans son « vaisseau ; c'étoit le plus beau qui fût « sur mer, et que la reine avoit fait «hâtir et nominer la Cordelière ». Primaudet auroit pa se sauver dans un esquif de son vaisseau embrâsé; mais préférant l'honneur à la vie, il le dirige contre l'amiral anglais, s'y cramponne, lui communique les flammes dont il est consumé, et tous deux périrent avec ceux qui les montoient. Préjean, dans une autre rencontré, repoussa jusqu'en Angleterre les Anglais qui l'avoient attaqué, y descendit avec eux, et mourut des blessures qu'il y reçut.

15.3.

Vente des do

Malgré l'économie de Louis XII, et l'obligation qu'il s'étoit imposée de ne point augmenter les impôts, de- maines de puis deux ans, il avoit été forcé dé- la couronne. tablir une crue, c'est-à-dire, une augmentation de tailles. Dans la pressante nécessité d'un surcroît de dépense, pour ne point molester ses sujets par de nouvelles taxes, il mit en vente des domaines de la couronne. Le parlement apposa à ces ventes des conditions,qui leur donnoient plutôt un caractère de prêt que d'aliénation. Les acheteurs reconnoissoient ne les posséder qu'en manière d'usufruit. Ils consentoient à ne point changer les titulaires des offices, à ne point couper les bois, à ne se permettre aucune dégradation, et à vider leurs mains quand ils en seroient requis, moyennant une pension sur le trésor public, qui diminueroit à mesure que le capital seroit remboursé

Journée

Les Anglais abordèrent à Calais au nombre stipulé par le traité de Ma- des Eperons. lines. L'empereur les joignit mal accompagné de quelque cavalerie allemande, selon sa coutume de faire la guerre avec les troupes des au

tres, et servit dans l'armée de Henri en qualité de volontaire, et à raison

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de cent écus par jour. Les Suisses descendirent comme un torrent de leurs montagnes, et inondèrent la Bourgogne. Le roi se tint par-tout sur la défensive; et tourmenté de la goutte, il se fit transporter en litière à Amiens, pour veiller de plus près à ce que ses généraux ne hasardassent point une bataille, dont un mauvais succès auroit pu compromettre la sûreté du royaume. Ses ordres à cet égard furent trop bien exécutés, dans une rencontre où il auroit peut-être gagné à être moins obéi.

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On s'attendoit qu'Henri VIII aɩtaqueroit Boulogne ou Abbeville places à sa convenance; mais il se laissa persuader par Maximilien de marcher sur Thérouenne, ville presqu'enclavée dans les états de l'archiduc, dont la garnison française inquiétoit et fatiguoit les Flamands, et dont la prise ne pouvoit être d'aucune utilité au roi d'Angleterre. Cette place, mal pourvue d'ailleurs, parce qu'on n'avoit pas prévu qu'elle dût être attaquée, manquoit sur-tout de vivres; le desir de la ravitailler occasionna des engagemens entre les assiégeans qui ne s'étoient pas encore bien établis dans leurs lignes, et des

détachemens de cavalerie française, chargés de poudre et de farine. Ils forçoient les palissades, traversoient les marais par les sentiers indiqués déposoient leurs provisions sur le bord des fossés, et revenoient au grand galop. L'armée assiégeante, instruite un jour du projet d'une pareille expédition, se mit toute entière à la poursuite des ravitailleurs; les détachemens français qui devoient protéger les pourvoyeurs au retour, s'étoient désarmés, ne les attendant pas sitôt, et furent surpris eux-mêmes par l'armée ennemie. Bayard, et d'autres braves, conseilloient d'attaquer. Piennes qui commandoit, et qui avoit ses ordres, ordonna la retraite. Elle se fit dans le plus grand désordre. Chacun fuyoit le plus vite qu'il pouvoit. Bayard, resté seul à l'arrière-garde pour couvrir les fuyards, soutint l'impétuosité des Anglais et sauva l'armée; mais il n'eut pas le même bonheur qu'au pont du Garillan; il fut fait prisonnier. Ainsi, à trente-quatre ans de distance, Maximilien vit, au même lieu, les Français fuir devant lui. Cette déroute arrivée au pied d'une montagne appelée Guinegate, est également connue sous le nom de jour

1515.

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