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dignation, qui retentit jusqu'en France, et détermina le roi à venir juger par lui-même de la légitimité des plaintes qui lui arrivoient de tous côtés. Quand le monarque parut en Italie, tous les Seigneurs s'empressèrent autour de sa personne. On voyoit à sa cour, le duc de Ferrare, le marquis de Mantoue, le seigneur de Bologne, le duc d'Urbin si traîtreusement dépouillé de ses états, le dernier fils de Varano, échappé au sort funeste de son père et de ses frères, et les députés des Vénitiens, des Florentins, et des Luquois. Chacun avoit des griefs à produire, et tous supplioient le roi de punir ces crimes, ou du moins de retirer sa protection aux coupables.

Louis parut d'abord honteux de se trouver comme complice des scélérats; mais il n'y a pas de mauvaise cause qui ne puisse se défendre, quand elle est traitée par une main habile. César fit parvenir au roi un agent secret, nommé Trocci, homme insinuant et adroit. Il et adroit. Il passa d'abord condamnation sur quelques griefs, dans lesquels il reconnut que Borgia avoit excédé les bornes du devoir comme lorsqu'il s'étoit permis des hos

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tilités contre les Florentins, alliés de la France; « mais, disoit l'avocat, «il a cessé sitôt qu'il en a reçu l'ordre. « Il est gonfalonier de l'église, et en « cette qualité a-t-il pu se dispenser « de faire rentrer dans l'ordre, des « vassaux qui affectoient l'indépen<< dance? Dans toutes ces expéditions, « il n'a rien entrepris sans l'aveu et << même le commandement du sacré « collège, et presque toujours, ex«cepté les Florentins, contre les en<< nemis du roi. Encore les Florentins « étoient-ils partisans secrets de Fré« déric, ct intérieurement mal dis«posés pour la France; au contraire « l'armée de César a toujours été, et <« est encore sous les ordres du roi, << comme s'il la soudoyoit de ses pro<< pres deniers, et sa majesté peut l'em«ployer par-tout où elle voudra.

« D'ailleurs, ajoutoit Trocci en « parlant au cardinal d'Amboise, ce « César qu'on vous fait si odieux a «de nombreux partisans dans le sacré « collège. Son Père est vieux et in« firme; s'il vient à mourir, on ne <«<< peut douter que son fils n'ait une «grande influence sur le choix du successeur. Vous êtes légat à latere la munificence d'Alexandre.

<<< par

« Cette dignité, qui n'est que pour << un temps, va expirer. Il est essen« tiel d'en agir avec le fils du pape « de manière à vous faire continuer «< cette prééminence, si importante <<< dans l'événement d'un conclave ». On a cru que le cardinal d'Amboise vit dans cette insinuation, la tiare qui lui étoit adroitement offerte, et que l'espérance de l'obtenir lui fit employer l'ascendant qu'il avoit sur l'esprit de Louis XII, en faveur des Borgia.

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Traité avec

César eut non-seulement la per- les Borgia. mission de venir se justifier, ce qui étoit déjà beaucoup, mais encore il fut très-bien reçu. En peu de jours il conclut un traité, par lequel on luiabandonna toutes ses usurpations, même celles qui avoient été faites sur les princes dont le roi s'étoit déclaré protecteur. La légation fut prorogée au cardinal d'Amboise pour dix-huit mois. Le pape, pendant cet intervalle, s'engagea à donner des chapeaux aux parens et aux amis du ministre, qui seroient autant de votans pour celui-ci en cas de vacance; et César s'obligea à mener l'armée ecclésiastique par- tout où le roi l'exigeroit.

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Le roi pour

du Milanès.

Louis s'occupa ensuite à visiter les

voit à la sûreté villes du Milanès. Par-tout il provoqua la reconnoissance du peuple par sa bienfaisance et sa bonté, vertus qui lui étoient familières. Il tâcha bien aussi de diminuer par des promesses et de belles paroles, le dépit des princes italiens, choqués de sa foiblesse en faveur de Borgia mais il ne réussit pas. Les Suisses avoient pris l'habitude de faire des irruptions dans le Milanès, par la seule cause, qu'ayant goûté du pillage pendant la guerre, ils avoient peine à sen priver. Une augmentation de pension mit un frein à leur avidité. Ils fournirent même

Mécon en

tement des

des recrues pour les troupes destinées à la défense de la partie française du royaume de Naples, et Louis quitta l'Italie, très-persuadé qu'il y laissoit la paix, parce que les seigneurs qu'il avoit abandonnés, et dont il avoit parlà frustré les espérances, se retirèrent sans faire éclater aucune plainte.

Mais ils conservoient un ressentiPrinces ita- ment intérieur, qu'ils se communiliens. quèrent. La crainte commune réunit ceux qui pendant l'invasion de Naples avoient été de parti contraire, c'est-à-dire, les uns pour Frédéric, les autres pour les deux rois agres

seurs. Ils formèrent une ligue contre Borgia, en donnèrent loyalement avis à Louis XII, et le prièrent de les approuver, en lui faisant remarquer que dans leur confédération ils s'engageoient expressément à respecter les intérêts de la France, et à n'agir que contre leur ennemi. Malgré cette explication, le monarque et son ministre congédièrent brusquement leurs députés, et un ordre fut envoyé au commandant du Milanès de secourir César qui étoit enfermé à Imola.

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et

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gia à l'égard

Le fils d'Alexandre jugea plus à Cruelle perpropos de tâcher de dissoudre la ligue fidie des Borque de l'attaquer, d'autant plus que des Ursins. le premier essai qu'il fit des forces des confédérés ne lui fut pas avantageux. Entr'eux se distinguoient les Ursins, respectés dans Rome fort riches en terres. Les chefs de cette famille étoient deux frères; Paul, guerrier renommé, et le cardinal des Ursins, estimé pour ses vertus. Paul et César avoient autrefois servi ensemble dans quelques expéditions. Après un échec, qui n'étoit pas à la vérité une défaite entière, Borgia écrivit aux princes ligués une lettre qu'il adressa à des Ursins. Il y disoit, que quoiqu'il eût à sa dis

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