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trouvons mal accordantes à l'air que nous voulons sonner, qui est la gloire de Dieu, nous pourrons les accorder, moyennant sa grâce et le conseil de notre père spirituel.

CHAPITRE VIII.

Affections qu'il faut faire après l'examen.

Après avoir doucement considéré chaque point de l'examen et vu à quoi vous en êtes, vous viendrez aux affections en cette sorte.

Remerciez Dieu de ce peu d'avancement que vous aurez trouvé en votre vie dès votre résolution, et reconnaissez que ç'a été sa miséricorde seule qui l'a fait en vous et pour

vous.

Humiliez-vous fort devant Dieu, reconnaissant que, si vous n'avez pas beaucoup avancé, ç'a été par votre manquement, parce que vous n'avez pas fidèlement, courageusement et constamment correspondu aux inspirations, clartés et mouvements qu'il vous a donnés en l'oraison et ailleurs.

Promettez-lui de le louer à jamais des grâces exercécs en votre endroit, pour vous avoir retirée de vos inclinations à ce petit amendement.

Demandez-lui pardon de l'infidélité et déloyauté avec laquelle vous avez correspondu.

Offrez-lui votre cœur, afin qu'il s'en rende du tout maître. Suppliez-le qu'il vous rende toute fidèle.

Invoquez les saints, la sainte Vierge, votre ange, votre patron, saint Joseph; et ainsi des autres.

CHAPITRE IX.

Des considérations propres pour renouveler nos bons propos.

Après avoir fait l'examen et avoir bien conféré avec quelque conducteur sur les défauts et sur les remèdes de ceuxci, vous prendrez les considérations suivantes, en faisant une chaque jour par manière de méditation, y employant le temps de votre oraison, et ce toujours avec la même méthode pour la préparation et les affections, de laquelle vous avez usé dans les méditations de la première partie, vous mettant avant toutes choses en la présence de Dieu, implorant sa grâce pour vous bien établir en son saint amour et service.

CHAPITRE X.

Considération première, de l'excellence de nos âmes.

Considérez la noblesse et excellence de votre âme, qui a un entendement, lequel connaît non-seulement tout ce monde visible, mais connaît encore qu'il y a des anges et un paradis, connaît qu'il y a un Dieu très-souverain, trèsbon et ineffable, connaît qu'il y a une éternité, et de plus, connaît ce qui est propre pour bien vivre en ce monde visible, pour s'associer aux anges en paradis, et pour jouir de Dieu éternellement.

Votre âme a de plus une volonté toute noble, laquelle peut aimer Dieu et ne le peut haïr en soi-même. Voyez votre cœur comme il est généreux ! Et que, comme rien ne peut arrêter les abeilles de tout ce qui est corrompu, mais elles s'arrêtent seulement sur les fleurs : ainsi, votre cœur ne peut être en repos qu'en Dieu seul et nulle créature ne le peut assouvir. Repensez hardiment aux plus chers et violents amusements qui ont occupé autrefois votre cœur, et

jugez en vérité s'ils n'étaient pas pleins d'inquiétudes mordantes, de pensées cuisantes et de soucis importuns, parmi lesquels votre pauvre cœur était misérable.

Hélas! notre cœur courant aux créatures, il y va avec des empressements, pensant de pouvoir y accoiser ses desirs; mais sitôt qu'il les a rencontrées, il voit que c'est à refaire, et que rien ne le peut contenter, Dieu ne voulant pas que notre cœur trouve aucun lieu sur lequel il puisse reposer, non plus que la colombe sortie de l'arche de Noé, afin qu'il retourne à son Dieu, duquel il est sorti. Ah! quelle beauté de nature y a-t-il en notre cœur! et donc pourquoi le retiendrons-nous contre son gré à servir aux créatures?

O ma belle âme, devez-vous dire, vous pouvez entendre, et vouloir Dieu; pourquoi vous amuserez-vous à chose moindre? Vous pouvez prétendre à l'éternité; pourquoi vous amuserez-vous aux moments? Ce fut l'un des regrets de l'enfant prodigue, qu'ayant pu vivre délicieusement en la table de son père, il mangeait vilainement en celle des bêtes. O mon âme ! tu es capable de Dieu: malheur à toi si tu te contentes de moins que de Dieu! Élevez fort votre âme sur cette considération; remontrez-lui qu'elle est éternelle, et digne de l'éternité; enflez-lui le courage pour ce sujet.

CHAPITRE XI.

Seconde considération, de l'excellence des vertus.

Considérez que les vertus de la dévotion peuvent seules rendre votre âme contente en ce monde; voyez combien elles sont belles; mettez en comparaison les vertus et les vices qui leur sont contraires. Quelle suavité en la patience, au prix de l'ire et du chagrin; de l'humilité, au prix de l'arrogance et ambition; de la libéralité au prix de l'avarice; de la charité, au prix de l'envie; de la sobriété au prix des désordres! Les vertus ont cela d'admirable, qu'elles dé

lectent l'âme d'une douceur et suavité non-pareille après qu'on les a exercées, au lieu que les vices la laissent infiniment recrue et malmenée. Or sus donc, pourquoi n'entreprendrons-nous pas d'acquérir ces suavités?

Des vices, qui n'en a qu'un peu n'est pas content, et qui en a beaucoup est mécontent; mais des vertus, qui n'en a qu'un peu, encore a-t-il déjà du contentement, et puis toujours plus en avançant. O vie dévote! que vous êtes belle, douce, agréable et suave! vous adoucissez les tribulations et rendez suaves les consolations. Sans vous, le bien est le mal, et les plaisirs pleins d'inquiétudes, troubles et défailJances. Ah! qui vous connaîtrait, pourrait bien dire avec la Samaritaine : Domine da mihi hanc aquam, Seigneur, donnezmoi cette eau: aspiration fort fréquente à la mère Thérèse et à sainte Catherine de Gênes, quoique pour différents sujets.

CHAPITRE XII.

Troisième considération, sur l'exemple des saints.

Considérez l'exemple des saints de toutes sortes. Qu'estce qu'ils n'ont pas fait pour aimer Dieu et être ses dévots ? Voyez ces martyrs, invincibles en leurs résolutions; quels tourments n'ont-ils pas souffert pour les maintenir? Mais surtout ces belles et florissantes dames, plus blanches que le lis en pureté, plus vermeilles que la rose en charité, les unes à douze, les autres à treize, quinze, vingt, et vingt-cinq ans, ont souffert mille sortes de martyres, plutôt que de renoncer à leur résolution, non-seulement en ce qui était de la profession de la foi, mais en ce qui était de la protestation de la dévotion: les unes mourant plutôt que de quitter la virginité, les autres plutôt que de cesser de servir les affligés et consoler les tourmentés et ensevelir les trépassés. O Dieu quelle constance a montré ce sexe fragile en semblables occurrences !

Regardez tant de saints confesseurs. Avec quelle force ont-ils méprisé le monde? Comment se sont-ils rendus invincibles en leurs résolutions? Rien ne les en a pu faire déprendre; ils les ont embrassées sans réserve, et les ont maintenues sans exception. Mon Dieu, qu'est-ce que dit saint Augustin de sa mère Monique? Avec quelle fermeté a-telle poursuivi son entreprise de servir Dieu en son mariage, et en son veuvage! Et saint Jérôme, de sa chère fille Paula; parmi combien de traverses, parmi combien de variétés d'accidents! Mais qu'est-ce que nous ne ferons pas sur de si excellents patrons? ils étaient ce que nous sommes ; ils le faisaient pour le même Dieu, pour les mêmes vertus; pourquoi n'en ferons-nous autant en notre condition, et selon notre vocation, pour notre chère résolution et sainte protestation ?

CHAPITRE XIII.

Quatrième considération, de l'amour que Jésus-Christ
nous porte.

Considérez l'amour avec lequel Jésus-Christ notre Seigneur a tant souffert en ce monde, et particulièrement au jardin des Olives, et sur le mont de Calvaire. Cet amour vous regardait, et par toutes ces peines et travaux obtenait de Dieu le père de bonnes résolutions et protestations pour votre cœur, et par même moyen obtenait encore tout ce qui vous est nécessaire pour maintenir, nourrir, fortifier et consommer ces résolutions. O résolution, que vous êtes précieuse! Étant fille d'une telle mère comme est la passion de mon Sauveur, ô combien mon âme vous doit chérir, puisque vous avez été si chère à mon Jésus! Hélas! ô Sauveur de mon âme, vous mourûtes pour m'acquérir mes résolutions, eh! faites-moi la grâce que je meure plutôt que de les perdre.

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