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pour me créer? Hélas! mon âme, tu étais abîmée dans cet ancien néant, et y serais encore de présent, si Dieu ne t'en eût retirée: et que ferais-tu dans ce rien? >>

II. Rendez grâces à Dieu. O mon grand et bon Créateur, combien vous suis-je redevable? puisque vous m'êtes allé prendre dans mon rien, pour me rendre par votre miséricorde ce que je suis. Qu'est-ce que je ferai jamais pour dignement bénir votre saint nom, et remercier votre immense bonté?

III. Confondez-vous. Mais hélas! mon Créateur, au lieu de m'unir à vous par amour et service, je me suis rendue toute rebelle par mes déréglées affections, me séparant et éloignant de vous pour me joindre au péché et à l'iniquité, n'honorant non plus votre bonté, que si vous n'eussiez pas été mon Créateur.

IV. Abaissez-vous devant Dieu. O mon âme, sache que le Seigneur est ton Dieu, c'est lui qui t'a fait, et tu ne t'es pas faite toi-même; ô Dieu, je suis l'ouvrage de vos mains.

Je ne veux donc plus désormais me complaire en moimême, qui de ma part ne suis rien. De quoi te glorifies-tu, ô poudre et cendres; mais plutôt, ô vrai néant, de quoi t'exaltes-tu? Pour m'humilier, je veux faire telle et telle chose, supporter tels et tels mépris; je veux.changer de vie, et suivre désormais mon Créateur, et m'honorer de la condition de l'être qu'il m'a donné, l'employant tout entièrement à l'obéissance de sa volonté, par les moyens qui me seront enseignés, et desquels je m'enquérrreai vers mon père spirituel.

CONCLUSION.

J. Remerciez Dieu. Bénis, ô mon âme, ton Dieu, et que toutes mes entrailles louent son saint nom, car sa bonté m'a tiré du rien, et sa miséricorde m'a créé.

II. Offrez. O mon Dieu, je vous offre l'être que vous m'avez donné, avec tout mon cœur; je vous le dédie et con

sacre.

III. Priez. O Dieu, fortifiez-moi en ces affections et résolutions; sainte Vierge, recommandez-les à la miséricorde de votre fils, avec tous ceux pour qui je dois prier. Pater noster. Ave Maria.

Au sortir de l'oraison, en vous promenant un peu, recueillez un petit bouquet de dévotion des considérations que vous aurez faites, pour l'odorer le long de la journée.

MÉDITATION II.

DE LA FIN POUR LAQUELLE NOUS SOMMES CRÉÉS.

PRÉPARATION.

I. Mettez-vous devant Dieu.

II. Priez-le qu'il vous inspire.

CONSIDÉRATIONS.

I. Dieu ne vous a pas mise en ce monde pour aucun besoin qu'il eût de vous, qui lui êtes du tout inutile, mais seulement afin d'exercer en vous sa bonté, vous donnant sa grâce et sa gloire. Et pour cela il vous a donné l'entendement pour le connaître, la mémoire pour vous souvenir de lui, la volonté pour l'aimer, l'imagination pour vous représenter ses bienfaits, les yeux pour voir les merveilles de ses ouvrages, la langue pour le louer; et ainsi des autres facultés.

11. Étant créée et mise en ce monde à cette intention, toutes actions contraires à celle-ci doivent être rejetées et évitées, et celles qui ne servent de rien à cette fin doivent être méprisées, comme vaines et superflues.

III. Considérez le malheur du monde, qui ne pense point à cela, mais vit comme s'il croyait n'être créé que pour bâtir des maisons, planter des arbres, assembler des richesses et faire des badineries.

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AFFECTIONS ET RÉSOLUTIONS.

I. Confondez-vous, reprochant à votre âme sa misère, qui a été si grande ci-devant, qu'elle n'a que peu ou point pensé à tout ceci. Hélas! direz-vous, que pensais-je, ô mon Dieu, quand je ne pensais point à vous? de quoi me ressouvenais-je, quand je vous oubliais? qu'aimais-je, quand je ne vous aimais pas? hélas! je me devais repaître de la vérité, et je me remplissais de la vanité et servais le monde, qui n'est fait que pour me servir.

II. Détestez la vie passée. Je vous renonce, pensées vaines et cogitations inutiles; je vous abjure, ô souvenirs détestables et frivoles; je vous renonce, amitiés infidèles et déloyales, services perdus et misérables gratifications ingrates, complaisances fâcheuses.

III. Convertissez-vous à Dieu. Et vous, ô mon Dieu, mon Sauveur, vous serez dorénavant le seul objet de mes pensées; non, jamais je n'appliquerai mon esprit à des cogitations qui vous soient désagréables. Ma mémoire se remplira, tous les jours de ma vie, de la grandeur de votre débonnaireté, si doucement exercée en mon endroit. Vous serez les délices de mon cœur et la suavité de mes affections.

Ah! donc tels et tels fatras et amusements auxquels je m'appliquais, tels et tels vains exercices auxquels j'employais mes journées, telles et telles affections qui engageaient mon cœur, me seront désormais en horreur; et à cette intention j'userai de tels et tels remèdes.

CONCLUSION.

I. Remerciez Dieu qui vous a faite pour une fin si excellente. Vous m'avez faite, ô Seigneur, pour vous, afin que je jouisse éternellement de l'immensité de votre gloire; quand sera-ce que j'en serai digne, et quand vous béniraiJe, selon mon devoir?

II. Offrez. Je vous offre, ô mon cher Créateur, toutes ces

mêmes affections et résolutions, avec toute mon âme et mon

cœur.

III. Priez. Je vous supplie, ô Dieu, d'avoir agréables mes souhaits et mes vœux, et de donner votre sainte bénédiction à mon âme, à cette fin qu'elle les puisse accomplir par le mérite du sang de votre fils répandu sur la croix. Faites le petit bouquet de dévotion.

MÉDITATION III.

DES BÉNÉFICES DE DIEU.

PRÉPARATION.

I. Mettez-vous en la présence de Dieu.
II. Priez-le qu'il vous inspire.

CONSIDÉRATIONS,

I. Considérez les grâces corporelles que Dieu vous a données, quel corps, quelles commodités de l'entretenir, quelle santé, quelles consolations loisibles pour celui-ci, quels amis, quelles assistances; mais cela considérez-le avec une comparaison de tant d'autres personnes qui valent mieux que vous, lesquelles sont destituées de ces bénéfices : les unes gâtées de corps, de santé, de membres; les autres abandonnées à la merci des opprobres, du mépris et déshonneur; les autres accablées de pauvreté; et Dieu n'a pas voulu que vous fussiez si misérable.

II. Considérez les dons de l'esprit. Combien y a-t-il au monde de gens hébétés, enragés, insensés; et pourquoi n'êtes-vous pas du nombre? Dieu vous a favoriséc; combien y en a-t-il qui ont été nourris rustiquement et en une extrême ignorance, et la Providence divine vous a fait élever civilement et honorablement.

III. Considérez les grâces spirituelles: ô Philothée, vous êtes des enfants de l'Eglise; Dieu vous a enseigné sa con

naissance dès votre jeunesse. Combien de fois vous a-t-il donné ses sacrements? combien de fois des inspirations, des lumières intérieures, des répréhensions pour votre amendement? combien de fois vous a-t-il pardonné vos fautes? combien de fois délivrée des occasions de vous perdre où vous étiez exposée? Et ces années passées, n'étaient-ce pas un loisir et commodité de vous avancer au bien de votre âme? Voyez un peu, par le menu, combien Dieu vous a été doux et gracieux.

AFFECTIONS ET RÉSOLUTIONS.

I. Admirez la bonté de Dieu. O que mon Dieu est bon en mon endroit ! ô qu'il est bon! O que votre cœur, Seigneur, est riche en miséricorde et libéral en débonnaireté; ô mon âme, racontons à jamais combien de grâces il nous a fait.

II. Admirez votre ingratitude. Mais que suis-je, Seigneur, que vous ayez eu mémoire de moi? O que mon indignité est grande. Hélas! j'ai foulé aux pieds vos bénéfices, j'ai déshonoré vosgrâces, les convertissant en abus et mépris de votre souveraine bonté, j'ai opposé l'abîme de mon ingratitude à l'abîme de votre grâce et faveur.

III. Excitez-vous à reconnaissance. Sus done! 6 mon cœur, ne veuille plus être infidèle, ingrat et déloyal à ce grand bienfaiteur. Et comment mon âme ne sera-t-elle pas à jamais sujette à Dieu, qui a fait tant de merveillés et de grâces en moi et pour moi?

Ah! donc, Philothée, retirez votre corps de telles et telles voluptés, rendez-le sujet au service de Dieu, qui a tant fait pour lui; appliquez votre âme à le connaître et reconnaître, par tels et tels exercices qui sont requis pour cela. Employez soigneusement les moyens qui sont en l'Église, pour vous sauver et aimer Dieu. Oui, je fréquenterai l'oraison, les sacrements, j'écouterai la sainte parole, je pratiquerai les inspirations et conseils.

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