parce que Dieu en est offensé; mais l'accusation de notre péché nous sera douce et agréable, parce que Dieu en est honoré. Ce nous est une sorte d'allégement de bien dire au médecin le mal qui nous tourmente. Quand vous screz arrivée devant votre père spirituel, imaginez-vous être à la montagne de Calvaire, sous les pieds de JésusChrist crucifié, duquel le sang précieux distille de toutes parts, pour vous laver de vos iniquités. Car bien que ce ne soit pas le propre sang du Sauveur, c'est néanmoins le mérite de ce sang répandu qui arrose abondamment les pénitents autour des confessionnaux. Ouvrez donc bien votre cœur pour en faire sortir les péchés par la confession; car, à mesure qu'ils en sortiront, le précieux mérite de la passion divine y entrera pour le remplir de bénédiction. Mais dites bien tout, simplement et naïvement; contentez bien votre conscience en cela pour une bonne fois. Et cela fait, écoutez l'avertissement et les ordonnances du serviteur de Dieu et dites en votre cœur: Parlez, Seigneur, car votre servante vous écoute. Oui, c'est Dieu, Philothée, que vous écoutez, puisqu'il a dit à ses vicaires : Qui vous écoute m'écoute. Prenez par après en main la protestation suivante, laquelle sert de conclusion à toute votre contrition, et que vous devez avoir premièrement méditée et considérée; lisez-là attentivement, et avec plus de ressentiment qu'il vous sera possible. PROTESTATION AUTHENTIQUE POUR GRAVER EN L'AME LA RÉSOLUTION DE SERVIR DIEU, ET CONCLURE LES ACTES DE PÉNITENCE. Je soussignée, constituée et établie en la présence de Dieu éternel et de toute la cour céleste, ayant considéré l'immense miséricorde de sa divine bonté envers moi, très-indigne et chétive créature, qu'elle a créée de rien, conservée, soutenue, délivrée de tant de dangers et comblée de tant de bienfaits; mais surtout ayant considéré cette incompréhensible douceur et clémence avec laquelle ce très-bon Dieu m'a si bénignement tolérée en mes iniquités, si souvent et si amiablement inspirée, me conviant à m'amender, et si pa-. tiemment attendue à pénitence et repentance jusqu'à cette année de mon âge; nonobstant toutes mes ingratitudes, déloyautés et infidélités, par lesquelles, différant ma conver-, sion et méprisant ses grâces, je l'ai imprudemment offensé ; après avoir encore considéré qu'au jour de mon sacré baptême, je fus si heureusement et saintement vouée et dédiée à mon Dieu pour être sa fille, et que, contre la profession qui fut alors faite en mon nom, j'ai tant et tant de fois si malheureusement et détestablement profané et violé mon esprit, l'appliquant et employant contre sa divine Majesté; enfin, revenant maintenant à moi-même, prosternée de cœur et d'esprit devant le trône de la justice divine, je me reconnais, avoue et confesse pour légitimement atteinte et convaincue du crime de lèse-majesté divine, et coupable de la mort et passion de Jésus-Christ, à raison des péchés que j'ai commis, pour lesquels il est mort et a souffert le tourment de la croix, et que je suis digne, par conséquent, d'être à jamais perdue et damnée. Mais me retournant vers le trône de l'infinie miséricorde de ce même Dieu éternel, après avoir détesté de tout mon cœur et de toutes mes forces les iniquités de ma vie passée, je demande et requiers humblement grâce, pardon et merci, avec entière absolution de mon crime, en vertu de la mort et passion de ce même Sauveur et Rédempteur de mon âme, sur laquelle m'appuyant, comme sur l'unique fondement de mon espérance, j'avoue derechef et renouvelle la sacrée profession de fidélité faite de ma part à mon Dieu en mon baptême, renonçant au diable, au monde et à la chair; détestant leurs malheureuses suggestions, vanités et concupiscences, pour tout le temps de ma vie présente et de toute l'é ternité; et me convertissant à mon Dieu débonnaire et pitoyable, je désire, propose, délibère, et me résous irrévocablement de le servir et aimer maintenant et éternellement; lui donnant à ces fins, dédiant et consacrant mon esprit avec toutes ses facultés, mon âme avec toutes ses puissances, mon cœur avec toutes ses affections, mon corps avec tous ses sens, protestant de ne jamais plus abuser d'aucune partie de mon être contre sa divine volonté et souveraine Majesté, à laquelle je me sacrifie et immole en esprit pour lui être à jamais loyale, obéissante et fidèle créature, sans que je veuille désormais m'en dédire ni repentir. Mais, hélas! si par suggestion de l'ennemi, ou par quelque infirmité humaine, il m'arrivait de contrevenir en chose quelconque à cette mienne résolution et consécration, je proteste dès maintenant et me propose, moyennant la grâce du SaintEsprit, de m'en relever si tôt que je m'en apercevrai, me convertissant derechef à la miséricorde divine, sans retardation ni dilatoire quelconque. Ceci est ma volonté, mon intention et ma résolution inviolable et irrévocable, laquelle j'avoue el confirme sans réserve ni exception, en la même présence sacrée de mon Dieu, à la vue de l'église triomphante, et en la face de l'église militante, ma mère, qui entend cette mienne déclaration en la personne de celui qui, comme officier de celle-ci, m'écoute en cette action. Plaise à vous, ô mon Dieu éternel, tout-puissant et tout bon, Père, Fils et Saint-Esprit, confirmer en moi cette résolution, et accepter ce mien sacrifice cordial et intérieur en odeur de suavité. Et comme il vous a plu me donner l'inspiration et volonté de le faire, donnez-moi aussi la force et la grâce requises pour le parfaire. O mon Dieu, vous êtes mon Dieu, Dieu de mon cœur, Dieu de mon âme, Dieu de mon esprit; ainsi je vous reconnais et adore maintenant et pour toute l'éternité. Vive Jésus! 3 CHAPITRE X. Conclusion pour cette première purgation. Cette protestation faite, soyez attentive et ouvrez les oreilles de votre cœur, pour ouïr en esprit la parole de votre absolution, que le Sauveur même de votre âme, assis sur le trône de sa miséricorde, prononcera là-haut au ciel devant tous les anges et les saints, en même temps qu'en son nom le prêtre vous absout ici-bas en terre. Si que toute cette troupe des bienheureux, se réjouissant sur votre bonheur, chantera le cantique spirituel d'une allégresse non-pareille, et tous donneront le baiser de paix et de société à votre cœur, remis en grâce et sanctifié. O Dieu! Philothée, que voilà un contrat admirable, par lequel vous faites un heureux traité avec sa divine Majesté, puisqu'en vous donnant vous-même à ellevous la gagnez, et vous-même aussi pour la vie éternelle. Il ne reste plus sinon que, prenant la plume en main, vous signiez de bon cœur l'acte de votre protestation, et que par après vous alliez à l'autel, où Dieu réciproquement signera et scellera votre absolution et la promesse qu'il vous fera de son paradis, se mettant lui-même, par son sacrement, comme un cachet et sceau sacré sur votre cœur renouvelé. En celte sorte, ce me semble, Philothée, votre âme sera purgée du péché et de toutes les affections du péché. Mais d'autant que ces affections renaissent aisément en l'âme, à raison de notre infirmité et de notre concupiscence, qui peut être mortifiée, mais qui ne peut mourir pendant que nous vivons ici-bas en terre, je vous donnerai des avis, lesquels, étant bien pratiqués, vous préserveront désormais du péché mortel et de toutes les affections de celui-ci, afin que jamais il ne puisse avoir place dans votre cœur ; et d'autant que les mêmes avis servent encore pour une purifica tion plus parfaite, avant que de vous les donner, je veux dire quelque chose de cette plus absolue pureté à laquelle je désire vous conduire. CHAPITRE XI. Qu'il se faut purger des affections que l'on a aux péchés véniels. A mesure que le jour se fait, nous voyons plus clairement dans le miroir les taches et souillures de notre visage; ainsi, à mesure que la lumière intérieure du Saint-Esprit éclaire nos consciences, nous voyons plus distinctement et plus clairement les péchés, inclinations et imperfections qui nous peuvent empêcher d'atteindre à la vraie dévotion. Et la même lumière qui nous fait voir ces tares et déchets, nous échauffe au désir de nous en nettoyer et purger. Vous découvrirez donc, ma chère Philothée, qu'outre les péchés mortels et les affections des péchés mortels, dont vous avez été purgée par les exercices marqués ci-devant, vous avez encore en votre âme plusieurs inclinations et affections aux péchés véniels. Je ne dis pas que vous découvriez des péchés véniels; mais je dis que vous découvriez des affections et inclinations à ceux-ci. Or, l'un est bien différent de l'autre car nous ne pouvons jamais être du tout purs des péchés véniels, au moins pour persister longtemps en cette pureté; mais nous pouvons bien n'avoir aucune affection aux péchés véniels. Certes, c'est autre chose de mentir une fois ou deux de gaîté de cœur, en chose de peu d'importance, et autre chose de se plaire à mentir et d'être affectionné à cette sorte de péché. Et je dis maintenant qu'il faut purger son âme de toutes ces affections qu'elle a aux péchés véniels, c'est-à-dire, qu'il ne faut point nourrir volontairement la volonté de continuer et persévérer en aucune sorte de péché véniel. Car aussi serait-ce une lâcheté trop grande de vouloir, tout à notre |