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XXVIII

LOI DU 18 JUILLET 1906, RELATIVE A LA RÉGLEMENTALION DU PATURAGE DANS LES FORÊTS SOUMISES AU RÉGIME FORESTIER, PORTANT ABROGATION DE L'ARTICLE 75 DU CODE FORESTIER ET MODIFICATION DES ARTICLES 69, 72 ET 110 DU MÊME CODE (1).

Notice et notes par M. Fernand DAGUIN, docteur en droit, avocat à la cour d'appel de Paris.

Cette loi a la même origine que les deux lois reproduites ci-dessus. Le projet auquel elle doit le jour a été déposé à la Chambre des députés par M. Ruau, ministre de l'agriculture, le 14 février 1906, en même temps que les deux autres projets; il a été renvoyé, comme eux, à la commission de l'agriculture, et a fait l'objet d'un rapport, rédigé également par M. Bonnevay.

La réforme proposée par le gouvernement portait sur quatre articles du code forestier, les articles 69, 72, 75 et 110.

L'article 69 est relatif à la déclaration annuelle des cantons forestiers défensables, abandonnés aux communes ou aux particuliers jouissant des droits d'usage, et à la fixation du nombre de bestiaux admis au pâturage et au panage. Il arrivait fréquemment que le nombre des animaux déclarés par les usagers ou par les habitants de la commune intéressée dépassât le nombre de ceux qui pouvaient être admis; le gouvernement proposa, dans ce cas, de conférer au maire, à l'imitation de ce qui se passe en Algérie (2), le pouvoir de dresser l'état de répartition entre les usagers du nombre des bestiaux admis.

L'article 72 imposait aux communes ou sections de commune usagères, l'obligation de grouper leurs animaux en un troupeau commun et de les faire conduire au pâturage par un ou plusieurs pâtres choisis par l'autorité municipale. Le projet tendait à accorder au préfet la faculté d'autoriser les habitants des écarts ou hameaux à avoir des troupeaux particuliers.

L'article 75 obligeait les usagers à munir leurs animaux de clochettes, à peine d'une amende de deux francs par tête de bétail. Cette prescription, tombée en désuétude, paraissait pouvoir être abrogée sans inconvénient.

Enfin, l'article 110 interdisait d'introduire des chèvres, brebis et mou

(1) J. Off. du 26 juillet 1906. TRAVAUX PRÉPARATOIRES.

Chambre des députés projet du gouvernement, dépôt, 14 février 1906, doc. 1906, p. 71; rapport, doc. 1906, p. 306; adoption, sans discussion, 6 avril 1906. Sénat rapport, doc. 1906, p. 750; adoption

sans discussion, 11 juillet 1906.

(2) Loi forestière algérienne, du 21 février 1903, art. 67 (A. Puton et Ch. Guyot, Code de la législation forestière, p. 426).

tons dans les forêts appartenant à des communes ou à des établissements publics, sans une autorisation spéciale du chef de l'État. Dans le but de faciliter l'obtention de celte autorisation, le gouvernement proposa de la faire accorder, non plus par décret, mais par arrêté du ministre de l'agriculture.

Le projet déposé par M. Ruau ne souleva aucune objection; la commission conclut à l'adoption pure et simple, ce qui eut lieu, à la séance du 6 avril 1906.

Transmis au Sénat, le projet y fut l'objet d'un rapport favorable, et fut adopté sans modification, à la séance du 11 juillet 1906.

La loi fut promulguée le 18 juillet, en même temps que les deux autres lois modificatives du code forestier. Nous en donnons le texte ciaprès.

« Article unique. -L'article 75 du code forestier est abrogé. << Les articles 69, 72 et 110 du même code sont modifiés ainsi qu'il suit :

« Art. 69. Chaque année, avant le 1er mai pour le pâturage, et un mois avant l'époque fixée par l'administration forestière pour l'ouverture de la glandée et du panage, les agents forestiers feront connaître aux communes et aux particuliers jouissant des droits d'usage les cantons déclarés défensables et le nombre des bestiaux qui seront admis au pâturage et au panage.

«< Les maires seront tenus d'en faire la publication dans les communes usagères et de dresser, s'il y a lieu, dans un délai de quinze jours, un état de répartition entre les usagers du nombre des bestiaux admis (1).

« Art. 72. Le troupeau de chaque commune ou section de commune devra être conduit par un ou plusieurs pâtres communs choisis par l'autorité municipale; en conséquence, les habitants des communes usagères ne pourront ni conduire eux-mêmes ni faire conduire leurs bestiaux à garde séparée, sous peine de 50 centimes d'amende par tête de bétail (2).

<< Toutefois, s'il existe dans une commune des groupes d'habi-tations trop éloignés de l'agglomération principale pour que les bestiaux puissent se joindre au troupeau commun, le préfet pourra, sur la demande du conseil municipal et l'avis conforme du conservateur des forêts, les autoriser à avoir des troupeaux particuliers, dont les pâtres seront choisis, comme ceux du trou

(1) L'attribution au maire du droit de fixer le nombre de bestiaux que chaque usager peut envoyer au pâturage, est une innovation de la loi.

(2) L'amende, dans ce cas particulier, a été réduite de deux francs à cinquante centimes.

peau commun, par l'autorité municipale. S'il y a désaccord entre le préfet et le conservateur, il en sera référé au ministre de l'agriculture, qui statuera définitivement (1).

« Les porcs ou bestiaux de chaque commune, section de commune, ou groupe d'habitants autorisé à avoir un troupeau distinct, formeront un troupeau particulier et sans mélange de bestiaux d'une autre commune ou section, ou d'un autre groupe, sous peine d'une amende de 5 à 10 fr. contre le pâtre et d'un emprisonnement de cinq à dix jours en cas de récidive.

<«< Les communes et sections de commune seront responsables des condamnations pécuniaires qui pourront être prononcées contre lesdits pâtres et gardiens, tant pour les délits et contraventions prévus par le présent titre que pour les autres délits forestiers commis par eux pendant le temps de leur service et dans les limites du parcours.

« Art. 75. Abrogé (2).

--

« Art. 110. - Dans aucun cas et sous aucun prétexte, les habitants des communes et les administrateurs ou employés des établissements publics ne peuvent introduire ni faire introduire dans les bois appartenant à ces communes ou établissements publics, des chèvres, brebis ou moutons, sous les peines prononcées par l'article 199 contre ceux qui auraient introduit ou permis d'introduire ces, animaux, et par l'article 78 contre les pâtres ou gardiens (3).

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<< Toutefois le ministre de l'agriculture pourra autoriser par des décisions spéciales le pacage des brebis ou moutons dans certaines forêts (4) ».

(1) Précédemment, il n'était pas possible aux habitants de groupes d'habitations éloignés de l'agglomération principale de la commune d'obtenir l'autorisation de constituer des troupeaux particuliers.

(2) L'article 75 édictait, pour les usagers, l'obligation de suspendre des clochettes au cou de leurs bêtes.

(3) L'article 110 contenait un alinéa 2, ainsi conçu : « Cette prohibition n'aura son exécution que dans deux ans, à compter du jour de la publication de la présente loi, dans les bois où, nonobstant les dispositions de l'ordonnance de 1669, le pâturage des moutons a été toléré jusqu'à présent. >>

On a supprimé, avec raison, cette disposition transitoire, qui n'avait plus de raison d'être.

(4) Ce dernier alinéa transfère du chef de l'État au ministre de l'agriculture le pouvoir d'autoriser des dérogations aux prescriptions du 1er alinéa. D'après le texte du Code de 1827, l'autorisation devait être accordée par « ordonnance spéciale de Sa Majesté ».

XXIX.

DÉCRET DU 18 AOUT 1906, MODIFIÉ PAR DÉCRET DU 10 NOVEMBRE 1906, PORTANT FIXATION DES GARANTIES SPÉCIALES DE CAPACITÉ PROFESSIONNELLE POUR LES CANDIDATS AUX FONCTIONS JUDICIAIRES, ET INSTITUANT POUR LES MAGISTRATS UN TABLEAU D'AVANCEMENT (1).

Notice par M. Daniel BURET, docteur en droit, avocat à la cour d'appel de Paris.

L'article 38 de la loi de finances du 17 avril 1906 est ainsi conçu : « Jusqu'à la promulgation d'une loi organique sur les conditions de nomination et d'avancement dans la magistrature, un règlement d'administration publique, rendu en exécution de la présente loi dans les trois mois qui suivront sa promulgation, fixera des garanties spéciales de capacités professionnelles pour les candidats aux fonctions judiciaires et instituera pour les magistrats un tableau d'avancement. »

C'est en exécution de cet article, mais avec un retard de deux mois sur le délai prescrit, que le décret du 18 août a été rendu. Aux termes de son article 24, ce décret n'entrait en application que le 15 novembre 1906, en ce qui concerne le tableau d'avancement qui devait être établi dans la seconde quinzaine d'octobre. De plus, le ministre pouvait procéder directement à toutes les nominations, conformément aux disposiLions antérieures, jusqu'au 1er juillet 1907, pour les postes de juge suppléant, et seulement jusqu'au 15 novembre 1906, pour tous les autres postes.

Ce décret fut mal accueilli, le tableau d'avancement ne fut pas établi en temps utile, et un second décret du 10 novembre, modifiant l'article 24, a décidé que le nouveau système ne sera appliqué qu'à partir du 15 février 1907, en ce qui concerne le tableau d'avancement. De plus,. le ministre conserve jusqu'à cette date la liberté de nomination à tous les postes autres que ceux de juges suppléants.

TITRE Ier.

DES GARANTIES SPÉCIALES DE CAPACITÉ PROFESSIONNELLES.

Art. 1er. Nul ne peut être nommé en France, en Algérie ou en Tunisie, aux fonctions judiciaires, s'il ne remplit les conditions exigées par la loi du 20 avril 1810 et s'il n'a subi avec succès les épreuves d'un concours ouvert pour l'admissibilité aux fonctions de juge suppléant ou s'il ne se trouve dans une des catégories mentionnées à l'article 14 ci-après.

(1) J. Off. des 21 août et 11 novembre 1906.

Art. 2. Peuvent être admis à prendre part au concours :

1o Les docteurs et licenciés en droit qui, remplissant les conditions prescrites par la loi du 20 avril 1810, justifient que pendant un an il ont accompli un stage au ministère de la justice, au parquet d'une cour d'appel ou à celui du tribunal de la Seine;

2. Les docteurs et licenciés en droit qui, outre le stage exigé par la loi du 20 avril 1810, justifient par des certificats d'inscription réguliers d'un stage effectif d'un an dans une étude d'avoué;

3. Tout lauréat de l'Institut ou d'une faculté de droit de l'État. Nul ne pourra se présenter plus de trois fois au concours.

Art. 3. Chaque année, le ministre de la justice fixe par arrêté le nombre des places qu'il y a lieu de mettre au concours; jusqu'au commencement des épreuves le nombre peut être augmenté.

L'arrêté qui indique la date à laquelle s'ouvre le concours est publié au Journal officiel trois mois avant cette date.

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Art. 4. A partir du jour de la publication de l'arrêté et dans le mois qui suit cette publication, les candidats peuvent se faire inscrire au parquet du procureur de la République de l'arrondissement où ils résident, en déposant les pièces de nature à justifier qu'ils remplissent les conditions prescrites tant par la loi que par le présent décret.

Les inscriptions et les pièces déposées sont transmises par le procureur de la République au procureur général.

Art. 5.

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Le procureur général fait parvenir, avec le résultat de son enquête, au ministre de la justice, le dossier des candidats inscrits dans le ressort de la cour. Le premier président, à qui le dossier a été préalablement communiqué, adresse de son côté un rapport sur chacun des candidats au ministre de la justice.

Le ministre de la justice apprécie s'ils réunissent les qualités essentielles qui doivent être exigées des aspirants à la magistrature et, après enquête supplémentaire s'il y a lieu, arrête définitivement la liste des candidats. Il notifie à chaque intéressé, quinze jours au moins avant l'ouverture du concours, la décision prise à son égard.

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Art. 6. Le jury de chaque concours est nommé par le ministre de la justice. Il se compose d'un conseiller à la cour de cassation, président, d'un directeur au ministère de la justice, de deux membres de cour d'appel et d'un membre du tribunal de la Seine.

Le jury siège à Paris.

Art. 7. Le concours comporte des épreuves destinées à constater que les candidats possèdent les connaissances théoriques et pratiques indispensables à l'exercice des fonctions judiciaires.

Les épreuves sont écrites et orales; la quotité des points à attribuer à chacune d'elles est déterminée par arrêté ministériel.

Les docteurs en droit, mention « sciences juridiques », bénéficient d'un nombre de points égal au dixième du maximum tel qu'il résulte de l'arrêté précité.

Art. 8. Les épreuves écrites comprennent deux compositions :

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