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sans transition, un refroidissement considérable avec humidité très-prononcée. Nous n'étions plus abrités par les terres de Luçon contre les effets de la mousson du N. E. Telles sont les circonstances qui, avec l'humidité de la corvette, durant la traversée de Manille à Macao et notre séjour à l'embouchure du Tigre, ont amené les affections des voies aériennes, nasales, etc. Tout l'équipage a été plus ou moins influencé. Sur le mouvement de février ne figurent que les malades qui ont présenté de la fièvre. Chez plusieurs il a été indispensable de recourir aux émissions sanguines plus ou moins réitérées.

Ce que l'humidité chaude n'avait pas déterminé, la température froide et humide l'a causé. Trois des convalescents de fièvres intermittentes de Nossi-Bé ont éprouvé le retour de l'affection périodique. Par compensation, il n'existe plus de traces de scorbut.

Après dix-huit jours d'arrivée sur la rade de Macao, nous appareillons pour Touranne (Cochinchine); nous y mouillons le 25.

La frégate lÉrigone, qui avait encore des vestiges de la dyssenteric et des fièvres intermittentes contractées dans le Yang-Tsé-Kiang (fleuve Bleu ou de Nankin), nous embarqua 6 malades pour Bourbon: 3 dyssentériques, 1 fièvre intermittente rebelle, 1 eczéma chronique, 1 fistule lacrymale double. Un des dyssentériques (Duhart) est mort en vue de la côte de Cochinchine, quatre jours après son embarquement sur l'Héroïne. Les deux autres sont, l'un surtout, fort amaigris, dans un état assez précaire. Les affections de notre équipage se rétablissent promptement sur la rade de Touranne.

Le 13-mars, Lechevoir, autre dyssentérique de l'Erigone, succombe ou plutôt s'éteint sans agonie.

Le 17 mars, nous nous mettons en route pour Singapore, cn passant par Colloo-Cham et Pulo-Condor, groupe d'îles dépendantes de la Cochinchine, les premières à l'E., les

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secondes au S. de cet État. Le 5 avril, nous étions à Singapore. Le 13, nous nous mettions en route pour Batavia. Le 24, nous jetions l'ancre sur cette rade, à un mille et demi de terre.

Avant notre arrivée à Java, je n'ai rien remarqué d'extraordinaire; encore quelques troubles des voies digestives, des héméralopies et 2 scorbuts: chez un des malades il est passé à l'état chronique, mais peu intense.

Nous avons éprouvé, sur la rade de Batavia, de telles chaleurs, et les nuits ont été si humides de rosée, qu'il était à supposer que nous devions, tôt ou tard, nous en ressentir. Cette influence s'est accusée par l'apparition de phénomènes morbides de l'appareil digestif; la diarrhée les a compliqués le plus souvent; la céphalalgie en a accompagné une certaine quantité : quatre offrent des accès intermittents, pour lesquels il a fallu recourir à la quinine, malgré la rougeur de la langue, etc.

Cependant, je me garderai bien d'attribuer, d'une manière exclusive, à notre séjour à Batavia l'existence des affections observées sur cette rade et peu de jours après notre départ; car, depuis notre départ de Singapore, l'équipage a éprouvé, en raison de la température et des travaux que nécessitent des mouillages et appareillages fréquents, des fatigues qui ont dû ébranler la santé. Les sondeurs, surtout, ont presque tous été malades.

Notre boulanger et un homme des plus vigoureux du bord (Le Roy) sont atteints, à peu de distance, de fièvre rémittente, muqueuse et soporeuse. L'affection a cédé chez le boulanger à un traitement approprié; le calomel a déterminé, chez lui, une salivation intense avec aphtes. Le malade entre promptement en convalescence, tandis que chez Le Roy, d'un tempérament sanguin, les saignées générales et locales n'ont procuré qu'un soulagement peu durable. L'antipériodique, uni au calomel, ainsi que les révulsifs les plus énergiques, pu arrêter les progrès du mal. Le Roy a succombé

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le dixième jour de son entrée au poste, avec les symptômes d'un raptus céphalique pendant l'un des paroxysmes.

Nous étions à la mer pour Bourbon, depuis le 16 mai, lorsque l'un de nos anciens fièvreux de Madagascar (Raux) est revenu, avec la deuxième rechute, de sa première affection. A la céphalie chronique ont succédé des accès tierces simples bien caractérisés. Le sulfate de quinine reste sans résultat bien manifeste. Il est vrai que nous sommes toujours pénétrés d'humidité, depuis notre sortie du détroit de la Sonde. La fièvre intermittente rebelle de l'Erigone s'est renouvelée plus forte que jamais, et à intervalles plus réguliers. Le peu de succès obtenus par la quinine me fait renoncer, pour ce malade, à l'emploi, quand même, de ce moyen. Je me borne à modérer, chez lui, l'exaltation de l'appareil nerveux.

Deux insolations ont cédé facilement. Pendant la seconde moitié de la traversée, j'ai observé 4 nouveaux cas d'accès intermittents chez des hommes atteints d'irritations gastrointestinales; leur marche, ainsi que celle des précédentes, est lente et irrégulière. Le convalescent de la fièvre soporeuse reprend difficilement ses forces.

Comme toujours les héméralopies sont plus nombreuses à la fin du voyage.

Un premier cas de scorbut, chez un de nos matelots les plus vigoureux (Courcoux), s'est manifesté. Trois des anciens malades sont rentrés; deux avec œdème des membres abdominaux et douleurs ostéocopes : une débilité générale accompagne ces phénomènes. Les symptômes d'irritation des organes du ventre m'ont fait suspendre le sulfate de quinine pour les affections mixtes, observées depuis notre arrivée à Batavia. Je me suis borné à l'administration des laxatifs salins, afin de remédier à l'état muqueux, forme plus fréquente de ces irritations.

A notre arrivée à Saint-Denis, le 17 juin, j'ai dirigé sur

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l'hôpital les convalescents, les fièvres larvées, etc. Le séjour à terre a régularisé la marche de ces affections.

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Pendant le voyage que nous avons fait à Maurice, du 25 juin au 1 juillet, nos malades ont tellement profité de ce séjour à terre, que la plupart rentraient à bord après une courte absence.

Quatre seulement n'étaient pas susceptibles de rendre des services immédiats: 1° Philibert, 2° maître (rétrécissement inodulaire à la portion spongieuse de l'urèthre, suite d'une ancienne chute (1836) sur la région périnéale). Ce maître est, à peu près, dans le même état depuis son embarquement à Brest; 2o Maillet (arthrite chronique, souvent récrudescente); 3° Debruyn (diarrhée lientérique chronique): 4° Malme, convalescent de fracture du calcaneum, avec distension des ligaments tibio - tarsiens. Le retour de ces hommes en France.est décidé à l'hôpital, après mon débarquement.

Purgé des valétudinaires, l'équipage de l'Héroïne, quoique fatigué, offre encore un bon noyau, malgré l'ennui qui le possède.

Depuis le départ de France jusqu'au 22 juillet 1843, époque à laquelle j'ai remis le service à mon successeur, 11 hommes sont morts de maladies: 1 à Saint-Denis, 1 à Saint-Paul (Provost Yves et Hillion) et 9 à bord; 6 de ces derniers ont succombé dans la campagne à la Nouvelle-Zélande, que je considère comme la plus pénible pour l'Héroine. Je ne compte ici que les hommes appartenant à notre équipage; 20, en y comprenant les 4 passagers sur la Fortune, et cités un peu plus hant, sont retournés en France, pour cause de maladies qui les mettaient hors d'état de rendre des services. 5, dont 1 volontaire, se sont noyés par accident.

L'Heroine a donc éprouvé une diminution totale de 36 hommes, par suite de maladies et d'événements de mer, dans l'espace de 26 mois d'une navigation très-pénible

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des latitudes diverses et dans des pays où existent des endémies menaçantes pour des Européens, dont bon nombre n'étaient pas dans un état de santé propre à résister à tant de causes de maladies.

L'assistance que j'ai reçue de M. Cigale, second chirurgien de l'Héroïne, mérite les éloges que je m'empresse de lui donner ici, et me fait bien augurer de son dévouement, s'il était besoin de le mettre jamais à l'épreuve.

II.

Après avoir fait l'exposé des affections observées le plus souvent à bord, je crois qu'il serait bon de jeter un coup d'œil sur quelques-uns des lieux que nous avons visités, quoique nous y ayons stationné trop peu de temps pour donner à cette matière tout le degré de solidité et d'utilité convenable.

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Akaroa (presqu'ile de Banks, Nouvelle-Zélande). Baie-des-Iles
(île du nord).

La baie d'Akaroa, dans la presqu'île de Banks, présente son ouverture au S. E. Elle est formée, surtout à l'E. par la succession de plusieurs baies secondaires, presque toutes abritées par de grosses pointes. Les terres qui forment la baie sont fort élevées et se terminent à la mer par une pente roide ou des coupes perpendiculaires. Akaroa est donc comme encaissé par des montagnes couvertes de grands arbres pour la plupart. Les points les plus élevés seulement, la Couronne et le Bossu, ont leur crête dénudée et rocheuse. Les plateaux des vallons sont assez limités et s'élargissent au rivage. Ils sont parcourus, en plusieurs sens quelquefois, par des petites rivières ou des ravines qui manquent rarement d'eau. Ainsi, à l'établissement de la société nanto-bordelaise, en amont du village Maouri-Akaroa, l'on en compte quatre: l'Aiguade, la rivière des Tentes, celle de l'Établissement et celle des Enfants. Quelques-unes peuvent être re

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