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l'on remarque chez les Maouris. Le contact avec des Européens infectés de syphilis a dû donner lieu à des symptômes héréditaires, dont on ne retrouve aucun exemple cité dans les voyages des anciens navigateurs. L'usage des vêtements très-chauds (couvertures de laine, etc.), dont les Maouris aiment à se charger, par luxe, et qu'ils enlèvent sans précautions, alors qu'ils ont le corps couvert de sueur, a donné lieu à de trop fréquentes affections pulmonaires dans les Pâs voisins des établissements européens, pour qu'il nous soit permis de ne point admettre cette cause à priori, dans la majorité des cas.

A l'abus des alcooliques, j'attribuerai les maladies les plus nombreuses du tube digestif et les stimulations du centre nerveux, qui mènent quelques individus à la folie. Cependant il est un fait incontestable; c'est que les Maouris tirent des grappes de l'etoutoa (coriaria sarmentosa) une liqueur enivrante, qui ne doit pas laisser que de causer parfois les désordres reprochés à l'abus des liqueurs fortes. Le fâcheux accident, arrivé à quelques hommes de l'Aube, à Kororarika (Baie-des-Iles, décembre 1841), prouve assez la nocuité de ces fruits. A Akaroa, plusieurs de nos hommes, et moi-même, eûmes l'imprudence d'en manger; mais personne n'a eu lieu de s'en repentir. Il est vrai que nous avions rejeté instinctivement les graines écailleuses de ces baies.

En résumé, si la Nouvelle-Zélande est en voie rapide de dépopulation indigène, il faut en accuser les guerres incessantes que se font les peuplades, leurs sacrifices, et, en grande partie maintenant, leurs rapports avec les Européens, qui introduisent chez eux des habitudes pernicieuses. Abandonnés à eux-mêmes, ces hommes sont vigoureux, bien proportionnés, quoiqu'ils soient à peine vêtus pour résister aux intempéries des saisons.

Quant à nous, nous trouvons à la Nouvelle-Zélande le

climat des zones moyenne et méridionale de l'Europe, selon le lieu que nous voulons y habiter.

Là, point de ces endémies meurtrières qui n'épargnent personne.

La variole exerce, chez les Maouris, quelques ravages; mais ils se prêtent si facilement à l'application du préservatif, que bientôt ils n'auraient plus rien à redouter de cette désolante maladie, si les possesseurs généralisaient cette mesure de prudence et d'humanité.

Colonie d'Adélaïde, dans le golfe Saint-Vincent (Nouvelle-Hollande), 1842.

La colonie anglaise d'Adélaïde, au S. de la NouvelleHollande (Terre de Flinders), comptait, à notre passage, une population de 17,000 âmes, dont 600 sur le bras de mer qui forme le port Adélaïde, 6 à 7,000 à Adélaïde même; le reste est disséminé dans l'intérieur, au delà des monts Lofty, ou sur le plateau qui existe entre les collines boisées où commencent ces montagnes et le bord de la mer. De nombreuses habitations se rencontrent sur cette plaine, dont les portions cultivées sont céréales.

Bien que les pluies soient rares, en général, le terrain argileux n'en conserve pas moins assez de fraîcheur et d'humidité pour faciliter les récoltes.

L'eau que l'on se procure est de bonne qualité, et provient des pluies qui en remplissent des ravins sans issues à la côte. Ces ravins se perdent dans les déclivités du sol, en dedans des dunes qui bordent le rivage. Là, ces eaux sont absorbées ou forment des marnes autour desquelles l'on admire la végétation la plus riche.

A un demi-mille du rivage, et en deçà, les puits ne fournissent qu'une eau saumâtre, qualité qu'elle doit, sans doute, à la dépression du sol au-dessous du niveau de la mer. Mais si de si vastes dunes, d'un beau sable blanc, s'opposent à l'envahissement du plateau par la mer, elles se prêtent fort bien à

une filtration. A une plus grande distance de la plage ces puits, peu profonds, contiennent une eau excellente qui n'a besoin que de repos pour précipiter l'argile à laquelle elle doit sa teinte opaline. C'est à l'aide de ces puits, dont le plus grand nombre est creusé dans les parties boisées, que les colons se fournissent dans l'été. Celle des ravins manque souvent, excepté dans la saisons des pluies. Le Torrens, même, sur la rive duquel la ville d'Adélaide est assise, manque absolument en certains endroits. Comme les autres ravines il est impasse,

en

Deux saisons se partagent l'année dans cette partie de l'Australie: la chaude et sèche, et celle des pluies. Celle-ci commence en avril et finit en septembre. Il n'y pleut jamais, cependant, plus de trois jours consécutifs; mais c'est par ondées épaisses. La saison est alors des plus agréables. C'est aussi l'époque où la végétation est la plus active et la campagne la plus belle; tandis que, les sept autres mois de l'année, le sol est desséché par un soleil brûlant.

Pendant notre séjour dans le golfe Saint-Vincent, en mars, nous avons eu des brises du large dans le jour et de terre après le coucher du soleil. La température, à bord, a été de 22° centigrades, le matin; 27° à 28° à midi, et 23o le soir. A terre la chaleur était beaucoup plus forte.

Entre la mer et Adélaïde, qui en est à 6 milles anglais, l'on a conservé une large ceinture de grands bois, sur la lisière desquels se trouve la majeure partie des habitations. Des chemins traversent ces bois dans tous les sens. Du reste, les forêts de la Nouvelle-Hollande ont cela de différent d'avec celles de la Nouvelle-Zélande, qu'elles manquent absolument de sous-bois, ce qui permet de les parcourir en voiture.

C'est pendant l'été que règnent les plus graves maladies, et les colons éprouvent de grandes pertes. La dyssenterie, surtout, fait de grands ravages. J'ai vu plusieurs exemples d'affections organiques des viscères abdominaux. L'intem

pérance d'un grand nombre en est la cause la plus fréquente. L'on observe aussi quelques fièvres périodiques. Les affections des premiers âges emportent le plus de victimes; et, en première ligne, se présentent celles qui accompagnent la première éruption des dents.

Au delà des monts Lofty, au dire des colons, le pays et le climat sont bien différents; car au lieu d'une plaine assez déprimée, mal arrosée, coupée dans plusieurs endroits de dunes, de ravins et de marécages, l'on rencontre un plateau très-élevé au-dessus du niveau de la mer, boisé et parfaitement sillonné de ruisseaux d'eau limpide. Là aussi la saison est tempérée, les maladies y sont rares; ceux même qui en ont contracté aux environs d'Adélaïde, vont s'y rétablir.

Tous les animaux domestiques y prospèrent. L'on s'y livre beaucoup à l'élève des moutons que l'on tire de la Nouvelle-Galles du Sud. Les bœufs et les chevaux sont fournis par la Tasmany-Lan (terre de Van-Diémen). Quelques-uns de ces derniers sont apportés de Timor.

Les légumes sont d'une excellente qualité. La chassé et surtout la pêche sont très-abondantes. Jusqu'à présent les volailles sont rares sur les marchés.

Au milieu de la nouvelle colonie les Nouveaux-Hollandais vivent assez tranquilles; mais il a été, jusqu'à ce moment, impossible de les utiliser pour les travaux les plus simples. Ils vivent de leur chasse, de ce qu'ils reçoivent en mendiant, et même des volailles ou moutons qu'ils peuvent dérober aux colons, et sans violence. Ces sauvages n'ont point d'habitations: il sont d'une affreuse malpropreté; et beaucoup, surtout parmi les femmes, offrent le dégoûtant spectacle d'affections lépreuse et scrofuleuse.

Enfin, le golfe Saint-Vincent offre, aux équipages fatigués par de longues privations, tous les avantages réunis, du moins dans la saison où nous l'avons fréquenté. La tranquillité de la mer permet d'ouvrir les hublots, de ventiler et sécher les lieux inférieurs. Quant au climat et anx rafraîchis

sements de toute nature, il y a de quoi satisfaire les plus exigeants et à peu de frais.

1842 et 1843.

La rapidité avec laquelle nous avons parcouru, dans notre dernière campagne, divers points de l'Indo-Chine ne m'a pas laissé le loisir de faire des remarques de quelque importance. La difficulté des communications et mes occupations m'interdisaient des absences prolongées.

Nous avons payé notre tribut au seul lieu où la santé des équipages se trouve si souvent compromise. Ce n'est que dans la suite des temps que l'on pourra donner à Batavia une salubrité relative. Les Européens ont reculé jusqu'à Veltevreden devant le fléau qui les frappait dans le vieux Batavia, laissant pendant la nuit aux Chinois et aux Malais la garde de leurs comptoirs et magasins. Quelques postes militaires veillent à la police générale.

Dans les hôpitaux militaires, j'ai retrouvé les nombreux désordres qui suivent les affections périodiques invétérées : beaucoup de trouble dans la circulation, des dyssenteries chroniques, quelques rémittentes graves. Mais nous ne devons pas omettre de dire que la plupart de ces affections appartenaient à des soldats et à des marins qui revenaient des divers établissements de la côte de Sumatra, etc., lieux dans lesquels les troupes sont toujours en campagne ou sur le qui-vive, pour repousser et poursuivre les Malais.

L'hôpital chinois, au Compang, compte une énorme proportion d'aliénés et de lépreux. Chez ces derniers, j'ai vu se contourner et disparaître, si je puis m'exprimer ainsi, leurs extrémités par une sorte d'absorption éliminatoire. Le plus grand nombre étaient couverts d'ulcères rongeants, avec ou sans éléphantiasis. Ces affections, qui reconnaissent la syphilis comme cause première, sont attaquées par les dépuratifs sudorifiques et les préparations mercurielles, et

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