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et d'autres parties du gréement; et, une fois l'élan pris, on a modifié de la même façon les balancines et les écoutes des huniers, ce qui a considérablement réduit les embarras du gréement, parce que les chaînes exposent à la violence du vent une surface moindre que celle des cordages. qu'elles ont remplacées. La fabrication des cordages a reçu, il est vrai, de nombreux perfectionnements depuis l'époque où les Carthaginois faisaient leurs câbles avec le sparton du genet, jusqu'à l'année 1840 où Buchanan a pris son brevet. Mais, pour appliquer ici une remarque fort judicieuse, à cette dernière époque, ces cordes étaient toujours des cordes, et même les drosses de gouvernail en lanières de peau, qui ont été introduites comme une nouveauté en 1807, n'étaient qu'une réminiscence des reeps employés dans l'enfance de notre navigation; et l'on ne peut pas dire qu'il ait été fait une réforme radicale dans les cordages jusqu'à l'emploi récent des cordes de fil d'archal pour les manœuvres courantes et les manœuvres dormantes. Les amiraux Shank, Bentinck, Knowles et d'autres officiers de la marine ont porté une attention spéciale sur les moyens d'assurer une grande force aux fils de caret réunis, de trouver la combinaison des fibres la plus parfaite, et de perfectionner la fabrication des cordages en général; et, entre les années 1783 et 1807, il n'a pas été délivré moins de 20 à 30 brevets pour cet objet. On a aussi discuté longuement le meilleur moyen de préserver les cordages de la destruction; car l'opération du goudronnage, opération qui se trouve grandement facilitée par le brevet du capitaine Huddart, pris en 1800, ne remplit ce but qu'imparfaitement, et diminue matériellement la force du cordage. Et cependant, comme le goudronnage, malgré tous ses défauts, est encore un précieux préservatif, plusieurs personnes, en tête desquelles il faut citer M. Chapman, ont fait diverses tentatives pour chasser l'acide et le mucilage du goudron ordinaire. On a eu recours, en outre, à l'huile, au suif et à

d'autres corps gras. Le tannage et la kyanisation n'ont été suivis d'aucun avantage décisif; mais une solution de caoutchouc, au lieu de goudron, a été, dit-on, employée dernièrement avec succès. Le cordage breveté de Lang est déjà un grand pas; mais, comme la plupart des inconvénients du chanvre sont sans remède, l'emploi du fil de fer a été accueilli avec plaisir. Cette ingénieuse invention avait cependant été brevetée, fabriquée et fréquemment employée en Angleterre longtemps avant que l'Association britannique pour l'avancement des sciences eût, en 1838, permis au comte Brenner de dire, en pleine assemblée, qu'elle était d'origine allemande, et qu'on l'avait appliquée, dès 1832, aux travaux des usines en Autriche. En vérité, nous songeons tout autant à aller étudier l'architecture navale en Bohême, qu'à emprunter aux Autrichiens des cordages pour nos navires. Si ces savants auditeurs eussent eu la moindre notion sur cette matière, ils n'auraient pas ignoré les noms d'André Smith et de M. Newall, dont les cordes en fer sont à la fois légères, flexibles et durables; et les personnes qui peuvent concevoir quelques doutes sur la vérité de ce que nous avançons, seront promptement convaincues en examinant le beau modèle qui a longtemps fonctionné sur le chemin de fer de Blackwall.

C'est le fer qu'on emploie ordinairement pour la fabrication des cordages de fils métalliques; mais le cuivre et d'autres métaux pourraient également servir. Ces cordages sont formés de différentes manières; suivant l'usage auquel ils sont destinés. Pour les manœuvres dorinantes, on emploie les fils droits sans commettage, garnis de fourrure, et enduits de matières qui les préservent de la rouille. D'autres cordages sont formés de la même manière que ceux de chanvre; les fils métalliques y remplacent les fils de caret et sont compis en torons. La solidité des extrémités qu'on obtient dans les cordages de chanvre en les surliant s'obtient ici en faisant passer les bouts des fils dans la plus petite ou

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verture d'un collier conique, et en les doublant ou repliant; on les soude ensuite en une masse solide qu'on peut façonner suivant l'usage auquel est destiné le cordage. Le tableau suivant montre le poids et les forces comparatives des cordages de fer et de chanvre :

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Des cordages et des manœuvres courantes, nous arrivons naturellement aux poulies. On jugera du nombre énorme de ces appareils qu'exige la marine roy[ae seulement, quand on saura qu'un vaisseau de ligne a dans son gréement environ 1,400 poulies de toutes sortes. La construction de ces poulies, malgré la simplicité de leur aspect, exige la plus grande précision, afin que leur jeu soit toujours ce qu'il doit être ; aussi l'art de la poulierie avait toujours formé une branche de fabrication importante et extrêmement coûteuse. A l'issue de la guerre d'Amérique, les fournitures de la marine étaient faites par M. Taylor de Southampton, qui avait pris un brevet pour un perfectionnement dans la fabrication des réas, et qui, plus tard, construisit une machine pour couper le bois et façonner les caisses des poulies; mais, à l'expiration de son marché, le Gouvernement entreprit lui-même la fabrication de cet article important, afin d'assurer ses approvisionnements. A

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peu près à la même époque, un ingénieur, devenu célèbre à bien juste titre, sir Marc Isambard Brunel, avait, par un effort de génie mécanique, achevé la construction d'un modèle de machine pour construire à la fois les réas et les caisses des poulies. A l'inspection de ce modèle, les lords de l'amirauté l'adoptèrent immédiatement pour le service de l'État, et Brunel fut chargé de diriger la construction de toutes les machines nécessaires. Ce travail dura près de six ans; mais la machine fut mise en activité en septembre 1808, et son ingénieux inventeur reçut une récompense nationale de 20,000 livres sterling (ou 500,000 francs). Ce mécanisme compliqué est mis en jeu par la vapeur, et il n'y a pas moins de 16 machines différentes; toutes en action et à l'œuvre au même instant; 7 d'entre elles sont employées à faire entièrement la caisse de la poulie, et les 9 autres achèvent le réa. Le travail est réparti entre elles de telle sorte que le morceau de bois brut est pris, coupé, façonné, creusé; les essieux et les vis métalliques sont fabriqués, polis, fixés; enfin les machines exécutent toute la série d'opérations nécessaires pour l'entier achèvement de la poulie. On a trouvé qu'avec cette machine 10 hommes pouvaient faire le même travail qui en exigeait 110 auparavant, et fabriquer aisément, dans l'année, 140,000 poulies de différentes grandeurs, d'une qualité supérieure à celles que l'on faisait à la main et dont la valeur n'est pas moins de 1,250,000 francs. Cet appareil, qui est en activité depuis 1808, n'a reçu aucun changement jusqu'à ce jour, et il n'exige aucune connaissance spéciale de la part des ouvriers qui y sont employés.

L'humidité pernicieuse de la plupart des soutes et l'altération de la poudre à canon, qui en est la conséquence, avait été depuis longtemps un sujet de plaintes sérieuses de la part des commandants de nos vaisseaux. Ceux qui voulaient voir leur bâtiment toujours en mesure pour le combat, faisaient fréquemment remuer la poudre des barils et

des gargousses pleines: aussi se représentait-il. périodiquement, sur chaque bâtiment, une époque où il fallait faire cette opération pour empêcher la poudre de se prendre en masse, et, pendant sa durée, il devenait nécessaire d'éteindre tous les feux du navire, à l'exception du fanal de la soute vitrée. Dans les barils généralement employés, soit que les bois dont ils sont formés n'aient pas été parfaitement desséchés, soit qu'ils absorbent l'humidité de l'atmosphère et la transmettent à ce qu'ils contiennent, la poudre se prend en masse et est fréquemment avariée; aussi lorsqu'on se servait uniquement de ces barils de bois, la quantité de poudre rendue, par les bâtiments de guerre, comme étant hors de service, et qu'il fallait refaire, était-elle énorme. Pour remédier à cet inconvénient, lord Stanhope s'efforça de faire adopter l'emploi de barils de cuivre, mais il échoua, « parce que cela était contraire aux règlements du service; » et pourtant, vingt années avant leur adoption en Angleterre, ils étaient employés dans la marine turque, d'après l'avis d'un ingénieur anglais. Enfin, vers 1812, l'usage des barils de cuivre, pour lesquels Walker prit un brevet, fut introduit dans la marine anglaise, et on les trouva, comme de juste, infiniment supérieurs à ceux de bois pour la conservation de la poudre, et la soute se trouva, de plus, débarrassée de tout l'attirail du tonnelier. En outre, comme la poudre est tout apprêtée en gargousse, on évite l'opération, souvent dangereuse, de la confection de celles-ci, et, comme elles sont tout à fait à l'abri de l'humidité, il n'est plus nécessaire de tourner la poudre de temps à autre. Le contre-amiral sir Ben Hallowell recommanda fortement leur adoption générale dans la marine, et, en 1814, il fit, à Tarragone, quelques expériences très-concluantes dont nous extrayons les résultats suivants :

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