Dans le tableau précédent, les distances latérales sont successivement rapportées à la ligne de tir et à une autre ligne qu'on peut appeler direction moyenne du tir, et déterminée de telle sorte que la somme des déviations à droite soit égale à la somme des déviations àgauche, Lorsque le nombre des coups est très-considérable et qu'il n'existe aucune cause constante qui tende à faire dévier les boulets dans un certain sens, ces deux lignes coïncident.

S 11.

Influence du vent sur la direction des projectiles.

L'écart de la direction moyenne a généralement eu lieu du côté vers lequel le vent soufflait; on peut s'en convaincre en jetant les yeux sur le dessin placé à la suite de ce rapport: le tir du 13 juin fait seul exception à cet égard, et ce jour-là la brise était modérée.

De ces faits, il est naturel de conclure que le vent exerce une influence sensible sur la direction des projectiles; toutefois le tir du 18 juin montre que l'écart de la direction moyenne ne représente pas exactement l'action du vent; il se peut faire, en effet, qu'une autre cause tende à faire dévier les boulets dans un sens constant, et d'ailleurs, lors mème que de pareilles causes n'existent pas, la direction moyenne de 20 coups ne coïncide pas nécessairement avec la ligne de tir.

S 12.

Considérations générales sur les déviations.

Lorsqu'on rapporte les déviations latérales à la direction moyenne du tir, on se propose surtout de se débarrasser des causes qui tendent à porter les boulets toujours dans le même sens; alors la valeur que l'on trouve pour la déviation moyenne est la plus petite possible, d'après les données de l'observation.

Si, pour chaque projectile en particulier, le sens de la déviation était le même que celui de l'écart initial, la déviation moyenne serait proportionnelle à la distance; mais on sait qu'elle croît plus rapidement.

Si, au contraire, le sens de chaque déviation était toujours déterminé par la force déviatrice, la déviation moyenne, supposée déduite d'un très-grand nombre de coups, serait indépendante des diverses valeurs de l'écart initial; mais une pareille hypothèse ne se réalisera jamais complétement. Lors donc que l'on considère les déviations moyennes données par l'expérience comme le résultat de la seule action des forces déviatrices, on doit nécessairement trouver pour ces forces des valeurs un peu au-dessus de la réalité; mais, par là même, l'erreur de l'hypothèse admise se trouve corrigée autrement, les tables des déviations se rapporteraient à un état de choses tout à fait idéal, et pourraient même induire en erreur dans les applications qu'on voudrait en faire à la pratique.

Les forces déviatrices varient entre des limites qui dépendent de l'état des projectiles; elles peuvent prendre d'ailleurs toutes les inclinaisons possibles. It résulte évidemment de là que les valeurs des déviations moyennes ne .peuvent être obtenues qu'à l'aide d'un nombre de coups extrêmement considérable.

'S 13.

Examen des déviations moyennes latérales des boulets creux de 0,22. Dans le tableau suivant, on a réuni les résultats obtenus en 1842 et 1843: Les déviations sont rapportées à la direction moyenne.

C'était le même pointeur qui dirigeait la bouche à feu en 1842 et en 1843; mais les procédés de pointage étaient différents. En 1842 on se servait d'un appareil adapté à l'affût, et dont on peut voir la description dans les Annales maritimes de 1843, page 1026.

Pour mieux apprécier les résultats consignés dans le tableau, il est à propos de tracer deux courbes, ayant pour abscisses les distances, et pour ordonnées, l'une, les déviations de 1842, l'autre, celles de 1843: c'est ce que l'on a fait dans un dessin placé à la suite de ce rapport. Par là on reconnaît facilement les irrégularités dont chaque série d'expériences est affectée, surtout si l'on observe que la déviation, croissant plus rapidement que la distance toute droite qui joint deux points quelconques d'une même courbe, doit toujours passer au-dessous du point de départ. Ainsi, par exemple, dans les expériences de 1843, l'ordonnée à 2,266 mètres se trouve trop petite, si on la compare à celle qui correspond à 1,990 mètres.

Il est à remarquer que les déviations observées en 1842 sont toutes supérieures à celles de 1843. Cette circonstance peut être attribuée au mode de pointage moins exact employé en 1842, et aux anomalies inévitables résultant du petit nombre de coups tirés à chaque distance dans l'une et l'autre série d'expériences.

Les déviations déduites des expériences exécutées à Gavre, antérieurement à 1840, sont précisément intermédiaires entre celles de 1842 et celle de 1843; elles sont rapportées dans le tableau suivant.

DISTANCES (mètres).

600

800 1,000 1,200 1,400 1,600 1,800 2,000 2,200 2,400 2,600

Obusier de 0,22 n° 1.
Charge, 3,50.

1-5 27 4-4 66 94 129 171 22 1 28 1 351 43-3

S 14.

Examen des déviations latérales des boulets de 30.

Dans le tableau suivant, les déviations sont rapportées à la direction moyenne du tir.

L'inspection de la courbe, qui a pour abscisses les distances, et pour ordonnées les déviations, fait voir que les divers résultats obtenus ne s'accordent point entre eux ; la troisième et la quatième déviation sont beaucoup trop petites, ou bien la première et la deuxième sont trop fortes.

Il est à observer que l'état de la mer était beaucoup plus calme dans les deux derniers tirs; mais, sans doute, les différences observées ne sont pas dues uniquement à cette seule circonstance; elles dépendent aussi, en partie, des anomalies du tir, car il n'est pas probable que, dans une série de 20 coups, les valeurs des forces déviatrices et leurs inclinaisons soient variées de telle sorte qu'on obtienne précisément leur effet moyen.

Si l'on rejetait cette manière de voir, et si l'on ne voulait attribuer qu'à l'état de la mer les irrégularités que l'on vient

de signaler, il conviendrait, du moins, d'avertir les praticiens que les déviations trouvées aux deux dernières distances ne peuvent être obtenues que par une belle mer et à l'aide d'un pointeur extrêmement habile. Cette observation serait d'autant plus nécessaire, qu'en rapportant les déviations à la direction moyenne du tir, on a réduit la déviation moyenne à sa moindre valeur (§ 12).

La table déduite des expériences exécutées à Gavre, antérieurement à 1840, donne une courbe qui, passant à peu près par le premier des quatre points déterminés par le tableau précédent, laisse au-dessus d'elle le second, et dans le reste de son cours se trouve au-dessus du troisième et du quatrième.

Voici en effet cette table :

DISTANCES (mètres). 600 800 1,000 1,200 1,400 1,600 1,800 2,000 2,200 2,400||

Déviations moyennes.
Charge, 5,00.

1m0 19 3m1 4-7 6m7 9m1 120 155 195 245

$ 15.

Conclusions relatives aux déviatons.

Il résulte des faits qui précèdent que, dans le tir à la mer, les déviations moyennes ne dépasseront pas, en général, celles qui sont données par les tables déduites des expériences de Gavre, du moins lorsque le pointeur sera un homme exercé.

S 16.

Portées.

Il a été dit, S 9, que le pointeur dirigeait toujours la ligne de mire sur le pavillon du mât de la batterie verte. De la hausse employée dans chaque tir, on peut donc conclure l'angle que l'axe de la pièce faisait avec la ligne qui