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sion, que l'appareil du docteur Marcet pouvait, avec quelques modifications, remplir le but que nous nous proposions. Il y avait longtemps que le besoin d'un pareil instrument se faisait sentir. Le capitaine Henry Ellis, dans son voyage en Afrique, en 1750, ramena de l'eau de l'énorme profondeur de 5,346 pieds (1,629 mètres) au moyen du sea guage (jauge marine), proposé par l'ingénieux docteur Hailes, pour trouver les divers degrés de température et de salure de la mer à différentes profondeurs. Cet appareil était un seau ordinaire, fermé à ses deux extrémités par un couvercle; chacun de ces couvercles était percé dans son milieu d'un trou d'environ 10 centimètres de diamètre et fermé par une soupape qui s'ouvrait de bas en haut, et, afin que ces deux soupapes pussent ouvrir et fermer simultanément, elles étaient réunies par une tige de fer qui allait de la partie inférieure de la soupape supérieure à la partie supérieure de la soupape inférieure. A mesure que le seau descendait dans la mer, la pression faisait ouvrir les deux soupapes et l'eau passait librement dans l'appareil; mais quand le seau était retiré de la mer, les deux soupapes étaient tenues fermées par la pression de l'eau opposée à la direction dans laquelle elles pouvaient s'ouvrir, et le seau revenait ainsi plein d'eau provenant du point le plus bas auquel il fut parvenu. Dans le voyage au pôle, exécuté en 1773, lord Mulgrave employa un appareil proposé par le docteur Irving, et qui était tout simplement formé d'un vase cylindrique ayant à chacune de ces extrémités une ouverture formée par un clapet s'ouvrant de bas en haut et tournant librement autour de charnières.

Lorsqu'on organisa nos expéditions dans le Nord en 1818, on pensa que la possibilité d'atteindre le pôle dépendrait de la circonstance suivante: «Y a-t-il, au pôle, une mer assez profonde pour que la chaleur, qui s'y accumule en été, soit un obstacle à la formation de la glace en hiver? » Entre autres faits, se rattachant à cette question, il était très

important de déterminer les salures relatives de l'énorme masse d'eau située au-dessous de la surface de la mer. Pour arriver à ce résultat, il était essentiel d'avoir un instrument parfait afin d'obtenir de l'eau de mer d'une profondeur donnée; après quelques essais pour modifier la boîte à roue volante (fly wheel box) de M. Tennant, sir Humphry-Davy trouva un appareil fort ingénieux, mais qui n'était pas à l'abri de la critique et qui fut donné au capitaine Ross. Celui du capitaine Parry fut construit par M. Newman, l'habile opticien. Il consistait en un vase de cuivre, muni d'un robinet à arrêt qu'ouvrait un piston, mis en mouvement par la pression de l'air, quand l'appareil était plongé dans la mer. Le piston pouvait être réglé de manière à recueillir de l'eau depuis 5 jusqu'à 80 brasses de profondeur (de 9 à 146 mètres). Comme les volumes des fluides élastiques sont dans le rapport inverse des pressions auxquels ils sont soumis, et que la pression d'environ 10 mètres d'eau diminue le volume de l'air de moitié, la graduation de l'instrument indiquait les moyens de le régler pour l'usage. Mais cet appareil ne paraissait pas être propre au but que nous nous proposions et qui était d'obtenir de l'eau de bien plus grandes profondeurs pour la soumettre à une analyse aussi exacte que possible. On construit la bouteille métallique en question principalement d'après le plan du docteur Marcet. Elle se compose d'un cylindre épais de métal de cloche d'environ 25 centimètres de long sur 15 de diamètre, ayant à chaque extrémité un couvercle épais; chacun de ceux-ci est percé d'une ouverture conique dans la même direction, et ils sont traversés par une tige métallique terminée, à chaque extrémité, par une portion de cône qui s'ajuste exactement dans les ouvertures coniques des couvercles. Quand on veut se servir de l'appareil, on lève la tige de piston et on la retient solidement au moyen d'un ressort; l'eau peut ainsi entrer librement dans le cylindre et en sortir à mesure qu'il descend. Quand il est arrivé à la profondeur voulue,

on fait couler le long de la ligne une balle de fer percée qui, en descendant, va frapper le ressort, la bouteille est à l'instant hermétiquement fermée par les cônes, et l'on a l'eau de la profondeur voulue sans qu'il soit possible que celle des profondeurs moindres vienne se mêler à elle.

Parmi les divers perfectionnements introduits dans le matériel de la marine, durant le siècle actuel, nous pouvons réclamer un des premiers rangs pour l'heureuse adoption des verres lenticulaires (bull's-eyes) actuellement encastrés dans les sabords, les hublots et les ponts des vaisseaux; et au travers desquels la lumière, bien que considérablement diminuée d'intensité, peut passer lors même que le verre lenticulaire est au-dessous des lames. Nous ne devons pas non plus oublier de mentionner les voiles de l'amiral Brooking et du capitaine Pearse; les voiles de cape, en cuir, du commander Lawrence; les bouées de sauvetage du capitaine Lillicrap et des lieutenants Cook et Jackson; les affûts des capitaines Marshall, Halloran et Pole; les nouvelles flasques et les coins de mire de Chatfield; les canots de guerre d'un petit tirant d'eau, du capitaine Smyth, pour courir le long d'une plage ou débarquer les troupes; les hublots à tubes de Lang; les solides porte-haubans de sûreté du capitaine Couch; la clef à levier de Rotch; la clef de mât de Rice; la poulie de capon, de Bothway; la pompe à balancier de Hilton; la table d'opérations du docteur Veitch; les compas de Pope; l'appareil de Cow, pour débarquer l'artillerie; les étoupilles de sûreté (safety tubes) de Watson; les modes de construction de brise-lames flottants de sir Samuel Bentham, du capitaine Sartorius et du capitaine Taylor, etc., etc. Tous ces perfectionnements ont été proposés non pour l'absurde vanité de surmonter des difficultés, mais parce qu'ils offrent, sans trop augmenter la dépense, un véritable but d'utilité.

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No 3.

CONSERVATION du matériel naval au moyen de la glu marine.

M. de Chabannes, capitaine de corvette, auquel nous sommes déjà redevable de plusieurs articles aussi utiles que curieux, s'est occupé, entre autres choses, pendant le voyage qu'il a fait en Angleterre, au commencement de 1843, de rechercher quels avantages la marine de ce pays retirait de la nouvelle composition nommée colle ou gla marine, dont nous avons déjà entretenu nos lecteurs, pages 166 et suivantes du tome II, Sciences et arts, de l'année dernière. M. de Chabannes ne présente pas le collage des bois comme l'emploi le plus important de la glu marine; il insiste davantage sur une application qui doit avoir de bien plus grands résultats pour la marine, celle de la conservation du matériel naval flottant, et, en général, de tous les bois, de tous les métaux et de tous les corps qui sont exposés à l'humidité.

L'expérience de plusieurs années sera sans doute indispensable pour apprécier les avantages de la glu marine; mais comme, depuis près de trois ans que cette composition est employée en Angleterre, on a tout lieu de s'en louer, il est probable que nous pourrons aussi l'utiliser en France. Déjà même, dans l'intérêt particulier, le port de Marseille en a fait de nombreuses applications paur le calfatage des bâtiments de commerce, et, dans la digue flottante que l'on construit à la Ciotat, toutes les pièces de bois sont assemblées et enduites avec la glu marine.

Quand on examine avec attention les dépenses qu'occa

sionne l'entretien du matériel naval, il est impossible de n'être pas frappé de la courte durée des bâtiments, d'où résulte l'obligation de fournir des remplacements fréquents. Il est peu de bâtiments qui, au bout de douze à quinze ans, n'aient besoin d'une refonte, sinon complète, au moins partielle, et qui ne soient entièrement incapables de navigner après vingtcinq à trente ans, Souvent même ce terme est abrégé, et ici l'usure des bâtiments, si je puis m'exprimer ainsi, n'est pas en rapport avec les services qu'ils ont rendus, avec les fatigues qu'ils ont éprouvées; car il arrive ordinairement qu'un bâtiment qui n'a presque pas navigué est plus promptement hors de service qu'un autre qui aura été beaucoup à la mer, et nous avons dans ce moment l'exemple de plus d'un vaisseau qui, sans être à peine sorti du port, ne serait point en état de faire campagne.

Il est d'une haute importance de rechercher les causes de cette prompte détérioration, dans les coques des bâtiments, et après les avoir reconnues, de trouver les moyens d'y remédier.

Nous commencerons donc par porter un examen attentif sur ces causes de détérioration, et, à cet effet, nous prendrons un bâtiment condamné, nous en séparerons toutes les parties, et nous en passerons une visite minutieuse.

Nous trouverons certaines pièces de bois qui ne sont nullement détériorées, mais elles sont en petit nombre. D'autres sont complétement pourries par l'action seule de l'humidité; celles-ci sont rongées par des insectes, qui n'attaquent que les parties sèches, celles-là par des vers qui ne dépassent pas les limites du bois mouillé: enfin il y a encore la pourriture sèche, qui ronge les bois dans leur intérieur sans montrer aucun signe apparent, espèce de maladie cachée, dont on ne connaît ni la cause ni le remède. Des ravages d'une autre nature se font en outre remarquer dans tous les endroits où le fer se trouve en contact avec le bois. Les chevilles qui servent à lier entre elles les diverses par

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