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de l'électricité. Ceci n'est qu'une conjecture, mais je crois qu'elle mérite considération.

Nous complétons ce document, dû à M. de Chabannes, par un extrait du Nautical Magazine, de janvier 1844, sur tout ce qui vient d'être dit en faveur de l'emploi de la glu mrine.

M. Jeffery, l'inventeur de la colle marine, a fait voir dernièrement, dans l'arsenal de Woolwich, une nouvelle application de cette substance, pour les cas de naufrage ou de détresse à la mer, ou pour la construction de moyens de transports d'hommes et de munitions sur des rivières, en temps de guerre. Les expériences ont été faites en présence d'un grand nombre d'officiers des armées de mer et de terre et de savants. M. Jeffery et ses aides ont commencé par déployer plusieurs pièces de bois d'environ un pouce d'épaisseur, jointes les unes aux autres par des charnières et semblables, à peu près, à un écran à feuilles; ils y ont joint ensuite d'autres pièces de bois de moindre dimension, au moyen de crocs et de boucles, et la composition a été appliquée aux joints. Ils ont ainsi construit et mis à l'eau, en 20 minutes, un canot de 12 pieds de long sur 4 de large et 20 pouces de profondeur, ayant sur l'arrière et sur l'avant des compartiments pleins d'air et hermétiquement fermés pour lui donner plus de légèreté.

Dès qu'il eut été mis à l'eau, le lieutenant Nichols, commandant le bateau à vapeur le Dwarf, M. Jeffery et deux ouvriers s'y embarquèrent et ils gagnèrent, à l'aviron, le ponton l'Hébé, stationné au milieu de la rivière, et revinrent à terre. Toute l'opération, depuis le paquetage des pièces de bois jusqu'à la fin de l'expérience, n'avait duré que 35 minutes; le bateau fut ensuite tiré à terre par deux hommes sans avoir fait une goute d'eau.

Cette embarcation ne pesait que 2 quintaux et 7 livres (un peu plus de 100 kilogrammes).

N° 4.

RAPPORT médical adressé à M. le docteur KERAUDREN, inspecteur général du service de santé de la marine, sur la campagne de la corvette l'Héroïne, commandée par M. Favin-Lévêque, capitaine de corvette, dans les mers de l'Inde et de l'Indo-Chine, depuis le 28 janvier 1841 jusqu'au 11 juillet 1843; par M. Rolland, docteur-médecin chirurgien-major de la corvette.-Traversée de Brest à Bourbon. -Nouvelle Zélande. Nouvelle Hollande. -IndoChine. - Akaroa. Baie des îles. Colonie anglaise d'Adélaïde dans le golfe Saint-Vincent.

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Brest, le 9 février 1844.

Le 1 mai 1841, nous appareillons de Brest. Après 56 jours de traversée, nous jetions l'ancre sur la rade de Rio-Janeiro, le 23 juin; le 19 mai nous avions communiqué sous voiles pendant quelques heures, avec Sainte Croix de Ténériffe.

Dans les premiers temps de notre navigation, nous avions eu à combattre bon nombre d'irritations plus ou moins vives des muqueuses digestive et pulmonaire. Cinq de ces affections ont revêtu, en raison de leurs complications, un tel caractère de gravité, qu'elles ont compromis l'existence de ceux qui en étaient atteints. De ce nombre est une pleuropneumonie hémorragique, des mieux caractérisées, chez notre deuxième voilier, homme de 30 ans, d'une constitution athlétique, à prédominance du système musculaire sanguin. Une médication antiphlogistique énergique, par les émissions sanguines, a promptement arrêté le cours des phénomènes primitifs. J'ai eu également à me louer de l'emploi du tartre stibié à la dose contra-stimulante. Cette substance a constamment déterminé, en grande partie, la résolution des engorgements pulmonaires consécutifs.

La muqueuse buccale a été souvent le siége d'inflammations ulcératives. Plusieurs ont dégénéré en fégares. Les

artilleurs et les anciens matelots de la 42° en ont offert les exemples les plus fréquents,

Un cas de scorbut s'est manifesté chez un caporal d'artillerie (Gaschet), homme d'une complexion faible, et sujet à des épistaxis habituelles à terre. Larges ecchymoses livides aux membres, fongosités et saignement des gencives, hémorragies nasales passives, dont le tamponnement seul nous rendait facilement maître; face terreuse, faiblesse générale considérable; tels étaient les symptômes fàcheux que présentait le malade à notre arrivée devant Sainte-Croix.

Un artilleur s'est fracturé en travers la clavicule gauche, au tiers externe, en tombant sur le genou fléchi d'un de ses camarades.

La laryngo-bronchite de notre maître d'équipage Marzin n'a pas marché favorablement. Il est vrai que la température a été, en général, variable et humide au début de la traversée.

Quoique le mois de juin ait été presque constamment orageux, sa chaleur modérée a facilité le retour à la santé de beaucoup de nos malades; les nouveaux cas ont été moins nombreux et moins intenses. Cependant une gastro-pneumonie, entrée à la fin de mai, a eu une marche insidieuse; elle s'est compliquée de réaction sur l'encéphale, qui a précédé de peu de temps la mort. Pillard, jeune marin, appartenait à la 42o compagnie. Il souffrait depuis longtems d'un catarrhe pulmonaire, lorsque je le fis entrer au poste. Disposé à la nostalgie, il dissimulait son indisposition.

Un cas de pleuro-pneumonie latente s'est aussi présenté en juin chez un artilleur; l'affection reste stationnaire quoi qu'on fasse. Un autre artilleur est atteint d'une arthrite suraiguë presque générale.

J'ai été sur le point de perdre, des suites d'une gastro-entérite chronique, un matelot de 37 ans, usé par la misère et des maladies antérieures, et qui naviguait pour la première

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fois. Provost (Yves) provient du dernier envoi fait à bord; chef d'une nombreuse famille, il était atteint de nostalgie, qui déterminait chez lui les accès alternatifs d'aliénation bruyante et d'idiotisme. A l'aide de promesses d'un prochain retour en France, j'étais parvenu à ranimer son courage et ses forces.

A notre arrivée à Rio-Janeiro craignant de voir se terminer fâcheusement la laryngo-bronchite du maître, qui offrait les premiers symptômes d'une phthisie laryngée, je proposai au commandant le renvoi de ce sous-officier en France, et celui du nostalgique Provost.

Notre scorbutique et les convalescents, se sont bien trouvés de notre relâche à Rio, bien que le temps ait été souvent variable et pluvieux pendant sa durée.

Le 5 juillet, nous mîmes à la voile pour Bourbon.

Avec l'abaissement de la température et l'humidité de l'atmosphère, circonstance qui sont devenues d'autant plus sensibles que nous approchions davantage du banc des Aiguilles, ont reparu les affections catarrhales, surtout celles des bronches et des fosses nasales. Les légères ulcérations de la bouche ont pris encore le caractère de fégares. Une seule affection bien intense du tube digestif et une pleuro-pneu-. monie assez grave ont été traitées chez le scorbutique et le nostalgique; les symptômes alarmants se sont renouvelés.

Des signes, d'abord obscurs, de collection dans le côté gauche du thorax se manifestent chez Béret, l'artilleur à la pleuro-pneumonie latente. En effet, le pus s'est frayé un double passage par les bronches et à l'extérieur, au niveau et au-dessus du téton gauche. Cet homme et le nostalgique ont été transportés à l'hôpital de Saint-Denis, dans un état très-précaire de santé, le 21 août. J'ai su, depuis, qu'ils n'avaient survécu que peu de jours à notre départ de Bourbon. Quant au scorbutique, il allait de mieux en mieux, grâce au régime nourrissant et tonique auquel il était sou

mis pendant la traversée. L'arthrite suraigue est aussi en bonne voie de rétablissement.

A notre passage à Bourbon, il existait encore dans les hòpitaux de la colonie des reliquats d'une dyssenterie épidémique qui avait frappé les jeunes soldats déposés naguère par l'Iphigénie et l'Uranie, et campés en tête du plateau de l'ancien camp des noirs à Saint-Denis.

Comme la santé publique n'avait pas été influencée, je crois qu'il ne faut attribuer cet événement qu'à des circonstances tout à fait particulières; et cela avec d'autant plus de raison, que l'épidémie n'a atteint que des hommes qui avaient habité le camp, après avoir fait, pour son installation, des corvées fatigantes. D'ailleurs, les corvées avaient, pour se désaltérer, l'eau au moins insipide de la rivière, qu'elles buvaient sans aucun correctif.

Le 31 août, nous appareillons de Saint-Denis pour la Nouvelle-Zélande.

Au début de cette traversée, quelques diarrhées apyréxiques se sont présentées; affections sans importance et que j'attribue au changement de vivres. Quelques jours de repos et une thérapeutique fort simple en font promptement justice. Chez trois hommes, seulement, elles ont persisté et décélé la maladie du tube digestif. L'un est convalescent de dysscnterie des Antilles (Le Tousse); les deux autres sont d'anciens matelots de la 42° (Thymeur et Alix), a peine rétablis d'affections antérieures à leur embarquement sur l'Héroïne.

Il faut remarquer aussi que la température, qui s'abaissait de plus en plus, doit être comptée pour quelque chose dans l'opiniâtreté de ces diarrhées symptomatiques et la réapparition des catarrhes, dont quelques-uns ont été assez intenses. J'ai eu à combattre deux nouvelles gastro-entérites, une avec arthrite, chez un vieux matelot (Maillet), sujet à cette affection, ainsi qu'une irritation gastro-pulmonaire, compliquée d'arachnoïdite, chez un jeune homme qui avait passé une

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