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sous toutes ses faces, Ses œuvres artistiques, ingénieuses et naïves, pleines de vie, et d'un coloris splendide mais peu varié, sont, on le sait, des bassins rustiques, des statuettes, des vases, des aiguières, des coupes, des salières, des vidercomes, des écritoires, des flambeaux, des corbeilles, des groupes représentant des sujets de l'histoire sainte et de la mythologie. Il y a des Palissy un peu partout; mais le plus grand nombre de ses chefs-d'œuvre est au Louvre, au musée de Cluny, et dans les collections Rallier, Rothschild, Roussel, Sellières et Soltikof. Les poissons, les lézards, etc., ont été moulés sur nature; les mendiants, les joueurs de cornemuse, leurs vêtements bariolés ou en lambeaux, sont traités avec un réalisme touchant dont Rembrandt aurait pu s'inspirer, tandis que dans certaines pièces, le nu se distingue par une grande pureté de style. On cite entre autres. la nourrice qui allaite, une vierge tenant sur ses genoux l'enfant Jésus, et un jeune garçon enlevant des chiens nouveau-nés à leur mère. Lorsque Palissy sortit de prison, les rustiques figulines étaient à la mode comme ornement des salles à manger, des parcs, des jardins. Durant plusieurs années les châteaux se le disputèrent : de celui d'Ecouen, qui était au connétable, il passa à celui d'Anet qu'habitait Diane de Poitiers, puis à ceux de Chaulnes, de Nesle, en Picardie, de Reux en Normandie, etc. La reine mère ayant ensuite entrepris la construction des Tuileries, lui confia la décoration des jardins à laquelle il travaillait, en 1570, avec deux de ses fils, Nicolas et Mathurin. Il avait installé son atelier près de la tuilerie; de là le nom de Bernard des Tuileries qn'on lui donne parfois. En creusant les fondations de la partie du Louvre qui porte le nom de nouvelle salle des Etats (1863), on a retrouvé un de ses fours sur la place du Carrousel, au pied de la grille, à vingt mètres environ de la porte située à gauche de l'arc de triomphe, ainsi que le moule d'un terme, sorte de monstre tout composé de coquillages et destiné à la grotte en terre émaillée du jardin, laquelle a disparu comme celle d'Ecouen. A la Saint-Barthélemy il fut épargné, aussi bien qu'Ambroise Paré, cet autre homme de génie dépourvu d'humanités, par Catherine de Médicis, qui avait encore besoin de ses services. Il dut sans doute la vie au soin qu'il avait eu de ne pas révéler les procédés à l'aide desquels il obtenait ses émaux. Durant le carême de 1575, il lui vint à l'esprit d'exposer dans un cours public ses notions sur l'histoire naturelle du globe; mais se défiant de lui-même, il convoqua d'abord les savants à trois séances préparatoires dans lesquelles il résuma toutes ses observations. N'ayant été contredit par personne, il ouvrit son cours et le continua l'année suivante, au grand applaudissement de nombre de personnes notables, des médecins du roi et notamment d'Ambroise Paré. Palissy avait recueilli et classé par ordre des curiosités qu'il invitait le public à visiter; ce cabinet d'histoire naturelle est très probablement le premier qui ait existé en France. On en trouve le catalogue raisonné à la fin de son second ouvrage: Discours admirables de la nature des eaux et fontaines, tant naturelles qu'artificielles, des métaux, des sels et

salines, des pierres, des terres, du feu et des émaux, avec plusieurs autres excellents secrets des choses naturelles, etc., Paris, 1580, in-8°, dédié à Antoine de Pons. Ce livre se compose de douze traités: 1° Des eaux et fontaines; 2o Du mascaret; 3o Des métaux et alchimie, contre les chercheurs de la pierre philosophale ou faiseurs d'or; 4° De l'or potable; 5° Du mitridat ou theriaque; 6o Des glaces; 7° Des sels divers; 8° Du sel commun; 9o Des pierres; 10° Des terres d'argile; 11° De l'art de terre, de son utilité, des émaux et du feu ; 12° Pour trouver et connaître la terre nommée marne. Outre le surprenant mérite du fond, les deux ouvrages de Palissy ont aussi celui de la forme et du style à un degré tout à fait supérieur. « Il est impossible, écrivait Lamartine, de ne pas proclamer ce pauvre ouvrier d'argile, un des plus grands écrivains de la langue française. Montaigne ne le dépasse pas en liberté, J.-J. Rousseau en sève, La Fontaine en grâce, Bossuet en énergie lyrique. » La Ligue, devenue maîtresse de Paris, s'empressa de jeter dans un cachot l'illustre et vénérable huguenot (1588), dont le ministre apostat Matthieu de Launoy (voir ce mot) demandait et pressait le supplice, tandis que Mayenne, moins haineux, s'efforçait de faire durer et d'allonger le procès. D'Aubigné rapporte que Henri III ayant dit à Palissy: «Mon bon homme, si vous ne vous accommodez pour le fait de la religion, je suis contraint de vous laisser entre les mains de mes ennemis, la réponse fut: Sire, j'étois bien tout prêt de donner ma vie pour la gloire de Dieu; si c'eût été avec quelque regret, certes il seroit éteint en ayant oui prononcer à mon grand roi: Je suis contraint; c'est ce que vous et ceux qui vous contraignent ne pourrez jamais sur moi, pour ce que je sais mourir.» Peu importe que cette sublime réponse soit ou non de l'invention de D'Aubigné ; si la bouche de Palissy ne l'a point prononcée, ses actes prouvent qu'il ne fut pas seulement « le héros de l'art céramique,» selon l'expression de M. Brongniart, mais encore un de ces héros de la conscience capables de sacrifier leur vie à leurs convictions. On lit, en effet, dans le Journal de L'Estoile: « En cet an 1590, mourut aux cachots de la Bastille de Bussi (Leclerc) maître Bernard Palissy, prisonnier de la religion, âgé de quatre-vingts ans, et mourut de misère, nécessité et mauvais traitements, et avec lui trois autres pauvres femmes détenues prisonnières pour la même cause de religion, que la faim et la vermine étranglèrent. Deux pierres sont en mon cabinet que j'aime et garde soigneusement en mémoire de ce bon vieillard, que j'ai aidé et soulagé en sa nécessité, non comme j'eusse bien voulu, mais comme j'ai pu. La tante de ce bonhomme qui m'apporta lesdites pierres, y étant retournée le lendemain voir comme il se portoit, trouva qu'il étoit mort; et lui dit Bussi que, si elle le vouloit voir, qu'elle le trouveroit avec ses chiens sur le rempart, où il l'avoit fait traîner comme un chien qu'il étoit. » Ainsi rien n'a manqué à ce grand homme, ni le caractère antique, ni le zèle et la constance de la piété, ni le génie créateur dans les sciences et dans l'art, ni le talent de grand écrivain, ni la « pauvreté » qui « empêche les bons esprits de parvenir, » ni l'adversité, ni le succès, ni la persécution, ni

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le martyre, qui font de lui un homme complet, et l'un des plus admirables de son admirable siècle. Joseph de Maistre parlait d'élever à Voltaire une statue par la main du bourreau; en 1868, une statue a été érigée au potier de Saintes dans la ville qu'il avait longtemps habitée, par un comité ultra-catholique, dont le secrétaire s'est cru tout permis pour atténuer le protestantisme de Palissy, et pour essayer de démontrer qu'il n'a pas fait au roi des mignons la réponse <«< insolente que lui prête d'Aubigné. Voir Bullet. de l'hist. du Prot. fr., I, 23, 83; II, 234, 522, 540; III, 4; X, 176; XI, 136, 252, 322, 405; XII, 135; XIII, 277; XIV, 340; 2a série III, 434, 495; IV, 40,97; Alfred Dumesnil, Vie de Bernard Palissy, Paris, 1851, in-18; Henry Morley, The life of Bernard Palissy, his labours and discoveries in art and science, Londres, 1852, 1 vol. in-8°; Sauzay et Delange, Monographie de l'œuvre de Palissy, Paris, 1865, in-fo; Camille Duplessis, Etude sur Palissy, couronnée par la Soc. d'Agriculture d'Agen, 1855, in-8°; Chevreul, Journal des savants, 1849; Brongniart, Traité des arts céram., Paris, 1854, 2 vol. in-8°; Lesson, Lettres sur la Saintonge, 1842; Delécluze, Revue fr., 1838; Champollion-Figeac, Cabinet de l'amateur, 1842, Louis Audiat, Bernard Palissy. Etude sur sa vie et ses travaux, Paris, 1868, in-12; La France prot.; Michelet, Guerres de Religion, 78; Hofer, Hist. de la chimie, II, année 1843; Louis Figuier, Savants de la Renaissance, Paris, 1880, in-12; Intermédiaire, I, 124; II, 64; V, 665; VI, 51. O. DOUEN.

PALLADE, évêque d'Hélénopolis, en Bithynie, né vers l'an 367, mort vers l'an 430, embrassa la vie monastique à l'âge de vingt ans, résida dans divers couvents de la Palestine et de l'Egypte, et devint évêque d'Hélénopolis, puis d'Aspona en Galatie. Il fut mêlé aux querelles antiorigénistes et se montra toujours zélé défenseur de Chrysostome, pour lequel il essuya de cruelles persécutions. Pendant son exil il parcourut diverses provinces, recueillant avec soin les actions édifiantes des anachorètes. C'est d'après ces mémoires qu'il forma son histoire des solitaires, intitulée Historia Lausiaca, sive paradisus de vitis Patrum, parce qu'il la composa à la prière de Lausius, gouverneur de Cappadoce, auquel il la dédia. La fraîcheur et la naïveté des descriptions, l'absence relative de miracles grotesques, témoignent en faveur de l'authenticité de cet ouvrage, composé vers l'année 420, qui n'a été connu jusqu'au seizième siècle que par des traductions latines. Le texte grec a été publié par Meursius, Leyde, 1616, in-4°. Fronton du Duc en a donné une édition plus complète dans son Auctuarium, t. II, Paris, 1624, et il a été imprimé depuis dans les éditions des Pères de l'Eglise, ainsi que dans Rosweyd, Vita Patrum. On ne sait s'il faut attribuer à Pallade le Dialogus cum Theodoro, Eccles. Rom. diacono, de vita et conversatione Joannis Chrysostomi, qui a paru d'abord traduit, en latin par Ambroise le Camaldule, Venise, 1532, et dont le texte grec a été publié par Bigot, Paris, 1680, in-4°; 1738, in-4°. Voyez Martini, Disputatio de vita et fatis Palladii Helenopolitani, Altorf, 1754;1 Ceillier, Hist. des aut. sac. et eccl., X, 66 ss.; Cave, Hist. eccl. liter., I, 377; Du Pin, Nouv. Biblioth. des aut. eccl., III, 93; Tillemont, Me

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moires, XI, 530; Fabricius, Bib. græca, IX, 8 ss.; Schrockh, Kirchengesch., VII, 208; X, 525 ss.

PALLADE (Saint), apôtre des Scots, né à Rome, mort à Fordun, près d'Aberdeen, en Ecosse, vers l'an 450, était diacre de l'Eglise de Rome lorsqu'il proposa au pape Célestin d'envoyer en Angleterre Germain évêque d'Auxerre, pour y combattre l'hérésie de Pélage. D'après la chronique de Prosper d'Aquitaine (cf. Bède, Hist. eccl., I, 17, Pallade lui-même fut sacré en 431, par Célestin, premier évêque des Scots établis dans l'Hibernie. Le Bréviaire d'Aberdeen et les calendriers d'Ecosse ont placé sa fête au 6 juillet.

PALLAVICINI ou Pallavicino (Pietro-Sforza), jésuite, né en 1607 à Rome, mort en 1667, professa la philosophie, puis la théologie, et fut nommé cardinal par Alexandre VII en 1659. Il prit part aux travaux de la congrégation qu'Innocent X avait instituée pour examiner la doctrine de Jansénius. Parmi ses nombreux ouvrages, son Histoire du Concile de Trente (Rome, 1656-1657, 2 vol. in-f; 1664, 3 vol. in-4°; la meilleure édition moderne est celle du jésuite Zaccaria, Faënza, 1792-99, 6 vol. in-4°; trad. en latin, Anvers, 1672, 3 vol. in-4o; en français, Paris, 1844, 3 vol. in-4°) occupe le premier rang. Elle a été composée pour réfuter l'lfistoire du même concile publiée par le moine vénitien Paolo Sarpi qui contient les plus vives attaques contre le concile de Trente et l'esprit qui présida à ses délibérations. Aveuglément dévoué à la curie romaine, familier avec les discussions théologiques, habile à mettre en œuvre les nombreux documents que Sarpi avait vainement cherché à se procurer, Pallavicini était l'homme qu'il fallait pour entreprendre l'apologie du concile de Trente dont il approuvait toutes les tendances. Nous citerons encore de lui : . Vindicationes Soc. Jesu, Rome, 1649; Gli Fasti sacri, 1637; Massime ed espressioni di civile ed ccclesiastica prudenza, 1713. - Voyez Alegambe, Bibl. scriptor. Soc. Jesu; Tiraboschi, Storia della Letteratura italiana, VIII, 132 ss.; Ranke, Fürsten u. Vælker von Südeuropa, IV, 270 ss.

PALLE (palla, couverture), nom d'une pièce de toile ou d'étoffe de soie qui couvre l'autel lorsque le prêtre y a placé le calice et ce qui est nécessaire au sacrifice. Dans le Sacramentaire de Grégoire le Grand, le corporal (voy. ce mot) et la palle sont appelés pallæ corporales, pour les distinguer des nappes d'autel, qui sont simplement nommées palla. Dans la suite, on a donné le nom de corporal au linge qui est au-dessous du calice, et celui qui est au-dessus a retenu le nom de palla. Voyez Le Brun, Explicat. des cérém. de la messe, II, 25.

PALLIUM, ornement pontifical propre aux papes, aux patriarches, aux primats et aux métropolitains, qui le portent sur leurs habits pontificaux. Il est en laine blanche, et a la forme d'une bande large de trois doigts, qui entoure les épaules, ayant des pendants longs d'une palme par devant et par derrière, avec de petites lames de plomb arrondies aux extrémités, couvertes de soie noire avec quatre croix rouges. L'origine du pallium est expliquée d'une manière différente. Les uns la trouvent dans les ornements sacerdotaux du grand-prêtre

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chez les Juifs; d'autres croient la voir dans le manteau impérial dont les empereurs accordaient l'usage aux hauts dignitaires, en particulier aussi aux papes et aux patriarches. Les textes invoqués (Symmaque, 501, chez Mansi, Collect. conc., c. VIII, fol. 228; Fejer, Codex diplom. Hungar., ad. an. 504) pour faire remonter l'usage du pallium au commencement du sixième siècle de l'ère chrétienne, manquent de solidité. Ce n'est guère que sous Grégoire Ier que l'envoi du pallium apparaît certain. Boniface, l'apôtre de la Germanie, en fait le premier mention (Epist. 73, ad Cudberthum, chez Würdtwein, Bonifaci epistolæ, Mogunt., 1789). Depuis lors, trois mois après leur consécration, les archevêques sont obligés de faire la réquisition du pallium, et jusqu'à ce qu'ils l'aient obtenu, ils ne peuvent exercer leurs fonctions, si ce n'est pour accorder des démissoires. Le pallium doit être réclamé à nouveau pour l'administration de chaque nouvelle province ecclésiastique il est enterré avec son propriétaire. Tandis que le pape peut le porter en toute occasion, l'archevêque ne peut le mettre que dans sa province et dans l'exercice de ses fonctions. Dans l'origine, le pallium était délivré gratuitement; plus tard les papes en réclamaient un prix élevé, ce qui donnait parfois lieu à des contestations entre les titulaires et la curie romaine. Le pallium est fabriqué avec de la laine prise sur des agneaux qui sont solennellement bénis par le pape depuis le balcon du Vatican à la fête de sainte Agnès, puis emmenés à l'église de ce nom et placés sur l'autel pendant la messe Agnus Dei. Les sœurs de Sainte-Agnès les élèvent avec le plus grand soin, les tondent et filent la laine. Les palliums sont bénis par le pape aux vêpres de la fête de saint Pierre et de Paul, le 18 juin, et passent la nuit sur l'autel élevé sur la tombe de saint Pierre dans l'église du Vatican ; ensuite ils sont serrés dans une armoire pratiquée au-dessus de la cathedra Petri, jusqu'au jour où le pape les envoie aux archevêques nouvellement promus. Primitivement réservé à ces derniers, le pallium a aussi été donné à certaines catégories d'évêques, comme en Orient où tous les évêques le portent. Voyez Thomassin, Discipline de l'Eglise; Bocquilot, Liturgie sacrée, p. 170; le père de Bralion, Pallium archiepiscopale; Barthel, De pallio, 1753; Pertsch, De origine, usu et authoritate palli archiepiscopalis, 1754; Calcagni, De pallio, 1820.

PALMER (Chrétien-David-Frédéric), né à Winnenden, dans le Wurtemberg, en 1811, mort en 1875 à Tubingue, où il professa la théologie depuis 1843, a laissé la réputation d'un esprit aimable, d'un écrivain facile et fécond, d'un orateur populaire, simple et ingénieux. Ses sermons, en particulier les deux recueils Evangelische Casualreden, 1846, et Predigten aus neuerer Zeit, 1874, se distinguent par leur forme élégante et claire, leur chaleur fortifiante et leur caractère pratique. Peut-être pèchent-ils, comme toutes les productions de Palmer, par un certain manque de profondeur et d'énergie: ils ne stimulent pas assez la réflexion propre des auditeurs ou des lecteurs. Ce sont les diverses branches de la théologie pratique que Palmer a traitées avec une prédilection et une aptitude marquées. Son Evangel. Homiletik, 1842, son Evangel. Katechetik, 1841, son Evangel. Pæ

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