Images de page
PDF
ePub

de Templeux, fut murée à la sollicitation des curés, parce qu'il s'y tenait des réunions nocturnes. Après l'édit barbare de 1724, qui provoqua une nouvelle émigration, l'intendant Chauvelin écrivait: « Nous n'avons guère dans ce département que les environs de Saint-Quentin et de Péronne, où il y a encore un assez grand nombre de gens de la R. P. R. » De son côté, l'évêque de Noyon affirmait que la «< perversion » faisait chaque jour des progrès près de Péronne; en 1727, il renouvelait ses plaintes et dénonçait les coupables. Du Vermandois le mouvement se communiqua à l'Amiénois; en 1743, des anciens catholiques embrassèrent la Réforme dans des réunions tenues à Senlis (arrond. de Doullens) par un meunier. Telle fut l'origine de la paroisse actuelle de Contay. Interrompues partout par la violente persécution de 1745, les assemblées recommencèrent en 1751, sans doute à l'arrivée du pasteur Pélissier, dit Dubesset, du surnom duquel M. Rossier a fait un ministre Duplessis qui n'a jamais existé. La persécution non moins violente de 1752 obligea Pélissier de se retirer en Hollande, d'où il revint cinq ans après. A l'ouest de Doullens, sur les confins de la Picardie et de l'Artois, Louis Duménil, de Grouches, se mit à son tour à faire des prosélytes, dont les descendants appartiennent également à l'Eglise de Contay. Enfin le Paul Rabaut du Nord, François Charmuzy, que la tradition (suivie par M. Rossier) a transformé en Charles Moisi (musi se dit pour moisi en picard), réorganisa en 1769 les Eglises de Lemé, Landouzy, Esquéhéries, Flavy-le-Martel, Hargicourt, Templeux, Lempire, Jeancourt, Lehaucourt, ainsi que celles du Cambrésis. Arrêté en chaire, le jour de Pâques 1770, à Nanteuil, il mourut en prison à Meaux, pendant l'instruction de son procès, qui pouvait se terminer par une condamnation capitale. Charmuzy eut pour successeur Briatte; de 1771 à 1773, celui-ci visita deux fois par an toutes les Eglises du Nord et celles de la Brie, et n'interrompit son ministère qu'après l'arrestation de son collègue de Meaux, Broca. Un autre pasteur, nommé Loreille, faisait concurrence à Briatte, en 1772, et élait accueilli à Landouzy et dans le Cambrésis. Trois ans plus tard, Bellanger, s'étant improvisé ministre, remplaçait Briatte; il présidait, en 1776, le colloque des Eglises de Templeux, Hargicourt, Jeancourt, Heucourt et Cempuiz, dans lequel il prenait l'engagement de visiter chaque Eglise trois fois par an, au lieu de deux. Bientôt le nombre des pasteurs augmenta malgré la persécution. Il y en eut quatre au synode tenu à Bohain en 1779, bien que la Brie, qui avait aussi le sien, eût refusé de s'y faire représenter, à cause de l'irrégularité du ministère de Bellanger. Ces quatre étaient Bellanger, de la rue de Bohain (Lemé), pour la Thiérache, Dolivat, d'Hargicourt, pour la Picardie (c'est-à-dire le reste de la province), Fontbonne-Duvernet, pour le Cambrésis, et Racine, pour l'Orléanais et le Berry. Peu après le synode, Dolivat fut emprisonné, et relâché à condition de passer à l'étranger. Née le remplaça en 1780. Bellanger mit fin à son ministère la même année, et eut pour successeurs Rangdesadreit (1781-1782), et Gential, dit Lasagne (1783-1788). A partir de 1785, la formule « Au Désert » dis

paraît des registres de l'Eglise de Lemé, et trois ans plus tard, grâce à l'édit de tolérance (1787), la contrée, qui n'avait qu'un ministre en 1770, en comptait six: Lasagne à Lemé, Malfuson à..., Née à Hargicourt, Devismes à Quiévy en Cambrésis, Hervieux à La Ferté-sousJouarre, Moru à Loisy en Brie. Devismes consacrait une part de son temps aux fidèles de Contay et à ceux de la basse Picardie (Vraignes, Ainval, Vergies, Fresneville, Heucourt). A Abbeville, Saint-Valery, Oisemont, Neufville, Prouville, Herly, Belleuse, Montdidier, le protestantisme était absolument éteint. La Picardie compte actuellement 7,400 protestants et treize pasteurs prêchant dans trente-deux temples et douze oratoires: Amiens, Vraignes, Ainval, Flixecourt (Abbeville, Ailly); Contay, Harponville, Toutencourt, Warloy, Franvillers; Doullens (Milly, Terramesnil); Templeux, Lempire; Jeancourt, Vendelle; Hargicourt; Nauroy, Serain, Montbrehain, Levergies; Saint-Quentin, Flavy-le-Martel (Lafère, Laon, Tergnier, Trosly); Fresnoy (Bohain, Essigny); Grougis (Guise); Esquéheries, Floyon, Hannapes; Lemé, Sains (Saint-Gobert); Landouzy, Neuvemaison, Parfondeval, Leuze. Voyez L. Rossier, Hist. des prot. de Picardie, Paris, 1861, in-12; notre Essai historiq. sur les Egl. réf. de l'Aisne, Paris, 1860, in-8°; Bullet. de l'hist. du prot., 2° série, II, 166; IV, 245; XIII, 269; Bullel. de la Société chrét. prot. du Nord, Saint-Quentin, 1857, in-8°, p. 40; F. de Schickler, Géographie historiq. de la France prot., Paris, 1879, grand in-8°; Louandre, Hist. d'Abbeville, etc., Paris, 1844, in-8°; le P. Daire, Hist. d'Amiens, 1752-1757, in-4°; H. Lefils, Hist. civile... de Saint-Valery, 1858, in-8°; Colliette, Mém. pour... l'hist. du Vermandois, Cambray, 1771, in-4°; Amédée Piette, Hist. de Vervins, Vervins, 1841, in-8°, et Hist. de l'abbaye de Foigny, Vervins, 1847, in-8°; l'abbé Pécheur, Hist. de Guise, 1851, in-8°; La Thiérache, Vervins, 1872; Annuaire prot., Paris, 1878, in-12. O. DOUEN.

PICARDS. Voyez Bohème.

PICOT (Pierre), descendant d'une famille française de Noyon en Picardie, émigrée pour cause de religion à l'époque de Calvin et alliée à celle de l'illustre réformateur, est né à Genève le 29 janvier 1746. Après avoir heureusement terminé ses études de théologie et reçu la consécration au saint ministère, il voyagea en France, en Hollande et en Angleterre, puis revint dans sa patrie où ses talents oratoires lui valurent de grands succès. Il remplit après cela, pendant dix ans, les fonctions de pasteur dans la paroisse rurale de Satigny et se fixa ensuite définitivement à Genève, où il fut nommé d'abord pasteur et professeur honoraire d'histoire ecclésiastique, puis-professeur titulaire de dogmatique. Pierre Picot était fort apprécié dans la société genevoise pour la gaieté de son esprit et la bonté de son caractère; on estimait, non seulement sa science théologique, mais ses talents poétiques et ses connaissances dans une science étrangère à ses occupations naturelles, mais pour laquelle il avait un goût prononcé, l'astronomie. Quand Pierre Picot mourut en 1822, il vivait dans la retraite et avait, depuis quelques années, renoncé à toute fonction officielle. Parmi ses écrits, on doit particulièrement mentionner une

[ocr errors]

thèse en latin sur le déluge, présentée par lui à la fin de ses études de théologie; un « sermon d'actions de grâces pour la restauration de la république genevoise (1815), » et un volume de sermons publié après sa mort en 1833.

PICOT (Jean), fils du précédent, né à Genève le 6 avril 1777, fit avec succès ses études dans sa ville natale. Il se rendit ensuite à Paris pour étudier les sciences naturelles vers lesquelles le portaient soit ses goûts et ses dispositions, soit l'amitié qui le liait à son contemporain Aug. Pyr. de Candolle et au professeur Dolomieu qui reçut lui-même les deux jeunes gens dans sa maison. Forcé, bien à contrecœur, de renoncer à l'étude de l'histoire naturelle, il revint à Genève, où il suivit les cours de l'auditoire de droit et fut reçu avocat en 1798. Dès lors, il servit son pays, soit comme adjoint du maire, soit comme conseiller de préfecture, et fut, en cette qualité, député auprès de Napoléon, avec lequel il eut quelques moments d'entretien; après la restauration, il fut nommé membre du conseil représentatif. Ces charges publiques lui laissèrent le temps de remplir une chaire de professeur d'histoire et de travailler à la publication de divers ouvrages historiques. Il fit d'abord paraître une Histoire des Gaulois (1804), plus tard, en 1808, des Tablettes chronologiques, et enfin, en 1811, une Histoire de Genève (3 vol.), où l'on retrouve les qualités qui distinguent ses autres ouvrages, c'est-à-dire, avant tout, la simplicité, l'intérêt et une parfaite clarté. Cet ouvrage, qui est inspiré par un esprit patriotique sans cesser pour cela d'être strictement impartial, expose les annales de la république genevoise jusqu'à sa réunion avec la France, c'est-à-dire surtout pendant la période où Genève occupa une position exceptionnelle dans le monde religieux, comme cité exclusivement protestante, de telle manière que l'auteur, sans se préoccuper spécialement des questions religieuses, y touche à chaque instant. Depuis lors, Jean Picot publia encore quelques ouvrages de statistique; mais, de bonne heure, il renonça aux fonctions officielles et à la publicité pour suivre ses goûts qui le portaient vers une vie tranquille et retirée. Sa parfaite bienveillance et la bonté de son caractère lui attiraient de la part de tous ceux qui l'entouraient une estime et une affection qui embellirent singulièrement les dernières années de sa vie. Jean Picot est mort en 1864, âgé de près de quatre-vingt-huit ans. A. NAVILLE.

PICOT (Michel-Joseph-Pierre), né en 1770 à Neuville-aux Bois, près d'Orléans, mort à Paris en 1841, se livra spécialement à l'étude de l'histoire ecclésiastique du dix-huitième siècle, et se consacra avec un grand zèle à la défense de la religion au sortir de la tourmente révolutionnaire. Il fut chargé en 1806 de diriger le Mémorial catholique, journal mensuel que l'abbé de Boulogne, plus tard évêque de Troyes, avait fondé, et en 1814 il dirigea l'Ami de la religion et du roi, qui devint bientôt l'organe officiel du clergé, et qu'il rédigea jusqu'en 1840. On a encore de l'abbé Picot: 1o des Mémoires, 1806; 2° Mémoire pour servir à l'Histoire ecclésiastique pendant le dix-septième siècle, Paris, 1806; 18151816, 4 vol. in-8°; 3o éd., 6 vol. in-8°; 3o Essai historique sur l'influence

de la religion en France pendant le dix-huitième siècle, 1824, 2 vol.; 4o une édition des OEuvres de l'abbé de Boulogne, 1827; il y a ajouté un Tableau religieux de la France sous le Directoire, et un Précis historique sur l'Eglise constitutionnelle; 5o un grand nombre d'articles sur l'histoire ecclésiastique dans la Biographie universelle.

PÍCPUS OU PICPUSSES, religieux du tiers-ordre de Saint-François, appelés aussi pénitents. On les nomme picpus à cause d'un de leurs Couvents qui fut bâti en 1601 à Picpus, petit village qui touchait au faubourg Saint-Antoine à Paris. Ce couvent a donné son nom à l'ordre entier. Ces franciscains se nomment à Paris religieux pénitents de Nazareth, et dans quelques provinces on les appelle tiercelins. Le Couvent de Picpus a été fondé par Jeanne de Sault, veuve de René de Rochechouart, comte de Mortemar; Henri IV lui accorda des lettres patentes, et Louis XIII posa la première pierre de l'église. Supprimée en 1790, cette congrégation a été rétablie sous la Restauration.

PICTET (Bénédict), fils d'André Pictet, ancien syndic de la république de Genève, et de Barbe Turrettini, naquit à Genève le 30 mai 1655. Après avoir fait de brillantes études littéraires et théologiques dans sa ville natale, il visita, en compagnie d'Antoine Léger, la France, la Hollande et l'Angleterre, et se lia avec tout ce que le protestantisme comptait alors de distingué dans ces divers pays. A Leyde, il soutint des thèses publiques sous la présidence de F. Spanheim. Consacré au saint ministère le 29 juin 1678, B. Pictet fut nommé pasteur de Saint-Gervais, l'un des faubourgs de la ville, en 1680, puis professeur de théologie l'année suivante. Il devint recteur de l'académie en 1690 et exerça cette charge avec honneur pendant plusieurs années La réputation de Pictet comme écrivain (il avait publié en 1696 une Theologia christiana) franchit bien vite les limites de sa patrie. En 1701, l'université de Leyde le sollicita de remplacer Span-heim qui venait de mourir, mais il refusa cet appel honorable, malgré les grands avantages qui lui étaient offerts, pour demeurer au service de son pays. Partisan très convaincu du calvinisme de Dordrecht, quoiqu'il apportât dans son orthodoxie une onction que l'on connaissait peu à son époque, Pictet entra en lutte ouverte avec ceux de ses.collègues de la compagnie, qui, partisans de l'abrogation du Consensus, demandaient que la souscription ne fût plus obligatoire pour les ministres de l'Eglise de Genève. Il maintint, dans une série de mémoires adressés au conseil, que cette signature était nécessaire pour conserver l'unité de la foi. « Prenez garde, écrivait-il, on nous ôte la formule: « Ainsi je pense, » puis on enlève les mots : «< Ainsi j'enseigne, » et l'on dit qu'il faudra se contenter de ceux-ci : « Je n'enseignerai rien de contraire. » Sans doute à présent on ne veut plus rien au delà. J'appréhende pour la suite, je vois que les exhortations seront inutiles; on attaquera le synode de Dordrecht... les confessions de foi. Je crains l'établissement de l'arminianisme et je redoute même des choses plus graves; les esprits du siècle sont entièrement portés à la nouveauté... » Pictet avait vu juste, mais des signatures hypocrites eussent-elles pu conjurer la réac

tion qui montait? Il le comprit sans doute, car après l'abolition du Consensus, le 25 juin 1706, il fut un des premiers à accepter le formulaire qui le remplaça, formulaire qui se bornait à exhorter à n'enseigner rien dans l'Eglise et dans l'académie contre les canons du synode de Dordrecht. Au milieu de ces discussions, de travaux pastoraux des plus actifs, de prédications fréquentes et d'un enseignement suivi à l'académie, Pictet trouva le temps de publier des ouvrages considérables de théologie dogmatique et morale. Le nombre de ces écrits imprimés s'élève à plus de cinquante. On en trouvera la liste complète dans le Dict. biogr. de Genève et de Vaud, de M. A. de Montet, t. II, p. 293-294. Les plus célè bres sont sa Theologia christiana, Gen., 1696, publiée par lui en français en 1701 et en 1708, en 3 vol. in-4o, et sa Morale chrétienne ou l'art de bien vivre, Genève, 2 vol. in-12 (1692, 1693, 1700 et 1710). Ces deux vastes traités, qui embrassent l'ensemble de la morale et de la dogmatique, sont la fidèle expression de la foi de leur auteur. D'une orthodoxie irréprochable, ils n'ont rien de la sécheresse ni de la raideur scolastique du dix-septième siècle. On y trouve une largeur de vue et un esprit de tolérance dans les choses secondaires presque inconnus chez les théologiens immédiatement antérieurs. Pictet avait appris sa théologie ailleurs que dans les formules, dans un contact direct avec la Bible et la personne du Sauveur, et dans des relations constantes avec les malades et les mourants au chevet desquels on le rencontrait chaque jour. A l'enseignement théologique, en effet, Pictet unit durant toute sa carrière l'enseignement pastoral; il s'occupa activement aussi des pauvres et surtout des réfugiés pour la foi. Généreux jusqu'à la prodigalité, il sacrifia en faveur de ces derniers une grande partie de son avoir, et quand il eut perdu toute sa fortune, il sut encore s'ingénier pour leur venir en aide. Estimé de ses concitoyens qui admiraient la conséquence de sa vie avec ses principes, Pictet fut aussi l'objet de distinctions flatteuses de la part des étrangers. La société anglaise pour la propagation de la foi l'admit au nombre de ses membres correspondants (1706), et l'académie des sciences de Berlin parmi ses associés étrangers (1714). Pictet mourut le 10 juin 1724 d'une fièvre maligne. L'Europe protestante s'associa tout entière au deuil de la république. - Voyez E. de Budé, Vie de Bénédict Pictet, Lausanne 1874; Gaberel, Hist. de l'Eglise de Genève, t. III, etc. LOUIS RUFFEt.

[ocr errors]

PIE for fut évêque de Rome, d'après la Chronologie de M. Lipsius, pendant quinze ou seize ans et mourut entre 154 et 156. Le vieux Catalogue libérien de 352 le fait régner de 146 à 161. Le Catalogue felicien de 530 nous dit qu'il était d'Aquilée et qu'il fut enterré auprès du corps de saint Pierre. Le Catalogue de 352, dont M. Lipsius fait remonter le témoignage à saint Hippolyte, écrit: sub hujus episcopatu frater ejus Ermes librum scripsit, etc., et le célèbre fragment de Muratori: Pastorem vero nuperrime temporibus nostris in urbe Roma Herma conscripsit sedente cathetra urbis Romæ æclesiæ Pio eps. fratre ejus, etc. (Harnack, Zeitschr. f. Kirchengesch., III, 4, 1879 ; éd. Tregelles, Oxford,

« PrécédentContinuer »