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chant entier à raconter le mariage de Clymène avec le soleil, et l'aventure malheureuse de Phaëton. Il dit' que l'éther, d'où Phaëton descendait, célébra sa naissance; que les nymphes de l'Océan en prirent soin, et que toutes les étoiles faisaient la garde autour de son berceau; que l'Océan, pour amuser ce jeune enfant, le jetait en l'air et le recevait ensuite dans son sein; que devenu plus grand, il se faisait un petit char auquel il attelait des béliers, et qu'au bout du timon il y avait mis une espèce d'étoile qui ressemblait à l'étoile du matin, dont il était luimême l'image. Il est bien difficile de méconnaître ici l'astre du matin, qui au lever héliaque du bélier précédait le char du soleil.

On fit de Clymène une nymphe des eaux, telle qu'étaient les hyades.

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L'équinoxe de printemps étant donc censé être le commencement de l'année, l'astre qui l'annonçait était le génie qui venait allumer le feu dans l'Univers; c'était le porte lumière. Aussi Nonnus, dans ses Dionysiaques 2, donne à Phaëton le nom de porte lumière, et Platon, dans son Timée, dit qu'on appelait ainsi, non seulement Lucifer ou Vénus, mais tout astre qui précédait le matin le soleil. Les signe du bélier qui se levait alors héliaquement, ainsi que la chèvre ou le cocher, durent donc être regardés comme des signes avant-coureurs ou même: comme causes de la chaleur que la terre allait ressentir tout l'été.. Aussi voyons-nous que les anciens

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V. 145, etc. Non. Dionys., 1. 38, v. 144.

peignaient la chaleur de l'Univers sous l'emblème d'un bélier, suivant Abnephius': « Indicaturi calorem mundanum, arietem pingunt. » Les Indiens ont leur Dieu du feu, qu'ils appellent le Dieu Agni; on le représente sur un bélier caparaçonné. Ce Dieu a quatre bras, et des flammes s'élancent de sa tête. On trouve cette figure parmi les autres incarnations de Vischnou, dans un manuscrit de la Bibliolhèque nationale n° 11: elle est la treizième. Le nom d'4gni et le bélier sur lequel est monté le génie désignent assez le bélier céleste que les Perses appellent l'agneau; il y a, disent-ils, équinoxe quand l'agneau reparaît. C'est cet agneau que le petit Phaëton attèle à son char dans Nonnus, c'est-à-dire le bélier. Nous le voyons répété trois fois sur un monument qui est dans Montfaucon ; il y est trois fois à cause des trois décans de chaque signe du zodiaque, et il est placé sur trois piles de bois de dix pièces chacune, nombre égal à celui des degrés de chaque décan. Deux prêtres placés devant le bûcher y sont représentés, le jour de l'équinoxe, allumant le feu sacré aux rayons du soleil. On nourrissait même des brebis consacrées aux soleil à Apolloni, suivant le témoignage d'Hérodote. Phaëton ou le cocher fut donc regardé également comme l'astre qui ramenait la chaleur, et le génie qui devait embraser l'Univers. Le jour où il se levait héliaquement était celui de l'équinoxe, jour où nous avons dit qu'en Egypte on célébrait une ancienne fête en mémoire de l'embrasement de la terre.

1 Kirk. ŒEdip,- ? Ant. Expliq. Suppl., pl. 51. Suppl. pl. 51.

Le jour où allait commencer le règne du feu, qui devait durer tout l'été, le cocher se trouvait le matin sur l'horizon avec le soleil; et, après avoir conduit son char ce jour-là, il se couchait le soir avec l'Eridan, au lever du scorpion. C'est ce scorpion dont la vue effraie ses chevaux qui se précipitent et s'approchent de la terre, spatio terræ propiore feruntur. Le jeune Phaëton foudroyé périt et tombe dans l'Eridan.Cet Eridan dont il est ici question, estla constellation dont le coucher précède de peu de minutes celui de Phaeton, ou du cocher qui est placé audessus. Ce fleuve ou cette constellation porte encore, dans les auteurs d'astronomie, le nom d'amnis phaëtontius', comme on le voit dans Blaeü. C'est cette apparence astronomique, ce coucher du génie du printemps, accompagné de celui de l'Eridan qui se fait le soir, au moment où montent les étoiles du scorpion, qui a donné naissance à la fable du jeune fils du soleil, dont on pleurait la chute en Italie, comme on pleurait la mort d'Osiris en Egypte, et de Tamuz ou d'Hercule en Syrie. Barbari ad Eridanum.accolentes, dit Plutarque, atris vestibus amicti Phaël ontem lugent. Plutarque, qui ignorait la véritable cause d'un pareil deuil, trouve cette cérémonie singulière, et ajoute : « Magis etiam, puto, ridiculum hoc fuerit, si horum hominum qui vixe>> runt, pereunte Phaëtonte, nemine id curante, »nati quinque aut decem post ætatibus cepêre ejus gratiâ vestem mutare et lugere. » Effectivement,

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Cas., p. 228.

TOM: IX.

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il serait difficile de rendre raison d'un deuil qui se serait perpétué si long-temps s'il n'eût eu pour origine la disparition ou la chute d'un génie. Ovide fixe sous le taureau, au 2 des nones de mai, l'apparition de ce terrible scorpion, et trois jours après le coucher d'Orion, du pied duquel sort l'Eridan et qui est suivi, dans son coucher, du cocher qui se couche peu de momens après. Au bout de cinq jours, se lèvent les pléïades ou les héliades, et le calendrier marque le commencement des ardeurs brûlantes de l'été. Le coucher du cocher est suivi du du lever du cygne, qui figure, comme ami de Phaeton, dans cette constellation. Il est pleuré de ses socurs. Quelques auteurs font monter le nombre de ses soeurs jusqu'à sept, et les appellent héliades, dont la première est Mérope, nom d'une des sept pléïades qui sont ici désignées sous le nom d'héliades. Mais plus communément on ne lui donne que trois soeurs, qui portent chacune un nom fort convenable à une étoile ; l'une est Lampetuse, l'autre Lampetie, et la troisième Phaëtuse; peut-être trois étoiles les plus remarquables de la constellation des hyades. En effet, Euripide n'en comptait que trois dans une tragédie qu'il avait intitulée Erechtée3, autre nom du cocher. Les hyades avaient donc quelque rapport avec l'histoire de Phaeton. Au moins on fait ses soeurs, comme les hyades, nymphes des eaux, et l'on trouve un monument, dans l'Antiquité

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Ovid. Fast., 1. 5, v. 417. V. 600.3 Theon, p. 125.

expliquée de Montfaucon, où les soeurs de Phaeton sont représentées versant de l'eau d'une urne, au moment de leur métamorphose.

Nonnus, dans ses Dionysiaques, décrit la chute de Phaëton, et dit positivement qu'il a été placé au ciel dans la constellation du cocher, ou que Jupiter l'a mis dans les constellations sous le nom et la forme d'un conducteur de char, ainsi que le fleuve Eridan dans lequel il avait péri.

⚫. On donna aussi au frère de Médée, Absyrte, fils d'Aëtes, le nom de Phaëton 3; et il est célèbre par ses malheurs, comme l'est le cocher, sous les noms de Phaeton et d'Hippolyte.

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On distingue dans le cocher, à l'épaule gauche, une belle étoile appelée la chèvre1, et tout près, à la main gauche, quelques petites étoiles qu'on dit être ses chevreaux. Cette étoile est de la première grandeur et d'une couleur d'or. C'est la fameuse chèvre Amalthée, si célèbre dans la fable de Jupiter qu'elle est supposée avoir allaité. On raconte qu'un certain Olénus, fils de Vulcain, comme l'était le cocher sous le nom d'Erichtonius, fut père de deux nymphes, Æga et Hélice, qui furent les nourrices de Jupiter, et qui donnèrent leurs noms à deux villes, à Hélice dans le Péloponèse, et à Æga en Æmonie, comme leur père 5 donna.le sien à Olenus en Aulide.

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' Ant. Expliq., t. 1, pl. 65. — Nonn., 1. 38, v. 434-439. 3 Idid. 4 Apoll., Rhod. Argon., l. 3, v. 245. Philostr. Icon., p. 856. Hygin., l. 2, c. 14.

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