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avons appliqué cette nouvelle clef, nous ont constamment donné le même résultat, ainsi que tous les monumens. Hercule se repose sur la peau du lion, et les Egytiens mettaient le tròne d'Horus sur le lion'. Les Chaldéens avaient une longue suite d'observations qui remontaient à plus de deux mille ans avant notre ère. Aussi ont-ils appelé Régulus ou le cœur du lion, par où passait le colure, le chef des mouvemens célestes ".

Cette antiquité de l'astronomie une fois établie, voici le raisonnement que nous faisons. La balance et l'écrevisse ont été dans l'origine destinées à peindre, l'une un équinoxe, l'autre un solstice. C'est le sens le plus naturel que nous puissions donner à ces emblèmes, et c'est celui qu'on leur a toujours donné jusqu'ici. Leur distance respective, ou l'intervalle de quatre-vingt-dix degrés qui les sépare, confirme encore cette conjecture. Ils ont donc occupé cette place originairement. La question se réduit à savoir à quel équinoxe ou à quel solstice ils ont été d'abord placés. Ce n'est point, comme nous venons de le voir, à l'équinoxe d'automne ni au solstice d'été, qu'ils ont été primitivement, puisque l'astronomie et l'invention de zodiaque sont antérieures au temps où ces emblèmes ont occupé ce point. C'est donc à l'équinoxe du printemps et au solstice d'hiver qu'ils ont été placés à l'époque de l'invention du zodiaque. Ils sont tous deux symboles parlans, l'un de l'égalité des jours et des

1 Hor.-Apollo, l. 1, c. 17.2 Théon, p. 122.

nuits, l'autre du mouvement rétrograde du soleil ; et cependant il fut un temps où ils ne pouvaient s'accorder avec ce double phénomène. Donc, s'ils s'y étaient accordés autrefois, ce n'est qu'en remontant fort loin qu'on parviendra à voir ce qu'ils ont dû nécessairement signifier dans l'origine. Or, en les rétablissant dans la place que la précession leur a fait quitter, le zodiaque entier devient un calendrier de l'Egypte, et la peinture naturelle de l'état du ciel et de la terre dans ce pays. Donc il a été inventé chez ce peuple, et dans l'époque unique où il convient à ce climat.

On voit qu'en partant de la supposition la plus simple, c'est-à-dire, qu'en imaginant que les figures d'animaux, tracées dans le zodiaque, ne sont pas des peintures bizarres, ni des figures dessinées au hasard et sans but, nous sommes arrivés à une époque où le zodiaque est l'emblème le plus naturel du ciel et de la terre chez le peuple égyptien. Cette supposition n'a rien que de vraisemblable, puisqu'on sait que, si ce peuple n'est pas l'inventeur de l'écriture hieroglyphique, au moins il en a fait usage plus qu'aucun autre peuple, l'a conservé plus long-temps, et nous a transmis plus de monumens de ces savans emblèmes. Nous le répétons encore ; il serait bien étonnant que chez les Egyptiens tout fût hieroglyphique, et que les emblèmes des constellations qui se trouvent tracés sur presque tous leurs monumens, et qu'ils appelaient les caractères de leur écriture sacrée, fussent les seules figures dans lesquelles il n'entrât aucun dessein.

Macrobe nous assure qu'elles avaient un sens; et la connaissance que nous avons du génie égyptien, plus encore que le témoignage de Macrobe, nous en est un sûr garant; de manière que j'aimerais mieux reconnaître que je n'ai pu en deviner le sens que de suppos. r qu'ils n'y en attachèrent aucun. Les symboles tracés dans le zodiaque se sont conservés pendant trop de siècles sans altération, et se retrouvent chez trop de peuples, avec les mêmes traits, pour croire qu'ils fussent des signes arbitraires. Aussi Court de Gébelin pense-t-il, comme moi, que les noms que portent les signes du zodiaque ne furent certainement pas 'inventés au hasard'. On ne saurait nier qu'il n'y ait le plus grand rapport entre ces noms et les phénomènes qu'offre le cours de l'année; et en conséquence ils doivent remonter à une antiquité très-reculée.

Bailly 2 observe que les sphères des Chaldéens et des Perses renfermaient des figures d'hommes sans nom. Je pense comme lui; mais voici la conclusion que j'en tire: 1o ce ne sont point des hommes, ou des héros apothéosés qu'on y avait placés, puisque sur-le-champ la figure eût eu un nom, celui du héros apothéosé; 2° les figures primitives étaient allégoriques et purement hieroglyphiques, des figures parlantes, soit par leurs attitudes, soit par leurs attributs; 3° enfin, les noms qu'on leur a donnés dans les poèmes allégoriques où on les personnifiait, exprimaient leur fonction ou leur po

1 Monde primitif, t. 4, p. 60.-2 Hist. de l'Astr., t. 1, p. 184.

sition, tels que l'épithète de Phaeton ou Brillant donnée au cocher; le nom de Cadmus ou l'Oriental, donné au serpentaire; celui de seigneur et de roi donné à d'autres génies en langue orientale, et que ce sont ces noms mal interprétés qu'on a pris pour des noms d'hommes. Tels sont les noms de Callisto et de Mégisto, ou de très-belle et trèsgrande, donnés à la grande ourse, dont on a fait la nymphe Callisto, et Megisto, fille de Cetée.

Si quelques peuples ont fait un changement dans les noms des constellations, ce n'a été que dans le même esprit, pour y substituer un emblème évi→ demment relatif à leur siècle et à leur climat. Nous voyons, par exemple, que les Chaldéens ont sup primé un des deux poissons, celui qui est sous le corps d'Androinède'. Mais à la place, ils y ont substitué une hirondelle, emblème naturel du retour du printemps, que le lever de cette constellation semblait ramener. On sait que le retour de cet oiseau de passage est encore observé par les habitans de nos campagnes, comme une époque de l'année rurale, et comme le signe avant-coureur du printemps:

Fallimur, an veris prænuntia venit hirundo.

(Ovide, Fast., l. 2, v. 853.)

Ce poète fixe ce retour sous les poissons, ou à la fin de février.

C'est ce que nous retrouvons dans le calendrier

1 Theon ad Arat. Phen., p. 131..

de Geminus . Voici comment commence le mois qui répond aux poissons: Pisces sol percurrit diebus trigenta; die secundâ, tempus est hirundinem apparere. Le calendrier de Ptolémée fixe au 25 de mechir ou de février le lever de la tête d'Andromède, et aux 28, 29 et 30le retour de l'hirondelle: hirundini advenire tempus est. C'est précisément l'intervalle de jours qu'il y a entre le lever de la tête d'Andromède et celui du poisson boréal, qui est sous Andromède, et à la place duquel nous avons dit que les Chaldéens peignirent une hirondelle. Le sens de ces emblèmes se présente sans équivoque, et c'est ici le lieu de dire comme Virgile: Ab uno disce omnes. On donnait même le nom de vents de l'hirondelle aux vents qui soufflaient dans cette saison. Dans la traduction latine d'un autre calendrier de Ptolémée, on lit ce qui suit, au dixième jour avant les calendes de mars: Die decima antè kal. leo occidit. Aquilones chelidonii appellati incipiunt, et per quatriduum flant. Hirundines apparent. On retrouve la même chose dans le calendrier romain tiré d'Ovide, de Columelle et de Pline, donné par le père Petau 3.

La peinture hieroglyphique d'une hirondelle, dans cette partie du ciel, est un symbole si naturel et si intelligible que le sens de cet emblème a déjà été aperçu par Scaliger: In ejus morphosei, dit ce savant en parlant du poisson boréal, caput hirun

1 Gemin. Uranol. Veter., p. 38-2 Ptolem., p. 47.—3 Ura-j nol. Petav., p. 61.

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