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chrétienne, changeait tous les aspects célestes, et pouvait même donner à Sirius une déclinaison australe si prodigieuse qu'il fût invisible dans la BasseÉgypte, ou que, s'il y était visible, il n'eût aucun lever qui pût annoncer le soltice d'été et fixer le départ d'une période qui commençait au capricorne.

Mais pour voir simon hypothèse réunissait encore ce nouveau caractère de vérité, je pris un globe que je perçai, et que je traversai d'un axe à l'endroit où les cercles polaires sont coupés par le cercle de latitude qui passe par les premières étoiles du capricorne. Je montai mon globe dans cet état à la latitude de vingt-trois degrés, ou de la Haute-Egypte qui confine à l'Ethiopie, qui fut la première habitée, et où l'astronomie a dû naître; et je fis des‐ cendre le capricorne sous l'horizon occidental, de manière à faire commencer la nuit. Alors je vis que Sirius était la première et la plus belle étoile qui parût à l'horizon oriental, et qu'il avait pu conséquemment, par son lever acronyque, fixer le départ de l'année solsticiale et de la période.

On ne doit pas s'étonner que nous fassions.commencer le soir une année et une période 1, puisqu'il est vrai que les anciens peuples commencèrent à compter par nuits avant de compter par jours. Les Egyptiens, entre autres, furent dans cet usage, comme il paraît par Isidore. Cette manière de compter leur fut commune avec les Athéniens3, avec

1 Hyde de vet. Pers. Relig., p. 213. 2 Isid. Orig., 1. 5 C. IO. 3 Macrob. Sat., l. 1, c. 3, p. 174.

les Lacédémoniens, avec plusieurs peuples d'Italie, avec les Gaulois, les Germains et tous les peuples du nord. Jules César dit en particulier des Gaulois qu'ils comptent par nuits, et qu'ils marquent le jour de leur naissance, le commencement des mois et des années, comme si le jour suivait. Moïse compte également par le soir les jours de la création. En voilà plus qu'il n'en faut pour justifier notre supposition, et prouver l'antiquité et l'universalité de cet usage.

Sirius se levait donc le soir, presque au midi de l'Egypte, ayant soixante-quinze degrés environ d'amplitude, avec un arc semi-diurne d'environ une heure et demie; et après une courte apparition, il se replongeait sous l'horizon. C'était donc l'étoile du fleuve, puisqu'elle semblait ne paraître que pour annoncer le débordement, et que sa fonction une fois remplie, elle disparaissait peu d'heures après, à cause de la grande déclinaison qu'elle avait alors. Elle venait à l'approche de la nuit avertir le peuple égyptien de se tenir sur ses gardes : c'était le fidèle moniteur qui, tous les ans à la même époque, renouvelait ses avertissemens.

La ressemblance de ses fonctions avec les services que rend à l'homme le chien fidèle qui veille à sa garde, put la faire comparer à cet animal; on l'appela donc l'astre-chien ou astrokuône ', nom qu'elle conserve encore aujourd'hui, et l'on peignit dans les étoiles de cette constellation l'image symbolique

' Hor. Apollo, c. 3. Germ. Cæs., e. 31.

du chien. Les Egyptiens en firent leur Mercure Anubis, ou leur génie à tête de chien. Plutarque, parlant de ce Mercure, appuie l'interprétation que nous donnons à ce symbole, et l'origine allégorique que nous lui supposons'. Sirius, dans notre système, dut donc être la première constellation extrazodiacale observée, et tenir la première place parmi les étoiles-génies. Plutarque, dans le même ouvrage, confirme encore cette conséquence lorsqu'il nous dit : « Qu'Oromase parsema le ciel d'étoiles, et qu'il leur donna Sirius pour chef2. Nous voyons pareillement dans le planisphère des marbres de Farnèse, Sirius, dont la tête est ornée de plusieurs rayons lumineux qui semblent caractériser le roi des constellations. Les Ethiopiens, au rapport de Plutarque, rendaientau chien tous les honneurs qu'on rend à un roi, et lui en donnaient le titre 3. Le chien à qui on rendait ce culte religieux, est le même sans doute qu'on adorait en Egypte comme le symbole vivant du chien céleste; et le titre de roi qu'on lui donnait ici lui appartenait comme au génie qui était censé avoir présidé au commencement de la grande période et donné l'impulsion à toute la sphère.

On ne doit pas être étonné que nous empruntions ici de l'Ethiopie des argumens en faveur de l'astronomie égyptienne; car nous sommes persuadés

Plut. de Iside, p. 355.-9 P. 370.- Ce passage de Plutarque pourrait aussi se rapporter au temps où Sirius fixait, soit l'équinoxe du printemps par son coucher, soit le solstice d'été par son lever héliaque.

que c'est de l'Ethiopie que sont sortis les inventeurs de l'astronomie établis en Egypte. La latitude de vingt-trois degrés, que nous avons supposée pour le lever de Sirius, le jour du solstice d'été, lorsque le capricorne occupait ce point, répond aux limites de l'Egypte et de l'Ethiopie. Nous devrions peutêtre attribuer plutôt à l'Ethiopie qu'à l'Egypte l'invention des sciences astronomiques; mais nous avons nommé les Egyptiens parce qu'ils sont plus connus, et qu'ils ont laissé le plus de monumens dans les derniers âges. Mais, quand il est question de fixer l'époque de l'invention du zodiaque, on doit toujours entendre par l'Egypte la partie qui est au-desus de Thèbes, laquelle était proprement l'ancienne Egypte '. Car c'était vers Syenne qu'était véritablement la primitive Egypte ; les provinces inférieures, ainsi que la Basse-Egypte, étaient moins anciennes. Les Egyptiens eux-mêmes appelaient celle-ci un don du Nil 3.

Quoi qu'il en soit, nous supposons que l'astronomie est née sur les rives du Nil, à vingt-trois degrés environ de latitude; et quelque dénomination qu'on donne aux habitans de ce climat, il n'en résulte aucune différence pour les preuves physiques qui entrent dans notre système. Lucien fait naître les sciences astronomiques en Ethiopie *, et de là descendre en Egypte (x). Cette opinion de Lucien s'accorde parfaitement avec la latitude que

1 Plut. adv. Stoic., p. 1064.-2 Arist. Meteor., 1. 1, c. 14.3 Herod., 1. 2, c. 5.—4 Lucian., de Astrol,, p. 985.

nous supposons au lieu qui fut le berceau de l'as→ tronomie, et que détermine le lever de Sirius à l'époque de l'invention du zodiaque. Cet autenr pensait aussi que les signes étaient hieroglyphiques. Le nom même de signes, séméia, qu'on leur a toujours donné, annonce assez des symboles, des affiches ou des annonces.

On trouve Sirius réuni avec le capricorne dans d'anciens monumens; nouvel argument qui semble indiquer la priorité de Sirius, sa qualité de génie qui présida au commencement de l'année astrale, produite par la précession, et établir la liaison de cette constellation avec le capricorne, qui occupait le solstice d'été à l'époque de l'invention du zodia→ que. Peut-être, au reste, aussi est-ce comme paranatellon qu'il figure.

Après la première ébauche de mon système, je sentis que l'étude des antiquités égyptiennes, qui jusque-là n'était point entrée dans le plan de mes travaux, me devenait nécessaire. Le premier ouvrage que je consultai fut l'OEpide du savant père Kirker, où l'astronomie se trouve jointe à une profonde érudition. Quelle fut ma surprise quand je trouvai dans cet ouvrage un planisphère égyptien qui plaçait à la tête de la division du zodiaque le même signe que celui que j'avais imaginé avoir dû originairement occuper cette place? J'y retrouvai non-seulement le capricorne, mais encore le génie Sirius, Seth ou Sothi; le Mercure à tête de

1

OEdip. Egypt., 1. 2, pars 2, p. 206.

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