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accord avec mes idées une conséquence toute naturelle: c'est que si ce planisphère était vraiment égyptien, j'avais bien déterminé le point de départ des signes. S'il n'était pas authentique, par quel hasard s'accordait-il avec mes autres preuves? Le père Kirker prétend que c'était la sphère des prêtres et des hiérophantes, c'est-à-dire des dépositaires de la religion et des sciences en Egypte ; que cette division était mystique et relative aux génies qui présidaient à l'ordre du monde, c'est-à-dire la base fondamentale de leurs mystères et de leur religion astronomique, et conséquemment le calendrier sacré, qui n'était pas connu du peuple, et qui contenait la clé de leurs savans symboles. Ce que le père Kirker avait conjecturé se trouve être vrai dans notre hypothèse astronomique sur la mythologie ancienne. Ils regardaient ce signe comme la porte des Dieux et le commencement de leur immortalité.

Nous pourrions faire usage de plusieurs traditions anciennes et de plusieurs opinions religieuses répandues chez divers peuples, qui semblent nous conduire à donner cette priorité au capricorne. Les Chinois placent encore le symbole d'une corne dans leur première constellation, et l'appellent kio ou la corne; et le père Gaubil appelle ce signe siderum annales 1.

Le zodiaque indien, publié dans les Transactions philosophiques de 17722, semble prouver

1 Souciet., t. 3, p. 98.- 2 Transactions philos., vol. 62, an. 1772, p. 353.

aussi, d'une manière assez naturelle, quoique indirecte, que le capricorne a dû occuper primitivement le solstice d'été. Ce monument est un quadrilatère autour duquel sont distribués les douze signes, de manière qu'aux quatre angles se trouvent la vierge, le sagittaire, les poissons et les gémeaux; et la vierge, répétée une seconde fois, se trouve encore placée au centre du cadre, la tête environnée de rayons. Nous imaginons que ce monument représente l'état du ciel dans l'âge où la vierge occupait le solstice d'été, et où l'équinoxe de printemps répondait aux gémeaux; position qu'ont dû avoir les cieux depuis l'invention de l'astronomie, comme l'a très-bien fait voir Bailly, et voici comme nous procédons pour arriver à cette conclusion. Ceux qui placèrent les douze signes dans l'ordre où ils sont dans ce monument, où il n'y a point d'équateur ni d'écliptique dont l'intersection puisse désigner un commencement du zodiaque, durent naturellement placer aux quatre angles du quadrilatère les quatre signes qui occupaient alors les quatre points cardinaux de la sphère. Ils durent faire du signe qui occupait le solstice d'été le dernier des signes ascendans, et le premier des signes descendans; le signe du solstice d'hiver dut être également le dernier des signes descendans, et le commencement des signes ascendans. Or, c'est précisément la place que la vierge et les poissons, signes solsticiaux à cette époque, occupent dans ce monument. Tous les animaux sont représentés marchant dans la même direction: tels que le bélier, le taureau,

le lion, et le commencement du mouvement de haut en bas se fait à la vierge, et celui de bas en haut se fait aux poissons. La vierge est donc le terme du mouvement du soleil en ascension, et le point où il commence à descendre pour parcourir les autres signes. Elle occupe donc le solstice d'été ou le trône du soleil, et voilà pourquoi elle est encore une fois répétée et placée au centre du planisphère comme la reine des cieux. Elle est assise, attitude symbolique du repos solsticial, portant sa main à sa tête, c'est-à-dire désignant de la main la partie la plus élevée des cieux, qu'elle occupait. Après ce signe solsticial, celui qui semble avoir été caractérisé avec le plus de soin dans ce monument, c'est celui qui se trouvait alors à l'équinoxe de printemps, c'est-à-dire le signe des gémeaux. Dans ce zodiaque, on ne voit point les gémeaux, mais à leur place est le symbole le plus expressif de l'égalité des jours et des nuits, ou d'un équinoxe. On y voit un jeune homme qui soutient deux globes divisés en deux hémisphères égaux, l'un obscur, l'autre lumineux, image naturelle de la terre et du ciel, représentés par ces deux globes le jour de l'équinoxe. Et medium luci atque umbris, jam dividit orbem, dit Virgile, en parlant de la balance équinoxiale. Les autres signes sont presque les mêmes que dans nos sphères :,on y retrouve le vas aquarium ou l'urne égyptienne, l'oxyrinque ou poisson-épée, uni au capricorne, la balance et l'écrevisse; mais l'une et l'autre sont éloignées des points équinoxiaux et solsticiaux.

Les deux signes où le génie symbolique paraît plus à découvert dans ce zodiaque, sont: 1o la vierge répétée deux fois, ce qui suppose du dessein; 2° le jeune homme qui porte les globes moitié blancs, moitié noirs, placé à quatre-vingtdix degrés de la vierge, et qui nécessairement occupe un équinoxe lorsqu'on suppose la vierge à un solstice; et je regarde comme un nouveau trait de vraisemblance ajouté à ma conjecture, celui qui résulte de cette position respective des deux emblèmes les plus caractéristiques.

Voilà donc encore un monument qui donne une position des cieux fort ancienne, et de beaucoup antérieure à l'époque où la balance et le cancer occcupaient, l'une l'équinoxe d'automne, l'autre le solstice d'été; il paraît donc que ces deux emblèmes n'ont pas été inventés originairement pour désigner ces deux points cardinaux de la sphère, puisqu'ils étaient déjà existans l'un et l'autre bien des siècles avant de pouvoir occuper cette place. Donc ils avaient été inventés pour marquer un autre équinoxe et un autre solstice; donc c'est à l'équinoxe de printemps et au solstice d'hiver qu'ils durent être primitivement, pour qu'il y ait eu une raison à leur institution et qu'ils aient fixé les époques astronomiques dont ils présentent naturellement l'idée.

Si nous faisons mouvoir les points équinoxiaux suivant l'ordre des signes, ou en sens contraire au mouvement de la précession, jusqu'à ce qu'un de ces emblèmes ait la place qui lui convient, alors

toute la sphère se trouve telle qu'elle a dû être à l'époque que je regarde comme celle de l'invention du zodiaque et comme le point du départ de l'année astrale produite par la révolution des fixes. Cet état primitif des cieux, tel que je le conçois, se trouve placé dans un monument ou pierre gravée que Pluche' a fait imprimer sous le nom d'Armée des cieux.

En regardant comme solstice le point le plus élevé de ce cercle zodiacal, le capricorne est le premier des signes descendans, et le sagittaire le dernier des signes ascendans; de manière que le soleil, arrivé au point culminant de sa route, se trouve au commencement du capricorne. Je ne crois pas que ce monument ait été destiné à perpétuer la première position du zodiaque; c'est plutôt un monument astrologique des derniers âges; mais il est propre à donner peu à peu un état du zodiaque à l'époque primitive, pourvu qu'on suppose le sagittaire un peu plus éloigné qu'il ne l'est du sommet de la fi

gure.

Ainsi nous avons donné au zodiaque une position suivant laquelle les emblèmes tracés dans chaque signe présentent un sens, et où les noms des douze signes ne sont pas seulement des noms, mais des signes de choses, comme dit Lucien, et forment un calendrier astronomique et rural qui convient à la Haute-Egypte et à l'Ethiopie, et qui ne convient qu'à ce pays. Nous avons montré que, même à cette

1 Pluch., Hist. du ciel, t. 1, p. 169.

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