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reine de rentrer dans le Oualo. Mais son fils viola le traité, et se rendit maître de cette province, d'où les Français parvinrent à le chasser en 1855. Il se réfugia à Nguik, qu'il supposait être placée hors de notre portée. Mais il ne s'y tint pas tranquille et il chercha à faire des tentatives contre les villages du Oualo dévoués à la colonie, et il était cause que le Oualo tout entier ne reconnaissait pas l'autorité française; de là un danger réel, une menace perpétuelle pour la colonie. Par suite aussi de cette hostilité d'Éli, les Maures avaient recommencé leurs invasions dans le Ndiambour. Il fallait donc enlever Éli, ou au moins le chasser du Ndiambour. C'est ce que se proposa le gouverneur en entreprenant l'expédition des derniers jours de décembre 1856. Parti de Saint-Louis, le 16 du même mois, à la tête de 600 hommes et 1,200 volontaires, il était à la tour de Dialakhar le 17, et le 18 à Nguik, qui fut aussitôt cerné; mais Éli, averti par deux Maures qui avaient aperçu la colonne, avait eu le temps de partir et de se dérober à la poursuite dont il était l'objet. Toutefois, un premier résultat était atteint: Nguik avait mis bas les armes devant le corps d'armée expéditionnaire. Le gouverneur ne s'en tint pas là: il voulut faire un exemple, et ce village, qui avait servi de refuge à l'ennemi, fut brûlé et livré au pillage. D'autres villages maures se soumirent. Revenue sur ses pas, la colonne du gouverneur arriva à Mpal, qu'elle traversa triomphalement au grand étonnement des indigènes, une sorte de croyance populaire ayant fait passer cette localité comme impénétrable à une armée.

Le gouverneur du Sénégal rendit compte, dans ses rapports du 24 mai au 2 juin 1857, de cette affaire ainsi que des précédentes. << Depuis notre expédition du lac Cayar (V. Annuaire 1856), qui a produit le meilleur effet dans le pays des Trarza, dans le Dimar et à Podor, Éli est venu détruire le village de Gandon, près Saint-Louis; c'est, il est vrai, un village du Cayar, mais qui nous était dévoué, et ce qui est le plus fàcheux dans cette affaire, c'est que les noirs des villages voisins ne se sont pas défendus. Avec 50 spahis nous avons, tous à jeun, poursuivi les pillards jusqu'au milieu de l'Oualo. »

A ces détails, qui résumaient les derniers événements, M. Faid

herbe ajoutait (2 juin) ce qui suit : « A force de nous donner du mal, nous venons de rétablir nos affaires sur le meilleur pied. J'ai atteint à Dialmah (rive gauche) la bande de Maures qui a détruit Gandon. Nous avons tué plusieurs princes parents de Mohamed-el-Hazib, et 29 Maures, tous marquants, sont restés sur le terrain. Éli cherche à retourner chez son père par le Fouta qu'il traverse en fugitif, et le Cayar se déclare contre les Maures. »> L'eau du lac que la colonne avait bue pendant quatre jours, présentait cette particularité : elle était verte à cause des herbes et principalement d'une espèce de chiendent qui tapisse le fond du lac, et dont l'albumine et le mucus végétal sont en suspension, en raison, sans doute, du piétinement des troupeaux qui viennent s'y abreuver. Cependant cette eau n'a rendu personne malade. Autre détail curieux : quand on y verse une goutte de dissolution d'alun, la liqueur se prend presque en gelée, tant est abondant le précipité du chlorophylle. Les hommes de l'expédition buvaient une grande quantité (jusqu'à dix litres) de cette

eau.

En fin de compte, les Trarza venaient d'éprouver de nouveau la valeur irrésistible des troupes françaises. Parmi les personnages maures tombés sur le champ de bataille, et dont parlait le chef de l'expédition, se trouvaient cinq neveux du roi des Trarza et cinq autres individus de sa famille. Trois prisonniers furent fusillés ou pendus à Gandon même «< sur le théâtre de leur crime, >> et le commandant du corps expéditionnaire motivait ainsi cette rigueur « Il m'est impossible de voir des ennemis dans ces bandes d'assassins et de voleurs de femmes et d'enfants. Aussi, je les traite comme des voleurs de grand chemin. Leurs chevaux, leurs méharis, les captifs et les troupeaux qu'ils emmenaient ont été pris par nous, par les contingents du Oualo ou par les Pouls du Dimar. »

Les nouvelles transmises du haut du fleuve (24 mai) étaient également bonnes, et donnaient lieu d'espérer que l'ennemi serait bientôt découragé et la colonie pacifiée. En effet, l'armée d'Al-Hadji (autre fanatique en crédit) avait été écrasée, le 25 avril, à Médine, et les Toucouleurs, battus le 2 mai à Bakel, avaient

été rejetés dans le Fouta, après avoir laissé 300 morts sur le terrain. Cette défaite d'El-Hadji devait nécessairement diminuer son prestige aux yeux des gens du haut pays. Après avoir délivré Médine, le gouverneur Faid herbe se disposa à aller attaquer Somsom, la ville la plus forte du Bondou et de toute la partie supérieure du fleuve.

L'expédition eut lieu dans le courant d'août. Le fort, construit il y avait environ cinquante ans par l'almamy Toumané, était tout à fait imprenable pour les indigènes. Bien des incidents pleins d'intérêt signalèrent cette courte et encore glorieuse campagne. Avant d'arriver en vue de Somsom, la colonne expéditionnaire traversa un pays magnifique. Rien de plus beau que cette partie du Bondou: végétation luxuriante, cours d'eau, chaînes de collines boisées, figuiers élastiques, tamariniers et baobabs luttant de dimensions colossales, telles étaient les merveilles qui se présentèrent aux regards des troupes. Le fort qu'il s'agissait de prendre était moins séduisant : situé au pied d'une chaine de collines rocheuses, il avait environ 300 mètres de circonférence, et était construit en pierres, terre glaise et paille hachée. Dix-huit tours, faisant office de bastions, garnissaient l'édifice. En plusieurs endroits, il y avait double ou triple enceinte. Enfin, dans l'intérieur, il y avait un réduit dont l'espace était garni de quatre autres tours. Telle était la construction dont il fallait s'emparer. La prise en fut plus aisée qu'on ne s'y serait attendu. En effet, celui qui la commandait, Malik, l'abandonna la même nuit avec ses gens, et le lendemain, le fort était au pouvoir du gouverneur et de ses troupes. L'œuvre de la sécurité de la colonie marchait ainsi à grands pas. Quant à AlHadji, il était en pleine retraite.

Une habile et utile exploration de la Falémé compléta ces vígoureuses et décisives opérations. C'est le lieutenant de vaisseau, Brossard de Corbigny, qui l'entreprit, le 25 août, avec le GrandBassam et le Serpent. La prise de plusieurs tatas (forts), de nombre de villages, tels que Ndangan, de quantité de troupeaux, fut le résultat de cette campagne. L'influence morale fut surtout puissante parmi les populations qui réagissaient contre l'empire absolu qu'Al-Hadji avait fait peser sur les habitants du Haut-Sé

négal. Un autre et également utile résultat de cette exploration, c'est qu'on put déterminer le cours de la Falémé jusqu'au point que l'on venait d'atteindre, et fixer les positions astronomiques de son embouchure dans le Sénégal, de Sénoudébou et Sansandig.

CHAPITRE VII.

LITTÉRATURE FRANÇAISE. INSTRUCTION PUBLIQUE.

CHRONIQUE JUDICIAIRE.

Histoire du Consulat et de l'Empire, par M. Thiers; t. XV et XVI. -Memoires du duc de Raguse. Histoire de France de M. Laurentie. Histoire de Louis-Philippe, par M. de Nouvion. -Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson. - Quatre ans de règne, par M. Véron.Le tome XXIII de l'Histoire littéraire. Bibliothèque spirituelle de M. de Sacy. La Liberté de conscience, par M. Jules Simon. — La Philosophie de Kant, par M. V. Cousin. M. Dupin et les Règles de droit et de morale tirées de l'Ecriture sainte. De l'assistance et de l'extinction de la mendicité, par M. de Magnitot. - Séance des cinq académies. M. de Montalembert. M. Villemain. Académie française: les prix Montyon de la littérature. Académie des inscriptions et belleslettres: Eloge de M. Guérard, par M. Naudet. Académie des sciences morales et politiques: Nécrologie scientifique et littéraire. Instruction publique; dépenses; actes divers. Discours de M. Rouland à l'occasion du concours général. Faits judiciaires divers; procès mémorables. - Faits judiciaires.

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Ce que l'on pourrait appeler la grande littérature n'a rien produit de bien neuf: on y vit uniquement du passé. M. Thiers a donné au public les tomes XV et XVI de son Histoire du Consulat et de l'Empire, exacte, minutieuse, détaillée, à telles enseignes que chaque régiment de la grande armée y pourrait trouver sa monographie. Est-ce à dire que M. Thiers se soit laissé aller à un engouement sans frein pour son héros, comme on le lui a reproché? Non sans doute; seulement l'historien de Napoléon Ier n'a pas voulu s'aventurer au delà des maximes générales qui sont comme le fonds commun de l'histoire, celles-ci, par exemple qu'une ambition effrénée finit toujours par se briser contre les obstacles qu'elle s'est créés; ou bien, que la prospérité arrivée à son apogée éblouit ou enivre même le génie. Tel est, si nous ne nous trompons, tout le sens du livre; mais rien des causes spéciales, multiples, sans cesse renaissantes, qui sont la vie des sociétés modernes. On trouverait à peine

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