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un peu plus avant sur la route de Vienne. Le quartier général 1800 – anıx de Moreau était à Wels; celui de l'archiduc, à Amstetten.

Le lendemain 21, le général Richepance se disposait à marcher sur Steyer, lorsqu'un parlementaire ennemi se présenta aux avant-postes. C'était le comte de Merfeld, envoyé par l'archiduc Charles au général Moreau, pour lui proposer une suspension d'armes, pendant que les deux gouvernements français et autrichien traiteraient des conditions d'une paix définitive. Le général Moreau, ayant trouvé les pouvoirs du comte de Merfeld insuffisants, ne voulut accorder qu'une trêve de quarante-huit heures, temps strictement nécessaire pour recevoir des nouvelles de Vienne, et déclara qu'il consentirait à un armistice plus prolongé dans le cas seulement où l'empereur manifesterait l'intention bien positive de faire une paix séparée, et sous la condition que le Tyrol serait entièrement évacué par l'armée impériale. Comme Moreau s'était réservé la faculté de continuer son mouvement sur l'Ens, le général Lecourbe se porta de Kremsmünster à Steyer, le général Decaen, de Neuhofen à Kronsdorf; le général Grenier suivit la grande chaussée de Vienne, en se dirigeant sur Ens. Plusieurs corps et détachements autrichiens se trouvèrent coupés par ces marches exécutées avec rapidité, et se rendirent prisonniers sans combattre. Vingt-deux pièces de canon, cent caissons, cinq ou six cents voitures, des magasins et des approvisionnements considérables tombèrent ainsi au pouvoir des Français. Les ponts sur l'Ens furent rétablis à Ens et à Steyer, et l'armée prit possession de la ligne que voulaient occuper les Autrichiens. Ce dernier mouvement s'opéra également sans combattre; et, comme la trêve était expirée, Moreau continua à faire marcher l'aile gauche qui passa les rivières d'Ips et d'Erlaf, et poussa son avant-garde à moins de vingt lieues de Vienne. En même temps l'aile droite remonta la vallée de l'Ens, et se dirigea vers Leoben sur la Mur. Afin de forcer l'armée autrichienne d'abandonner ses lignes qui se trouvaient tournées par cette marche, Moreau se disposait à porter son quartier général de Kremsmünster à Steyer, lorsque le général Grüne se présenta muni de pleins pouvoirs pour conclure un armistice. L'archiduc annonçait au général en chef français que l'empereu

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était décidé à faire la paix, quelles que fussent d'ailleurs les Allemagne dispositions de ses alliés. Moreau, dont le vœu, au milieu de ses derniers triomphes, avait été pour la paix, crut devoir arrêter la marche de ses troupes et consentir à l'armistice demandé. Il pensa qu'il avait assez fait pour sa gloire, et dédaigna le stérile honneur d'une entrée triomphale dans la capitale de l'Autriche. Quelques historiens ont blâmé la modestie, selon eux très-déplacée en ce moment, du vainqueur de Hohenlinden. Il devait, disent-ils, continuer sa marche jusque sous Vienne, où il eût été plus facile de dicter les conditions de la paix ; mais Moreau ne se regardait que comme le mandataire de la république. Le système de l'envahissement des capitales n'avait point encore été établi comme il le fut par la suite; et la générosité française permettait-elle de refuser une trêve demandée par l'Autriche, avec l'intention franche de céder enfin au vœu général des peuples?

Quoi qu'il en soit, l'armée française venait de conquérir en vingt-deux jours quatre-vingts lieues de terrain; les formidables lignes de l'Inn, de la Salza, de la Traun et de l'Ens avaient été franchies sans perte; plus de 45,000 Impériaux mis hors de combat, cent quarante-sept pièces de campagne et une grande quantité de drapeaux étaient autant de trophées qui rendaient la modération du vainqueur encore plus remarquable.

La déclaration de l'archiduc, portant que l'empereur était décidé à faire la paix sans l'intervention de ses alliés, servit de base, et fut énoncée dans le préambule de la convention d'armistice qui fut signé à Steyer, le 25 décembre, par le général Lahorie pour le général Moreau, et par le général-major comte de Grüne pour l'archiduc Charles. Nous croyons devoir donner ici cette pièce historique en son entier.

Convention d'armistice.

Sa Majesté l'empereur et roi voulant traiter de suite de la paix avec la république française, quelle que soit la détermination de ses alliés; les généraux en chef de l'armée française et de l'armée impériale en Allemagne, désirant arrêter, autant qu'il est en leur pouvoir, les maux inséparables de la guerre.

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sont convenus de traiter d'un armistice et suspension d'armes. 1800 A cet effet, ils ont chargé de pouvoirs spéciaux: savoir, le gé- Allemagne. néral en chef Moreau, le général de brigade Victor-François Lahorie, et S. A. R. l'archiduc Charles, le général-major comte de Grüne et le colonel Wairother de Vetal, de l'état-major, lesquels ont arrêté ce qui suit :

ART. 1. La ligne de démarcation entre la portion de l'armée gallo-batave en Allemagne, sous les ordres du général Augereau dans les cercles de Westphalie, du haut Rhin et de Franconie, jusqu'à Bayersdorf, sera déterminée particulièrement entre ce général et celui de l'armée impériale et royale qui lui est opposé. De Bayersdorf, cette ligne passe à Erlangen, Nuremberg, Neumarck, Parsberg, Laber, Stadt-am-Hof et Ratisbonne, où elle passe le Danube, dont elle longe la rive droite jusqu'à l'Erlaf, qu'elle remonte jusqu'à sa source; passe à Mark-Gaming, Kogelbach, Gossling, Hammer, Mendling, Leopolstein, Eisenartz, Vordenberg et Leoben; suit la rive gauche de la Mur jusqu'au point où cette rivière coupe la route de Salzbourg à Klagenfurth, qu'elle suit jusqu à Spital; remonte la chaussée de Vérone par Lienz et Brixen jusqu'à Botzen; de là passe à Meran et Sainte-Marie, et arrive par Bormio dans la Valteline, où elle se lie avec l'armée d'Italie.

2. La carte d'Allemagne, par Chauchard, servira de règle dans les discussions qui pourraient s'élever sur la ligne de démarcation ci-dessus.

3. Sur les rivières qui sépareront les deux armées, la section ou la conservation des ponts sera réglée par des arrangements particuliers, suivant que cela sera jugé utile, soit pour le besoin des armées, soit pour ceux du commerce; les généraux en chef des armées respectives s'entendront sur ces objets, ou en délégueront le droit aux généraux commandant les troupes sur ces points. La navigation des rivières restera libre, tant pour les armées que pour le pays.

4. L'armée française non-seulement occupera exclusivement tous les points de la ligne de démarcation ci-dessus déterminée, mais encore, pour mettre un intervalle continu entre les deux armées, la ligne des avant-postes de l'armée impériale et royale sera dans toute son étendue, à l'exception du Danube, à un

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mille d'Allemagne, au moins, de distance de celle de l'armée Allemagne. française.

5. A l'exception des sauve gardes ou gardes de police qui seront laissées ou envoyées dans le Tyrol par les deux armées respectives, et en nombre égal, mais qui sera le moindre possible (ce qui sera réglé par une convention particulière ), il ne pourra rester aucune autre troupe de S. M. l'empereur dans l'enceinte de la ligne de démarcation. Celles qui se trouvent en ce moment dans les Grisons, le Tyrol et la Carinthie devront se retirer immédiatement par la route de Klagenfurth sur Bruck, pour rejoindre l'armée impériale d'Allemagne, sans qu'aucune puisse être dirigée sur l'Italie; elles se mettront en route des points où elles sont, aussitôt l'avis donné de la présente convention, et leur marche sera réglée sur le pied d'une poste et demie d'Allemagne par jour.

Le général en chef de l'armée française du Rhin est autorisé à s'assurer de l'exécution de cet article par des délégués, chargés de suivre la marche des troupes impériales jusqu'à Bruck.

Les troupes impérlales qui pourraient avoir à se retirer du haut Palatinat, de la Souabe ou de la Franconie, se dirigeront par le chemin le plus court au delà de la ligne de démarcation.

L'exécution de cet article ne pourra être retardée, sous aucun prétexte, au delà du temps nécessaire, eu égard aux distances.

6. Les forts de Kufstein, Scharnitz, et les autres points de fortifications permanentes dans le Tyrol, seront remis en dépôt à l'armée française, pour être rendus dans le même état où ils se trouvent à la conclusion et ratification de la paix, si elle suit cet armistice, sans reprise d'hostilités.

Les débouchés de Finstermünz et Nauders, et autres fortifications de campagne dans le Tyrol, seront remis à la disposition de l'armée française.

7. Les magasins appartenants dans ce pays à l'armée impériale seront laissés à sa disposition.

8. Les forteresses de Würtzburg en Franconie, et la place de Braunau, dans le cercle de Bavière, seront également remises à

l'armée française pour être rendues aux mêmes conditions que 1800 les forts de Kufstein et Scharnitz.

9. Les troupes tant de l'Empire que de Sa Majesté Impériale et royale qui occupent les places les évacueront; savoir : la garnison de Würtzburg, le 16 nivôse an 9 ( 6 janvier 1801); celle de Braunau, le 14 nivôse an 9 (4 janvier 1801 ); et celle des forts du Tyrol, le 18 nivôse (8 janvier 1801).

10. Toutes les garnisons sortiront avec les honneurs de la guerre, et se rendront, avec armes et bagages, par le plus court chemin, à l'armée impériale. Il ne pourra rien être distrait par elles de l'artillerie, munitions de guerre et de bouche, et approvisionnements en tout genre de ces places, à l'exception des subsistances nécessaires pour leur route jusqu'au delà de la ligne de démarcation.

11. Des délégués seront respectivement nommés pour constater l'état des places dont il s'agit, mais sans que le retard qui serait apporté à cette mission puisse en entraîner dans l'évacuation.

12. Les levées extraordinaires ordonnées dans le Tyrol seront immédiatement licenciées, et les habitants renvoyés dans leurs foyers; l'ordre et l'exécution de ce licenciement ne pourront être retardés sous aucun prétexte.

13. Le général en chef de l'armée du Rhin, voulant, de son côté, donner à Son Altesse l'archiduc Charles une preuve non équivoque des motifs qui l'ont déterminé à demander l'évacuation du Tyrol, déclare qu'à l'exception des forts de Kufstein, Scharnitz et Finstermünz, il se bornera à avoir dans le Tyrol les sauve-gardes ou gardes de police déterminées par l'article 5, pour assurer les communications. Il donnera en même temps aux habitants du Tyrol toutes les facilités qui seront en son pouvoir pour leurs subsistances, et l'armée française ne s'immiscera en rien dans le gouvernement de ce pays.

14. La portion du territoire de l'Empire et des États de S. M. Impériale dans le Tyrol est mise sous la sauve-garde de l'armée française, pour le maintien du respect des propriétés et des formes actuelles du gouvernement des peuples. Les habitants de ce pays ne seront point inquiétés pour raison de services rendus à l'armée impériale, ni pour opinions politiques, ni pour avoir pris une part active à la guerre.

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Allemagne.

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